Développement d’un modèle cognitif de calcul de la qualité de transmission dans les réseaux optiques

L’émergence de services multiples et les exigences en volume de trafic dans les réseaux motivent la conception de réseaux optiques hétérogènes pouvant supporter des débits et des formats de modulation divers, ainsi que différents types de services. La cognition est proposée afin d’assurer le contrôle de ces réseaux. Et les techniques d’apprentissage machine, permettant de baser sa décision sur les expériences passées stockées dans une base de données, sont de plus en plus pressenties pour l’implémentation de cette fonctionnalité dans les réseaux optiques. Plusieurs outils et modèles ont été proposés. Cependant, se basant sur le théorème « No Free Lunch » de (Wolpert & Macready, 1997), soutenant qu’aucune solution en apprentissage machine ne peut être déclarée optimale pour un ensemble de données, une étude de trois des techniques d’apprentissage machine appliquée à un ensemble de données synthétiques générées à partir d’un algorithme construit sur MATLAB est présentée dans ce projet.

L’estimation de la QoT à l’aide de modèles analytiques couvrant les dégradations de la couche physique nécessite généralement un temps de calcul élevé. Néanmoins, faire une prédiction de la qualité du signal de nouvelles connexions optiques avant de les implanter dans des réseaux optiques hétérogènes permet d’améliorer les performances du processus à l’aide de la classification de ces connexions optiques en deux classes spécifiques (bonne ou mauvaise QoT).

Estimation de la qualité de transmission 

La qualité de transmission d’un signal optique peut être estimée selon différentes métriques : l’OSNR, la magnitude du vecteur d’erreur (Error Vector Magnitude, EVM), le facteur Q (Q Factor) ou le BER. L’OSNR définit le rapport entre la puissance du signal optique et la puissance de bruit optique dans une bande passante donnée. La magnitude du vecteur d’erreur correspond à la norme du vecteur d’erreur qui est la différence entre le vecteur de référence et celui mesuré. Le facteur Q est un facteur lié au rapport signal sur bruit électrique calculé en bout de liaison au niveau du photodétecteur. Le BER définit le rapport des bits avec erreur par rapport au nombre total de bits transmis. L’évaluation de la qualité de transmission se fait à partir de paramètres tels que la topologie du réseau, les caractéristiques du lien et du signal à transmettre de même que des connexions déjà établies dans le réseau de manière à fournir une estimation précise de cette métrique.

(Azodolmolky et al, 2011) ont développé l’outil Q-Tool, qui calcule le facteur Q pour une connexion optique à partir de paramètres tels la topologie du réseau, les caractéristiques physiques et l’état des connexions actives sur le réseau. Cet outil, construit à l’aide de simulations analytiques et numériques, est développé en MATLAB et considère un format de modulation en intensité OOK.

Le Q-Tool tient compte des imperfections, tant statiques que dynamiques, de la couche physique dans les réseaux optiques transparents. Les effets statiques, étant liés à la topologie de réseau, sont pris en compte à l’aide de la méthode (Split-Step Fourier, SSF). Ce sont, le bruit lié à l’émission spontanée amplifiée (Amplified Spontaneous Emission, ASE), la dispersion chromatique (Chromatic Dispersion, CD), la concaténation de filtres et la dispersion de mode de polarisation (Polarisation Mode Dispersion, PMD). Les effets dynamiques, quant à eux, dépendent des connexions optiques dans le réseau. Ce sont l’automodulation de phase (Self-Phase Modulation, SPM), la modulation de phase croisée (CrossPhase Modulation, XPM) et le mélange à quatre ondes (Four Wave Mixing, FWM). Dans le modèle analytique utilisé dans le Q-Tool, le bruit ASE de même que les effets FWM sont estimés à l’aide de distribution gaussienne de manière à introduire leur contribution dans la détermination du facteur Q. Les effets XPM et FWM sont considérés comme des effets de bruit aléatoires qui affectent le facteur Q. Un modèle statistique est utilisé pour introduire la pénalité liée à l’effet statique PMD, car la dispersion de mode de polarisation de premier ordre domine dans la configuration de 10 Gbit/s avec un signal codé en non-retour à zéro (Non-Return-to-Zero, NRZ), qui est la configuration adoptée dans le développement de l’outil. Le développement du Q-Tool a contribué à fournir un outil qui prend en compte les dégradations qui affectent les performances de la couche physique dans un réseau optique de 10 Gbit/s et de format OOK.

Le projet européen CHRON propose les techniques cognitives pour assurer une optimisation de l’utilisation des ressources du réseau et une réduction de la consommation d’énergie dans le système (Caballero et al, 2014). Les chercheurs ont, entre autres, présenté des algorithmes cognitifs sur l’estimation de la qualité de transmission. Dans ce contexte, ils ont utilisé l’outil Q-Tool, présenté ci-haut, pour générer une base de connaissances leur permettant de construire ces solutions cognitives. Jiménez a proposé un outil cognitif d’estimation de la qualité de transmission pour un réseau à multiplexage de longueur d’onde (Wavelength Division Multiplexing, WDM) de 10 Gbit/s, à compensation optique de dispersion et grille fixe (Jiménez et al, 2013).

