Etude des activités par écholocation et de la diversité spécifique des chauves-souris insectivores

Menaces sur les chauves-souris

Presque le quart des chauves-souris est menacé à cause de la modification ou la perte des habitats et de la perturbation ou la perte des gîtes (Mickleburgh et al., 2002). La déforestation, la chasse, l’utilisation des insecticides et pesticides constituent un facteur de perturbation et de disparition des chauves-souris (Hutson et al., 2001). En 2001, l’UICN a classée mondialement 15 espèces de chauves-souris à écholocation dans la catégorie «Gravement menacé», 30 espèces «En danger» et 135 espèces «Vulnérables» (Hutson et al., 2001).
Pour les chauves-souris malgaches, les principales menaces sont la chasse (nourriture et loisirs) surtout pour les Yinpterochiroptera (Pteropodidae et Hipposideridae), la déforestation, la pollution chimique (pesticides) et la perte des habitats à cause des activités minières, des incendies délibérés et des feux de brousse incontrôlés (Raheriarisena et al., 2001).

Régime alimentaire

La majorité des chauves-souris à écholocation (75%) sont insectivores. En effet, ils ne chassent pas qu’en vol et ils sont capables de prélever des proies rampantes, tapies dans l’herbe ou posées sur le feuillage. D’autres espèces mangent des fruits et des fleurs ou en extraient le nectar grâce à leur langue très allongée (Exemple : Carollia perspicillata, Phyllostomidae d’Amérique du Sud). Quelques espèces de chauves-souris sont carnivores, elles consomment des poissons (Exemple: Noctilio leporinus, Noctilionidae), de petits reptiles et d’amphibiens (Exemple : Trachops cirrhosus, Phyllostomidae), des oiseaux (Exemple : Vampyrum spectrum, Phyllostomidae) et même de petits mammifères y compris d’autres chauves-souris (Exemple : Phyllostomus hastatus, Phyllostomidae) (Hutson et al., 2001). Les vampires d’Amérique tropicale sont hématophages (Desmodus rotundus, Diaemus youngi et Dyphilla ecaudata, Phyllostomidae). Elles se nourrissent uniquement de sang, aspiré à partir des petites blessures qu’elles infligent essentiellement aux animaux à sang chaud comme les bétails (bovins, chevaux, cochons), les volailles et occasionnellement les humains. Pour les chauves-souris à écholocation malgaches, elles sont toutes insectivores (Russ et al., 2003).

Méthode de mensuration des chauves-souris

Cette méthode de mensuration est nécessaire pour étudier les différents aspects morphologiques des chauves-souris. Toutes mensurations doivent être exprimées en grammes (g) et en millimètres (mm) (Hutson & Racey, 1999).
Mesures morphométriques : Cette technique consiste à prendre des mesures sur les différentes parties du corps de l’animal. Les mesures usuellement prises et utilisées dans les descriptions des chauves-souris sont : les longueurs de l’avant-bras, de la métacarpe du cinquième doigt, du tibia, du pied (du talon à l’extrémité de la plus longue griffe), de l’oreille, du tragus, de la queue (à partir de l’anus jusqu’à la dernière vertèbre) ainsi que la largeur des feuilles nasales (Peterson et al., 1995 ; Goodman, 1996, 1998, 1999 ; Russ et al., 2003). Les mesures sont prises avec un pied à coulisse (avec 1 ± 0,1 mm d’erreur standard) ou une règle métallique graduée et les valeurs sont notées sur une fiche pro forma pour chaque individu (Ralisata, 2005). Pour les personnes droitières, il est indiqué de contrôler la chauve-souris par la main gauche et les matériels de mesure par la main droite pour une bonne mensuration (Hutson & Racey, 1999). Les clés de détermination établies par Peterson et al. (1995) et Russ et al. (2003) ont été utilisées pour l’identification des espèces.
Pesage : Le poids d’une chauve-souris varie d’un individu à l’autre. Des pesola de 10, 30, 50, 100 ou 300 g sont ainsi utilisés pour les mesures. Au cours du pesage, l’animal est mis dans un sac pré pesé à vide. Le poids d’un individu donné est égal ainsi à la différence du poids total (poids du sac+poids de l’animal) et du poids du sac vide (Hutson & Racey, 1999). Pour chaque individu, les valeurs prises sont aussi notées dans la fiche de mesure.

