Analyse des difficultés de résolution d’un problème électrique

La traduction territoriale d’un enjeu national

Analyse des difficultés de résolution d’un problème électrique

Le difficile travail de problématisation partenariale vant même d’envisager la définition de stratégies, la mobilisation de moyens adéquats ou les modalités de mise en œuvre, c’est tout un travail de structuration préalable qui attend les partenaires du programme départemental de maîtrise de la demande en électricité. Au cours de cette première phase du processus de traduction, la réduction du grand monde implique en effet de formaliser clairement le problème au travers d’une inscription12, afin de « désembrouiller la pelote des intérêts existants »13. Exprimé plus simplement, il s’agit pour les partenaires du programme de MDE de définir un cadre de référence commun qui leur permette de travailler efficacement ensemble. Dans le cas présent, cela va se formaliser dans le cadre restreint d’une nouvelle expertise dont l’objectif est de donner à voir la complexité du problème en quelques centaines de pages14 . A [I-A] Une expertise arbitrale pour délimiter le périmètre d’action collective Au cours des six premières réunions du comité technique (été 2003- début 2004), c’est la question de la réalisation d’une étude Point Zéro qui occupe largement les partenaires. Considérant qu’il est prématuré de définir dès à présent un plan d’action précis, ces derniers veulent au préalable disposer d’un état des lieux de la demande électrique départementale pour ajuster les mesures à prendre en fonction des priorités identifiées. En amont de la réalisation de l’étude à proprement dite, il convient donc de définir conjointement comment celle-ci va se mettre en œuvre. Ainsi, les deux premières réunions du comité technique ont été consacrées à la rédaction puis à la validation d’un projet de cahier des charges afin de cadrer les attendus de cette expertise. Arrivée à ce stade, l’organisation partenariale du programme MDE va se trouver mise à l’épreuve puisqu’il s’agit désormais de s’entendre sur deux points cruciaux : celui du financement de cette étude et celui de sa supervision. Toutefois, l’heure des dissensions n’est pas encore arrivée et c’est assez aisément que la Région, le Département, l’ADEME, EDF et la FDEL vont s’accorder pour prendre en charge une part équivalente (10.000€ pour chacun des cinq financeurs) du budget. De même, le choix de la FDEL comme maître d’ouvrage de l’étude va faire l’objet d’un consensus, chacun estimant que le syndicat départemental est certainement le mieux placé pour suivre le travail qui devra être conduit par le prestataire choisi. Si les avis convergent quant à l’utilité d’une cartographie départementale des zones en contrainte, afin de pouvoir cibler au mieux les secteurs les plus sensibles dans le cadre de la future mise en œuvre du programme de MDE, il n’en reste pas moins que sur bien d’autres aspects de l’étude les points de vue se révèlent assez distincts. Ainsi, tandis que la FDEL, la DRIRE et l’ADEME recherchent d’abord une certaine exactitude (et fondent donc de grands espoirs sur ce document pour définir objectivement les priorités du programme), on a pu observer qu’EDF semble pour sa part se préoccuper avant tout de l’utilité de cette expertise pour appuyer et légitimer sa stratégie15. Son représentant n’hésite d’ailleurs pas à reconnaître qu’il n’en attend « rien de miraculeux », sachant déjà ce qu’il va y trouver puisque l’entreprise publique est l’un des principaux fournisseurs de données. Pour autant, même si EDF ne paraît guère se préoccuper des résultats à venir, il suit pour autant avec attention le déroulement de l’étude afin de s’assurer de la confidentialité des données contenues dans les rapports d’expertise, soucieux de l’usage qui pourrait en être fait dans un contexte désormais concurrentiel. Dans la perspective d’un ciblage des zones prioritaires, on constate par ailleurs que la FDEL et l’ADEME ne s’accordent pas sur la stratégie qui doit en découler le moment venu. En effet, du point de vue du syndicat départemental, l’objectif est de se focaliser sur ces points noirs, alors qu’à l’inverse, la délégation régionale de l’Agence tend à privilégier la mise en œuvre d’un dispositif global à l’échelle du département, tout en tenant compte de ces secteurs prioritaires. Entre la sectorisation chirurgicale prônée par l’un et la départementalisation ajustée que propose l’autre, le comité technique n’a toutefois pas encore à trancher. En effet, l’étude ne fait alors que commencer, et rien ne devrait véritablement être décidé de manière formelle avant la remise du rapport final. Ce n’est qu’alors que nous pourrons voir quels usages seront finalement faits de cette expertise16 . Une étude préalable sous surveillance En mai 2004, à l’issue de la procédure d’appel d’offres, c’est le bureau d’études TransEnergies (associé à CRP Consulting) qui est finalement désigné pour conduire l’étude Point Zéro. Démarre alors une période importante au cours de laquelle le comité technique va consacrer la majeure partie de son temps à débattre des premiers éléments de résultats qui lui sont fournis au fur et à mesure des rapports intermédiaires. À l’occasion de la première phase (qui doit s’achever à la fin de l’année 2004), la mise en relief des données collectées va ainsi souvent donner l’occasion aux membres du comité technique d’exprimer leurs critiques sur les références retenues par le bureau d’études. À cet égard, on constate une fois encore que les remarques sont étroitement liées à l’identité des acteurs qui les formulent, chacun s’exprimant en fonction de ses intérêts. Concernant les données présentées dans le premier rapport, l’Observatoire Régional de l’Energie (OREMIP) va notamment s’étonner de ne pas avoir été contacté par les bureaux d’études, l’Observatoire disposant d’une importante connaissance quantitative en matière d’énergie sur la Région. De même, les responsables lotois (Département, Préfecture et FDEL) présents au comité technique vont exprimer leur perplexité à l’égard des projections démographiques et économiques (jugées pessimistes) que les auteurs du rapport ont retenu à l’horizon 2020. Reprochant aux bureaux d’études de n’avoir pris en compte ni le désenclavement généré par l’autoroute A20 (qui scinde le département en deux sur un axe Nord-Sud), ni les futures (mais hypothétiques) retombées du futur aéroport de Brive-Cressensac, les acteurs locaux vont largement insister pour que la vision prospective soit revue à la hausse. Allant à l’encontre des estimations de l’INSEE, le comité technique va ainsi formaliser un « avertissement » à l’adresse du bureau d’études pour qu’il prenne en compte l’enjeu politique et symbolique fort que constitue le développement territorial. Il semble en effet inenvisageable de s’appuyer sur des projections décourageantes, laissant entrevoir un inexorable déclin du Lot, alors que chacun s’emploie à l’enrayer au présent.  

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