Modélisation des propriétés radiatives au sein de nanostructures complexes

Modélisation des propriétés radiatives au sein de nanostructures complexes

Survol des différentes méthodes existantes

Dans la littérature, plusieurs techniques de modélisation permettent de calculer l’interaction entre un rayonnement et un diffuseur de forme plus ou moins quelconque. Pour la majorité des méthodes présentées, les seules limites actuelles en terme de paramètre de taille du diffuseur sont les ressources informatiques disponibles. Nous allons ici brièvement passer quelques unes de ces méthodes en revue, avant d’expliquer les raisons qui nous ont conduit à choisir l’approximation dipolaire discrète.

Méthodes perturbatives

L’idée de ces méthodes [Yeh64, Erm68a, Erm68b, Erm69] est de déterminer la diffusion d’une onde électromagnétique par une particule de forme quelconque (mais pas trop éloignée de la forme sphérique) à partir d’une particule sphérique dont on connaît analytiquement les propriétés de diffusion (la théorie de Mie). La surface du diffuseur est exprimée en coordonnées sphériques par : r(θ,φ) = r0 [1+ϑ f (θ,φ)] (4.1) où r0 est le rayon de la sphère non perturbée, ϑ est un paramètre et f (θ,φ) est une fonction arbitraire, avec pour seule contrainte : |ϑ f (θ,φ)| < 1 0 ≤ θ < π; 0 ≤ φ < 2π (4.2) Les champs à l’intérieur et à l’extérieur du diffuseur sont développés en séries infinies d’harmoniques sphériques vectorielles. Les coefficients d’expansion sont exprimés en séries de puissances de ϑ. Ces méthodes souffrent de problèmes de convergence, qui est très lente ; on peut donc être amené à calculer un très grand nombre de termes avant que la troncature des séries infinies puisse être faite sans provoquer une erreur importante. La méthode, bien que précise lorsqu’elle fonctionne [KKMC80, Sch90], doit être limitée aux particules dont la forme est relativement proche de celle d’une sphère (i.e. pour |ϑ f (θ,φ)| ¿ 1). 

Méthode aux éléments finis 

Dans cette méthode qui est assez peu utilisée, l’équation de Helmholtz est résolue dans un espace discrétisé en éléments pyramidaux. Pour plus d’informations sur ces méthodes, on pourra par exemple se reporter à [VCK94]. La quantité de mémoire nécessaire à ces calculs et la complexité de mise en œuvre font qu’on ne s’étendra pas plus sur cette méthode. On précise néanmoins qu’il 106 existe des librairies dans le domaine public [Web] permettant d’implémenter facilement cette méthode. 

Méthode FDTD

 La technique FDTD (pour Finite Difference Time Domain method) consiste à résoudre les équations de Maxwell sous leur forme différentielle (équations (4.3) et (4.4)) dans l’espace temporel [Yee66]. ∇×E = −µ ∂H ∂t (4.3) ∇×H = σE+ε ∂E ∂t (4.4) Les dérivées spatiales et temporelles des champs électrique et magnétique sont approchées par des schémas de type différences finies. Cette approche est utilisée pour résoudre l’interaction entre un diffuseur de forme quelconque et une onde électromagnétique. Le diffuseur ainsi que le milieu dans lequel il est plongé (domaine de calcul) sont discrétisés par un ensemble de sous-volumes parallélépipédiques (en utilisant un système de coordonnées cartésien), bien que d’autres systèmes de coordonnées puissent être utilisés. Chaque sous-volume se voit attribuer les propriétés optiques du milieu auquel il fait référence (milieu hôte ou diffuseur). Les grandeurs calculées sont les valeurs des champs E et H aux noeuds du maillage. Concernant la variation temporelle des champs, les valeurs des champs au pas de temps t sont utilisées pour déterminer les valeurs des champs au pas de temps t + ∆t1, le système est donc purement explicite en temps. En terme de ressources informatiques nécessaires pour un tel calcul, il faut compter de l’ordre de 30 mailles par longueur d’onde pour obtenir une précision acceptable aux abords des discontinuités (interfaces par exemple). Un des avantages de cette méthode est la possibilité de considérer n’importe quel milieu (diélectrique, métal,. . .) linéaire ou non et des diffuseurs de forme quelconque. En contrepartie, le volume des mailles va dépendre de la finesse des aspérités du diffuseur à prendre en compte afin de respecter sa géométrie. De plus, la méthode se basant sur le maillage de tout le volume de calcul, le nombre de mailles (et donc les ressources mémoire nécessaires et le temps de calcul) peut croître très rapidement, même si le schéma proposé par [KL93] permet de faire évoluer la quantité de mémoire nécessaire en (nombre de mailles) 4/3 , ce qui est un grand avantage par rapport aux méthodes intégrales qui nécessitent une quantité de mémoire variant en (nombre de mailles) 3 . Néanmoins, l’obtention des champs lointains, nécessaires à la détermination des sections efficaces d’extinction, d’absorption et de diffusion, nécessite des calculs complémentaires. Enfin, le fait de limiter le  domaine de calcul impose l’utilisation de conditions aux limites non triviales [Bér94, Bér96]. 107 

