REFLEXION ET ANALYSE

REFLEXION ET ANALYSE

Démarche réalisée

 Avant d’amorcer toute réflexion, nous ferons une brève description de la démarche méthodologique telle qu’elle a été effectuée au cours de la recherche-action. Cette description nous permettra de vérifier si nous avons été fidèle à la méthodologie proposée au début de l’étude et constituera un bon point de départ à la réflexion qui s’ensuivra. Le tableau 13 nous résume les interventions réalisées dans le cadre de la présente recherche-action. Au premier coup d’oeil, on remarque que la validation du contenu s’est faite à plusieurs étapes et de diverses façons. Ainsi, le comité consultatif fut le premier à prendre connaissance du portrait de l’organisation, et c’est lui qui a choisi l’ancrage, c’ est-à-dire l’angle à partir duquel sera traité le problème. Dans l’ ordre, ont par la suite validé la situation, les employées et les membres du conseil d’administration. Pour la chercheure, la participation du personnel et des membres du conseil d’administration aux étapes d’identification et d’application des changements est aussi en elle-même un processus de validation. Comme ce sont ces deux groupes qui identifiaient les changements souhaités, ces changements s’en trouvaient donc automatiquement validés au fur et à mesure par ceux-là mêmes qui les avaient identifiés. Pour mieux illustrer ces dires, voici comment nous avons procédé lors de l’identification des changements souhaités. Précisons d’abord que la méthode choisie a été développée par un conseiller en ressources humaines de 1 ‘Office des services de garde à l’enfance, M. Claude Tremblay. Selon ses propres termes, la méthode s’appelle « le principe de la pyramide ». Sa mise en application est la suivante:1° Identification des changements souhaités par les employées et, suivant le principe de la pyramide, on tend à être le plus précis possible. 2 o On refait le même processus avec la directrice, et en plus on vérifie sa position par rapport aux changements identifiés par les employées. Il s’agit ici de savoir s’il y a compatibilité possible au chapitre des attentes, des objectifs et des moyens. 3° Le processus est ensuite repris avec les membres du conseil d’administration. 4 ° Finalement, on asseoit tous les acteurs à une même table et, pour chaque changement souhaité, on identifie le niveau d’entente. Par exemple, tous peuvent partager une même attente vis-à-vis une situation problématique mais diverger sur les objectifs ou les moyens à prendre pour corriger cette situation. Cette méthode de validation est d’autant plus intéressante que Checkland ne nous propose aucune technique pratique de validation. L’approche développée par M. Tremblay se présente donc comme un outil complémentaire à l’utilisation de la méthodologie des systèmes souples et constitue, à notre avis, un moyen valable de validation lors de l’identification des changements souhaités.  C’est après avoir pris un recul sur le plan d’action issu de ce processus que la chercheure réalisa qu’elle avait sous évalué un élément, soit le climat organisationnel. Cette dernière croyait qu’un climat de confiance se développerait au même rythme que le processus d’identification des changements. Or, le résultat fut tout autre puisque l’aboutissement du processus donna lieu à un plan d’action structurant, signe que la confiance n’était pas encore revenue. Il fallait donc se réajuster en axant les interventions futures vers le . rétablissement du climat de confiance. Ce n’est qu’après avoir atteint cet objectif que l’organisation pourrait se pencher à nouveau sur le plan d’action et l’épurer en fonction de ses véritables besoins. D’ailleurs nous avons pu constater récemment à la garderie qu’effectivement la confiance entre les parties favorise l’action. Non seulement règne-t-il aujourd’hui dans l’organisation un bon climat de travail mais celui-ci se maintient déjà depuis plusieurs mois. Le plan d’action a été « réactualisé », des priorités ont été établies et tout le monde s’est mis au travail. Les résultats n’ont pas tardis. Le taux de fréquentation oscille autour de 95 %, le dernier exercice financier présente un bilan positif, un programme pédagogique a été élaboré, le personnel participe à la gestion des équipements et du matériel didactique, l’information circule, etc. C’est donc dire que dans la présente recherche-action, la validation par la participation des membres de l’organisation à l’identification des changements ne s’est pas révélée une garantie suffisante de succès de l’intervention. Une relation de confiance minimale doit exister pour dépasser l’étape d’identification des changements et procéder à leur mise en oeuvre. Avant de terminer par un parallèle entre la méthodologie de Checkland et la démarche effectivement réalisée, nous ferons quelques derniers commentaires sur la façon dont nous avons procédé. Ces commentaires ont trait aux processus de conceptualisation et de comparaison. Disons simplement que ces processus reposent sur une revue de littérature se rapportant à divers aspects de la gestion des ressources humaines et des organismes à but non lucratif. De nombreuses lectures ont alimenté une réflexion approfondie quant aux moyens de sortir la garderie de l’impasse dans laquelle elle se trouvait. 

 Comparaison entre la démarche méthodologique proposée et celle réalisée 

Ce n’est qu’au fur et à mesure que progresse la recherche-action qu’on comprend de plus en plus la signification de « méthodologie des systèmes souples ». Cette souplesse, nous l ‘avons exploitée à fond en nous adaptant continuellement aux désirs, aux besoins et au contexte de la garderie et ce, en créant nos propres outils. En rétrospective, nous constatons donc que nous avons respecté la démarche proposée par Checkland dans sa méthode et dans ses étapes. Dans un même élan, nous avons su reconnaître l’unicité du portrait de la petite organisation à but non lucratif dans laquelle fut réalisée la recherche-action et personnaliser notre façon d’y intervenir. Enfin, mentionnons que la méthodologie de Checkland s’avère selon nous un précieux guide pour assurer une intervention efficace dans des organisations aussi complexes que sont les petites organisations. 

