Cycle biogéochimique des ETM dans les écosystèmes forestiers

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Interaction des apports atmosphériques avec le couvert forestier

Dépôt atmosphérique de métaux

Les dépôts atmosphériques à longue distance d’ETM sont suivis et évalués à l’échelle européenne par le réseau EMEP4. Les dépôts sont modélisés à partir de mesures ponctuelles sur le territoire (Réseau MERA5 en France). Ce réseau suit les dépôts d’éléments majeurs, d’ozone et de métaux. En France, une seule station est équipée pour le suivi des métaux trace. Les mousses (Gombert et al., 2005) sont également utilisées en tant que bio-indicateurs (Réseau BRAMM) à l’échelle du territoire (528 sites de collecte). Il n’existe pas en revanche d’évaluation de dépôt sous couvert, alors même que le couvert forestier modifie les flux incidents sur les sols forestiers.

Le couvert forestier: une surface d’interaction végétation/atmosphère

Le couvert forestier constitue une surface de contact importante et complexe avec l’atmosphère. Dans les forêts tempérées, la surface spécifique du couvert (LAI=Leaf Area Index ou surface spécifique du feuillage) est comprise entre 3 à 10 m2.m-2 de sol (Ulrich et al., 1995). Cette surface est de plus réactive, puisque les feuilles et les aiguilles sont recouvertes d’une cuticule qui leur confère des propriétés d’adhésion vis-à-vis des particules atmosphériques (Müller et Riederer, 2005). Ainsi le dépôt sec s’accumule à la surface des aiguilles ou des feuilles. L’exudation de molécules organiques par la canopée (Qualls et al., 2000; Michalzik et Stadler, 2005) peut induire la dissolution totale ou partielle de ce dépôt sec (Hou et al., 2005). Les éléments apportés par l’atmosphère par voie humide ou sèche peuvent ainsi être assimilés par la canopée.

L’étude des pluviolessivats : un moyen d’étude des processus ayant lieu au niveau du couvert

L’interaction du couvert forestier avec les apports atmosphériques induit la modification de la composition chimique des pluies sous couvert forestier, i.e. les pluviolessivats (Lovett et Lindberg, 1984). En effet, aux dépôts humides hors couvert, s’ajoute le dépôt sec accumulé sur la canopée, le couvert forestier accumulant du dépôt sec de façon plus importante qu’un sol nu. De plus, des éléments peuvent être assimilés directement par le couvert et d’autre être exudés. La somme de ces processus constitue l’échange avec la canopée. La composition des pluies sous couvert s’écrit donc : FSC(i) = DH(i)+DS(i)+Echange (i) (Eq 1. 2) Où, pour un élément donné i, FSC est le flux sous couvert, DH le dépôt humide, DS le dépôt sec et Echange le terme d’échange avec la canopée.
L’étude couplée de la composition des pluviolessivats et des pluies hors couvert permet d’identifier les processus dominants ayant lieu au niveau de la canopée en fonction des éléments. Notamment, l’étude des flux nets sous couvert (différence des flux sous et hors couvert) au cours d’évènements pluvieux ponctuels permet de différentier les flux dus au dépôt sec et ceux dus à l’échange avec la canopée (Lovett et Lindberg, 1984 ; Rodrigo et al., 2003).
De nombreuses études ont été consacrées à l’identification de ces processus pour les éléments majeurs (Ulrich, 1983; Lovett et Lindberg, 1984; Bredemeier, 1988; Probst et al., 1990; Probst et al., 1992; Beier et al., 1992; Dambrine et al., 1995; Ranger et al., 1997; Dambrine et al., 1998; Balestrini et al., 1998; Neal, 2002; Erisman et Draaijers, 2003; Balestrini et al., 2007). Ainsi, les origines dominantes ont pu être identifiées dans les pluviolessivats pour les différents éléments (Probst et al., 1990), les proportions des différents processus dépendant du type de couvert, du type de sol et du contexte des apports atmosphériques :
• origine interne à l’écosystème (exudation par la canopée) pour K, Mn ;
• origine atmosphérique (enrichissement sous couvert du au dépôt sec, exudation minime) pour Na, Cl, SO4 ;
• origine mixte (enrichissement des pluviolessivats, dû au dépôt sec et à de la récrétion) pour Ca, Mg, NO3-.
Certains éléments sont assimilés par la canopée au moment du dépôt : NO3-, NH4+, H. L’échange avec les protons incidents peut ainsi induire un lessivage de cations basique du couvert forestier (contenu dans la végétation ou dans le dépoôt sec) vers les pluviolessivats (Lindberg et al., 1986; Staelens et al., 2008). Il est à noter que les apports atmosphériques changeant au cours du temps, notamment dans le cas des apports acidifiants qui diminuent sur les écosystèmes, les réponses des écosystèmes à ces apports peuvent évoluer (Coddeville et al., 2008).
Les études concernant les ETM dans les pluviolessivats sont plus rares mais permettent également d’identifier des processus dominants en fonction des éléments (Tableau 1. 2).
Les études menées sur les apports d’ETM hors et sous couvert permettent ainsi d’identifier les processus dominants suivants :
Le dépôt sec est une source importante d’ETM pour les écosystèmes forestiers, représentant près de la moitié des apports atmosphériques. Les flux sous couverts sont augmentés dans les cas de Ni, Cu et Pb. Dans le cas de Ni, c’est le lessivage du contenu de la canopée qui en est la cause, alors que pour Pb et Cu, c’est le lessivage de dépôts sec. Les flux de Cd et Zn ne sont pas augmentés sous couvert, du fait d’une assimilation directe de ces éléments par la canopée.
Ainsi, la dynamique au niveau du couvert forestier dépend de la solubilité des dépôts, de leur disponibilité potentielle au niveau du couvert, et leur recyclage par la végétation
Les études de spéciation des métaux dans les apports atmosphériques hors couvert (Spokes et al., 1996) et sous couvert (Hou et al., 2005 ; Casartelli et al., 2006) sont rares bien qu’elles renseignent sur les processus ayant lieu au niveau de la canopée. En effet, la spéciation contrôle la disponibilité potentielle au niveau du couvert.
Le devenir et l’impact potentiel des ETM dans les écosystèmes forestiers sont ainsi liés à leur mobilité au sien des phases aqueuses et aux interfaces (notamment les interfaces atmosphère/végétation et solide/solution dans les sols). Cette mobilité est essentiellement associée à leur fractionnement entre les phases et à leur spéciation en solution.

