Spectroscopie vibrationnelle à deux photons de l’ion H2+

Spectroscopie vibrationnelle à deux photons de l’ion H2+

Spectre de l’ion H+

La détermination du rapport des masses du proton et de l’électron par spectroscopie optique de l’ion H+ 2 repose sur la comparaison entre la théorie et l’expérience sur une fréquence de transition rovibrationnelle. Si l’on veut obtenir une précision relative de l’ordre de 10−10 sur le rapport de masses, les incertitudes expérimentale et théorique doivent atteindre le niveau de quelques kHz pour des fréquences de l’ordre de 32 THz. Pour la théorie, une telle précision dépasse de trois ordres de grandeur les résultats disponibles à la fin des années 90. La naissance de projets de mesure du rapport de masse par spectroscopie de l’ion H+ 2 [34] et de l’ion HD+ [35] a stimulé les progrès théoriques. Le but de ce chapitre est de présenter l’état actuel des calculs. Ceux-ci consistent en la détermination des énergies non relativistes au delà de l’approximation de Born-Oppenheimer et en la détermination des corrections radiatives et relativistes. Notre équipe a développé le calcul précis des énergies non relativistes en adaptant une méthode initialement développée pour l’atome d’Hélium et reprise par B. Grémaud [36], puis a mis en place une collaboration avec V. Korobov pour le calcul des corrections relativistes et radiatives. L’amélioration des méthodes variationnelles, et l’augmentation de la puissance de calcul des ordinateurs a permis un progrès spectaculaire de la précision des calculs non relativistes qui atteignent aujourd’hui 14 à 20 chiffres significatifs. Dans le premier paragraphe, je décris brièvement les méthodes qui donnent les résultats les plus précis et je donne les énergies des niveaux qui interviennent dans les transitions à deux photons que nous souhaitons sonder. Les corrections relativistes et radiatives peuvent s’écrire sous la forme d’un développement en puissance de la constante de structure fine α et du rapport de la masse de l’électron à celle du proton. La prédiction des énergies de transition avec une incertitude relative au niveau de 10−10 implique le calcul des termes d’ordre relatif allant de α 2 à α 5 . Les calculs antérieurs donnaient seulement les corrections à l’ordre α 2 et α 3 dans l’approximation de Born-Oppenheimer [37, 38]. V. Korobov a commencé, il y a quelques années, une évaluation systématique des corrections relativistes et radiatives. Celles-ci se séparent en deux parties : – Une partie indépendante du spin : je donne l’expression des termes de corrections et l’ensemble des paramètres nécessaires au calcul de manière à évaluer les incertitudes et à dégager les facteurs actuellement limitants pour la précision des calculs. – Une partie dépendante du spin : la structure hyperfine dont le hamiltonien effectif a également été établi par V.Korobov. Son travail permet d’établir la structure hyperfine des raies à deux photons que nous allons sonder dans notre expérience. L’objectif de ce chapitre est de donner la structure et la position des raies à deux photons de H+ 2 , ainsi que les probabilités de transition. Une partie de ces résultats est publiée dans les références [39, 40]. Je termine par une revue succincte des effets systématiques intervenant dans notre expérience, et à prendre en compte pour les comparaisons théorie-expérience. 

