Evolutions législatives générales et propres à la SRL

L’objectif des deux réformes est d’accroitre l’attractivité de la Belgique grâce à une fiscalité plus favorable et un code des sociétés plus moderne répondant à des exigences en terme de simplicité, flexibilité et compétitivité notamment dans un contexte de mobilité accrue au niveau européen. Avant la grande réforme du CSA, un autre changement apparu fin 2018 avait également pour objectif la simplification et la rationalisation des formes de sociétés. En effet, vous n’aurez plus, si vous êtes titulaire de profession libérale, à constituer de société civile. Cette notion, tout comme celle de société commerciale, a disparu fin 2018 avec la réforme du droit des entreprises pour laisser place dans le Code de droit économique à la notion unique d’entreprise . Chronologiquement la dernière grande réforme est celle du CSA entrée en vigueur le 1er mai 2019. Depuis cette date, toute nouvelle société est régie exclusivement par ce nouveau droit. Quant aux sociétés existantes, elles se voient appliquer toute une série de dispositions impératives depuis le 1er janvier 2020 mais aussi supplétives à condition que ces dernières ne soient pas en contradiction avec les statuts de la société. Toutes les sociétés sont tenues d’adapter leurs statuts au nouveau code d’ici 2024, sans quoi, tous les membres de l’organe de gestion seront personnellement et solidairement responsables des dommages causés à leur société ou à l’égard de tiers.

Introduction du nouveau Code des sociétés & associations

Le CSA est divisé en 19 livres, eux-mêmes divisés en titres . Les livres 1 à 3 traitent des dispositions générales. Les quatre suivants traitent des quatre principales formes de sociétés. La société simple et ses formes spécifiques sont abordées dans le livre 4. Nous nous concentrerons principalement sur le livre 5 qui traite des sociétés à responsabilité limitée et qui semble être celui touché par le plus grand nombre de modifications par rapport à l’ancien Code des sociétés. Le livre 6 traite de la société coopérative et le livre 7 de la société anonyme. Un numéro d’article sera toujours précédé du numéro de livre auquel il se réfère. Cette nouvelle nomenclature permet de distinguer très facilement si la disposition citée concerne une disposition générale ou propre à une forme de société.

Formalités liées à la constitution

Formalités à la constitution
La SRL peut, tout comme le permettait la SPRL, n’être constituée que par une seule personne (article 1:1). L’article 2:5 rappelle que la SRL doit être constituée par acte authentique, devant notaire, à peine de nullité. La société devra également être enregistrée au registre des personnes morales auprès de la Banque-Carrefour des Entreprises (article 2:7). Ces premières étapes représentent un coût de l’ordre de 1 500 à 2 000 euros pour le(s) fondateur(s).

La personnalité juridique
La SRL fait partie, au même titre que la société coopérative (« SC ») et la société anonyme (« SA »), d’une des trois « formes de base » de sociétés dotées de la personnalité juridique. La quatrième forme est la société simple qui, elle, en est dépourvue (Art. 1:5). La société simple peut cependant acquérir la personnalité juridique, et devenir ainsi une société en nom collectif (SNC) ou, s’il y a des associés commanditaires (associés bailleurs de fonds n’intervenant pas dans la gestion de la société), une société en commandite (SComm). La SRL est à nouveau, comme l’était la SPRL, la forme de société la plus sollicitée, et ce encore davantage depuis qu’elle est dépourvue de capital minimum ; nous y reviendrons. La SA, également appelée société de capitaux, à présent seule société avec une exigence minimale de capital, reste réservée aux sociétés d’une certaine envergure où l’identité des actionnaires, potentiellement nombreux, est d’un intérêt accessoire.

Obligations de la société et de ses fondateurs 

L’apport
Ce sont les articles 1:8 à 1:10 qui régissent les apports. Lors de la constitution de la société, les actionnaires de la SRL sont tenus de réaliser un apport en échange duquel ils recevront des actions. Dans le passé ces apports devaient représenter un capital minimum de 18.550 euros. Ce temps est révolu et a vu disparaitre toute exigence en matière de montant minimum de capitaux propres. Les apports peuvent être de trois types : en numéraire, en nature et en industrie. Nous reviendrons plus tard sur les incidences que peut avoir la forme d’apport choisie sur la distribution des bénéfices de l’entreprise. L’apport en numéraire est le plus simple et consiste à verser une somme qui sera affectée aux capitaux propres de la société.

Les montants que les actionnaires se seraient engagés à apporter mais qui ne sont pas libérés devront être listés et communiqués chaque année lors du dépôt des comptes annuels  . Cette liste, en sus des montants restant à libérer, fera apparaitre l’identité de chaque actionnaire, le nombre d’actions souscrites ainsi que le montant des versements effectués. L’apport en nature permet d’allouer des immobilisations corporelles et incorporelles à la société. Ces apports n’ayant pas une valeur indiscutable tel que le numéraire, il faudra faire appel à un réviseur pour contrôler et valider la valeur du ou des biens apporté(s). Cette procédure permet d’éviter tout conflit d’intérêt quant à l’estimation de la valeur du bien apporté. Enfin, l’apport en industrie, forme d’apport en nature auparavant exclue pour la SPRL (et qui l’est toujours pour la SA), est, comme l’indique le code, l’engagement d’effectuer des travaux ou des prestations de services au profit de la société. S’agissant d’une forme d’apport en nature, il faudra ici aussi l’intervention d’un réviseur.