Etude des activités des chauves-souris à écholocation

L’émission d’une chauve-souris témoigne de son activité. L’activité des chauves-souris est d’habitude donnée par les nombres de passage et de chasse enregistrés pendant une période de temps spécifique (Fenton, 1970). Le passage ou « bat pass » est caractérisé par une séquence de pulsations à rythme régulier et espacé par le même laps de temps, utilisé surtout lorsque les chauves-souris se déplacent ou cherchent la nourriture. La phase de chasse ou « bat feeding » est caractérisée par des pulsations très rapprochées, plus rythmées et répétées, c’est-à-dire : plus la chauve-souris s’approche de la proie, plus elle produit de pulsations pour recevoir l’information à temps. Ces activités sont bien perceptibles aux détecteurs ultrasoniques et elles sont mesurées par le comptage des nombres de passage et de chasse lors de la réécoute (Fenton, 1970 ; Russ, 1999). Les durées (en secondes) de chaque séquence de passage et de chasse sont aussi relevées à l’aide d’un chronomètre et leur somme traduit la durée totale des activités. Les comparaisons des activités entre sites et habitats sont ainsi possibles (Fenton & Bell, 1981). Si ces activités ne permettent pas souvent d’identifier les espèces, les types d’habitats visités et préférés peuvent être identifiés.

Effet de la fragmentation sur les Chauves-souris insectivores

La fragmentation d’habitat est l’un des plus importants processus qui menace la survie de la biodiversité (Ramanamanjato & Ganzhorn, 2001). Comme certaines forêts malgaches (Exemple : la forêt d’Ambohitantely-Ankazobe-Antananarivo), les forêts littorales anosyennes n’échappent pas à ce phénomène de fragmentation. Certains blocs sont isolés les uns des autres et leur taille varie de 1 à 377 ha (Bollen & Donati, 2006).
Depuis les grands blocs à forêt intacte jusqu’aux petits blocs largement dégradés, des degrés de composition variable en Chiroptères ont été rencontrés. Certains auteurs (e.g. Rakotondramanana, 2004) ont mentionné que les fragments qu’ils soient de petite ou de grande taille sont tout autant visités par les communautés de chauves-souris présentes dans un milieu et que leurs activités se régularisent avec la stabilisation progressive des fragments. En général, les blocs de grande taille (S9, M15, M16) abritent plus d’espèces (7 à 8 espèces) par rapport aux petits blocs (3 à 5 espèces pour M6, M13, M20, S8), à cause de la disponibilité des perchoirs (gîtes) et des nourritures, mais peut-être aussi de la forte détection ultrasonique effectuée dans ces blocs. Dans la région d’Ambohitantely, les activités des chauves-souris décroissent avec la surface des fragments(Rakotondramanana, 2004).
Certaines chauves-souris sont uniquement rencontrées dans les grands blocs (H. commersoni, T. rufus, M. aurita et M. goudoti) et pour M. majori, sa fréquence de détection diminue avec la taille du bloc bien qu’il soit présent dans tous les blocs visités. L’utilisation de la forêt par ces espèces paraît ainsi vitale et évidente. En contrepartie, les Molossidae sont plus observés dans les milieux ouverts des petits blocs. L’avantage des petits fragments, pour ces chauves-souris, réside dans la plus grande disponibilité des lisières riches en proies (Rakotondramanana, 2004).
Pour Sainte Luce, l’absence de corridor entre S8, S9 et S17 laisse isoler ces blocs les uns des autres, évidemment pour les espèces résidentes y compris les chauves-souris. De plus, aucune grotte ou autre formation rocheuse, pouvant servir de gîtes, n’est présente aux environs de la zone. A Mandena, bien que les forêts « d’eucalyptus », surtout Melaleuca quinquenervia (Niaouli), soient envahissantes et risquent de dominer la forêt littorale (QMM, 2001), elles peuvent être utilisées comme une sorte de corridor par les chauves-souris, du fait de sa richesse en insectes et de perchoirs de nuit.

