Géométrie et structures de la bande minéralisée de Setolazar-Bokoya

Géométrie et structures de la bande minéralisée de Setolazar-Bokoya

Travaux historiques et coupe proposée La bande minéralisée de Setolazar-Bokoya a été étudiée dans son ensemble par RHODEN & ERENO (1962), puis plus spécifiquement au niveau de Bokoya par DUFLOT et al. (1984). Il n’existe pas de carte minière pour l’exploitation proche du village de Setolazar, pour laquelle nous avons produit une coupe basée sur nos observations de terrain (Figure 8.2).

Observations de terrain

Expressions de la minéralisation

 L’exploitation de Setolazar s.s., à l’extrême nord de la bande minéralisée de SetolazarBokoya, en représente un bon échantillon à petite échelle de la géométrie et des structures (Figure 8.3 A). On y voit immédiatement que le minerai est contrôlé directement par la stratigraphie : la séquence sédimentaire débute par des schistes argentés, surmontés de cette bande minéralisée (environ 30 m) qui est elle-même coiffée d’une barre carbonatée. Le minerai consiste en une alternance de bancs à magnétite massive riches en pyrite et de bancs verdâtres silicatés pouvant correspondre à de l’exoskarn (Figure 8.3 B et C). Ces alternances ne sont pas régulières : les bancs sont épais de 1 à 20 cm et jusqu’à 50 cm, ceux à magnétite se révélant généralement plus épais que leurs semblables silicatés. Cette configuration plaide pour le remplacement préférentiel d’une lithologie particulière de la série stratigraphique. Ce protolithe était probablement déjà composé d’alternances : le remplacement sélectif des niveaux calcareux aurait ainsi produit les bancs à magnétite, expliquant l’allure du minerai (Figure 8.3 D). Un protolithe possible, niveau alternant des bancs carbonatés emballés dans une matrice schisteuse, se trouve sur une crête entre les bandes minéralisées d’Axara et de Setolazar-Bokoya (Figure 8.3 E). Par ailleurs, quelques veines à grenats se propagent depuis la bande minéralisée jusque dans les schistes sous-jacents. De la même façon, les carbonates au toit montrent une minéralisation disséminée, devenant au contact du minerai des grenatites massives d’ordre métrique, comme cela a déjà été observé par RHODEN & ERENO (1962). L’exploitation de Bokoya, située cette fois à l’extrême sud de la bande minéralisée, reprend la même logique en plus démonstratif. Le banc minéralisé y atteint en effet jusqu’à 50 m d’épaisseur (Figure 8.4 B) et le minerai y semble moins oxydé qu’à Setolazar s.s.. De même, les alternances peuvent y dépasser l’épaisseur du mètre (Figure 8.4 C). Entre ces deux gisements, une petite exploitation (probablement le « Zona 1 » de RHODEN & ERENO, 1962) se révèle différente (Figure 8.5 A). La minéralisation n’y est pas portée par un banc stratigraphique continu. En effet, elle remplace un niveau carbonaté au sein des schistes, produisant un banc de magnétite massive riche en pyrite dont l’extension se poursuit sous la forme d’une lentille stratiforme (Figure 8.5 B). Une autre lentille de magnétite massive forme un septa dans une intrusion magmatique voisine. Au contact avec la magnétite massive, les schistes peuvent être imprégnés d’hématite et prendre une couleur verdâtre. 

Pertubations ultérieures

 Dans le gisement de Setolazar-Bokoya, la bande minéralisée est recoupée par de nombreuses intrusions magmatiques d’épaisseur métrique à plurimétrique, de texture lavique et par ailleurs très altérées. Des failles méridiennes à pendage ouest réutilisent les épontes figées de ces intrusions, ce qui se traduit parfois par des brèches remaniant des blocs magmatiques (Figure 8.3 B, F et G). Ces failles, qui peuvent présenter des conjuguées, occasionnent des microplissements sous forme de crochons dans les alternances du banc minéralisé (Figure 8.3 H). Les intrusions magmatiques recoupent le minerai sous forme de dyke avant de se conformer à la stratigraphie du banc minéralisé (Figure 8.3 I) ; leur bordure se révèle parfois magnétitisée (Figure 8.3 J). Le site intermédiaire de Zona 1 se trouve au cœur d’un réseau de failles normales d’orientation N12, 70 W (Figure 8.5 C). L’intrusion magmatique présente un mur abrupt faillé, et un toit plus diffus. Le septa est intégré au niveau du conduit vertical de l’intrusion lors de son ascension, avant que celle-ci ne s’étale en sill sous la crête.

