Ecologie de la restauration et restauration écologique

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Cas particulier de la végétation des berges modelées par l’homme et/ou restaurées par génie végétal

Les berges aménagées sont des milieux artificialisés, à verticalité forte en zone urbaine où la végétation implantée relève souvent plus des activités récréatives et paysagères que d’un souci de maintien des fonctions écologiques.
Si la berge est stabilisée par génie végétal, lejeunissementra régulier d’une partie des milieux ne peut plus se dérouler correctement étant donnée lfrein donné aux phénomènes érosifs. Cette solution, qui concerne uniquement l’aspect technique lié à la fixation du milieu, est cependant préférée de très loin aux solutions de génie civilqui ne permettent pas le maintien des fonctions écologiques, avec souvent une faible biodiversité te un développement accru des espèces invasives (Li and Eddleman 2002; Cavaillé, Dommanget et al. 2013).
Enfin, le génie végétal employé dans un programme derstauration écologique ne stabilise pas uniquement la berge mais tente d’initier également des successions secondaires et de reconstruire les fonctionnalités écologiques de cesmilieux.

Caractéristiques de la végétation dans un milieu contraignant

La végétation riveraine est une végétation terrestrbien souvent pionnière et qui présente des adaptations et des stratégies efficaces pour résister ou éviter les contraintes exercées par le milieu fluvial adjacent. Ces caractéristiques sont pour certaines présentées ci-dessous.

Système racinaire dense et robuste

Un système racinaire dense et robuste est une caractéristique indispensable pour le maintien de l’individu dans ces milieux fréquemment perturbés par des écoulements et les variations de hauteur de nappe phréatique. Les systèmes racinaires peuvent être répartis en trois types morphologiques : fasciculés, traçants ou pivotants (Köstler, Brückner et al. 1968). L’architecture racinaire évolue vers l’un de ces systèmes (ou une combinaison d’entre eux) en fonction des contraintes rencontrées dans le milieu. A la germination, la plupart des espèces ligneuses émettent d’abord un pivot vertical, qui produit ensuite un grand nombre de racines latérales, en particulier dans les horizons superficiels (Atger 1992; Weber and Mattheck 2005). En milieu riverain non contraint, il a été démontré que lesacinesr des espèces ligneuses sont pivotantes alors qu’en cas d’anoxie, elles deviennent traçante s (Foussadier 1998).
Lorsqu’une sécheresse s’exerce sur l’ensemble du système racinaire, le stress hydrique stimule la croissance racinaire tandis qu’en cas de répartition hétérogène de l’eau dans le sol, la plante va compenser en favorisant la croissance dans le milieu où l’eau est davantage disponible (Abrisqueta, Mounzer et al. 2008). L’intensité de ramification augmente alors dans ce compartiment (Passioura 1996; Pradhan, Mahata et al. 2003; Hund, Ruta et al. 2009).
Le système racinaire évolue donc en fonction du patron de croissance racinaire de l’individu, lui-même influencé par les conditions locales.
Les racines proximales1 permettent de s’ancrer efficacement dans un substrat souvent peu cohésif et donc de résister aux forces d’érosion etde cisaillement exercées par les écoulements et les mouvements de terrain tandis que les racines distales permettent l’acquisition des ressources hydriques, minérales et organiques (Ennos and Fitter 1992; Ennos 2000).
1 Une racine proximale est une racine directement rattachée au pivot tandis qu’une racine distale en est éloignée.
En milieu ripicole, le phénomène est essentiellemen documenté par l’étude des systèmes racinaires des Salicaceae, des Betulaceae et des Ulmaceae. Par exemple, Alnus sp. résiste remarquablement bien aux forces de tension (Bibalani, Bazhrang et al. 2008) et à l’arrachement (Karrenberg, Blaser et al. 2003). Son système souterrain lui permet de s’ancrer profondément dans les sols même lourds et tassés grâce à un grand nombre de racines obliques émanant des racines centrales (Drénou 2006).

