Suivi temporel de la dynamique des structures

Suivi temporel de la dynamique des structures

Dynamique des structures observée à partir de données expérimentales

La compréhension du comportement des structures, de par leur complexité, nécessite de considérer des modèles simplifiés. Ces derniers permettent alors d’appréhender les éléments principaux contrˆolant la dynamique de tels systèmes. Le système mécanique le plus simple que l’on puisse considérer comme ayant un comportement approchant celui des immeubles est l’oscillateur amorti. Ce système simpliste présentant une masse ponctuelle est cependant très éloigné de la complexité des structures qui nous intéressent. Boutin et al. (2005) et Chesnais et al. (2008), parmi d’autres, ont alors démontré qu’il était possible de modéliser numériquement et très fidèlement des structures par des modèles de poutres continues. Boutin et al. (2005) ajoutent que cette approximation est non seulement valide pour des hautes tours dont la forme se rapproche d’autant plus de celle de poutres continues, mais également pour des bˆatiments de taille modérée (environ 15 étages). L’idée dans cette thèse n’est pas de déterminer, à l’instar des études citées précédemment, les paramètres des poutres continues correspondant aux structures à l’étude ici mais d’utiliser cette analogie pour étudier expérimentalement, en laboratoire, des poutres de différents matériaux. Ces poutres sont alors considérées comme des analogues standards, à échelle réduite, des structures de génie civil dans leur ensemble. Nous étudierons ainsi certaines caractéristiques des paramètres modaux des poutres, en laboratoire et assimilées à des structures de génie civil, en fonction de certaines conditions expérimentales ou environnementales. Ce chapitre rappellera quelques notions essentielles de la dynamique des structures, en passant de l’oscillateur amorti aux modèles de poutres continues d’Euler-Bernoulli et de Timoshenko, utiles à l’interprétation des observations expérimentales. Puis, nous analyserons l’influence de l’environnement sur le comportement des structures. Nous détaillerons alors deux d’entre-elles pouvant ˆetre source d’informations sur l’état de santé de la structure : la non-linéarité de l’amortissement à très faible sollicitation (vibrations ambiantes) et la réponse non linéaire de la structure lors de sollicitations dynamiques

Poutres continues 

Le modèle très simple d’oscillateur amorti à un degré de liberté permet d’introduire les notions de base de la dynamique des structures mais ne représente pas fidèlement le comportement plus complexe de structures dont la masse est distribuée. Les structures telles que les immeubles sont communément modélisées par des poutres continues (Boutin et al. (2005), Chesnais et al. (2008)). Dans le cas de structures élancées, le comportement de celles-ci peut ˆetre approché par celui d’une poutre en flexion d’après le modèle d’EulerBernoulli. Pour des structures plus complexes, le modèle de poutre continue dite de Timoshenko prenant en compte le cisaillement en plus de la flexion, est plus approprié. 

 Poutre en flexion pure 

Lorsque les poutres sont caractérisées par une section, une distribution de masse et de rigidité uniformes, deux approximations peuvent ˆetre considérées : • les déformations de la section droite dues au cisaillement sont négligées, • l’effet d’inertie de rotation est négligé. 

Poutre de Timoshenko 

Le modèle de poutre continue dite de Timoshenko rend compte d’un comportement, à la fois en flexion et en cisaillement (Cowper (1966)). Il est ainsi similaire au modèle précédent, à l’exception des deux approximations qui ne sont donc plus considérées. Hans (2002) propose ainsi une équation similaire à l’équation 1.12 qui, après séparation des variables, s’écrit pour les déformées modales .

