Portage nasal de SARM chez les éleveurs de porcs

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S. AUREUS ET ANTIBIORESISTANCE

En 1941, toutes les souches de S. aureus semblaient sensibles à la pénicilline G. Dès 1944, est apparue une pénicillinase qui maintenant concerne plus de 95% des souches cliniques. En 1960, est apparue une résistance à la méticilline, antibiotique majeur résistant à la pénicillinase. Cette résistance entraine la résistance à toutes les pénicillines et céphalosporines, et souvent associée à des multiples autres résistances (aminosides, érythromycines, tétracycline …).

Résistance aux beta-lactamines

La résistance du S. aureus aux beta-lactamines relève de plusieurs mécanismes.

La production d’origine plamidique de beta-lactamases

Les beta-lactamases sont des enzymes inactivant l’antibiotique par l’ouverture du cycle beta-lactame. La beta-lactamase de staphylocoque est une pénicillinase qui induit une résistance aux pénicillines A et G (ampicilline et amoxicilline), aux carboxypénicillines et aux acyl-uréido penicilline mais n’a pas d’effet sur les pénicillines M (méticilline, oxacilline, et cloxacylline), les céphalosporines et les pénèmes. La pénicillinase est inactivée par les inhibiteurs de beta-lactamase (acide clavulanique, sulbactam, tazobactam) qui, associé aux beta-lactamines, restaurent leur efficacité. En milieu hospitalier, 80% des staphylocoques sont producteurs de beta-lactamines.
Les beta-lactamines ont pour cible des enzymes de la membrane cytoplasmique nécessaire à la formation du péptidoglycane pariétal, auxquelles elles se fixent d’une manière irréversible. Ces enzymes sont, pour cette raison, appelées « P.L.P. » (protéine liant la pénicilline) ou « P.B.P. » (protein binding penicillin). En présence d’une beta-lactamine, les bactéries ont de ce fait une paroi fragilisée et ne résistent plus aux chocs osmotiques.

Résistance intrinsèque liée à la P.L.P2a

Mécanisme

La meticilline, comme l’oxacilline et la cloxacilline, est une penicilline M non hydrolysée par les pénicillinases. La résistance à la méticilline est principalement due à la production d’une nouvelle P.L.P ou P.L.P2a. Cette P.L.P2a est une transpeptidase qui peut catalyser à elle seule l’assemblage du peptidoglycane lorsque les autres P.L.P. sont saturées par les beta-lactamines [29]. La P.B.P2a, ayant une faible affinité pour les beta-lactamines, n’est pas affectée par ces antibiotiques et permet ainsi à la bactérie de continuer la biosynthèse de sa paroi [30].
Les souches possédant ce type de résistance sont dites « méti-R » et désignées par le sigle « SARM » (pour Staphylococcus aureus résistant à la méticilline). Les souches méti-R sont généralement des multi résistantes. Toutes ces souches produisent la pénicillinase staphylococcique.

Support génétique

La P.L.P2a est codée par le gène mecA situé dans un grand fragment d’ADN chromosomique appelé mecDNA, retrouvé uniquement chez les souches résistantes à la méticilline et intégré au niveau d’un site spécifique de S. aureus. Le mecDNA appartient à une nouvelle classe d’éléments génomiques mobiles appelés SCCmec (Staphylococcal cassette chromosome mec) [31-33].
Par des méthodes de clonage et de séquençage, le mecDNA présentait des sites d’attachement pour des transposons et des séquences d’insertion pouvant se comporter comme des pièges pour capter des gènes de résistance à d’autres familles d’antibiotiques que les beta-lactamines.

 Variation de l’expression de la résistance liée à la P.L.P2a

Certaines souches de SARM présentent une résistance hétérogène à la méticilline. Vis-à-vis de la résistance, 4 classes phénotypiques de SARM ont été identifiées sur la base de la mesure de concentrations minimales inhibitrices (CMI) sur des populations bactériennes. Les classes 1 à 3 représentent des souches résistantes hétérogènes et la classe 4 des souches résistantes homogènes. L’expression phénotypique de la résistance est fonction des conditions de culture. Ainsi, le caractère homogène est favorisé par une culture en milieu hypersalé ou une incubation à 30°C.
L’expression hétérogène ou homogène n’est pas nécessairement en rapport avec les PLP2a produites par ces souches [34].