Fractionnement physique et chimique des métaux dans les eaux naturelles

La mobilité d’un ETM au sein de l’écosystème forestier dépend :
– de la solubilité des phases solides auxquelles il est associé, dans l’atmosphère et au sein des sols;
– de sa partition solide/solution au sein des sols ;
– de son fractionnement physique en solution entre les phases particulaires/colloïdales et dissoutes;
– de sa spéciation en solution, celle-ci influençant d’une part la réactivité vis à vis des phases solides et d’autre part la disponibilité vers la biosphère.

Partition des métaux entre les phases solides et solution des métaux

La labilité des métaux au sein des sols est liée à leurs affinités pour les différentes phases porteuses au sein des sols et de la solution de sol ainsi qu’au contexte physico-chimique (Baize, 1997).

Phases solides en présence

Les ETM sont présents dans le réseau cristallin des minéraux primaires du fait de leur intégration à ce réseau lors de la formation des minéraux ou du fait de leur association aux minéraux secondaires. Au cours de la pédogénèse, ces minéraux sont altérés et les ETM sont ainsi associés à différentes phases secondaires au sein des sols.
• Matière organique
Les sols forestiers sont plus riches en matière organique (MO) que les autres types de sol (Ranger et al., 2005). Les horizons de surface sont enrichis en MO du fait des apports de la litière. En effet, la minéralisation non complète des résidus organiques et des retombées de feuillage conduit à l’accumulation de matière organique en surface des sols. Les processus d’humification (transformation de la matière organique par les micro-organismes et condensation des molécules) conduisent à la formation de la matière organique des sols (Duchaufour, 2001). La MO des sols est composée de macromolécules complexes, fractionnées opérationnellement entre acide humiques et fulviques, en fonction de leur solubilité dans l’acide. Cette distinction opérationnelle ne permet pas de caractériser précisément la MO du sol. Celle-ci présente une structure complexe et des propriétés physiques (poids moléculaire, surface spécifique, propriétés optiques) variées (Tipping, 2002). Toutefois, la MO des sols possède des propriétés universelles qui lui confèrent une réactivité importante vis-à-vis des cations (Tipping, 2002). Notamment, la MO des sols possède de nombreuses fonctions hydroxyles et carboxyles. La dé-protonation de ces fonctions implique une charge négative conduisant à la complexation des cations. Différents types d’association entre la matière organique du sol et les ETM sont possibles. Des sites d’association de faibles affinités pour les ETM sont présents en grandes quantités (groupes carbonyles et acides faibles). D’autres sites, moins abondants, présentent des affinités beaucoup plus fortes pour les métaux (groupes N ou S). Les complexations s’effectuent sous formes de complexes mono-di ou tridentés (Tipping, 2002).
• Phases oxy-hydroxylées (Fe, Al, Mn)
Les oxydes sont des solides ioniques chargés négativement en surface du fait de la présence de groupement OH à leur surface. Les ETM, chargés positivement, peuvent être complexés en surface de ces hydroxydes (Sparks, 1995).
• Le complexe d’échange du sol
Le complexe d’échange du sol est constitué de la matière organique et des argiles (Duchaufour, 2001). Le complexe d’échange du sol est occupé, en fonction des caractéristiques chimiques du sol (pH en particulier) par des protons ou cations (Ca, Na, K, Al). L’occupation du complexe d’échange renseigne sur l’état nutritif du sol. Des ETM peuvent être associés à ces complexes d’échange. Ils seront facilement mobilisables par échange avec des protons ou cations basiques.