Suivi expérimental de la santé des structures – SHM 

La surveillance des structures se définit comme étant la mise en place d’une stratégie de détection de l’endommagement dans celles-ci (Farrar et Worden (2007)). L’endommagement est alors défini comme un changement dans la géométrie du système ou le matériau le constituant. Une dégradation majeure faisant intervenir un bouleversement de la géométrie de la structure ne nécessitant pas de méthode évoluée pour ˆetre détectée, l’endommagement se limitera dans la majorité des cas à l’apparition de fissures dans le matériau. Dans le cadre de la surveillance des structures, la détection des dommages consiste à observer si la structure connaˆıt un changement entre un état initial (souvent considéré comme intact) et un état altéré. Afin de détecter ce changement dès son apparition, l’état de la structure est suivi de manière continue. Pour ce faire, trois indicateurs de l’état de santé sont couramment utilisés dans les structures de génie civil : les fréquences propres (Doebling et al. (1996), Salawu (1997)), les amortissements modaux (Modena et al. (1999)) et les déformées modales (Doebling et al. (1996)). Roux et al. (2014) indiquent par ailleurs, que les déformées modales sont plus difficilement mesurables expérimentalement de fa¸con précise et nécessitent l’utilisation d’un grand nombre de capteurs distribués sur l’ensemble du système. Les auteurs ajoutent que les fréquences propres et par conséquent les amortissements sont beaucoup plus sensibles à l’apparition de dommages. Nous nous concentrerons donc principalement sur les deux premiers paramètres modaux . Cependant, avant d’interpréter les variations de la fréquence et de l’amortissement comme étant l’apparition de dommages irréversibles dans la structure, il est nécessaire d’écarter l’ensemble des autres facteurs connus pour les influencer. En effet, ces deux paramètres modaux sont rapportés comme variant avec les paramètres environnementaux tels que la température et l’humidité ainsi qu’avec l’amplitude de la sollicitation lors de forts événements météo ou de séismes. Les variations sont généralement, temporaires et ne traduisent la création d’aucune fissure. L’influence des conditions environnementales a été observée et interprétée par différents auteurs sans, cependant conduire à l’établissement de lois de comportement spécifiques à l’effet de la température et de l’humidité sur la fréquence ou l’amortissement d’une structure. En effet la dépendance relative de chaque paramètre modal est différente d’une structure à une autre. Mikael et al. (2013) observe ainsi comme le montre la figure 1.3 que la température augmentant, la fréquence fondamentale de la structure étudiée diminue alors que celle d’une autre structure augmente. Clinton et al. (2006) et Herak et Herak (2010) sont en accord et indiquent une corrélation positive entre fréquence et température. Ils rapportent également que l’humidité de l’air et les précipitations impactent à la fois la fréquence et l’amortissement au travers de deux mécanismes possibles : l’altération de l’interaction sol-structure due à la saturation de celui-ci ainsi que l’humidification du béton. Les auteurs indiquent pour les deux paramètres modaux une corrélation positive de ceux-ci avec les précipitations et l’humidité de l’air. Les fortes sollicitations dynamiques, que représentent les séismes sont également source de variations transitoires des fréquences et amortissement modaux. Clinton et al. (2006) ont ainsi montré des chutes de fréquences de 10% à 20% sur l’ensemble des modes étudiés de la Millikan Library du campus de Caltech au cours de plusieurs tremblements de terre récents suivies d’un retour aux valeurs initiales en quelques minutes. Ce comportement n’indique aucun endommagement contrairement aux chutes de fréquences permanentes constatées après les séismes ayant frappé le bˆatiment au cours de ses trois premières décennies d’existence. Kohler et al. (2005) et Guéguen et al. (2016) ont également constaté des chutes de fréquence fondamentale du Factor Building de Los Angeles, de l’ordre de 10%, suivies d’un recouvrement de celle-ci dans les minutes qui suivent (voir la figure 1.4). Ce phénomène de relaxation observé sur les structures a aussi été étudié sur des échantillons de laboratoire et à l’échelle de la croˆute terrestre. Cela fait l’objet de la section 1.5 qui détaille les observations aux différentes échelles et les interprétations proposées par les auteurs. Les séismes ne représentent pas les seules sollicitations affectant les propriétés élastiques des structures. En effet, Clinton et al. (2006) indiquent une chute des fréquences propres jusqu’à 3% au cours d’événements de vents violents. Tamura et Suganuma (1996) ont étudiés, eux, la relation entre l’amplitude de l’accélération à laquelle sont soumises différentes tours et leur fréquence et amortissement respectifs. La figure 1.6 montre l’exemple pour deux d’entre elles. On peut alors y observer une variation jusqu’à 3% pour la fréquence et 70% pour l’amortissement. Herak et Herak (2010) ont, de leur cˆoté, étudié une structure à Zagreb, sous vibration ambiante uniquement. Ils ont alors montré une dépendance des paramètres modaux vis à vis de l’amplitude des vibrations. 