Compétition, évitement et résistance aux contraintes

Les espèces ripicoles, du fait de leur implantation dans des milieux contraignants, doivent développer des stratégies compétitives efficaces pour l’acquisition des ressources. Les compartiments aériens et souterrains sont tous les deux concernés. En effet, certaines plantes tentent d’en priver d’autres suivant différentes formes de compétition. En milieu ouvert, les tiges et feuilles permettent à la plante d’exercer une com pétition par surcroissance et par préemption, tandis qu’en milieu plus contraignant comme dans le cas du sol, les plantes exercent davantage une compétition par consommation (Schoener 1983). Nous nous attarderons cependant plus volontiers sur la compétition racinaire pour les ressources hydriques, minérales et organiques car celle-ci semble davantage affecter les performances des espèces dans les milieux peu productifs (Wilson and Tilman 1991).
L’évitement des contraintes dans le compartiment souterrain est lié aux stratégies de compétition par consommation. En effet, une espècemonopolisant les ressources hydriques sera souvent à même de résister à une sécheresse du faitde son réseau racinaire étendu. L’évitement d’une contrainte consiste essentiellement à accompl ir l’ensemble de son cycle vital avant l’apparition du stress ou à s’approvisionner dans u n compartiment ne subissant pas ou peu de variation. La résistance met davantage en jeu des mécanismes d’accroissement de l’efficience d’extraction et d’utilisation des éléments nécessaires à la plante ainsi que des mécanismes physiologiques de minimisation des pertes.
L’évitement consiste principalement pour la plante à extraire l’eau des nappes phréatiques, compartiments hydrauliques subissant habituellement peu de variation comparés aux compartiments à surface libre. La résistance se décompose en deux sous-stratégies selon Maximov: l’augmentation de l’absorption (« water sp enders ») et la limitation des pertes en eau (« water savers ») (Maximov 1929).
Prenons pour illustrer ces phénomènes un exemple bien documenté avec la concurrence acharnée que se livrent les tamaris exogènes invasifs et les espèces natives américaines pour l’accès à l’eau. Les tamaris sont phréatophytes facultatifs 2et s’alimentent indifféremment dans la nappe phréatique et dans la zone vadose (Smith, Devitt et al. 1998; Staffler 1999), ce qui leur confère une résistance à la sécheresse accrue comparativement aux espèces locales. Cette faculté à utiliser de multiples sources d’alimentation en e au permet à cette espèce de minimiser le stress hydrique et de maintenir ses fonctions physiologiques et sa croissance (Cleverly, Smith et al. 1997; Devitt, Piorkowski et al. 1997).
L’architecture et la production de biomasse racinaire des tamaris sont également particulièrement tournées vers l’acquisition de resources du sol. En effet, les racines latérales des Tamarix servant à capter l’eau sont extrêmement abondantes et étalées au voisinage de la nappe phréatique. L’extension latérale des racinesdépasse souvent de quatre à sept mètres le diamètre de la couronne de l’arbre chez T. euphratica. Ceci permet à ces plantes de faire face aux fréquents dessèchements des couches supérieuresdu sol, si néfastes aux autres espèces. En cas de sécheresse due à un abaissement phréatique,les tamaris étudiés aux Etats-Unis émettent rapidement un grand nombre de racines en direction de la nappe afin de palier le manque d’eau (Horton and Clark 2001) tout en prospectant dans la zone non saturée, ce qui leur permet de concurrencer les espèces compagnes que sont saules et peupliers. L’augmentation de biomasse racinaire permet ainsi aux individus de retrouver la nappe avant la fin de la période de sécheresse. De plus, chez les tamaris, des propagations racinaires verticales de plus de 10, voire dans certains cas de 50 m, ont ainsi été observées(Waisel, Eshel et al. 1996; Thevs 2005). Cette profondeur racinaire leur permet de coloniser des secteurs présentant une nappe phréatique profonde mais également de ne pas entrer en concurrence avec d’autres espèces pour l’eau de subsurface.