Modélisation et facteurs de contrôle

La partition des ETM entre les phases solide et la solution de sol a été largement étudiée. En effet, l’impact potentiel des ETM sur la biosphère dépend en grande partie de leur passage dans la solution de sol (Jopony et Young, 1994; Benedetti et al., 1996; Christensen et al., 1996; McBride et al., 1997; Romkens et Salomons, 1998; Sauvé et al., 2000; Sauvé et al., 2003;Tipping et al., 2003; Watmough et al., 2005; Luo et al., 2006; MacDonald et Hendershot, 2006; Pampura et al., 2007; Ponizovsky et al., 2008; Fest et al., 2008; Degryse et al., 2009).
La partition des ETM au sein des sols est contrôlée par des mécanismes de sorption et de complexation (Welp et Brummer, 1999) plutôt que par des mécanismes de précipitation. Bien que dans des sols très contaminés, des phases solides aient pu être observées (Sarret et al., 2004), celles-ci sont peu réactives et ne contrôlent pas les concentrations en ETM en solution (Degryse et al., 2009).
La partition des métaux entre les phases solides et la solution de sol peut être exprimée par un coefficient de partage simple (Kd) : où Msol est la concentration en métal dans la phase solide du sol (en mol ou g.kg-1) et [Msolution] est la concentration dans la solution de sol (en mol ou g.l-1). Le coefficient de partage est donc homogène à une unité de volume par unité de masse, classiquement des l.kg-1.
L’application des coefficients de partage implique une isotherme d’adsorption linéaire, ce qui est vérifié dans le cas des sols faiblement contaminés (Degryse et al., 2009). De nombreux auteurs ont utilisé cette approche pour décrire le fractionnement des métaux entre les phases solides et liquides. Notamment, Sauvé et al. (2000) ont établi des Kd basés sur des données issues de nombreuses études publiées. Les sols étudiés sont très divers et les méthodes utilisées pour l’extraction des solutions de sol diffèrent largement selon les études. Les valeurs de Kd présentent ainsi une dispersion importante (Tableau 1. 3).
Tableau 1. 3. Valeurs de Kd moyennes, écart type (SD), coefficient de variation (CV), médiane, minimum et maximum reportées par Sauvé et al., 2000, à partir d’une synthèse bibliographique.
De nombreux paramètres, tels que le type de sol, le niveau et le type de pollution influent sur la valeur de Kd. Toutefois, il apparait que le pH du sol contrôle de façon robuste le coefficient de partage solide/solution des ETM dans les sols (Figure 1. 4). L’effet du pH étant plus marqué pour Ni, Zn et Cd que pour Cu et Pb.
Les isothermes de Freundlich sont particulièrement adaptées aux cas de milieux adsorbant multi sites avec des affinités différentes, ce qui est le cas des sols. Il est ainsi possible d’établir des modèles basés sur la compétition des métaux et des protons pour l’adsorption sur les phases du sol, « The competitive ion model », proposé par McBride et al., (1997). Les protons étant en compétition avec les métaux pour la complexation par un ligand L (en l’occurrence la matière organique du sol), Où M est le métal considéré, L est un ligand, et H un proton qui peut être > 1, dans le cas de ligands polyfonctionnels.
Les coefficients de ces équations sont déterminés à partir de données empiriques, par régressions multilinéaires. Ces équations permettent la prédiction des concentrations en métaux traces dans les solutions de sol à partir des paramètres du sol, ce qui est un enjeu important, puisque les études d’impact des ETM sur les sols et leurs écosystèmes nécessitent la connaissance des concentrations en ETM en solution, qui sont rarement disponibles (du fait des contraintes de l’extraction et de la mesure de faibles concentrations dans la solution de sol) et, alors que les paramètres du sol sont disponibles dans de plus nombreuses bases de données.
Ce type d’équation (appelés également fonctions de transfert) a été établi précédemment (voir notamment Sauvé et al., 2000; Tipping et al., 2003; Pampura et al. 2007; deVries et al., 2007). Les équations sont établies à la fois pour prédire des concentrations totales et en ion libre en solution à partir des teneurs totales et « réactives » dans les sols.
Les paramètres du sol les plus significatifs pour expliquer le parta solide/solution et utilisés dans les fonctions de transfert sont le pH et les teneurs en MO du sol (Sauvé et al., 2000; Tipping et al., 2003) . Les teneurs en métal total ne sont pas toujours un paramètre significatif pour la prédiction des concentrations en solution, notamment dans le cas de sols faiblement contaminés (Watmough et al., 2005). Les travaux utilisés pour l’établissement des fonctions de transfert concernent rarement des sols forestiers (Pampura et al., 2007). Par ailleurs, lorsque des sols forestiers sont étudiés, seuls des sols acides sont concernés (Römkens et Salomons, 1998; Sauvé et al., 2003).
L’utilisation des seuls paramètres du sol pour la prédiction des concentrations en solution est limitante, notamment du fait du rôle de la concentration en Carbone Organique Dissous (COD) dans la solution de sol vis-à-vis de la partition des ETM, en particulier pour Pb et Cu (Sauvé et al, 2000). Ainsi, le coefficient de partage de Cu dans les sols est corrélé plus fortement au coefficient de partage solide /solution du carbone organique qu’au pH du sol (Figure 1. 5).
Figure 1. 5. Evolution du coefficient de partage solide/solution Kd de Cu dans les sols en fonction du pH du sol (a) et du coefficient de partage de la matière organique (b). (extrait de Degryse et al., 2009).
Ainsi, l’ajout du COD comme variable d’entrée dans les fonctions de transfert permet d’améliorer la qualité de la prédiction des concentrations totales en solution (Tipping et al. 2003). Toutefois, d’un point de vue opérationnel, les concentrations en COD dans les solutions de sol doivent être connues, ce qui n’est pas souvent le cas, puisque cela nécessite l’extraction de la solution de sol.

