Douleurs d’aine chroniques chez l’athlète

Les douleurs d’aine sont des symptômes douloureux situés au niveau de la zone inguinale. Il n’y pas de définition anatomique formelle de l’aine, mais cette zone est généralement considérée comme une étendue de l’insertion proximale des adducteurs de hanche jusqu’au mur abdominal (Crockett et al, 2015). Le terme d’athlète, quant à lui, est défini comme un « sportif de haut niveau, qui participe à une compétition » (Wiktionnaire, 2015). Concernant la chronicité, les douleurs doivent répondre à plusieurs des caractéristiques suivantes : « une persistance ou récurrence, qui dure au-delà de ce qui est habituel pour la cause initiale présumée, notamment si la douleur évolue depuis plus de 3 mois ; une réponse insuffisante au traitement ; une détérioration significative et progressive du fait de la douleur, des capacités fonctionnelles et relationnelles du patient dans ses activités de la vie journalière, au domicile comme à l’école ou au travail » (Haute Autorité de Santé, 2014).

Du fait de la complexité de la définition du terme « chronique », dans ce travail, seules les douleurs répondant de façon insuffisante au traitement donné sont considérées comme chroniques, sans prendre en compte la notion de temps.

Epidémiologie 

La prévalence des douleurs d’aine varie entre 2 et 28% pour toutes les blessures sportives (Hureibi & McLatchie, 2015 ; Cheatham, Hanney, Kolber, & Salamh, 2014). Plus spécifiquement, les douleurs d’aine sont, dans 58% des cas, liées aux adducteurs de hanche pour tous les sports confondus et atteignent même 69% chez les joueurs de football (Weir et al, 2011). Les lésions surviennent à 55% lors des matchs et à 45% lors des entrainements (Serner et al, 2015). De plus, leur risque de récidives est très élevé, variant de 15 à 31% (Drew et al, 2014).

Facteurs prédisposants 

Certains sports sont considérés à risque de provoquer ce type de douleurs, tels que le football traditionnel et australien, le rugby et le hockey sur glace (Weir et al. 2011). De manière générale, ces sports ont comme particularité de comporter des sprints, des décélérations rapides, des shoots et des changements soudains de direction. D’ailleurs, le shoot est le mouvement créant le plus de lésion pour les joueurs de football, alors que pour les autres sports, c’est le changement soudain de direction qui est le plus mis en cause (Serner et al, 2015).

Etiologies

La littérature propose diverses étiologies pour expliquer les douleurs d’aine : musculo-tendineuses, osseuses, nerveuses, génitales, gastro-intestinales et structurelles des articulations coxo-fémorale, sacroiliaque ainsi que de la symphyse pubienne.

Dans ce travail, seules les causes musculo-tendineuses des douleurs d’aine sont analysées car elles sont les lésions musculaires parmi les plus fréquentes (McSweeney et al 2012). De plus, la précision du groupe musculaire des adducteurs de hanche est apportée car leur insertion, au niveau pubien, constitue la source de douleurs d’aine la plus courante. (Hölmich, 2014). Enfin, il y a une dernière distinction à faire entre les douleurs aiguës (suite à un évènement unique) et chroniques (suite à une charge biomécanique modifiée ou à un microtraumatisme répétitif) (McSweeney et al, 2012). Les douleurs aiguës liées aux adducteurs de hanche proviennent fréquemment d’une déchirure myotendineuse, d’une contusion ou d’une foulure musculaire. En revanche, les douleurs chroniques, également appelées LSARGP d’après l’anagramme de la traduction anglaise Long-Standing Adductor-Related Groin Pain, sont plus complexes car elles sont fréquemment dues à plusieurs pathologies coexistantes (Drew, Osmotherly, & Chiarelli, 2014). La cause des douleurs d’aine chroniques reste encore largement débattue dans la littérature (Hölmich, 2014).

Dans ce qui suit, les différentes origines possibles de douleurs d’aine chroniques liées aux adducteurs de hanche sont citées. Cette courte liste n’est probablement pas exhaustive mais elle reprend les notions les plus fréquemment mentionnées dans la littérature, à savoir les enthésopathies/tendinopathies chroniques et la pubalgie de l’athlète. De plus, celle-ci ne se base pas sur un article déjà publié, puisqu’à ce jour, aucun consensus n’est établi quant au diagnostic des douleurs d’aine.

Enthésopathie / Tendinopathie chroniques
La tendinopathie des adducteurs de hanche est l’une des causes les plus fréquentes mais peu reconnue des douleurs d’aine chroniques, spécialement chez les athlètes. Les enthésopathies au niveau de la jonction myotendineuse progressent souvent en douleurs d’aine chroniques. En effet, les lésions à l’aine entraînent d’abord un processus inflammatoire, qui se transforme ensuite en processus dégénératif associé à un changement des tissus conjonctifs. Ces pathologies, au niveau de la symphyse pubienne et/ou des tissus mous alentour, provoquent des forces mécaniques de stress au travers de la branche antérieure du pubis (Avrahami & Choudur, 2010). Au niveau de l’aine, le muscle long adducteur et droit de l’abdomen contrôlent les forces de cisaillement de la symphyse pubienne. Une rupture de l’équilibre entre ces deux groupes musculaires a un impact sur les forces de cisaillement, ce qui peut provoquer une enthésopathie du long adducteur ou une tendinopathie du droit de l’abdomen (Drew et al, 2014).