Capacités de reproduction sexuée et asexuée

Les espèces pionnières adoptent différentes stratégies de reproduction face aux contraintes exercées par les milieux qui les hébergent. Une reproduction sexuée présente un avantage à long terme en conservant la diversité génotypique tandisqu’une reproduction asexuée montre un avantage immédiat en permettant de s’affranchir d’un bon nombre d’aléas et en assurant la stabilité des populations (Eriksson 1992; Barsoum 2001). De plus, la reproduction asexuée participe à la compétition interspécifique pour l’occupation d’un milieu et à la compétition intraspécifique par sélection des allèles les plusen adéquation avec le milieu.
Prenons l’exemple d’espèces ripicoles telles que celles appartenant aux Salicaceae. La plupart de ces plantes ont la capacité de se régénérer tant par voie sexuée qu’asexuée (Hughes, Barsoum et al. 2000; Karrenberg, Edwards et al. 2002; Rood, Braatne et al. 2003). La régénération sexuée se fait via l’émission d’un grand nombre de graines légères, aisément dispersées tant par le vent que par l’eau et sur delongues distances (Karrenberg, Edwards et al. 2002). Leur apparition au début du printemps coïncide aussi avec des hautes eaux (Hughes, Adams et al. 2001), ce qui augmente leur dissémination.
La plupart des Salicaceae se régénèrent également rpabouturage (Kollmann, Vieli et al. 1999; Gurnell and Petts 2002). De plus, l’existence de bourgeons racinaires préformés sur les tiges et la possibilité pour les saules de se régénérer à partir de tiges couchées permettent une reproduction végétative très efficace (Carlson 1950). Ces espèces rejettent également vigoureusement de souches après recépage, offrant des pieds-mères pour de futurs ouvrages (Ceulemans, McDonald et al. 1996).
La plupart du temps, la reproduction asexuée prend le pas sur la reproduction sexuée (Moggridge and Gurnell 2010) car les boutures ont une croissance plus rapide et résistent mieux aux contraintes environnementales (Hartmann, Kester et al. 1996; Vesk and Westoby 2004; Moggridge and Gurnell 2009). Cependant, la reproduction sexuée joue un grand rôle dans les processus de colonisation des bancs après les périodes de hautes eaux (Hervouet, Dunford et al. 2011). En effet, les plantules sont extrêmement dépendantes de la nappe. La première cause de mortalité est typiquement liée aux variations rapides du niveau de la nappe phréatique (Mahoney and Rood 1991; Mahoney and Rood 1998). Ces deux types de reproduction sont cependant complémentaires chez les Salicaceae car la régénération asexuée favorise la régénération sexuée en colonisant des sites et en procurant aux plantules un habitat protégé des perturbations fluviales.

La répartition de la végétation ripicole est influencée par des paramètres biogéographiques et écologiques

Les paramètres écologiques et biogéographiques présentés ici sont pour la plupart corrélés, par exemple l’altitude et la température mais également la granulométrie et la richesse du sol. Les valeurs optimales de chaque paramètre pour l’établissement d’une espèce constituent un hypervolume caractéristique de la niche fondamentale de l’espèce (Hutchinson 1957).

Paramètres biogéographiques

Altitude

La végétation, qu’elle soit forestière ou ripicoleest influencée par l’altitude. En effet, l’altitude crée des gradients, conditionnant la répartition des espèces en étages (Rameau, Mansion et al. 2008). L’altitude influence la température, la luminosité, la durée de végétation, mais aussi la pluviométrie et la disponibilité hydrique. Les espèces ripicoles d’altitude doivent ainsi être tolérantes à l’alternance gel/dégel, aufroid et effectuer leurs cycles de vie plus rapidement.

Continentalité

Le degré de continentalité conditionne également larépartition des espèces (Rameau, Mansion et al. 2008). En effet, l’amplitude entre les valeurs extrêmes de température journalières et annuelles et l’humidité relative de l’air sont des paramètres très importants pour le cycle de vie des espèces. Des végétaux supportant de grands écarts de température ne présenteront pas les mêmes adaptations que ceux vivants dans des milieuxplus stables et n’occuperont donc pas les mêmes niches écologiques.