Fractionnement physique des métaux au sein de solutions naturelles

Nature et propriétés des phases colloïdales

Les colloïdes sont définis comme des éléments de taille comprise en 1 µm et 1 nm (IUPAC : International Union of Pure and Applied Chemistry). Buffle et al. (1998) les définissent comme des entités de taille suffisante pour présenter des propriétés supramoléculaires mais d’assez petite taille pour ne pas sédimenter en l’absence d’agrégation.
Dans les eaux naturelles, les colloïdes sont de natures variées (Figure 1. 6). Les colloïdes peuvent être de nature minérale (oxyhydroxydes de Fe/Al) ou organiques (biopolymères ou molécules de plus petite taille). Ces deux types de colloïdes sont souvent associés (Pokrovsky et al., 2006; Pédrot et al., 2008), les plus petits colloïdes organiques stabilisant les colloïdes minéraux (Buffle et al., 1998).
Les colloïdes sont des entités réactives en solution, notamment avec les métaux, du fait de leur charge de surface. Les colloïdes minéraux argileux présentent des charges permanentes ainsi que des charges variables liées aux groupements hydroxyles en bordure des argiles. Les oxyhydroxydes de Fe et d’Al possèdent des groupes fonctionnels hydroxyles impliqués dans des réactions spécifiques de complexation des métaux traces (Bruemmer et al., 1988). Les colloïdes organiques présentent également des groupements fonctionnels hydrophiles : carboxyles (COOH), phénoliques (OH), carbonyle (C=O) et amines (NH2). La stabilité des complexes formés par les métaux et les colloïdes organiques décroit selon l’ordre suivant : Cu>Pb>Ni>Co>Cd>Zn (Pandey et al., 2000). Les charges portées par les colloïdes sont dépendantes du pH de la solution, et il existe un pH de charge nulle, pour lequel les densités de charges positives et négatives sont égales (Sposito, 1989). L’interaction avec les ETM dépend donc des conditions physico-chimiques de la solution.

