Détroit, la métropole désassemblée

Détroit, la métropole désassemblée

Détroit est un symbole. Longtemps considérée comme emblème de la prospérité américaine en raison de son développement économique et démographique, la métropole a été touchée de plein fouet par la désindustrialisation à partir des années 60 et cumule depuis des difficultés qui s’aggravent d’année en année. Une des conséquences de l’histoire mouvementée de la Motor city est un visage extrêmement fragmenté qui a des implications directes sur la planification métropolitaine. Afin de comprendre le morcellement de cette métropole il est nécessaire de commencer par un historique général de la ville pour ensuite axer l’analyse sur les différents facteurs qui ont contribués à la montée de la défiance des communautés entre elles pour conclure sur un passage en revue de la fragmentation métropolitaine. La ville de Détroit est la plus grande ville de l’état du Michigan. Elle est fondée en 1701 par le Français Antoine Lamotte de Cadillac sur la rivière Détroit comme poste avancé commercial dans la région des grands lacs. Après être passée sous contrôle Britannique elle est rattachée au Etats-Unis en 1783. Français et Anglos Saxons déjà installés et la ville compte 284 7041 habitants à l’aube du XIXème siècle. La ville devient une place majeure du commerce et de la finance et le downtown (centre-ville) voit la construction de nombreux grattes ciels tandis que le midtown (première couronne adjacente au downtown) héberge immeubles de logements et usines autour de deux ceintures de chemin de fer.

L’acheminement facile des ressources place Détroit au premier plan de la production lourde : bateaux à vapeur et locomotives sont produits ainsi que d’autres produits manufacturés (vêtements, pelles et tabac) durant tout le XIXème siècle. Le développement de l’automobile au début des années 1900 trouve ainsi à Détroit une main d’œuvre qualifiée et un coût d’acheminement faible des matières premières. En 1914 on recense 432 entreprises construisant des automobiles dans la ville. Le véritable boom de la production automobile de masse commence en 1908. Henri Ford développe la Ford T en 1908 et la construction de l’usine d’Highland Park en 1910 marque le début d’un mode de production industriel jusqu’alors inédit : la production à la chaine. Cette méthode suit le principe de découpage des tâches et fait en 1910 à 7,65% en 19302. Cette arrivée ne se fait pas sans tension et les premiers quartiers exclusivement noirs émergent sous la pression des politiques et habitants blancs qui prônent ségrégation et racisme. Les méthodes fordistes sont appliquées par la suite par les autres entreprises automobiles et les 3 principales (General Motors, Ford, Chrysler) prennent le nom de « Big Three ». L’entrée en guerre des Etats-Unis en 1941 et la participation des Big Three à l’effort de guerre (20% de la production militaire des USA est réalisée à Détroit) amènent Franklin D. Roosevelt à qualifier la ville « d’arsenal de la démocratie ». Ce symbolisme et le besoin de main d’œuvre contribuent à attirer encore plus de population et la ville culmine à 1 849 586 habitants en 1950.

La guerre des territoires

Les années suivant la seconde guerre mondiale sont caractérisées par l’explosion de la croissance des banlieues. L’électrification de la production industrielle commencée dans les années 1920 amène les usines automobiles à se construire sur le mode horizontal (contrairement à la production à la vapeur qui nécessitait une concentration verticale des usines afin de minimiser la perte d’énergie). Les nouvelles usines nécessitent un foncier important à bas cout et se construisent désormais dans les différentes couronnes périphériques extérieures à Détroit (Des 25 usines construites après 1950 aucune n’est localisée dans les limites de la ville centre). Cette tendance est doublée de l’avènement du rêve américain (l’accession aux pavillons de banlieue) encouragé par les politiques de prêts et la construction d’autoroutes par le gouvernement fédéral. Les populations commencent à quitter la ville pour aller s’établir en banlieue et la population de la ville commence à décliner. Cette tendance concerne surtout les classes moyennes et supérieures blanches en raison des politiques ségrégationnistes et on parle ainsi de « white flight ». Un nombre conséquent d’émeutes et de tensions raciales entre noirs et blancs après la guerre culmine avec les émeutes de 1967 et renforce encore le white flight.

 

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