Matrice T 

L’approche dite “matrice T” a été introduite par Waterman [Wat71] pour un diffuseur métallique homogène. Comme la théorie de Mie, cette approche repose sur la décomposition en harmoniques sphériques vectorielles des champs incidents et diffusés. Elle a ensuite été étendue aux diélectriques de forme quelconque : on citera par exemple les cylindres [BY75], les ellipses [BY75, WM80, WB79], les agrégats de sphères diélectriques [PS73, Mac94, Xu95, MM96] et les matériaux multi-couches [PS74]. L’approche matrice T a quatre avantages principaux qui sont (i) le fait de pouvoir prendre en compte des géométries de diffuseurs quelconques, (ii) le fait que cette méthode puisse être utilisée jusqu’à des paramètres de taille de l’ordre de 100, (iii) la précision de la méthode qui en fait une méthode de référence et enfin (iv) le fait qu’une fois le calcul des sections efficaces fait pour une seule orientation du diffuseur, il est très simple et rapide d’obtenir les valeurs des sections efficaces des diffuseurs moyennées sur toutes les orientations possibles du diffuseur. Néanmoins, cette méthode a comme inconvénient majeur la difficulté de mise en œuvre, que ce soit au niveau théorique ou de la programmation de cette méthode (Mishenko met un code à disposition sur son site internet [MD]). De plus, les champs étant décomposés en séries infinies d’harmoniques sphériques vectorielles, la troncature de ces séries peut détériorer rapidement les résultats, la convergence de la méthode pouvant être assez lente. A cause de difficultés d’ordre numérique, cette méthode se limite à des agrégats de l’ordre de la centaine de particules. 

Méthodes intégrales (ou méthodes des moments) 

Ces techniques regroupent toutes les méthodes basées sur la résolution des équations de Maxwell sous leurs formes intégrales. Les premiers auteurs à avoir utilisé cette méthode et à avoir montré que la diffusion d’une onde plane électromagnétique par un diffuseur de volume V est décrite par l’équation (4.5) sont Shifrin [Shi51], Van Bladel [Bla61] et Harrington [Har93]. E(r) = E inc (r) +K 2 Z V d 3 r 0 · I+ 1 K2 ∇∇¸ exp(iK|r−r 0 |) 4π|r−r 0 | £ m 2 ¡ r 0 ¢ −1 ¤ E ¡ r 0 ¢ (4.5) Cette expression exprime le champ électrique en r comme le champ extérieur incident en r auquel s’ajoutent les contributions de tous les éléments de volume d 3 r 0 centrés en r 0 . Cette intégrale est calculée en maillant l’intérieur du diffuseur en N sous-volumes cubiques (environ une vingtaine de mailles par longueur d’onde), chaque sous-volume étant assez petit pour que l’on puisse supposer que le champ électrique est constant à l’intérieur de chaque sous-volume. Une fois le champ électrique déterminé en tout point du diffuseur, le champ diffusé est calculé en se plaçant en champ lointain. L’équation en elle-même ne contient aucune approximation, c’est en discrétisant le diffuseur que l’approximation intervient. Plus il est discrétisé finement, meilleurs seront les résultats. Néanmoins, il faut noter que la quantité de mémoire nécessaire évolue comme N 3 et que le temps de calcul évolue en N 2 . Ces techniques sont bien adaptées aux matériaux conducteurs ou aux diélectriques. Elles ont 108 de plus l’avantage d’être assez facilement programmables. Néanmoins, l’implémentation devient plus complexe lorsque le matériau constitutif du diffuseur n’est pas homogène, ou que le paramètre de taille devient important. Enfin, comme on le verra plus loin, bien que cette méthode nécessite au départ le maillage de tout l’espace de calcul, on peut dans le cas d’agrégats de particules sphériques se permettre de ne pas mailler le domaine de calcul, ce qui implique une réduction importante de la quantité de mémoire habituellement nécessaire à cette méthode. L’approximation dipolaire discrète, méthode que nous avons retenu pour nos études et dont il sera beaucoup question par la suite, fait partie de ces méthodes intégrales.

 Bilan de cette étude bibliographique

 Les calculs que nous allons mener seront basés sur des structures pouvant avoir des formes très complexes (agrégats générés informatiquement) et des paramètres de taille relativement faibles (x ≤ 1). Au vu du problème que nous voulons résoudre, seules les méthodes perturbatives ne sont pas adaptées, les autres méthodes présentées n’étant pas à priori limitées par les géométries des diffuseurs. Les méthodes de type éléments finis sont aussi à oublier à cause de la complexité de leur mise en œuvre. Nous rejetons aussi la technique de la matrice T à cause de sa complexité, bien qu’elle soit très performante. Il reste donc deux grands types de techniques : la méthode FDTD et les méthodes intégrales. Une étude comparative systématique a été menée par Yurkin et al. [YHBL06] entre la méthode FDTD et l’approximation dipolaire discrète, qui fait partie des méthodes intégrales ; ces auteurs ont ainsi montré que ces deux techniques de modélisation sont quasiment équivalentes, que ce soit en terme de consommation mémoire ou de temps de calcul. Entre ces deux méthodes, notre préférence est allée à l’approximation dipolaire discrète pour les trois raisons suivantes : – Sa simplicité de mise en œuvre ; – Le fait que plusieurs codes basés sur l’approximation dipolaire discrète sont déjà disponibles dans le domaine public et peuvent nous servir de référence pour valider nos développements ; – Enfin, le nombre important de publications qui traitent de la diffusion du rayonnement électromagnétique par des agrégats à l’aide de cette méthode. Ci-dessous, nous présentons plus précisément le principe de l’approximation dipolaire discrète. 

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