Méthodes d’isolement des colloïdes des solutions naturelles

Les colloïdes sont difficiles à collecter et à caractériser (Buffle et al., 1998). Les méthodes utilisées pour les isoler comprennent l’ultracentrifugation (Jones et Bryan, 1998 ; Citeau et al., 2006), la dialyse de solutions de sol in situ (Pokrovsky et al., 2005), et l’ultrafiltration (Eyrolle et al., 1996; Pourret et al. 2007).

Rôle des colloïdes dans la dynamique des ETM

Les colloïdes peuvent complexer des ETM. Ainsi, leur dynamique dans les eaux naturelles va influencer celle des métaux traces (Jonge et al., 2004). La dynamique couplée des colloïdes et des ETM dans le cas des solutions de sol a été étudiée en laboratoire (Karathanasis, 1999 ; Pedrot et al., 2008) et in situ (Denaix et al., 2001 ; Pokrovsky et al., 2006 ; Citeau et al., 2006). Les ETM présentent des affinités spécifiques différentes pour les colloïdes. Ils peuvent être associés aux colloïdes dans des proportions différentes, en fonction des types de milieu. L’affinité de Cu pour les colloïdes organiques est forte (Eyrolle et al., 1996). Pb présente une affinité supérieure pour les colloïdes que Cd et Zn. Ainsi, alors que Cd et Zn sont majoritairement présent sous forme dissoute, 40 % (Denaix et al., 2001) et 75% du Pb est présent sous forme colloïdale sous des sols agricoles et de prairie. Cette proportion s’abaisse à 20% dans le cas d’un sol forestier acide (Citeau et al., 2003). Dans le cas d’un permafrost, la complexation par des colloïdes organo-minéraux est plus importante (de 20 à 30% pour Co, Ni, Cu et Zn et supérieure pour Pb). Sb en revanche est sous forme dissoute (Pokrovsky et al., 2006).

Spéciation des métaux en solution

Implication de la spéciation des ETM en solution

L’étude de la spéciation des ETM en solution consiste à identifier les différentes formes chimiques sous lesquelles ils sont présents en solution. Les ETM peuvent être sous forme ionique MZ+, ou « ion libre ». Ils peuvent également être complexés à des ligands inorganiques (Cl-, NO3-, SO42-, CO32-,…) et organiques. La matière organique dissoute naturelle est complexe et est le plus souvent considérée comme un ligand unique, dont les propriétés de sorption varient (Tipping, 2002). Pour des valeurs de pH élevées, les ETM peuvent être par ailleurs présents sous forme hydroxylées.
La connaissance de la spéciation des métaux en solution est un enjeu important. En effet, les formes chimiques sous lesquelles sont présentent les ETM régissent d’une part leur réactivité vis-à-vis des différentes phases en présence dans le milieu et ainsi leur mobilité (Weng et al., 2002;), et d’autre part leur disponibilité vis-à-vis de la biosphère et leur toxicité potentielle. En effet, dans le cas de l’assimilation des métaux par une solution, il est reconnu que la forme ion libre est la plus toxique (Lofts et al., 2004), bien que la disponibilité de certains complexes organométalliques ait été reconnue (Brandt et al., 2008).

Facteurs de contrôle

La spéciation des ETM en solution dépend des conditions physicochimiques de la solution (force ionique, concentrations relatives des différents ligands, pH).
Le pH est le paramètre prépondérant qui fixe les concentrations des différentes espèces en solutions. En effet, les concentrations en ion libre en solution sont dépendantes du pH, puisque les protons et les ETM sont en compétition pour la complexation avec les ligands présents en solution. L’exemple de Zn est donné à la Figure 1. 7.
Figure 1. 7. Evolution des logarithmes des concentrations en Zn2+ (p=-log) en fonction du pH de la solution de sol (extrait de Tye et al.,, 2003). La solution de sol est extraite de microcosmes après 11(•) et 818 ( ) jours.
Les ETM ont des affinités spécifiques pour les ligands présents en phase dissoute. Ainsi, Cu et dans une moindre mesure Pb présentent une affinité plus forte pour la matière organique dissoute que Cd et Zn et Ni (Pandey et al., 2000; Weng et al., 2002). Sb, présente sous forme hydroxylée dans les eaux naturelles est en revanche chargé négativement et n’est pas associé à la matière organique dissoute (Filella et al., 2002).

Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 Cycle biogéochimique des ETM dans les écosystèmes forestiers
I. Contexte général
I.1 Définition des ETM
I.2 Dispersion naturelle et anthropique des ETM
I.3 Rôles biologiques et toxicité des ETM
II. Dynamique des ETM au sein des écosystèmes forestiers
II.1 Fonctionnement des écosystèmes forestiers
II.2 Cycles minéraux dans un écosystème forestier
III. Apports atmosphériques de métaux sur les écosystèmes forestiers
III.1 Emissions atmosphériques de métaux
III.2 Interaction des apports atmosphériques avec le couvert forestier
III.2.1 Dépôt atmosphérique de métaux
III.2.2 Le couvert forestier: une surface d’interaction végétation/atmosphère
III.2.3 L’étude des pluviolessivats : un moyen d’étude des processus ayant lieu au niveau du couvert
IV. Fractionnement physique et chimique des métaux dans les eaux naturelles
IV.1 Partition des métaux entre les phases solides et solution des métaux
IV.1.1 Phases solides en présence
IV.1.2 Modélisation et facteurs de contrôle
IV.2 Fractionnement physique des métaux au sein de solutions naturelles
IV.2.1 Nature et propriétés des phases colloïdales
IV.2.2 Méthodes d’isolement des colloïdes des solutions naturelles
IV.2.3 Rôle des colloïdes dans la dynamique des ETM
IV.3 Spéciation des métaux en solution
IV.3.1 Implication de la spéciation des ETM en solution
IV.3.2 Facteurs de contrôle
IV.3.3 Modélisation
V. Protection des écosystèmes terrestres vis-à-vis de la pollution atmosphérique: concept des charges critiques
V.1 Définition des charges critiques
V.1.1 Calcul et utilisation des charges critiques
Chapitre 2 Matériels et méthodes
I. Sites d’étude
I.1 Le réseau RENECOFOR
I.2 Présentation des six sites d’étude
I.2.1 Choix des sites
I.2.2 Présentation des sites d’étude
II. Démarche expérimentale
II.1 Présentation des différents suivis mis en oeuvre
II.2 Contraintes liées à l’étude des métaux traces
III. Prélèvement des échantillons sur le terrain
III.1 Sols
III.1.1 Collecte de sol au niveau des fosses pédologiques
III.1.2 Collecte mensuelle de sol pour extraction de la solution de sol
III.2 Solutions de sols
III.2.1 Choix des bougies poreuses
III.2.2 Conditionnement des bougies poreuses
III.2.3 Mise en place des bougies poreuses
III.2.4 Protocole de prélèvement de la solution de sol par bougies poreuses
III.3 Précipitations hors couvert, pluviolessivats et ruissellements de troncs
III.3.1 Précipitations Hors Couvert
III.3.2 Pluviolessivats et ruissellements de troncs
III.3.2.1 Blancs effectués sur les installations de terrain
III.3.2.2 Collecte des échantillons
III.4 Etude de la végétation sur les placettes de sapin
III.4.1 Prélèvement des échantillons
III.4.1.1 SP 57
III.4.1.2 SP 11
IV. Traitement des échantillons de sol au laboratoire
IV.1 Mesure des principaux paramètres du sol
IV.2 Extraction de la phase extractible au CaCl2
IV.2.1 Choix de l’extraction au CaCl2 0,01 M
IV.2.2 Méthodologie
IV.3 Extraction de la solution de sol
IV.4 Traitement des échantillons de solution
IV.4.1 Filtration des solutions
IV.4.2 Séparation des colloïdes
IV.4.2.1 Définition de la fraction colloïdale et implication dans la mobilité des ETM au sein des sols
IV.4.2.2 Protocole de fractionnement physique
IV.4.2.3 Validation du protocole de lavage des cellules
IV.5 Traitement des échantillons de végétation
IV.5.1 Broyage
IV.5.2 Extraction des cires des aiguilles
IV.5.3 Minéralisation
V. Analyse chimique des échantillons
V.1 Carbone Organique Dissous et SUVA
V.2 Anions
V.3 Cations majeurs
V.4 Eléments traces
VI. Modélisation de la spéciation des ETM en solution (WHAM-VI)
VI.1 Description du modèle
VI.2 Données d’entrée
VI.3 Sorties du modèle
VI.4 Hypothèses sur les données d’entrée