Paramètres écologiques

Anoxie et inondation

En milieu riverain, la présence des espèces varie ne fonction de la distance verticale à la ligne d’eau (Van Splunder, Voesenek et al. 1996; Amlin and Rood 2001), ce facteur explique largement les séries de végétation présentes à proximité des cours d’eau (voir 2.1.3). Quand la distance augmente, les plantes intolérantes à l’anoxie et/ou résistantes à la sécheresse peuvent s’établir (Dufour 2005). Les espèces tolérantes à ’anoxiel se situent préférentiellement en bas de berge (Van Splunder, Voesenek et al. 1996; Amlin and Rood 2001; Adam, Debiais et al. 2008; Nakai and Kisanuki 2011). La durée et la fréquencedes crues affectent également la répartition des plantes en induisant de l’anoxie dans les horizons habituellement oxygénés et en contrôlant le recrutement des espèces ripicoles (Mahoney and Rood 1993; Van Splunder, Coops et al. 1995; Barsoum and Hughes 1998; Foussadier 1998; Shafroth, Auble et al. 1998; Van Splunder 1998; Guilloy-Froget, Muller et al. 2002; Karrenberg, Blaser et al. 2003; Dufour 2005; Francis, Gurnell et al. 2005).

Lumière

La disponibilité de la ressource lumineuse est sans aucun doute un des paramètres les plus importants régissant l’installation et la pérennisation d’une espèce végétale ripicole (Ellenberg 1979; Evette, Balique et al. 2012). Les réactions photosynthétiques nécessitent une quantité de photons déterminée sans laquelle la plante s’étiole. La compétition pour cette ressource est intense en milieu alluvial (Lovell, Gibson et al. 2009). En effet, le feuillage des espèces à fort développement vertical (saules et peupliers) crée un ombrage à même de gêner les espèces à développement plus étalé ou à croissanceplus lente telles qu’ Hippophae rhamnoides et Myricaria germanica. Dans un milieu colonisé par des individus de hautjet ou par des fourrés arbustifs, les espèces pionnières, ne peuvent s’installer, la ressource lumineuse étant totalement captée par la canopée.

Température

La température de l’air et du sol influence les cycles de vie des espèces en conditionnant la faisabilité des processus enzymatiques et l’intensité de l’évapotranspiration. La majorité des espèces alluviales sont phréatophytes obligatoires et vaporisent de grandes quantités d’eau. Certaines plantes ripicoles adaptées aux températures élevées peuvent se développer au bord des cours d’eau temporaires comme les Tamarix spp. et Acacia spp. De même, les conditions hivernales observées en altitude créent des nichesspécifiques où seules des plantes présentant des adaptions particulières telles que des trichomes3 ou encore une forme naine, peuvent s’implanter.

pH et richesse du sol

La quantité de matière organique présente dans lesdifférents sols alluviaux augmente généralement en direction de l’aval (Lecerf 2005). De même, la fertilité et le pH des sols diminuent avec l’altitude, ceci étant notamment liéavec la diminution des températures. De plus, les sols très minéraux (peu de matière organique à éroder en amont) ainsi que les vitesses d’écoulement généralement fortes favorisent plutôtle dépôt de matériaux grossiers alors que les branches plus en aval présentent des sols très riches. Cependant, les espèces ripicoles sont pour la plupart pionnières et par conséquent peu ou pasexigeantes en terme de fertilité (Ellenberg 1979; Evette, Balique et al. 2012).
La plupart des espèces ripicoles affectionnent les sols neutres à basiques (Ellenberg 1979; Rameau, Mansion et al. 2008; Evette, Balique et al. 2012). Un substrat présentant un pH faible influence même la survie et le développement des pèces ripicoles telles que les saules (Pezeshki, Anderson et al. 1998).