Autres modes de résistance que la P.L.P2a

Trois mécanismes peuvent être à l’origine de cette résistance de bas niveau :
 Des altérations des P.L.P1, 2 ou 4 chez des souches ne produisant pas de beta-lactamase.
 Une hyperproduction de beta-lactamase plasmidique pourrait être également à l’ origine de l’hydrolyse de la méticilline.
 La production d’une méticillinase.
Cependant, aucun échec thérapeutique n’a été rapporté lors d’infections causées par de telles souches.

Résistance aux autres familles d’antibiotiques

Aminosides

S. aureus est normalement sensible aux aminosides mais des résistances dues à une inactivation de l’antibiotique par diverse enzymes bactériennes sont fréquemment détectées surtout parmi les souches méti-R. La gentamycine est la molécule la plus active parmi les aminosides, ainsi toute souche qui résiste à cet antibiotique résiste aussi aux autres aminosides.

Macrolides

S. aureus est normalement sensible aux macrolides mais des résistances dues à une modification de la cible ribosomiale sont observées pour l’érythromycine, la josamycine et les lincosamides. Les synergistines (pristinamycine) constituent d’excellents antis staphylococciques et presque toujours actifs.

Glycopéptides

Les glycopéptides (vancomycine, téicoplanine), elles sont très efficaces mais doivent être réservés aux infections sévères.
Depuis 1992, la première sensibilité diminuée de S. aureus pour les glycopeptides a été décrite pour la vancomycine au Japon et aux Etats-Unis [35]. Puis, des souches à sensibilité diminuée à la téicoplanine ont également été décrites. Ces souches apparaissent chez des patients traités par glycopéptides.
Tous ces produits sont utilisables comme une alternative aux beta-lactamines en cas d’allergie à ces dernières. Par contre, pour éviter la sélection de mutants résistants, la fosfomycine, l’acide fusidique, la rifampicine et les quinolones fluorées (péfloxacine, ofloxacine, ciprofloxacine) ne seront utilisés qu’en association, mêmes s’ils sont presque toujours actifs.

POUVOIR PATHOGENE DE S. AUREUS

Les staphylocoques sont une part non négligeable de la flore normale nasale, mucosale, cutanée et digestive des humains et des animaux. Par contre, certaines espèces peuvent être des pathogènes opportunistes. Ils sont généralement associés à la formation d’abcès et de lésions suppuratives. Ils sont également une cause importante de toxi-infections alimentaires.

Infections en médecine humaine

S. aureus est d’abord un germe pyogène responsable de la plupart des infections suppurées de la peau et des muqueuses ; il surinfecte souvent les plaies négligées. Parfois, ces infections cutanéo-muqueuses sont le point de départ de suppuration profonde ou d’infection générale qui donne lieu à des fréquentes localisations métastatiques génératrices d’infections profondes.
Les infections profondes sont neuro-pulmonaires (pneumopathie, abcès, pleurésie, pneumonies bulleuses), génito-urinaires (abcès rénal, phlegmon périphériques, abcès de prostate), ostéo-articulaire (ostéomyélites aigüe des adolescents, abcès osseux), cardiaque ou cérébro-méningées.
S .aureus est aussi pathogène à cause des toxines qu’il fabrique [36] :
 Les toxines exfoliatives peuvent agir ensemble ou indépendamment pour produire le syndrome d’exfoliation généralisé (syndrome de la peau ébouillante chez l’enfant ou syndrome de Ritter chez le nouveau-né) (Staphylococcal scalded skin syndrome, SSSS)
 la toxine du choc toxique (TSST ou Tst) et des entérotoxines (Staphylococcal enterotoxins, SEs) peuvent causer des symptômes d’empoisonnement alimentaire à staphylocoque. Ces toxines, lorsque ingérées et présentes dans l’estomac, vont stimuler les nerfs des réflexes vomitifs. Les symptômes les plus fréquemment associés aux empoisonnements alimentaires à S. aureus sont caractérisés par des douleurs abdominales ainsi que des vomissements. Ces empoisonnements ne sont généralement pas fatals, mais les symptômes apparaissent rapidement après l’ingestion de nourriture contaminée, habituellement quelques heures et persistent un jour ou deux.