Pubalgie de l’athlète ou athletic pubalgia (en anglais)
Premièrement, de nombreux termes mentionnés dans la littérature scientifique sont décrits comme des synonymes et/ou des composantes de la pubalgie de l’athlète. Parmi les plus fréquents, on retrouve : « sports hernia, Gilmore’s groin, osteitis pubis, slap shot gut, sportsman’s hernia, hockey groin syndrome, adductor dysfunction, hockey goalie syndrome and core muscle injury, groin disruption, prehernia complex, inguinal disruption » (Larson, 2014 ; Crockett, 2015 ; McSweeney, 2012). Deuxièmement, le mécanisme pathologique, pouvant aboutir à des douleurs d’aine, est sujet à une grande confusion : « La physiopathologie en demeure encore débattue et multifactorielle. Un déséquilibre musculaire entre le groupe des adducteurs et la sangle abdominale est souvent cité comme cause première de perte de coordination et de synchronisation du couple tronc—membres inférieurs, source de lésions micro traumatiques. Certains décrivent des adducteurs trop puissants et rétractés, associés à une sangle abdominale faible chez le footballeur, quand d’autres vont rapporter un déficit des muscles adducteurs, relatif aux abducteurs de hanche chez les hockeyeurs sur glace ». (Sailly, 2013)

L’existence d’une lésion chronique légère mènerait à une dysbalance des forces permettant ensuite à la lésion de se propager, si l’athlète continue son activité sportive (McSweeney et al. ,2012). Trois principaux patterns lésionnels de la pubalgie athlétique sont décrits :
1) lésion au niveau du droit de l’abdomen uniquement
2) lésions atteignant les adducteurs de hanche et le droit de l’abdomen
3) lésion des adducteurs de hanche uniquement. Il s’agit de la cause la plus fréquente de pubalgie de l’athlète car les adducteurs de hanche sont les muscles les plus puissants de cette région.

Lien étroit entre les muscles adducteurs de la hanche et abdominaux
Le droit de l’abdomen et les adducteurs de hanche sont antagonistes. Les fibres des insertions du droit de l’abdomen et du long adducteur fusionnent au niveau pelvien afin de former une aponévrose commune. Une lésion sur le tendon de l’un de ces groupes musculaires prédisposerait le tendon opposé à subir également une détérioration, par altération de la biomécanique et par perturbation des structures entourant les origines ténopériostales, c’est-à-dire les insertions musculaires (McSweeney et al, 2012). De par ces liaisons anatomiques et fonctionnelles, entre 15 à 30% des atteintes au niveau des adducteurs de hanche engendrent des lésions au niveau du droit de l’abdomen, et inversement (Crockett et al, 2015).

Suite à ce qui a été mentionné précédemment, il ressort que l’étiologie du mécanisme pathologique lors de LSARGP ne fait pas l’objet d’un consensus clair. D’ailleurs, lorsqu’il est interrogé sur le sujet, le Dr. Per Hölmich, auteur de nombreuses publications sur cette pathologie, exprime la réponse suivante : « In most cases I believe it is an enthesopathy (whatever that is?) but in general we cannot say for sure – at least not always. That is why I use this term: LSARGP. Within the term we will hopefully in time be able to differentiate the more precise different diagnosis constituting the clinical entity » (Réponse par mail, le 12 janvier 2016).

Table des matières

1. Introduction
2 Cadre théorique
2.1 Anatomie du bassin
2.2 Douleurs d’aine chroniques chez l’athlète
2.2.1 Définitions
2.2.2 Epidémiologie
2.2.3 Facteurs prédisposants
2.2.4 Etiologies
2.3 Diagnostic
2.3.1 Signes cliniques
2.3.2 Tests cliniques
2.3.3 Imagerie médicale
2.4 Traitements
2.5 Synthèse
2.6 Objectif
3. Méthodologie
3.1 Critères de recherche
3.2 Stratégie de recherche
3.3 Critères de sélection
3.3 Evaluation de la qualité méthodologique des articles
3.4 Extraction des données
4. Résultats
4.1 Qualité des articles retenus
4.2 Design des articles
4.3 Présentation des articles
4.4 Outcomes
5. Discussion
5.1 PIO
5.1.1 Population
5.1.2 Intervention
5.1.3 Outcomes et outils de mesure
5.2 Interprétation des résultats
5.2.1 Interprétation des résultats primaires
5.2.1.1 Temps pour un retour au sport au niveau-pré lésionnel
5.2.1.2 Pourcentage de patients reprenant le sport au niveau pré-lésionnel
5.2.1.3 Mesure de succès du traitement
5.2.1.4 Impression globale subjective du patient
5.2.1.5 Synthèse des résultats primaires
5.2.2 Interprétation des résultats secondaires
5.2.2.1 Temps pour un retour au sport au niveau-pré lésionnel
5.2.2.2 Pourcentage de patients reprenant le sport au niveau pré-lésionnel
5.2.2.3 Mesure de succès du traitement
5.2.2.4 Impression globale subjective du patient
5.2.2.5 Synthèse des résultats secondaires
5.3 Confrontation des résultats à la littérature
5.4 Limites et difficultés du travail
5.5 Pistes pour des recherches futures
5.6 Implications cliniques
6. Conclusion

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