Humidité des sols et variation de hauteur de la nappe phréatique

L’humidité des sols est conditionnée par les précipitations mais aussi par les fluctuations du niveau de la nappe phréatique et la texture du sol. Les espèces végétales présentent des optimums d’humidité très variables pour leur développement et s’implantent donc aussi en fonction de la teneur en eau des sols (Ellenberg 1979; Evette, Balique et al. 2012).
Nombre d’études font état de changements paysagers en lien avec l’affaissement phréatique ou l’assèchement des terrains du à une baisse des précipitations (Stromberg 1998; Amlin and Rood 2002; Kelly and Goulden 2008). Les espèces végétales phréatophytes facultatives, en s’approvisionnant indifféremment dans les compartiments vadose et saturé sont en règle générale indépendantes à l’état adulte desproblèmes d’humidité apparaissant dans les milieux ripicoles et s’installent donc sur toute la hauteur de la berge, alors que les espèces inféodées à la nappe peuvent disparaitre en cas d’effondrement phréatique subit.

Texture du sol

La texture du sol est un des paramètres influençant l’installation des espèces en milieu riparien. Les racines pénètrent aisément les macropores des sols peu cohésifs et grossiers mais ces derniers sont sujets à la sécheresse et retiennent plus difficilement les particules organiques, ralentissant l’extraction des éléments nécessairesà la plante (Passioura 1991). Les sols à granulométrie très faible comme les sols compacts rgileuxa ne se laissent pas aisément pénétrer, la plupart des espèces n’exploitent donc pas les chapes argileuses. Il en va de même pour les sols
à granulométrie trop grossière. En effet, les racines de certaines espèces de ligneux ripicoles ne traversent pas le toit de galet et s’enracinent donc en surface, ce qui peut être préjudiciable à leur maintien dans le milieu (Dufour 2005).

Services rendus par les ripisylves : fonctions biologiques et influence sur la dynamique du cours d’eau

Fonction de corridor biologique entre écosystèmes disjoints

Les ripisylves, du fait de leur structure bien souvent en cordon, permettent le déplacement d’espèces le long des réseaux, connectant par exempl des écosystèmes de l’amont et de l’aval. Ces corridors sont indispensables aux espèces dispersées en métapopulations ou opérant des migrations saisonnières (Décamps, Joachim et al. 1987). De plus, la ripisylve sert également de corridor en permettant la circulation de flux de graines et de propagules.
Les flux de gènes opérés par les espèces impactentfortement la diversité génétique de certaines opulations (végétaux phréatophytes, aquatiques, espèces animales inféodées à l’eau).

Fonction d’épuration et de contrôle de flux d e matière

Cette fonction s’opère suivant deux directions :
• Du milieu adjacent (le plus souvent la plaine alluviale) vers le cours d’eau
Les ripisylves font office de zones tampons entre la plaine et le cours d’eau (Piégay, Pautou et al. 2003; Pinay and Clement 2003). Les racines filtrent les eaux de ruissellement et permettent la transformation ou la rétention des polluants organiques. Elles s’opposent à l’enrichissement excessif des rivières et des nappes en azote et en phosphore, en absorbant ces nutriments et en contribuant au processus de dénitrification microbiologique (Pinay and Clement 2003).
En cas de crue, les parties aériennes filtrent lesmatières en suspension provenant des terrains voisins et réduisent la quantité de sédiments entraînés le long des pentes vers les cours d’eau (Adam, Debiais et al. 2008). Les boisements de berge contribuent ainsi fortement à améliorer la limpidité des rivières, évitant l’envasement des habitats aquatiques sensibles, notamment des frayères.
• De l’amont vers l’aval
En raison de sa forte rugosité, la végétation de berge filtre également les matériaux en suspension lors des crues. Elle contribue à l’enric hissement des sols en éléments nutritifs et en minéraux en favorisant le dépôt des alluvions. De plus, la ripisylve apporte des matériaux au cours d’eau en introduisant des débris végétaux (Piégay, Pautou et al. 2003).

Fonction d’habitat

Les ripisylves sont des milieux naturellement riches en biodiversité. De nombreuses espèces animales et végétales s’y reproduisent, s’y alimentent et s’y réfugient. Cet écotone sert ainsi d’habitats pour de nombreuses espèces. Les arbres sous cavés, les embâcles mais aussi les racines et radicelles sont exploités par la faune aquatique pour la ponte. Certaines espèces sont partiellement inféodées à la ripisylve tandis que d’autres s’y réfugient uniquement lors d’inondations importantes. De plus, le couvert forestier à l’aplomb du cours d’eau permet de garder les eaux fraîches, condition indispensable à la faune aquatique (Décamps and Décamps 2002).