LA RECHERCHE-ACTION 

Son déroulement

 C’est en juin 1987 que débute la recherche-action à la garderie. Sa durée active avec l’organisation est de 7 mois, soit jusqu’en décembre de la même année. Dès le départ, les membres du conseil d’administration et les représentants du personnel au comité consultatif furent informés par la consultante que son intervention à la garderie ferait l’objet d’un mémoire de maîtrise en gestion des petites et moyennes organisations. Cette information semble n’avoir eu guère d’impact, les préoccupations de tous étant tournées exclusivement vers la crise que traversait l’organisation et les moyens de s’en sortir. Il est important de connaître le contexte dans lequel évoluait à ce moment-là les divers groupes d’acteurs de la garderie, ceci étant en quelque sorte le fil conducteur du déroulement de la recherche-action. Rappelons que la notion d’action associée à la recherche veut donner un rôle de premier plan aux acteurs de 1 ‘organisation, sans qui il n’y aurait pas de recherche-action et pas même d’intervention. En juin 1987, la situation est donc la suivante: les dix éducatrices et la cuisinière sont divisées en plusieurs clans. La directrice est complètement isolée: c’est la guerre froide avec le personnel et, au printemps, le conseil d’administration lui a demandé de démissionner, chose qu’elle a refusé de faire. Quant à la situation de ce conseil d’administration, elle n’est guère beaucoup plus reluisante, comme nous le verrons dans les lignes qui suivent.

LE CONSEIL D’ADMINISTRATION 

Sur les dix membres élus en janvier 1987, il en reste six, ce qui représente le nombre minimum requis pour avoir quorum. De ce groupe, trois membres ont un mandat qui se termine en 1988 et, parmi eux, deux personnes démissionnent à la fin juin, dès le début de l’intervention. Trois membres ont, eux, un mandat qui, normalement, prendrait fin en juin 1987. On retrouve dans ce groupe la présidente et le vice-président .Malgré le profond désir de chacun de ces parents membres du conseil d’administration de sauver la garderie, tous sauf un ont quitté avant la fin de l’intervention. Contrairement à l’entrepreneur privé ou aux employées de la garderie, ces parents ne voient pas dans la survie de la garderie leur propre survie. N’oublions pas que ces gens sont des bénévoles. Rappelons aussi que les enfants de la moitié d’entre eux ne fréquentent plus la garderie au moment de l’intervention. Enfin, il faut savoir que, comme il arrive souvent dans les organisations à but non lucratif, la situation a déjà atteint un seuil critique avant que l’on ne fasse appel à une aide extérieure. Toute l’énergie des membres du conseil d’administration y est passée, et on est à bout de ressources. C’est ainsi qu’une panique généralisée chez le personnel et certains membres restants du conseil d’administration, conjuguée à des pressions venant d’organismes qui subventionnent la garderie, a poussé la chercheure à commencer l’intervention à la mi-juin. Avec le recul du temps, nous pensons que cette recherche-action aurait pu être retardée jusque vers la fin août. À ce moment, les élections d’un nouveau conseil d’administration et la fin des vacances estivales du personnel auraient fourni des garanties supplémentaires de réussite à 1′ intervention. Car un des principes de la recherche-action est la nécessité de faire évoluer tous les acteurs au fur et à mesure que se déroule l’intervention. Ceux-ci doivent s’approprier les problèmes et   les solutions qui y sont afférentes. Or, lorsque des  élections ont enfin eu lieu à la garderie, le plan de redressement venait à peine d’être complété, il n’y avait plus de directrice en poste et seulement un conseil d’administration symbolique. L’ancien vice-président a tenté du mieux qu’il a pu de transférer au conseil d’administration nouvellement élu tout le contenu de la démarche entreprise depuis six mois avec la chercheure et l’ensemble de l’organisation. Mais, malgré la bonne volonté évidente des nouveaux membres, on assista à une réaction tr~s humaine et en partie inconsciente de leur part, celle de tenter de refaire tout le diagnostic de 1 ‘organisation, afin de repartir ensuite sur de nouvelles bases. Par cette réaction, on remettait directement en question la pertinence de poursuivre la recherche-action avec la consultante, recherche à laquelle d’ailleurs on mit fin poliment quelques semaines plus tard. Enfin, la position adoptée par le conseil d’administration risquait aussi de compromettre le cheminement du personnel dans sa prise en charge des problèmes de la garderie et de leurs solutions; chose que nous n’avons pu vérifier pour les raisons que l’on connaît. 

 LA DIRECTRICE

 Au moment où commence la recherche-action, la directrice était déjà dans une position difficile au sein de l’organisation. Dès les premières entrevues complétées, la chercheure comprit qu’elle devait éviter de tomber dans le piège classique d’avoir été embauchée pour congédier le directeur général de l’organisation. Or, le défi de demeurer objective  était de taille puisque tant le personnel syndiqué que le conseil d’administration souhaitent le départ de la directrice. Les données recueillies par la chercheuse sont par la suite venues confirmer la nécessité d’aller chercher une ressource mieux outillée en matière de gestion des ressources humaines et financières.

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