Table des matières

INTRODUCTION
I- GENERALITES SUR LES CHAUVES-SOURIS A ECHOLOCATION
I-1- Morphologie
I-2- Classification
I-3- Système d’écholocation
I-4- Habitats et gîtes
I-5- Comportement et cycle de vie
I-6- Régime alimentaire
I-7- Rôles écologiques
I-8- Prédateurs et parasites
I-9- Menaces sur les chauves-souris
II- PERIODE D’ETUDE
III- MILIEU D’ETUDE
III-1- Contexte général sur la Région Anosy
III-2- Présentation du district de Tolagnaro 
III-2-1- Localisation géographique
III-2-2- Milieu naturel
III-2-2-1- Composantes physiques
III-2-2-1-1- Géologie et relief
III-2-2-1-2- Climat
III-2-2-2- Composantes biologiques
III-2-2-2-1- Forêts littorales
III-2-2-2-2- Autres formations végétales
III-2-2-2-3- Faune
III-2-2-2-4- Ecosystème aquatique
III-2-3- Milieu humain
III-3- Zone de Mandena
III-4- Zone de Sainte Luce
IV- METHODOLOGIE
IV-1- Habitats d’étude
IV-1-1- Choix des habitats
IV-1-2- Etude de la structure des habitats
IV-2- Méthode de capture des chauves-souris
IV-2-1- Filet japonais
IV-2-2- Sites de capture
IV-2-3- Extraction et manipulation
IV-2-3-1- Extraction
IV-2-3-2- Manipulation
IV-3- Méthode de mensuration des chauves-souris
IV-3-1- Mesures morphométriques
IV-3-2- Pesage
IV-4- Méthode de détermination du sexe et de l’âge des chauves-souris
IV-4-1- Détermination du sexe
IV-4-2- Détermination de l’âge
IV-5- Méthode de préparation d’un spécimen
IV-6- Méthode d’observation directe
IV-7- Méthode de radio télémétrie ou « radio tracking »
IV-7-1- Principe de la radio télémétrie
IV-7-2- Matériels
IV-7-2-1- Transmetteurs
IV-7-2-2- Radios réceptrices
IV-7-2-3- Antennes
IV-7-2-4- Autres équipements
IV-7-3- Protocole
IV-7-3-1- Choix des individus à marquer et mise en place du transmetteur
IV-7-3-2- Suivi nocturne
IV-7-3-3- Localisation des perchoirs diurnes
IV-7-3-4- Estimation du domaine vital
IV-8- Méthode de détection ultrasonique
IV-8-1- Principe de l’écholocation des chauves-souris
IV-8-2- Détecteurs ultrasoniques
IV-8-2-1- Principe de l’appareil détecteur
IV-8-2-2- Types de détecteurs ultrasoniques
IV-8-2-2-1- Détecteur au mode hétérodyne
IV-8-2-2-2- Diviseur de fréquence
IV-8-2-2-3- Détecteur au mode d’expansion de temps
IV-8-3- Technique de la détection ultrasonique
IV-8-4- Etude des activités des chauves-souris à écholocation
IV-8-5- Etude des sonogrammes des chauves-souris à écholocation
IV-8-5-1- Types d’appels des chauves-souris
IV-8-5-2- Analyse des ultrasons
IV-8-5-2-1- Logiciel d’analyse acoustique « BATSOUND 3.31 »
IV-8-5-2-2- Mesures des paramètres caractéristiques
IV-8-5-3- Identification des espèces par leur écholocation
IV-9- Analyses et traitement des données
IV-9-1- Analyses statistiques
IV-9-1-1- Statistique descriptive (Waite, 2000)