Fonction de ralentissement des crues, de rétention des embâcles et de modification de la dynamique fluviale

La rugosité et la flexibilité des parties aériennesdes végétaux de la ripisylve modifient les conditions d’écoulement en cas de crue tout en dissipant une partie de l’énergie du cours d’eau (Darby 1999; Nepf and Vivoni 2000; Tabacchi, Lambs et al. 2000) . Si la ripisylve ne se réduit pas à un simple cordon mais s’étale en forêt alluviale, elle participe également au retardement de l’onde de crue. D’autre part, la végétation influence la dynamique et la morphologie fluviales (Piégay, Pautou et al. 2003). Par exemple, les Salicaceae, espèces ligneuses parmi les plus communes des ripisylves sont reconnues pour modifier le profil du cours d’eau en obstruant les flux via des embâcles, en renforçant les sols avec leurs racines et en favorisant les dépôts de sédiments (Hickin 1984; Edwards, Kollmann et al. 1999; Corenblit, Tabacchi et al. 2007; Moggridge and Gurnell 2009) (Fig. 5). Ceci facilite la stabilisation et l’accroissement des bancs de sable et gravier (McKenney, Jacobson et al. 1995; Hupp and Osterkamp 1996; Gurnell, Petts et al. 2001; Gurnell, Tockner et al. 2005; Moggridge and Gurnell 2009). A terme, la végétation permet la création de tresses et le développement des îles par rétention des fines et des embâcles (Edwards, Kollmann et al. 1999; Kollmann, Vieli et al. 1999; Gurnell, Petts et al. 2001; Gurnell and Petts 2002; Gurnell and Petts 2006; Moggridge and Gurnell 2009; Osterkamp and Hupp 2009).
Figure 5 Influence de la végétation sur son milieu(d’après Corenblit, Tabacchi et al. 2007)

Fonction économique et sociale

La forêt alluviale et la ripisylve peuvent être valorisées économiquement par la filière sylvicole pour la production de bois de qualité (Combe 2003). En effet, les sols enrichis par les apports de limons lors des crues, sont des territoires très productifs en biomasse. Les espèces ligneuses telles que les noyers, érables, frênes oumerisiers qui peuvent coloniser ces milieux peuvent être à forte valeur économique.
La bande boisée qu’est la ripisylve structure le paysage et constitue un cadre apprécié par la plupart des usagers du cours d’eau. Les pêcheurs sont directement concernés par cet espace car la qualité des eaux et donc la richesse piscicole dela rivière dépendent pour beaucoup du bon état de la ripisylve. Par ailleurs la demande est forte pour les activités de loisirs orientés vers les milieux aquatiques. L’attractivité de la ripisylve est donc directement liée à la présence et à la structuration de sa végétation.