Interprétation de la structure du gisement de Setolazar-Bokoya 

L’existence d’une bande minéralisée continue et concordante avec la stratigraphie locale témoigne du contrôle lithologique fort du minerai à Setolazar-Bokoya. Par ailleurs, les roches magmatiques du secteur, bien qu’altérées, sont clairement postérieures à l’évènement minéralisateur (remobilisations ferrugineuses en bordure) et l’on n’y trouve nulle trace d’un stockwerk. En l’absence d’intrusion semblant minéralisatrice, les roches magmatiques sont cependant nombreuses et malgré tout systématiquement présentes à proximité du minerai (Figure 8.4 A). L’ensemble de ces caractères semblent favoriser une minéralisation diffusive via la circulation de fluides au sein d’un protolithe dont la perméabilité augmente du fait des alternances. Bien que postérieures au banc minéralisé, les intrusions magmatiques semblent contrôler ces circulations hydrothermales, sans doute en y apportant la chaleur nécessaire. L’épaisseur de ce banc minéralisé suggère par ailleurs l’ampleur de ces circulations, qui ont dû se poursuivre après le dépôt des minéralisations, ainsi que le montrent l’état d’altération des intrusions et l’oxydation des bancs de magnétite. 

Paragenèse de la bande minéralisée de Setolazar-Bokoya 

Le banc minéralisé de Setolazar-Bokoya est constitué d’alternances décimétriques de niveaux à magnétite massive et de niveaux skarnoïdes. L’examen des alternances skarnoïdes de la bande minéralisée montre une absence quasi-totale des pyroxènes. L’altération, oxydante, est cependant très intense sur le site, au point que peu de grenats sont eux-mêmes préservés ; au hasard des échantillons, ils présentent néanmoins plusieurs stades d’évolution, et constituent ainsi une parfaite illustration de la métasomatose et de sa rétromorphose intense subie dans le secteur. L’observation de l’évolution des grenats est donc essentielle pour dresser la séquence paragénétique de la bande minéralisée de Setolazar, qui se résume ainsi : 

La phase prograde

 Des silicates anhydres de la phase prograde ont été observés au contact avec un banc de magnétite massive au niveau du site Zona 1 (Figure 8.5 B). La présence d’apatites, d’amphiboles chloritisées et de feldspaths dans le fond de roche semblent montrer qu’il s’agit d’un endoskarn (Figure 8.7 A). Les grenats y sont largement dominants, fréquemment Chapitre 8 – La bande minéralisée de Setolazar-Bokoya 158 associés à des baguettes d’hématite. Ils peuvent croître à partir de feldspaths ou d’amphiboles (Figure 8.7 B) et les plus gros marquent parfois une zonation à cœur rosé isotrope et bordure verdâtre anisotrope. Les pyroxènes, plus rares et généralement plus petits, sont intercroissants avec les grenats, ce qui traduit leur synchronisme au sein de la séquence paragénétique. Certains semblent être des giga-structures poecilithiques. Si l’endoskarnisation est pervasive, on y trouve néanmoins des veines grenatitiques massives (environ 500 µm d’épaisseur) ; on peut imaginer que l’endoskarnisation se propage à partir de ces veinules. Comme il a été observé sur le terrain, des veines métasomatiques d’épaisseur centimétrique s’échappent localement de la bande minéralisée à Setolazar s.s. pour parcourir les schistes sous-jacents. Cette diffusion fissurale a permis de préserver des grenats au stade initial. Ces grenats fissuraux, plurimillimétriques, montrent une zonation cœur-bordure très nette : si le cœur est rosé et isotrope, la bordure prend des teintes plus jaunes-verdâtres et anisotrope (Figure 8.7 C). La plupart des cœurs montrent en outre une zone d’oxydation, et les cristaux peuvent également être fissurés par des carbonates et des oxydes. Hormis les grenats, les veines, dont la matrice est carbonatée, comprennent également des baguettes d’hématite. Localement, la concentration de grenats au sein de grenatites a également permis de mieux les préserver. Ces grenatites remplacent probablement d’anciens bancs plus épais de la lithologie originelle, mais forment également un remplacement métrique dans la barre carbonatée sommitale. Les grenats s’y révèlent plus petits (de l’ordre de 100 µm) et plus globuleux, et souvent peu ou pas zonés. L’oxydation des cœurs est toujours présente. Le fond de la roche est une fois encore carbonaté, et l’hématite primaire intègre des morceaux de grenats lors de sa croissance (Figure 8.7 D). Dans les alternances skarnoïdes plus réduites, l’ensemble des minéraux forme un rubanement la plupart du temps rétromorphosé. On y retrouve des niveaux à grenats, rosés et isotropes. 