VI.4.1 Solutions de sol
VI.4.2 Pluviolessivats
VII. Modélisation du flux d’eau drainée dans les sols : utilisation du modèle biljou
VIII. Etablissement de bilans biogéochimiques à l’échelle de l’écosystème
VIII.1 Bilan pour une placette forestière
VIII.1.1 Dépôts Atmosphériques
VIII.1.1.1 Estimation du dépôt humide
VIII.1.1.2 Estimation du dépôt sec
VIII.1.2 Altération
VIII.1.3 Exportation par la biomasse
VIII.1.4 Drainage
IX. Etablissement de charges critiques pour les sites d’études
IX.1 Hypothèses de calcul des charges critiques
IX.2 Etablissement de la charge critique
IX.3 Etablissement des limites critiques
Chapitre 3 Dynamique des ETM dans les sols forestiers
I. Introduction
II. Les solutions de sol: moyens de collecte et caractéristiques
III. Comparaison des deux types de bougies poreuses
III.1 pH
III.2 Concentrations en COD
III.3 Concentrations en métaux traces
III.4 Conclusion sur l’utilisation des bougies poreuses pour la collecte de solutions de sol pour l’analyses d’ETM
IV. Comparaison des solutions de sol extraites par bougies poreuses et centrifugation de sols frais
IV.1 pH
IV.2 COD
IV.3 Ions majeurs
IV.4 Eléments Traces
IV.5 Synthèse
V. Teneurs et spéciation des métaux dans les sols et solutions de sol de sols forestiers français
V.1 Teneurs totales en métaux
V.1.1 Teneurs totales en ETM en fonction des types de sol
V.1.2 Influence anthropique sur la composition en ETM des sols
V.1.2.1 Profils de concentration
V.1.2.2 Facteurs d’enrichissement
V.2 Teneurs extractibles au CaCl2
V.3 Composition des solutions de sol
V.3.1 Carbone Organique Dissous
V.3.1.1 Teneurs en COD et relation avec le carbone organique du sol
V.3.1.2 Aromaticité du COD
V.3.2 ETM
V.3.2.1 Teneurs totales
V.3.2.2 Spéciation
VI. Prédiction des concentrations en ETM dans les solutions de sol en fonction des paramètres des sols : Artcle EJSS
VII. Utilisation des fonctions de transfert pour l’estimation des concentrations en solution. Etude critique
VII.1 Fonctions de transfert publiées
VII.2 Prédiction des concentrations totales et en ion libre dans la solution de sol par les fonctions de transfert
VII.2.1 Concentrations totales en Cd et Pb en solution
VII.2.1.1 Concentrations en ion libre en solution
VII.2.2 Limites à l’utilisation des fonctions de transfert
VII.2.2.1 Méthodes d’extraction de la solution de sol
VII.2.2.2 Types de sol concernés : occupation, pollution potentielle
VII.2.2.3 Gammes des paramètres utilisés pour établir les fonctions de transfert
VIII. Conclusion du chapitre
Chapitre 4 Apports atmosphériques d’ETM et influence du couvert forestier
I. Introduction
II. Apports atmosphériques Hors Couvert sur les sites étudiés
II.1 Situation de l’année d’étude par rapport aux 15 dernières années
II.2 Composition chimique des Précipitations Hors Couvert (PHC)
II.2.1 pH
II.2.2 Éléments majeurs
II.2.3 Concentrations en éléments traces dans les Précipitations Hors Couvert
II.3 Flux annuels d’éléments précipités hors couvert forestiers
II.3.1 Apports atmosphériques de soufre et d’azote
II.3.2 Flux d’ETM Hors couvert
II.3.2.1 Flux d’éléments mesurés durant l’année de suivi
II.3.2.2 Comparaison avec d’autres estimations de flux
II.4 Evolutions temporelles des concentrations et flux d’ETM dans les précipitations hors couvert
III. Apports atmospheriques sous couvert
III.1 Influence du couvert forestier
III.2 Composition chimique des pluviolessivats et ruissellement de tronc
III.2.1 pH
III.2.2 Eléments majeurs
III.2.3 Carbone Organique Dissous
III.2.4 Métaux
III.2.4.1 Précipitations Sous Couvert
III.2.4.2 Ruissellements de Tronc
III.3 Modification des flux d’éléments sous le couvert forestier
III.3.1 Interception
III.3.2 Flux circulant dans les ruissellements de tronc
