Modélisation des comportements hystérétiques de piézocéramiques

Modélisation des comportements hystérétiques
de piézocéramiques

Au sein des matériaux piézoélectriques, les piézocéramiques de type PZT sont aujourd’hui parmi les matériaux les plus utilisés. Plus facile à fabriquer que les monocristaux de type quartz ou niobate de lithium, ces matériaux ferroélectriques possèdent des caractéristiques plus intéressantes. Leur mode de fabrication étant bien maîtrisé, un raisonnement empirique basé sur les matériaux connus permet aux industriels de créer de plus en plus de nouveaux matériaux aux propriétés diverses. Au cours de leurs fabrications, et lors de leurs usages, ils possèdent souvent des niveaux de contraintes résiduelles non nuls et sont communément soumis à de grandes contraintes mécaniques ou électriques, qui modifient significativement leurs caractéristiques par rapport à l’état non contraint. Chacun de ces matériaux est formé d’une multitude de domaines possédant chacun une polarisation et une déformation propre, eux même sensibles aux contraintes externes. Les altérations de structures vont générer des non-linéarités ferroélectriques se traduisant par quatre courbes d’hystérésis résultant de la somme des changements de propriétés de chaque domaine, via les évolutions de murs de domaines. La compréhension de ces phénomènes est un point clef dans le travail d’amélioration des dispositifs piézoélectriques à comportement hystérétique. Basé sur ces considérations et sur des observations expérimentales, le modèle présenté dans ce chapitre décrit le comportement de piézocéramiques soumises à des contraintes mécaniques et électriques et en explique les fonctionnements.

Les phénomènes hystérétiques dans les céramiques ferroélectriques 

Domaine d’étude 

Dans un matériau ferroélectrique, des phénomènes de couplage de la déformation, de la contrainte, du champ électrique et du déplacement électrique sont observés. Les relations hystérétiques entre les différents couples de variables (contrainte/champ électrique, déplacement électrique/champ électrique, déformation/contrainte et déformation/champ électrique) caractérisent le comportement non-linéaire de ces matériaux. Cette non-linéarité ‘hystérétique’ est à l’origine des changements de propriétés des matériaux ferroélectriques sous contraintes. Notre étude traite d’une contrainte uniaxiale (mécanique ou électrique), appliquée dans une unique direction. La direction de contrainte est la direction 3, correspondant à la direction (Oz). Les directions (Ox) et (Oy) sont notées respectivement 1 et 2 et forment avec (Oz) un système de coordonnées orthonormé direct (figure IV.1). Par conséquent, les contraintes appliquées se réduisent à leurs composantes électrique et mécanique dans la direction 3, soit E3 et σ 33 respectivement. De même, le déplacement électrique considéré se réduit à sa composante D3 . Par analogie, la déformation longitudinale associée est notée 33 S et les deux déformations transversales identiquement notées 11 S et 22 S .Les matériaux étudiés sont initialement polarisés dans la direction (Oz). Nous étudions l’évolution de la polarisation dans cette direction, en fonction des niveaux et du type de contraintes appliquées. L’étude de la polarisation se réduisant à sa composante P3 , elle est notée P par soucis de simplicité. De la même manière, le champ électrique, la contrainte mécanique et le déplacement électrique ne possédant qu’une composante dans la direction (Oz), ils seront notés respectivement E , σ et D pour alléger les notations.Le but de ce travail est de modéliser l’évolution des déformations et du déplacement électrique en fonction du champ électrique et de la contrainte mécanique appliqués. Lors du chargement électrique des piézocéramiques, la contrainte mécanique est nulle. Ce chargement induit une évolution hystérétique du déplacement électrique ainsi que des déformations. Lors du chargement mécanique des piézocéramiques, le champ électrique est nul. Il induit une évolution hystérétique du déplacement électrique ainsi que des déformations. On parlera de charge et de décharge pour notifier la mise sous contrainte et le relâchement de celle-ci. Nous avons choisi de décrire les 4 phénomènes hystérétiques sur un même matériau, le PLZT, étudié par Lynch [Lynch1995a]. De cette manière, nous décrivons les quatre comportements hystérétiques sur un unique matériau, avec des valeurs de polarisations et des niveaux de contraintes comparables. Notons que ce matériau a fait l’objet de nombreux articles et qu’il sera l’objet d’une confrontation avec notre modèle dans le chapitre suivant.