IV-9-1-2- Statistique analytique
IV-9-1-2-1- Test U de Mann-Whitney (Waite, 2000)
IV-9-2- Analyses non statistiques
IV-9-2-1- Effort d’échantillonnage
IV-9-2-1-1- Effort de capture
IV-9-2-1-2- Effort de détection
IV-9-2-2- Fréquence d’occurrence des espèces détectées en acoustique
V- RESULTATS ET INTERPRETATIONS
V-1- Résultats généraux
V-1-1- Liste des espèces recensées
V-1-2- Structure de la végétation
V-2- Résultats des captures
V-2-1- Effort d’échantillonnage
V-2-2- Richesse et abondance spécifique
V-2-2-1- Par sites
V-2-2-2- Par blocs forestiers
V-3- Résultat de l’observation directe
V-4- Résultats de la radio télémétrie
V-4-1- Sites dortoirs de Hipposideros commersoni
V-4-2- Sites d’activités de Hipposideros commersoni
V-4-3- Domaine vital de Hipposideros commersoni
V-5- Résultats de la détection ultrasonique
V-5-1- Effort de détection
V-5-2- Sonogrammes des différentes espèces
V-5-2-1- Sonogrammes des espèces à appels CF
V-5-2-1-1- Sonogrammes de Hipposideros commersoni (Hipposideridae)
V-5-2-1-2- Sonogrammes de Triaenops rufus (Hipposideridae)
V-5-2-1-3- Sonogrammes de Emballonura atrata (Emballonuridae)
V-5-2-2- Sonogrammes de Myzopoda aurita (Myzopodidae)
V-5-2-3- Sonogrammes des espèces à appels FM
V-5-2-4- Sonogrammes des espèces à appels FM/CF
V-5-2-5- Sonogrammes des espèces non identifiées
V-5-2-5-1- Sonogramme des « Autres Vespertilionidae »
V-5-2-5-2- Sonogrammes des Molossidae
a)- Sonogramme des Molossidae A
b)- Sonogramme des Molossidae B
V-5-3- Comparaison des sonogrammes des différentes espèces
V-5-4- Relation entre morphologie et écholocation
V-5-5- Fréquence d’occurrence des espèces par écholocation
V-5-5-1- Par sites
V-5-5-2- Par blocs forestiers
V-5-5-2-1- Zone de Sainte Luce
V-5-5-2-2- Zone de Mandena
V-5-5-3- Par macrohabitats
V-5-6- Activités des Chauves-souris insectivores
V-5-6-1- Par sites
V-5-6-2- Par blocs forestiers
V-5-6-3- Par macrohabitats
V-5-6-4- Par microhabitats
V-5-6-5- Par zones ripicoles et non ripicoles
VI- DISCUSSION
VI-1- Efficacité des méthodes utilisées
VI-2- Diversité spécifique
VI-3- Sélection et utilisation des habitats par les Chauves-souris insectivores
VI-3-1- Macrohabitats et microhabitats
VI-3-2- Zones ripicoles et non ripicoles
VI-3-3- Grotte
VI-4- Radio télémétrie
VI-4-1- Myzopoda aurita
VI-4-2- Hipposideros commersoni
VI-5- Echolocation
VI-5-1- Spécificité
VI-5-2- Fonction de l’habitat
VI-6- Effet de la fragmentation sur les Chauves-souris insectivores
VI-7- Dépendance forestière
VI-8- Conservation
CONCLUSION
RECOMMANDATIONS
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Sites Internet visités
ANNEXES
Hipposideros commersoni
Espèces

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