Les chercheurs du projet CHRON ont ensuite étendu ces travaux en proposant une étude sur un système de transmission WDM à compensation de dispersion, avec 5 canaux de 80 Gbit/s, avec un format de modulation par multiplexage de polarisation et par déplacement de phase en quadrature (Polarization-Division Multiplexed Quadrature Phase Shift Keying, PDMQPSK) (A. Caballero et al, 2012). Ils ont, dans ce cas, pris des mesures de façon à classifier chaque instance représentant une connexion optique, décrite à l’aide de différents paramètres tels la puissance de transmission, la longueur de la fibre optique et le nombre de canaux. Les métriques mesurées, permettant de déterminer les classes sont l’OSNR et l’EVM.

Le projet CHRON et l’outil E-Tool 

Dans le projet CHRON, les chercheurs ont développé une architecture de réseau hétérogène qui s’appuie sur la cognition de façon à utiliser une connaissance de l’état actuel du réseau et un processus d’apprentissage afin de répondre aux exigences de qualité de service et de transmission pour les différents types de services et applications.

Un réseau optique hétérogène est un réseau qui utilise simultanément plusieurs technologies de transmission : différents formats de modulation, débits de données, grilles de transmission et type de codage ; ceci dans l’optique de supporter différents types de services avec des exigences spécifiques de qualité de service. On parle d’hétérogénéité en termes de services pris en charge et aussi d’interfaces physiques.

L’acquisition de données de terrain posant un problème dans ce domaine, les chercheurs de ce projet ont eu recours au Q-Tool, développé par (Azodolmolky et al, 2011). Il convient de rappeler que cet outil combine des modèles analytiques et numériques pour évaluer la qualité de transmission. Cependant, il n’est valide que pour les systèmes de transmission à modulation d’intensité et détection directe OOK de débit 10 Gbit/s. Par conséquent, dans l’étude pour démontrer que l’architecture proposée dans le projet CHRON convient aussi aux réseaux de débits plus élevés et formats de modulation en amplitude et en phase et à détection cohérente, les chercheurs ont dû utiliser seulement 153 instances obtenues à partir de mesures expérimentales des paramètres OSNR et EVM réalisées en laboratoire, conduisant à des précisions de classification de l’ordre de 79 à 98.7%.

Par ailleurs, dans les travaux de (Barletta et al, 2017), les chercheurs ont proposé un nouvel algorithme pour la génération des données synthétiques de connexions optiques. Cet algorithme prend en compte les caractéristiques suivantes : le nombre de spans de la connexion, la longueur totale de la connexion, la plus grande longueur de lien, le volume de trafic et le format de modulation. Avec cet outil E-Tool, les chercheurs ont obtenu des performances de 99.0 à 99.6% pour des bases d’apprentissage de 1000 et 90,000 instances respectivement. Deux techniques d’apprentissage machine ont été utilisées : les K plus proches voisins K-NN et la forêt aléatoire RF. Et la technique RF a été celle adoptée pour l’outil proposé.

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 LA COGNITION POUR ESTIMER LA QUALITÉ DE TRANSMISSION DANS LES RÉSEAUX OPTIQUES
1.1 Estimation de la qualité de transmission
1.2 Le projet CHRON et l’outil E-Tool
1.3 L’apprentissage machine
1.4 Réseaux optiques cognitifs
1.5 Conclusion
CHAPITRE 2 DÉVELOPPEMENT DU MODÈLE DE CALCUL DES PARAMÈTRES DE QUALITÉ DE TRANSMISSION D’UNE LIAISON OPTIQUE
2.1 Notions de connexions optiques et de liaisons optiques
2.1.1 Caractéristiques de la transmission optique
2.2 Effets linéaires dans une fibre optique
2.3 Effets non linéaires dans une fibre optique
2.3.1 Les effets non linéaires dans les liaisons optiques à compensation électronique de dispersion
2.4 Qualité de transmission optique et le modèle de bruit gaussien additif
2.4.1 Formule analytique de la qualité de transmission
2.5 Conclusion
CHAPITRE 3 ESTIMATION DE LA QOT DE CONNEXIONS OPTIQUES DANS LES RÉSEAUX WDM COHÉRENTS À COMPENSATION ÉLECTRONIQUE DE DISPERSION À L’AIDE DE TECHNIQUES D’APPRENTISSAGE MACHINE
3.1 Génération de données synthétiques de BER sur MATLAB
3.2 Validation des données synthétiques
3.2.1 Validation d’une liaison WDM 112 Gbit/s à 4 canaux avec l’outil web NLIN Wizard
3.2.2 Comparaison avec l’OSNR mesuré sur une liaison WDM 112 Gbit/s à 4 canaux avec compensation optique de la dispersion avec l’outil VPItransmissionMaker
3.2.3 Comparaison avec l’OSNR obtenu à partir de la formule analytique de calcul d’OSNR final sur une liaison optique
3.3 Classification de connexions optiques à l’aide de la cognition
3.3.1 Les méthodes d’apprentissage machine dans les réseaux optiques
3.3.2 Les méthodes de validation dans les processus de classification et de prédiction
3.3.3 Les techniques d’apprentissage machine étudiées
3.3.4 Choix d’algorithme de classification et de prédiction de la QoT selon les critères de performance
3.4 Conclusion
CHAPITRE 4 RÉSULTATS ET DISCUSSION
4.1 Analyse de performance de chacune des techniques d’apprentissage machine
4.2 Comparaison des résultats des différentes méthodes
4.3 Conclusion
CONCLUSION

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