Chargement électrique d’un matériau ferroélectrique

Évolution du déplacement électrique en fonction du champ électrique

 L’évolution du déplacement électrique en fonction de la charge puis de la décharge du champ électrique a déjà été traité (en partie) dans le premier chapitre. Ici, nous décrivons plus précisément ce cycle (figure IV.2) en insistant sur les points importants, ainsi que sur les différents processus mis en œuvre. Rappelons que la polarisation a été définie comme la densité de dipôle électrique, son évolution est donc liée à celle du déplacement électrique A l’état initial, la céramique n’est pas polarisée et possède un déplacement électrique nul à champ électrique nul (point A). On applique un champ électrique positif croissant qui va créer et faire croître la polarisation dans le matériau jusqu’à atteindre une variation de déplacement électrique linéaire (point B), correspondant au déplacement électrique de saturation Dsat . En ce point, le champ électrique est égal au champ de saturation Esat . Lorsque le champ électrique est relâché, le déplacement électrique, ainsi que la polarisation diminuent lentement au fur et à mesure que le champ électrique se rapproche de zéro (point C). Une fois cette valeur atteinte, une polarisation rémanente, notée P0 , est observée en l’absence de contrainte. L’application d’un grand champ électrique négatif provoque la baisse non-linéaire du déplacement électrique. Dans un premier temps, la décroissance est lente puis s’accélère jusqu’au point D où le déplacement électrique et la polarisation sont nuls. En ce point, la variation de déplacement électrique (donc de polarisation) est maximum et le champ électrique correspondant est le champ électrique coercitif ( Ec – ). Au-delà de ce point, la valeur du déplacement électrique change de signe et s’oriente dans le sens du champ. La polarisation du matériau a elle aussi changé de signe. L’évolution du déplacement électrique croît (négativement) ensuite, mais de plus en plus lentement au fur et à mesure que l’on s’éloigne du champ coercitif ( D → E ) jusqu’à une variation linéaire du déplacement électrique, alors égale à Dsat – pour une valeur de champ égale à Esat – . L’évolution de la vitesse de variation du déplacement électrique en fonction du champ électrique est considérée symétrique par rapport à la valeur Ec [Lu2001-Boucher2002-Walter2003-Lu2006-Su2011]. Le segment C → D → E est un processus de renversement de la polarisation. Lorsque le champ électrique est relâché, le déplacement électrique diminue au fur et à mesure que le champ électrique se rapproche de zéro ( E → F ). A champ électrique nul, la valeur de la polarisation est égale à 0 – P . Ce phénomène de relaxe est analogue (mais en sens inverse) au segment B →C . Ces deux segments de courbe sont des processus de relâchement de la polarisation. Par la suite, on applique un champ électrique positif le long du segment F → G → B . L’évolution du déplacement électrique est inverse à celle du segment C → D → E , c’est un autre processus de renversement de polarisation. La valeur de champ électrique au point G est égale au champ électrique coercitif Ec . Dans l’état polarisé, à contrainte mécanique nulle, pour de petites variations du champ électrique et dans l’approximation des faibles variations de polarisation, la relation avec le déplacement électrique autour du point C peut-être linéarisée : D3 33 E3 T = ε . (IV.1) Par définition, la constante T 33 ε se calcule comme la pente de cette courbe à champ électrique nul, c’est-à-dire quand le matériau est dans son état de polarisation rémanente P0 . Pour de grandes valeurs de champ électrique, l’effet non-linéaire sur le déplacement électrique doit être considéré. 

Évolution des déformations en fonction du champ électrique 

Comme décrit au chapitre I, l’action d’un champ électrique sur une piézocéramique engendre des déformations longitudinale et transversales. Ces deux déformations subissant des cycles d’hystérésis de même forme, seule l’évolution de la déformation longitudinale au cours de la charge puis de la décharge du champ électrique est décrite ici. La figure IV.3 montre le comportement de la déformation longitudinale lors d’une charge puis d’une décharge de type électrique en l’absence de contrainte mécanique dans un matériau de type PLZT. L’évolution de la déformation en fonction du champ électrique à contrainte mécanique nulle décrit une nouvelle boucle d’hystérésis. La déformation est comptée positive en décompression. L’évolution de cette courbe est à mettre en parallèle avec la précédente, car les deux évolutions s’obtiennent en même temps et sont très liées, comme expliqué au chapitre I. Ainsi, nous mettons en évidence différents points de fonctionnements importants, identiques à ceux définis au cours de l’évolution de la polarisation.

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