La minéralisation

 Dans l’endoskarn, la minéralisation est assez peu exprimée. Les oxydes y sont en effet essentiellement représentés par de petites magnétites trapues au niveau des minéraux ferromagnésiens, ainsi que par une magnétitisation de l’hématite fibreuse primaire. Au niveau de la bande minéralisée, l’étude des bancs ferrugineux montre un envahissement pervasif par un ensemble de petits cristaux trapus de magnétite (généralement inférieurs à 100 µm) bien individualisés et formant donc une masse relativement poreuse baignant dans un fond carbonaté. On y retrouve parfois des cristaux de magnétite plus gros (environ 200 µm) et légèrement zonés. Si l’on se penche sur les niveaux silicatés, plusieurs évidences montrent qu’au stade minéralisateur une magnétisation progressive s’y opère. Ainsi, au contact avec les alternances ferrugineuses, des bancs de grenats sont complètement transformés en magnétite et carbonates (Figure 8.7 E). Au sein même des skarnoïdes, des veines carbonatées bordées de cristaux de magnétite automorphes (100 µm d’épaisseur en moyenne) parcourent la roche tout en respectant son rubanement primaire (Figure 8.7 F). Dans les niveaux où la magnétitisation est la plus avancée, de plus petits cristaux de magnétite (inférieurs à 50 µm) sont disséminés dans tout le fond de la roche (Figure 8.7 G). Ils forment également des couronnes autour des grenats isolés, complètement remplacés par la phase rétrograde à calcite-chlorite-pyrite. Sur les quelques rubans continus de grenats préservés, il est en revanche possible d’y voir latéralement la magnétite les remplacer (Figure 8.7 H et I). 8.2.3 La phase rétrograde L’endoskarn a été relativement épargné par la phase rétrograde. On n’y retrouve guère que de l’épidote comme silicate hydraté, souvent en amas dans le fond de roche. Pour ce qui est des minéraux métalliques, la pyrite est parfois présente, souvent associée aux grenats. Dans l’exoskarn en revanche, la phase rétrograde est très pervasive. L’association chlorite-calcite est omniprésente et se retrouve aussi bien dans les cavités nombreuses laissées dans le minerai des niveaux ferrugineux, qu’en rubans dans les niveaux skarnoïdes dont elle peut complètement occulter la lithologie initiale (Figure 8.7 G). La chlorite (chamosite) est rarement isolée dans la calcite, mais plutôt présente en bordure des cristaux de magnétite automorphe. Dans les niveaux les mieux préservés de la phase rétrograde, on retrouve beaucoup de biotite. La pyrite de l’exoskarn est généralement fissurale, entraînant alors des cristaux subautomorphes de magnétite (Figure 8.7 J), ou encore en mouches au cœur des grenats complètement rétromorphosés (Figure 8.7 K et L). Lorsque les grenats sont préservés, elle y est très fréquemment associée. La pyrite se retrouve également en intercroissance avec les titanites. Ce fond pervasif à pyrite-calcite-chlorite dominant est lui-même recoupé d’une nouvelle phase fissurale à calcite qui contient des fibres d’hématite (Figure 8.7 M), mais également quelques cristaux isolés d’épidote ou de titanite. La phase de rétromorphose et l’oxydation supergène se traduisent par une hématisation intense des cristaux de magnétite à l’échelle de la bande minéralisée.

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