Description non relativiste 

Les méthodes de calcul 

Dans toute la suite, nous noterons : – L : nombre quantique rotationnel associé au moment cinétique orbital total L – v : nombre quantique vibrationnel L’ion H+ 2 est constitué de deux protons et d’un électron en interaction Coulombienne. Dans le système des unités atomiques, le hamiltonien non relativiste de ce système s’écrit [41] : H = P2 1 2M + P2 2 2M + P2 3 2 + 1 R − 1 r1 − 1 r2 (1.1) o`u les indices 1, 2 et 3 représentent respectivement les deux protons et l’électron. M est le rapport des masses du proton et de l’électron. R, r1 et r2 sont respectivement la distance internucléaire et les distances proton-électron. Toutes les méthodes de calcul précis des niveaux d’énergie de H+ 2 utilisent la diagonalisation du hamiltonien 1.1 couplée à une approche variationnelle. Elles diffèrent par le choix du système de coordonnées, le choix de la base de fonctions pour développer le hamiltonien, et la méthode de diagonalisation numérique. R.E. Moss a calculé la quasi-totalité des niveaux rovibrationnels de H+ 2 , HD+ et D+ 2 au début des années 1990, avec une incertitude sur les niveaux d’énergie de 10−11 unité atomique [10, 11, 12]. Plus récemment, deux méthodes sont apparues comme les plus performantes : – La méthode la plus courante consiste en un choix de coordonnées de type Hylleraas [42]. Les fonctions d’onde utilisées sont des produits de puissances de R, r1 et r2 par des exponentielles décroissantes. Nous pouvons ici citer les travaux réalisés par Taylor [43], Drake [44], Frolov [45], Schwartz [46] et V. Korobov [48]. Les fonctions en facteur des exponentielles sont choisies par chacun des auteurs pour optimiser la convergence des calculs. On pourra consulter la référence [46] pour une comparaison détaillée des taux de convergence obtenus pour différents choix de base. L’avantage de cette méthode réside dans sa grande flexibilité. Il est possible d’ajuster les valeurs des exposants afin de reproduire le comportement de la fonction d’onde à différentes échelles de longueur; on atteint ainsi des taux de convergence record (C. Schwartz a obtenu l’énergie du niveau fondamental de l’atome d’Hélium avec une précision de 10−36 en utilisant une base de seulement 10257 vecteurs [47]). En revanche, elle conduit à l’utilisation de matrices pleines qui s’avèrent coˆuteuses en termes de temps de calcul. Une arithmétique multiple précision est ici nécessaire. Il faut également noter que la simplicité des fonctions de base permet d’exprimer analytiquement les éléments de matrice intervenant dans le calcul des corrections relativistes et radiatives, et facilite donc le calcul de ces corrections. – La deuxième méthode se base sur le système de coordonnées périmétriques et utilise des fonctions hydrogéno¨ıdes pour fonctions de base. Elle a été introduite par Pékéris en 1958 [49] dans le cadre de calculs sur l’atome d’Hélium. En ce qui concerne H+ 2 , elle est utilisée dans les références . Ce choix de coordonnées tire le maximum d’avantages des propriétés de symétrie du problème coulombien à trois corps. Il permet d’écrire le hamiltonien non relativiste sous forme de matrice bande qui peut-ˆetre diagonalisée numériquement de fa¸con très efficace. Cette méthode s’avère particulièrement efficace sur les premiers états rotationnels L = 0, L = 1 et L = 2, mais perd de son intérˆet pour les L plus élevés car l’expression analytique du hamiltonien se complique considérablement lorsque L augmente. Ces méthodes ont permis d’atteindre des précisions variant de 10−14 10−20 u.a. suivant les niveaux considérés. Il serait évidement possible d’aller plus loin si nécessaire, cette précision étant limitée par l’arithmétique de calcul (double à octuple précision) et par la quantité de mémoire disponible efficacement. Les niveaux d’énergie E0 de H+ 2 en unités atomiques, issus des références [8, 55], sont donnés dans le tableau 1.1 pour les niveaux que nous pouvons sonder, c’est à dire les niveaux correspondant à 0 6 L 6 4 et v=0 ou 1. Des niveaux d’énergie complémentaires pour lesquel V. Korobov a calculé les corrections relativistes et radiatives sont donnés en Annexe A, il s’agit des niveaux pour lesquels 0 6 L 6 4 et 0 6 v 6 4. Les énergies ont été calculées avec la valeur M = 1 836, 152 672 61 du rapport de la masse du proton à celle de l’électron [2].

Table des matières

Introduction
1 Spectre de l’ion H+
1.1 Introduction 1
1.2 Description non relativiste .
1.2.1 Les méthodes de calcul
1.2.2 Effet du rapport de la masse du proton à celle de l’électron
1.3 Corrections relativistes et radiatives
1.3.1 Corrections indépendantes du spin
1.3.2 Fréquences de transition
1.3.3 Structure hyperfine
1.3.4 Transitions à deux photons
1.4 Effets systématiques
1.4.1 Effet Zeeman
1.4.2 Effet Stark
1.4.3 Effet Doppler du second ordre
1.4.4 Déplacement collisionnel
1.5 Conclusion
2 Préparation, piégeage et détection des ions
2.1 Piégeage d’ions H+
2.1.1 Piège hyperbolique
2.1.2 Dispositif expérimental
2.1.3 Distribution rovibrationnelle des ions H+
2.2 Photodissociation
2.2.1 Section efficace de photodissociation
2.2.2 Dispositif expérimental
2.2.3 Résultats
2.3 Spectroscopie de H+
2.4 Conclusion
3 Source laser d’excitation à deux photons
3.1 Sources laser à 9,166µm
3.1.1 Laser à CO2
3.1.2 Modulateurs acousto-optique, et électro-optique
3.1.3 Laser à cascade quantique (QCL)
3.1.4 Applications des QCL à la spectroscopie
3.1.5 Choix de la source
3.2 Référence de fréquence
3.2.1 Choix d’une référence moléculaire
3.2.2 L’acide formique
3.2.3 Largeur de raie
3.2.4 Absorption saturée en cavité
3.3 Référence de fréquence : stabilisation du laser à CO2
3.3.1 Cavité Fabry-Pérot
3.3.2 Asservissement
3.3.3 Mesure absolue de la fréquence du laser à CO2 stabilisé
3.4 Asservissement en phase du QCL sur le laser à CO2
3.4.1 Principe
3.4.2 Détection du signal
3.4.3 Comparaison de phase
3.4.4 Performances
3.5 Stabilité de la source
3.5.1 Principe de la mesure
3.5.2 Résultats
3.6 Spectroscopie de l’acide formique
3.6.1 Dispositif
3.6.2 Résultats
3.7 Cavité de haute finesse pour la spectroscopie de H+
3.8 Conclusion
Conclusion et perspectives
4 Annexes
A Energies non relativistes
B Fréquences de transitions (L,v)→(L
B.1 Transitions L→L
B.2 Transitions L→L+2
B.3 Transitions L→L-2
C Structure hyperfine
C.1 Matrices réduites de S et I
C.2 Coefficients du hamiltonien de structure hyperfine
Bibliographie

projet fin d'etude

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