Le quasi apport
Cette notion a disparu du CSA pour les SRL. Elle est en revanche maintenue pour la SA et détaillée dans les articles 7:8 à 7:10. Elle désigne l’opération d’acquisition par la société d’un bien détenu par un administrateur ou un constituant de cette société. Opération qui porte sur un certain montant et serait réalisée dans un délai précis après la constitution. Le fait que cette notion ait disparu pour la SRL n’empêche évidemment pas un administrateur ou actionnaire de la SRL, de céder un bien propre, à la société qu’il gère ou qu’il détient. Le bon sens veut que l’opération soit réalisée dans des conditions de marché normales et exclut tout conflit d’intérêt entre les parties qui donnerait lieu à un avantage financier abusif. Il est donc bon de veiller au respect des règles en matière de conflit d’intérêt sans quoi la responsabilité des administrateurs sera remise en question. Vous retrouverez les précisions sur la procédure en cas de conflit d’intérêt aux articles 5:76 à 5:78 du CSA. L’opération devra notamment être justifiée et détaillée dans un rapport spécial qui sera annexé et déposé en même temps que les comptes annuels.

Le contrôle
L’article 1:14 apporte une nouveauté importante en matière de droit des associés et de contrôle de l’entreprise. Auparavant, en SPRL, la répartition des droits était proportionnelle aux apports de chaque associé (à l’exception des actions sans droit de vote). Avec le nouveau code, cette proportionnalité peut disparaitre, ce qui rend l’attribution des droits beaucoup plus flexible. En vertu des statuts, un associé peut disposer de droits étendus ou à l’inverse ne disposer d’aucun droit, tout comme il pourrait jouir d’une part plus ou moins importante du bénéfice qui ne corresponde pas au nombre d’actions qu’il détient. Cette flexibilité permet donc de paramétrer à la carte les pouvoirs et droits au bénéfice de chaque associé.

Cette flexibilité impose également la présence de nouvelles mentions dans le registre des actionnaires. Ce dernier devra faire apparaitre le nombre total d’actions émises ainsi que les droits de vote et droits aux bénéfices y afférents. La règle de base pour la SRL reste que, sauf disposition statutaire contraire, chaque action donne droit à une part égale du bénéfice (art. 5:41) et que chaque action donne droit à une voix (art. 5:42).

Approbation et publication des comptes annuels
Les dispositions liées à la publication des comptes annuels ne sont pas nouvelles mais sont volontairement mises en avant dans cette section pour sensibiliser au respect de celles-ci. Les comptes annuels tels que décrits à l’article 3:1 doivent être soumis et approuvés par l’assemblée générale dans les six mois de la clôture de l’exercice comptable. Ensuite, ces comptes annuels ainsi que l’ensemble des éléments liés repris à l’article 3:12 doivent être déposés à la Banque nationale de Belgique (BNB) dans les trente jours qui suivent leur approbation et au plus tard sept mois après la date de clôture de l’exercice. Alors qu’une déclaration fiscale et un avertissement extrait de rôle d’une personne physique restent confidentiels et accessibles via le portail de l’administration fiscale uniquement au contribuable concerné et ses éventuels mandataires ((expert-) comptable), les comptes annuels d’une SRL sont consultables, pour peu qu’ils soient déposés, à tout moment et par toute personne via le site de la BNB . Ces obligations, qui concernent tant la forme et le contenu que le délai dans lequel publier, imposent de sortir d’un certain anonymat financier permis par l’exécution d’une activité en personne physique. Outre une publicité dont certains se seraient bien affranchis, notons que la tenue d’une comptabilité en société impose un mode de présentation stricte et plus complet que ce qui est exigé dans le cadre de la tenue de la comptabilité d’une personne physique. Cela engendrera très certainement des frais comptables plus conséquents. Malgré une complexité et une complétude accrues, le délai de publication des comptes annuels (maximum 7 mois à dater de la fin de l’exercice comptable) est plus court que le délai octroyé aux mandataires pour le dépôt des déclarations à l’impôt des personnes physiques , qui lui court jusqu’en octobre de l’année d’imposition. Cette réduction de délai impose une certaine rigueur dans la transmission des éléments permettant d’établir les comptes annuels afin que ces derniers puissent être établis et déposés dans les temps. La publication des comptes annuels dans les délais requis ravira les créanciers, bailleurs de fonds tel un établissement de crédit, qui gardent un œil attentif sur l’évolution de la santé financière des sociétés à qui ils ont octroyé du crédit.

Table des matières

Introduction
1. Situation en Belgique
1.1. Fiscalité de l’indépendant en personne physique
1.2. Motivations principales et incitants à constituer une société
2. Evolutions législatives générales et propres à la SRL
2.1. Introduction du nouveau Code des sociétés & associations
2.1.1. Formalités liées à la constitution
2.1.2. Obligations de la société et de ses fondateurs
2.1.3. La SRL avec le statut de petite société au sens de l’article 1:24
2.1.4. Changements majeurs d’ordre financier pour la SRL
2.1.5. Conditions de maintien du patrimoine de la société
2.2. Réforme de l’ISOC pour les PME
2.2.1. Diminution des taux d’imposition
2.2.2. Versements anticipés
2.2.3. Requalification des intérêts d’avances
3. Rémunération du capital
3.1. Dividende ordinaire
3.2. VVPR-bis
3.3. Réserve de liquidation
3.4. Quel régime privilégier en terme de distribution pour l’actionnaire d’une nouvelle SRL avec le statut de petite société ?
3.4.1. Le statut de petite société
3.4.2. Le facteur temps
3.4.3. L’incertitude liée au futur
3.4.4. L’importance de l’apport
4. Reprise de parts d’une SRL existante
4.1. Profil de l’entreprise
4.2. Eléments juridiques et fiscaux à considérer par les repreneurs dans le cadre de la reprise
Conclusion

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