Propagation d’incertitude

Propagation d’incertitude

Les modèles numériques sont généralement déterministes au sens où les entrées du modèle sont supposées connues. Or, nous avons vu dans les chapitres précédents que les alternateurs pouvaient avoir des dimensions variables d’une machine à l’autre qui n’étaient pas contrôlées et donc par nature incertaines. Les modèles déterministes ne sont alors plus directement adaptés pour traiter ce type de données d’entrée. Il est alors nécessaire d’avoir recours à des méthodes permettant de propager les incertitudes sur les données d’entrée vers les grandeurs de sortie du modèle. Dans ce chapitre, la méthodologie de quantification d’incertitude dans le cas d’une approche stochastique est présentée. Les quatre étapes : le développement du modèle, la modélisation de la variabilité des données d’entrée, la propagation des incertitudes, le post-traitement (analyse de sensibilité) sont décrits d’une manière générale. Ensuite, la démarche est appliquée dans le cas de la machine à griffes avec les incertitudes dimensionnelles. 

Méthodes de propagation d’incertitude

L’application d’une méthode numérique (FEM, FIT) pour résoudre les équations de Maxwell conduit à des modèles utiles pour comprendre et prédire les caractéristiques des dispositifs électromagnétiques. Avec les progrès dans les domaines de l’analyse numérique, de la CAO et des outils de traitement et de visualisation, il est maintenant possible de représenter et de mailler des géométries très complexes et de prendre également en compte des matériaux avec des lois de comportement plus réalistes (non linéarité, hystérésis). En outre, les ordinateurs d’aujourd’hui ont la capacité de résoudre les problèmes avec des millions d’inconnues. Les erreurs de modélisation causées par les nombreuses hypothèses pour construire un modèle mathématique (l’ensemble d’équations) et les erreurs numériques dues à la discrétisation (par une méthode des éléments finis, par exemple) peuvent être négligeables. Par conséquent, dans certaines applications, s’il existe un écart entre les mesures (supposées parfaites) et les résultats donnés par le modèle numérique, il est dû aux paramètres d’entrée qui ne sont pas égaux à leurs valeurs nominales. Les origines de ces écarts sont nombreuses et sont liées soit à un manque de connaissances (incertitudes épistémiques) soit à des variations incontrôlées (incertitudes aléatoires). Cet aspect a d’ailleurs été clairement mis en évidence dans les chapitres précédents où les dimensions des alternateurs possèdent une variabilité importante d’une machine à l’autre. Dans la pratique, si les incertitudes sur certains paramètres ne peuvent pas être négligées ou si on souhaite en évaluer l’impact, l’accroissement de la précision du modèle déterministe devient inutile. Les modèles prenant en compte les incertitudes sur les paramètres d’entrée deviennent alors indispensables. Dans notre étude, nous avons constaté une variabilité notable d’une machine à l’autre de grandeurs caractéristiques comme l’entrefer. Il est donc légitime de caractériser l’impact d’une telle variabilité sur les performances de la machine électrique, c’est à dire de Propagation d’incertitude 83 «mesurer » la variabilité des grandeurs d’intérêt comme le courant ou le couple. Si cette variabilité est importante, il est alors utile, voire nécessaire, de déterminer quelles sont les grandeurs d’entrée qui influent le plus sur la variabilité des grandeurs d’intérêt de sortie. Ainsi, cela permettra de cibler les actions de réduction de la variabilité des grandeurs d’intérêt en agissant de manière efficace seulement sur la variabilité des paramètres d’entrée les plus influents. Pour tenir compte des incertitudes, plusieurs approches sont proposées dans la littérature. La première est basée sur le pire scénario (les données d’entrée incertaines appartiennent à des intervalles). La deuxième est basée sur la logique floue logique (fuzzy logic). La dernière approche est l’approche stochastique où les paramètres d’entrée incertains sont modélisés par des variables ou des champs aléatoires. Cette dernière approche est plus riche que les deux précédentes en matière d’informations prises en compte par le modèle stochastique. Cependant, cette approche peut nécessiter plus de données pour représenter la variabilité des paramètres d’entrée et également plus de ressources numériques. Depuis le début des années 90, de nombreuses recherches dans le domaine de l’ingénierie ont porté sur l’élaboration de modèles stochastiques, principalement en génie mécanique et génie civil [79,80,81]. Dans le domaine de l’électromagnétisme, le développement et l’application de ces modèles ont commencé dans les années 2000 et connaissent un intérêt croissant dans la communauté [82,83,84,85,86,87]. Dans la suite, les quatre étapes pour mettre en œuvre un modèle stochastique sont brièvement présentées. Nous appliquons ensuite la démarche au cas de notre machine à griffes.

Présentation générale

La démarche de quantification d’incertitudes comporte quatre étapes qui sont les suivantes (cf Figure 91) A- Le développement d’un modèle mathématique liant les données d’entrée (déterministes ou incertaines) avec les grandeurs d’intérêt (sorties du modèle). Le modèle peut être analytique ou basé sur la résolution numérique des équations aux dérivées partielles comme les équations de Maxwell. B- La modélisation de la variabilité des paramètres d’entrée par un modèle probabiliste. Les paramètres peuvent avoir une signification physique comme les paramètres des matériaux (conductivité, perméabilité…) ou des dimensions ou peuvent être des coefficients utilisés dans une loi de comportement non-linéaire de matériaux par exemple. Dans l’approche stochastique, chaque paramètre incertain est modélisé par une variable aléatoire. Il faut donc déterminer les lois de ces variables aléatoires qui peuvent être corrélées. La détermination de ces lois est souvent faite sur la base d’expertise car peu de mesures sont en général disponibles. Dans notre cas, nous nous baserons sur notre campagne de mesures présentée dans le chapitre précédent et sur les modèles de l’excentricité et de la déformation du stator. 84 C- La propagation de la variabilité des paramètres d’entrée à travers le modèle développé dans l’étape A. Cette étape permet de quantifier la dispersion des grandeurs d’intérêt (sorties du modèle) qui sont des variables aléatoires D- La caractérisation des grandeurs d’intérêts qui sont aléatoires à l’issue de l’étape C. Les grandeurs statistiques (moyenne, écart-type, la corrélation entre les grandeurs de sortie) peuvent être calculées. La sensibilité globale de sortie par rapport aux entrées peut être également analysée. Cette analyse de sensibilité permet de déterminer les paramètres d’entrée dont la variabilité influence le plus la variabilité de la grandeur de sortie.

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