Nutrition et Soins Palliatifs

Nutrition et Soins Palliatifs

Questions éthiques des soins nutritionnels en situation palliative : la position du médecin

Les soins palliatifs, selon la définition de l’OMS de 2014, correspondent aux soins prodigués aux « maladies engageant le pronostic vital » et à une approche destinée à être mise « en œuvre précocement au cours de la maladie, en conjonction avec d’autres thérapies visant à prolonger la vie. 1» Cette définition inclut les patients ayant des maladies incurables, mais aussi ceux qui se trouvent à un stade de la maladie où la guérison est peu probable, certes, mais pas impossible. Ce stade peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années  . Les principales maladies concernées sont des pathologies chroniques comme les cancers, les pathologies neuromusculaires et cérébrales dégénératives, l’insuffisance organique sévère respiratoire, hépatique, rénale, cérébrale, les infections non curables, etc. Cette phase ne se définit pas par l’absence de traitements spécifiques (chimiothérapie, radiothérapie, etc.) de la maladie car ces derniers peuvent parfois ralentir l’évolution et/ou améliorer les symptômes et la qualité de vie. Le but des soins palliatifs est de soulager la douleur et les autres symptômes pénibles, intégrant les aspects psychologiques et spirituels, d’améliorer ainsi la qualité de vie des patients et d’accompagner leurs familles. La Société française d’accompagnement et de soins palliatifs les définit comme : « des soins actifs délivrés dans une approche globale de la personne atteinte d’une maladie grave, évolutive ou terminale. L’objectif des soins palliatifs est de soulager les douleurs physiques et les autres symptômes, mais aussi de prendre en compte la souffrance psychologique, sociale et spirituelle3 .»  Le modèle de l’Association canadienne de soins palliatifs (figure 12) facilite la compréhension de ce type de soins . Nous avons intégré à ce modèle de soin les éléments clés du support nutritionnel. Figure 12. Adaptation du modèle de soins palliatifs de l’Association canadienne de soins palliatifs. Les soins nutritionnels s’inscrivent dans les soins généraux des malades en soins palliatifs et peuvent, dans certains cas, s’avérer indispensables. En effet, les nouvelles thérapeutiques ont permis de prolonger la survie de malades qui, auparavant, décédaient en raison de l’évolution de la maladie. Pour ces patients, la nutrition est devenue un facteur de survie. Par exemple, dans les maladies tumorales, la nutrition artificielle peut éviter l’aggravation de l’état de dénutrition et la personne peut recevoir les doses adéquates des traitements anticancéreux. En soins palliatifs, le but du support nutritionnel doit s’adapter en fonction de l’évolution de la maladie et des besoins du patient. Pour cela, l’état nutritionnel doit être  évalué dès le début du traitement et faire ensuite l’objet d’un suivi régulier au cours du traitement, au moyen d’outils appropriés. Dans ce contexte particulier, outre le fait de démarrer une pompe de nutrition entérale ou d’installer une perfusion de nutrition parentérale, il est nécessaire de prodiguer une éducation nutritionnelle et des conseils diététiques aux patients et aux familles. Les soins nutritionnels visent ainsi à produire un effet thérapeutique spécifique (prévenir et traiter la dénutrition / la cachexie, l’amélioration de l’administration des traitements anti-tumoraux, le contrôle des effets indésirables des traitements anti-tumoraux) ou à favoriser le confort du patient en améliorant sa qualité de vie. Toutefois, le principal objectif est de maintenir la nutrition orale (lorsqu’elle est possible) en fournissant des conseils nutritionnels adaptés au cas par cas1 . Au plan clinique, la place de la nutrition artificielle en soins palliatifs reste toutefois controversée2 . La revue de la littérature de MI del Rio et collaborateurs publiée en 2011, explicite les effets cliniques en soins palliatifs (Tableau 8). Il souligne aussi l’absence d’études de bonne qualité sur cette question.

Revue systématique de la littérature.

Méthodologie

Une revue de la littérature suit une méthodologie systématique et rigoureuse qui commence par une recherche exhaustive de toutes les études répondant à une question précise. Cette question doit être claire et définie a priori et elle doit figurer dans le titre, l’abstract ou dans la dernière phrase de l’introduction. En effet, en ciblant une question précise, les auteurs arrivent plus facilement à réunir des études homogènes età aboutir à #'(! une conclusion1 . Celle-ci fait aussi l’évaluation critique de la qualité méthodologique des études retenues et ensuite la synthèse des résultats. En ce qui concerne la recherche bibliographique, nous avons consulté Medline, la principale base de données biomédicales ainsi que Proquest qui contient également des ressources telles que des mémoires et thèses, des ebooks, des journaux, des collections historiques, des archives gouvernementales et culturelles2 . Nous avons ciblé les publications entre 1990 et 2015, en anglais, français et espagnol en utilisant des mots clés du MeSH (Medical Subject Headings) : ! nutrition artificielle et hydratation, « artificial nutrition and hydration» ; ! attitudes et perceptions, « attitudes and perceptions » ; ! fin de vie « end of life » ; ! soins palliatifs « palliative care » ; Nous avons évalué les titres de toutes les publications et pour ceux qui paraissaient pertinents, nous avons analysé les résumés. Les publications sélectionnées sont celles dont les études devaient inclure : (i) les attitudes, perception ou positionnement des médecins concernant la nutrition artificielle ; (ii) les patients adultes en fin de vie ou en soins palliatifs ; (iii) les recherches empiriques originales, excluant ainsi les rapports de cas, les avis, et, enfin, les documents de travail. Si les résumés présentaient ces trois critères d’inclusion, le texte intégral était évalué. Nous avons exclu les études qui évaluent i) les attitudes et perceptions uniquement chez les infirmiers et autres soignants ; ii) l’hydratation uniquement ; iii) la situation exclusive des démences (déjà analysée dans le cas n° 4 du chapitre précédent) ; iv) des états de conscience altérée (état végétatif chronique et état pauci relationnel). Ces derniers, même s’ils sont concernés par les soins de confort, ont été exclus en raison des débats particuliers concernant notamment l’incertitude qui existe relativement au diagnostic, au pronostic et à la notion de conscience. Sur ce point, l’attitude des médecins peut être très différente et cette situation mériterait une analyse séparée. 

Résultats et analyse de la littérature

Tableau 9. Résultats de la recherche électronique Medline par mots clés. Mots cléfs Quantité «Artifitial nutrition and hydratation » and « end of life ». 99 Artifitial nutrition and hydratation » and « palliative care» 84 « artificial nutrition and hydration » « end of life » and « attitudes » 21 « artificial nutrition and hydration » and « end of life » and « attitudes » and « perceptions » 4 « artificial nutrition and hydration », « end of life », « attitudes and perceptions » and « physicians ». 2 Le tableau 9 montre le résultat de la recherche électronique bibliographique. Nous avons évalué tous les titres de ces publications ainsi que les résumés. Malgré le rôle central du médecin dans la prise de décision d’initier ou d’arrêter la nutrition artificielle en soins palliatifs, nous avons trouvé une seule étude évaluant l’attitude des médecins.1 En ce qui concerne la recherche bibliographique sur ProQuest, elle n’a pas produit de nouvelles d’études. Ce constat a attiré notre attention. En effet, cette information serait essentielle pour étudier les diverses attitudes, les aspects qui sont impliqués dans la prise de décision des médecins, la façon dont il serait possible de différentier l’attitude des médecins de celle adoptée par les patients, leurs familles et autres soignants. Cette information permettrait aussi d’identifier les obstacles pour favoriser la nutrition orale et garantir son rôle affectif et social.

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