Infections en médecine vétérinaire

En médecine vétérinaire, les staphylocoques causent d’importantes mammites bovines, des abcès, des infections cutanées, des otites et des infections urinaires.
L’Agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA) estime en 2010 que les principaux réservoirs animaux du SARM dans les pays touchés sont les porcs, veaux, et poulets de chair, surtout dans les élevages industriels.
Les personnes susceptibles d’être contaminées sont celles ayant un contact direct comme les éleveurs ou les vétérinaires. A côté de cela, des cas isolés ont été signalés concernant des animaux de compagnie (chiens, chats) et les chevaux. Les souches infectant ces animaux sont les mêmes que celles retrouvées dans les hôpitaux. Ce qui permet d’en déduire que les hommes peuvent transmettre les SARM aux animaux de compagnie ; ces derniers constituant un réservoir potentiel.
L’utilisation des antibiotiques à des fins prophylactiques et thérapeutiques ou comme promoteurs de croissance, la promiscuité entre les animaux favorise les échanges de bactéries et la diffusion des gènes codant pour la résistance aux antibiotiques [37]. En outre, l’élimination de quantité important des bactéries résistantes avec les matières fécales peur favoriser leurs disséminations dans l’environnement. En particulier, l’utilisation au long cours de doses infra thérapeutiques est considérée comme un facteur responsable du développement de résistance en exerçant une pression de sélection permettant l’émergence de souches résistantes préexistantes dans la population bactérienne [38].

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. GENERALITE SUR STAPHYLOCOCCUS AUREUS
I.1- Taxonomie
I.2- Habitat
I.3- Caractères bactériologiques
I.4- Caractères de culture
I.5- Virulence de S. aureus
I.5.1 Facteurs intervenant dans la colonisation, l’adhésion, l’invasion
I.5.2 Facteurs d’extension et de diffusion
II. S. AUREUS ET ANTIBIORESISTANCE
II.1 Résistance aux beta-lactamines
II.1.1 La production d’origine plamidique de beta-lactamases
II.1.2 Résistance intrinsèque liée à la P.L.P2a
II.1.2.1 Mécanisme
II.1.2.2 Support génétique
II.1.2.3 Variation de l’expression de la résistance liée à la P.L.P2a
II.1.3 Autres modes de résistance que la P.L.P2a
II.2 Résistance aux autres familles d’antibiotiques
II.2.1 Aminosides
II.2.2 Macrolides
II.2.3 Glycopéptides
III. POUVOIR PATHOGENE DE S. AUREUS
III.1 Infections en médecine humaine
III.2 Infections en médecine vétérinaire
DEUXIEMEPARTIE : METHODES ET RESULTATS
I. METHODES
I.1 Cadre de l’etude
I.1.1 Description du site de l’étude
I.1.2 Type d’étude
I.1.3 Période et durée de l’étude
I.1.4 Population d’étude
I.1.5 Mode de l’échantillonnage et taille de l’échantillon
I.1.6 Critères d’inclusion
I.1.7 Critères d’exclusion
I.1.8 Paramètres étudiés
I.1.9 Analyse statistique des données
I.1.10 Limites d’étude
I.1.11 Considérations éthiques
I.2 Realisation des prelevements et recueil des echantillons et acheminement au laboratoire
I.3 Analyses microbiologiques
I.3.1 Procédure d’identification de SARM
I.3.1.1 Condition de culture et caractéristiques des géloses
I.3.1.2 Coloration de Gram
I.3.1.3 Catalase
I.3.1.4 Coagulase
I.3.2 Antibiogramme
II. RESULTATS
II.1 Description de l’échantillon
II.2 Portage nasal de SARM chez les éleveurs de porcs
II.2.1 Analyse des facteurs de risque de portage nasal de SARM chez les éleveurs de porcs
II.2.2 Portage nasal de SARM chez les éleveurs de porcs et sensibilité aux autres antibiotiques
II.3. Portage nasal de SARM chez les éleveurs de volailles
II.3.1 Analyse des facteurs de risque de portage nasal de SARM chez les éleveurs de volailles
II.3.2 Portage nasal de SARM chez les éleveurs de volailles et sensibilité aux autres antibiotiques
TROISIEME PARTIE : DISCUSSIONS
I. REFLEXIONS SUR LA METHODOLOGIE
II. COMMENTAIRES SUR LES PREVALENCES ET LES DIFFERENTS FACTEURS DES RISQUES ETUDIES
II.1. Portage global de SARM chez les éleveurs de porcs
II.1.1. Portage nasal de SARM en fonction du genre chez les éleveurs de porcs
II.1.2. Portage nasal de SARM en fonction de l’âge chez les éleveurs de porcs
II.1.3. Evaluation des facteurs de risque chez les éleveurs de porcs
II.2. Portage global de SARM chez les éleveurs de volailles
II.3. Evaluation de l’antibiorésistance des souches de S. aureus isolée chez les éleveurs de porcs et de volailles
III. SUGGESTIONS ET PERSPECTIVES
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

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