Bases moléculaires de l’addiction

Bases moléculaires de l’addiction

L’addiction est une maladie chronique, sous-tendue par des modifications persistantes des réseaux neuronaux impliqués dans les processus de récompense. La mise en place de cet état pathologique repose sur la capacité des drogues à détourner les circuits de récompense en agissant sur la modulation dopaminergique, essentielle à leur fonctionnement. L’addiction apparait comme une forme pathologique d’apprentissage qui repose sur des mécanismes de plasticité neuronale très largement partagés avec les processus normaux d’apprentissage et de mémoire. En modifiant la concentration extracellulaire en DA, les drogues impactent la signalisation intracellulaire en aval de ce neuromodulateur et les mécanismes de plasticité neuronale qui en dépendent. Les adaptations cellulaires et moléculaires induites par les drogues au sein des neurones du système de récompense jouent un rôle central dans la mise en place des altérations comportementales à long terme observées dans l’addiction (Robison and Nestler, 2011).

La plasticité neuronale reflète la capacité des neurones à modifier durablement leur fonctionnement en réponse à des signaux électriques ou chimiques spécifiques. Ces adaptations à long terme dépendent de modifications de la composition moléculaire des neurones au travers de régulations géniques importantes pour la synthèse de nouvelles protéines (Kandel, 2001). Les voies de signalisation intracellulaires jouent un rôle important dans la plasticité neuronale en permettant un couplage efficace entre l’activité synaptique induite par les signaux extracellulaires et l’initiation d’évènements intracellulaires qui sous- tendent les changements durables du fonctionnement neuronal. Bien qu’ayant des modes d’action différents, les drogues d’abus, induisent des adaptations moléculaires très similaires en agissant sur des voies de signalisation communes (Nestler, 2005). Ce chapitre abordera plus particulièrement l’implication des protéines de la voie des ERK, activée par les drogues dans les circuits de récompense. Dans le striatum, la voie ERK activée en aval des D1R (Récepteur dopaminergiques de type D1) et NMDAR est un substrat moléculaire important pour l’intégration de signaux dopaminergiques et glutamatergiques au sein des MSN (Girault et al., 2007). L’activation de cette voie joue un rôle majeur dans le développement des adaptations neuronales et comportementales induites par les drogues (Lu et al., 2006).

La voie ERK

La voie ERK appartient au groupe des voies de signalisation de type MAPK (Mitogen Activated Protéine Kinase). Ces voies de transduction intracellulaires sont impliquées dans la propagation de signaux de la membrane vers le noyau et participent aux mécanismes de régulations géniques dépendants de l’activité neuronale. Trois grandes familles de MAPK ont été décrites à ce jour : la famille des MAPK/ERK, la famille des MAPK/JNK (c-Jun N- terminal Kinase) et la famille des MAPK/p38 (Derkinderen et al., 1999, Raman et al., 2007).

Dans les cellules non-neuronales, les MAPK sont impliquées dans les processus de prolifération, de différenciation et de survie (Volmat and Pouyssegur, 2001). Dans les neurones post-mitotiques du SNC, les protéines ERK sont abondamment exprimées (Fiore et al., 1993, Hollister et al., 1997). Dans cette partie, seules les données concernant la voie ERK au sein des neurones seront abordées. S’il existe huit isoformes de ERK (ERK1-8), ERK1 et ERK2 restent les mieux décrites dans le SNC. ERK1/2 sont exprimées de manière ubiquitaire dans le cerveau, avec un niveau d’expression variable des deux isoformes selon les régions cérébrales (Ortiz et al., 1995). Dans les neurones, les ERK1/2 sont localisées et activées dans les dendrites, le soma, le noyau et les terminaisons axonales (Hyman et al., 1994, Ortiz et al., 1995). ERK est activée par de nombreux stimuli extracellulaires agissant sur des récepteurs de type ionotrophique ou métabotropique. La voie ERK intervient dans un très grand nombre de fonctions cellulaires telles que la survie neuronale mais aussi dans la mise en place d’adaptations cellulaires durables importantes pour la plasticité neuronale (Sweatt, 2004, Thomas and Huganir, 2004) Les MAPK de type ERK sont phosphorylées en réponse à des signaux extracellulaires spécifiques, par l’activation séquentielle de différentes protéines kinases, dont principalement la cascade Ras-Raf-MEK, immédiatement en amont des ERK. L’initiation de cette cascade de signalisation débute à la membrane par l’activation d’une petite protéine G qui active la première kinase en amont, à savoir la MAPK/ERK-kinase-kinases (MEKK) Raf, principalement B-Raf ou Raf-1 dans le cerveau. Les MEKK phosphorylent et activent les MAPK/ERK-kinases (MEK) qui activent à leur tour les MAPK par phosphorylation (Figure 6).

La voie ERK, une cible commune des drogues d’abus

L’activation de ERK par les drogues a initialement été décrite dans l’ATV chez le rat, suite à l’injection chronique de cocaïne ou de morphine (Berhow et al., 1995). Cette activation résulte d’un processus homéostatique impliquant le facteur neurotrophique BDNF (Brain Derived Neurotrophic Factor). La première démonstration de l’activation de ERK dans le striatum a été apportée par des travaux du groupe du Dr. Caboche qui ont montré que l’administration aiguë de cocaïne augmente le niveau de phosphorylation de ERK dans le striatum ventral et dorsal (Valjent et al., 2000). Cet évènement survient de manière rapide et transitoire dans les neurones striataux et se maintient au cours d’un traitement chronique. L’activation de la voie ERK s’est ensuite révélée comme un mécanisme cellulaire commun à de nombreuses drogues telles que le cannabis, la d-amphétamine, la méthamphétamine, la morphine, la nicotine ou encore l’alcool (Valjent et al., 2001, Choe et al., 2002, Salzmann et al., 2003, Valjent et al., 2004, Ibba et al., 2009).

L’activation de ERK par les drogues a initialement été décrite dans l’ATV chez le rat, suite à l’injection chronique de cocaïne ou de morphine (Berhow et al., 1995). Cette activation résulte d’un processus homéostatique impliquant le facteur neurotrophique BDNF (Brain Derived Neurotrophic Factor). La première démonstration de l’activation de ERK dans le striatum a été apportée par des travaux du groupe du Dr. Caboche qui ont montré que l’administration aiguë de cocaïne augmente le niveau de phosphorylation de ERK dans le striatum ventral et dorsal (Valjent et al., 2000). Cet évènement survient de manière rapide et transitoire dans les neurones striataux et se maintient au cours d’un traitement chronique. L’activation de la voie ERK s’est ensuite révélée comme un mécanisme cellulaire commun à de nombreuses drogues telles que le cannabis, la d-amphétamine, la méthamphétamine, la morphine, la nicotine ou encore l’alcool (Valjent et al., 2001, Choe et al., 2002, Salzmann et al., 2003, Valjent et al., 2004, Ibba et al., 2009).

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