Table des matières

A Cadre thématique et problématique
1 Le génie végétal en rivière
1.1 Définition
1.1.1 Ecologie de la restauration et restauration écologique
1.1.2 Génie écologique et génie végétal
1.2 Historique et pluridisciplinarité
2 La végétation riveraine
2.1 Définition, types d’habitats et succession végétale
2.1.1 Définition
2.1.2 Types d’habitats
2.1.3 Succession végétale, répartition en mosaïque et répartition sérielle
2.1.4 Cas particulier de la végétation des berges modelées par l’homme et/ou restaurées par génie végétal
2.2 Caractéristiques de la végétation dans un milieu contraignant
2.2.1 Système racinaire dense et robuste
2.2.2 Compétition, évitement et résistance aux contraintes
2.2.3 Capacités de reproduction sexuée et asexuée
2.3 La répartition de la végétation ripicole est influencée par des paramètres biogéographiques et écologiques
2.3.1 Paramètres biogéographiques
2.3.2 Paramètres écologiques
2.4 Services rendus par les ripisylves : fonctions biologiques et influence sur la dynamique du cours d’eau
2.4.1 Fonction de corridor biologique entre écosystèmes disjoints
2.4.2 Fonction d’épuration et de contrôle de flux de matière
2.4.3 Fonction d’habitat
2.4.4 Fonction de ralentissement des crues, de rétention des embâcles et de modification de la dynamique fluviale
2.4.5 Fonction économique et sociale
3 La végétation dans les ouvrages de génie végétal
3.1 Les ouvrages en rivière ont un rôle mécanique et écologique
3.1.1 Protection de la surface du sol
3.1.2 Consolidation en subsurface et stabilisation en profondeur
3.1.3 Restauration d’habitats, de corridors et de fonctionnalités écologiques
3.1.4 Présentation de quelques techniques couramment utilisées
3.2 Espèces ligneuses ripicoles classiquement utilisées en génie végétal, une prédominance des saules
3.2.1 Ecologie des espèces ligneuses utilisées en Europe
3.2.2 Pourquoi sont-elles utilisées en génie végétal ?
3.3 Caractéristiques requises pour les espèces intégrées à des ouvrages de génie végétal : les traits biotechniques
4 Une contrainte majeure dans la réussite des ouvrages de génie végétal : la sécheresse
4.1 Définition de la sécheresse
4.2 Les différents paramètres de la sécheresse
4.3 La sécheresse pourrait être aggravée par les changements globaux
4.4 Sécheresses et matériel végétal
4.4.1 Impact de la sécheresse
4.4.2 Traits végétaux caractérisant les stratégies d’adaptation à la sécheresse
5 Quelles sont les espèces à utiliser dans des ouvrages soumis à sécheresse ?
5.1 Problématique générale
5.1.1 La nécessité de caractériser la résistance à la sécheresse de boutures issues d’espèces et de populations utilisées en génie végétal
5.1.2 La nécessité d’utiliser d’autres genres que celui des saules pour réaliser des boutures en génie végétal
5.1.3 Schéma récapitulatif de la problématique
5.2 Variabilité des réponses inter populationnelles et interspécifiques à la sécheresse, le cas des saules communément utilisés en génie végétal
5.3 Dynamique des traits biotechniques et biologiques des Tamaricaceae soumis à différentes conditions d’humidité
5.3.1 Etude des potentialités d’utilisation des Tamaricaceae en génie végétal
5.3.2 Etude de la dynamique racinaire de boutures de deux Tamaricaceae soumis à un abaissement de nappe
B Résultats scientifiques
6 Les Salicaceae
6.1 Caractéristiques écologiques des espèces modèles
6.2 Effects of drought on biotechnical performance of willow cuttings on riverbanks
7 Les Tamaricaceae
7.1 Description des espèces modèles
7.1.1 Caractéristiques écologiques des espèces modèles
7.1.2 Caractéristiques biotechniques des espèces modèles
7.2 European Tamaricaceae in bioengineering on dry soils
7.3 Tamaricaceae cuttings root behaviour according to groundwater level variations
C Synthèse et perspectives
8 Synthèse des résultats et conclusions
8.1 Les espèces classiquement utilisées : les saules
8.2 Les Tamaricaceae
8.3 Comparaison des résultats des traits biotechniques entre expérimentations
9 Perspectives de recherche
9.1 Une caractérisation plus fine de la réponse à la sécheresse ?
9.2 D’autres espèces à étudier ?
9.3 Les caractéristiques mécaniques des espèces et leur efficacité dans l’ouvrage
9.4 La prospection racinaire
9.5 La diversité biologique des ouvrages en génie végétal
9.6 Des ouvrages plurifonctionnels ?
10 Valorisation des connaissances et ultimes préconisations opérationnelles
10.1 Valorisation des connaissances
10.2 Eléments complémentaires de préconisations opérationnelles
Bibliographie
Annexe 1: Using Ecological and Biogeographical Features to Produce a Typology of the Plant
Species Used in Bioengineering for riverbank Protection in Europe
Annexe 2 : Les Tamaricaceae en génie végétal

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