III.3.2.1 Volumes drainés le long des troncs et implication pour la composition des ruissellements de tronc
III.3.2.2 Importance relative du flux drainé le long des troncs
III.3.3 Modification du flux d’acidité sous le couvert
III.3.4 Flux de cations et anions majeurs sous couvert
III.3.5 Métaux
III.3.5.1 Modification des flux de métaux sous le couvert
III.3.5.2 Relation avec la pluviométrie
IV. Localisation et dynamique des ETM dans les aiguilles de sapin
IV.1 Composition et rôle de la cuticule
IV.2 Composition des aiguilles en fonction de leur âge
IV.3 Localisation des éléments
IV.4 Dynamique des ETM dans les aiguilles
V. Spéciation des métaux dans les pluviolessivats et implication pour les mécanismes au niveau de la canopée : Article Atmosphéric E
Chapitre 5 Dynamique des ETM à l’échelle de la placette et établissement de charges critiques
I. Bilans d’éléments dans les écosystèmes forestiers
II. Stocks d’ETM dans les écosystèmes forestiers
II.1 Sols
II.2 Humus
II.2.1 Biomasses
II.2.2 Concentrations et stocks de métaux dans la litière
II.2.2.1 Concentrations
II.2.2.2 Stocks
II.3 Végétation
III. Flux d’éléments dans un écosystème forestier
III.1 Altération
III.2 Apports atmosphériques
III.2.1 Les différents apports atmosphériques en ETM sur les écosystèmes terrestres
III.2.2 Estimation du dépôt sec
III.2.3 Calcul des différents flux pour les sites d’étude
III.2.3.1 Résultats obtenus avec les différentes méthodes de calcul du dépôt sec
III.2.3.2 Choix de l’élément invariant
III.2.3.3 Choix du pas de temps de calcul
III.2.4 Comparaison du flux net sous couvert avec l’estimation du dépôt sec
III.2.4.1 Plomb
III.2.4.2 Cuivre, Chrome et Antimoine
III.2.5 Proportion du dépôt sec dans les apports atmosphériques
III.3 Drainage via la solution de sol
III.3.1 Estimation des flux hydriques
III.3.2 Estimation des flux d’éléments lessivés
III.4 Exportation par la biomasse
III.4.1 Accroissement courant
III.4.2 Concentrations en ETM dans le bois
IV. Bilans d’éléments sur les différentes placettes
IV.1 Etablissement des bilans pour les placettes d’étude
IV.2 Importance relative des différents flux
IV.3 Dynamique des éléments
IV.4 Incertitudes sur l’établissement des bilans
V. Bilan d’éléments complet sur la placette SP 57 : Importance de la mobilité des ETM au sein de la végétation dans l’établissement
VI. Définitions de charges critiques pour les écosystèmes terrestres
VII. Limites critiques et état actuel des solutions de sol
VII.1 Etablissement des limites critiques
VII.1.1 Méthodes de détermination des concentrations critiques en solution
VII.1.2 Influence du pH de la solution de sol
VII.2 Comparaison des limites critiques et des concentrations mesurées en solution
VIII. Etablissement des charges critiques
VIII.1 Calcul des charges critiques pour les sites d’étude
VIII.2 Comparaison des charges critiques et des apports actuels
IX. Conclusions du chapitre
Chapitre 6 Conclusions – Perspectives
Les paramètres du sol et de la solution de sol régissent la solubilité des ETM
A l’interface solide/solution : rôle du pH
En solution : rôle des phases colloïdales
La spéciation des ETM dépend de l’élément considéré
Prédiction de l’extractabilité et des concentrations en ETM en solution
La végétation constitue une interface dynamique entre l’atmosphère et le sol
Le couvert forestier capte et recycle les apports atmosphériques
Recyclage et exportation de l’écosystème
Les écosystèmes forestiers français étudiés sont faiblement contaminés en ETM
Contamination actuelle des sols
Apports actuels et fonctionnement des écosystèmes
Charges critiques en ETM des écosystèmes étudiés
Bibliographie
Liste des figures
Liste des tableaux
Table des Annexes

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