 Amortissement et Fluctuation-Dissipation 

La théorie de Jeary (1986) d’un comportement en trois étapes de la fréquence et de l’amortissement a été développée pour des structures soumises à des accélérations fortes, comme celles présentées dans l’étude de Tamura et Suganuma (1996) atteignant 10−2 m.s−2 . Le dépassement de la limite élastique qui est tenue pour responsable de ce comportement non-linéaire par Jeary est alors, en effet, une explication cohérente avec ces niveaux d’accélération. Cependant, s’agissant des variations dans le domaine des vibrations ambiantes, et donc des déformations élastiques, nous proposons ci-dessous une explication différente pouvant expliquer la forte dépendance de l’amortissement mesuré dans les structures vis à vis de l’amplitude de l’accélération enregistrée. Campillo et Roux (2014) se sont intéressés à l’expression du théorème de corrélation de bruit dans un milieu hétérogène suivant le développement mathématique décrit cidessous.

Table des matières

Introduction générale
1 Dynamique des structures observée à partir de données expérimentales
1.1 Oscillateur amorti à 1 degré de liberté
1.2 Poutres continues
1.2.1 Poutre en flexion pure
1.2.2 Poutre de Timoshenko
1.3 Suivi expérimental de la santé des structures – SHM
1.4 Amortissement et Fluctuation-Dissipation
1.5 Elasticité non-linéaire
1. Conclusion et objectifs de la thèse
2 Dispositif expérimental et structures réelles étudiées
2.1 Dispositif expérimental
2.1.1 Poutres
2.1.2 Instrumentation et acquisition de données
2.1.3 Jet d’air
2.2 Identification des modes de vibration des poutres
2.3 Dispositif automatique de frappe
2.4 Endommagement de la poutre en granite
2.4.1 Protocole
2.4.2 Mesures de l’endommagement
2.5 Structures réelles
2.5.1 Factor Building
2.5.2 Hotel de ville de Grenoble
2.5.3 Tour de la préfecture de Nice
3 Mesure des paramètres modaux d’une structure
3.1 Historique des mesures de vibrations dans les structures de génie civil
3.2 Vibrations ambiantes
3.3 Random Decrement Technique
3.3.1 Théorie et revue de la méthode
3.3.2 Exemples d’application
3.3.3 Etude paramétrique expérimentale de la RDT
3.3.3.1 Bande passante du filtre
3.3.3.2 Longueur des signaux
3.3.3.3 Précision
3.4 Normalized Random Decrement Technique
3.4.1 Description de la méthode
3.4.2 Etude expérimentale de la NRDT
3.5 Conclusions
4 The Fluctuation-Dissipation theorem used as a proxy for damping variations in real engineering structures.
4.1 Abstract
4.2 Introduction
4.3 Experimental setup and data
4.4 Processing
4.5 Results
4. Application to real-scale buildings
4. Discussion
4. Conclusion
5 Dynamique lente dans les structures de génie civil
5.1 Etude sur des poutres continues en laboratoire
5.1.1 Rappels sur les expériences
5.1.1.1 Dispositif expérimental
5.1.1.2 Traitement des données
5.1.2 Etude comparative de la non-linéarité dans trois poutres continues
5.1.2.1 Résultats
5.1.2.2 Discussion
5.1.2.3 Conclusions
5.1.3 Effet de l’endommagement sur la non-linéarité dans une poutre en granite
5.1.3.1 Interférométrie
5.1.3.2 Elasticité non-linéaire
5.1.3.3 Effet de l’endommagement sur l’amortissement
5.1.3.4 Discussion
5.1.3.5 Conclusions
5.1.4 Conclusions
5.2 Non-linéarité dans les structures de génie civil .
5.2.1 Structures étudiées
5.2.2 Traitement des données
5.2.3 Résultats
5.2.4 Discussion et conclusions
5.3 Conclusions
Conclusions et perspectives
Bibliographie
Annexes

projet fin d'etudeTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *