Historique du concept de mémoire

Historique du concept de mémoire

Dans le sens commun, la mémoire est l’aptitude à conserver et à restituer des choses passées. C’est une représentation sous une forme mentale, du dispositif permettant de stocker des informations. La mémoire désigne à la fois la capacité d’un individu ou d’un groupe humain de se souvenir de faits passés et ce souvenir lui-même. Mémoriser implique donc à la fois une capacité d’apprentissage, de stockage, et de restitution de l’information apprise. La mémoire a longtemps été considérée comme l’une des facultés principales de l’esprit humain, et réservée à l’homme. René Descartes s’intéressa aux moyens d’accéder à la connaissance dans son ouvrage « Les Règles pour la Direction de l’Esprit ». Il s’agit d’une œuvre inachevée où il expose les règles qui selon lui permettent de diriger l’esprit. Elles sont au nombre de 21, et mentionnent à plusieurs reprises la mémoire. C’est avant tout une des ressources de l’intelligence humaine qui, au même titre que l’imagination, l’intuition et la déduction, se doit d’être travaillée pour accéder à la connaissance. « Enfin il faut se servir de toutes les ressources de l’intelligence, de l’imagination, des sens, de la mémoire, pour avoir une intuition distincte des propositions simples, pour comparer convenablement ce qu’on cherche avec ce qu’on connoît, et pour trouver les choses qui doivent être ainsi comparées entre elles ; en un mot on ne doit négliger aucun des moyens dont l’homme est pourvu. »

Bergson ou le problème du corps et de l’esprit

À la fin du XIXe siècle, Bergson s’interrogeait sur la dualité du corps et de l’esprit et traite de la question de la mémoire. Bien que ce problème existe presque depuis l’origine de la philosophie (Platon, Aristote…), Bergson en a fait une question centrale, voir fondamentale de la philosophie de l’esprit. Dans son ouvrage « Matière et Mémoire » de 1896, il explore les fonctions du cerveau et entreprend une analyse de la perception et de la mémoire et propose des considérations sur les problèmes de la relation entre l’esprit et le corps. Pour Bergson l’analyse de la mémoire est un moyen de trancher ce problème entre processus mentaux et corporels. Il considère alors que la mémoire est profondément spirituelle, et que le cerveau ne se contente que d’orienter la mémoire vers l’action présente. Le cerveau insère des souvenirs dans le présent en vue de l’action. Le cerveau n’a alors qu’une fonction pratique tandis que le corps est le centre de l’action. Pour Bergson, les lésions du cerveau n’abîment pas le souvenir, ni la mémoire, mais perturbent la fonction pratique du cerveau. Les souvenirs ne peuvent dès lors plus être « incarnés » par l’action. Ils existent toujours, mais ils sont impuissants. En effet, le cerveau ne remplit plus sa fonction, on ne peut donc pas utiliser ces souvenirs.

Dans son ouvrage « Essai sur la relation du corps à l’esprit », Bergson analyse le problème classique de l’union de l’âme et du corps. Ce livre est écrit en réaction à « Maladies de la mémoire » de Théodule Ribot, paru en 1881. Ce dernier soutient que la science du cerveau prouve que le souvenir est logé dans une partie du système nerveux. Le souvenir serait localisé dans le cerveau, il serait donc matériel. Bergson s’oppose à cette réduction de l’esprit à la matière. Néanmoins en cette fin de XIXe siècle, les chercheurs Ribot et William James spécialisés en biochimie furent les premiers à tenter de déterminer en laboratoire de manière scientifique quels étaient les supports de la mémoire. Ils furent en cela très influencés par la théorie de la mémoire organique. Les origines du concept de mémoire organique datent du XVIIIe siècle. Pour Maupertuis par exemple, les semences sont faites de particules provenant de tout le corps (théorie de la pangénèse), et possèdent entre elles certaines affinités. Ainsi le développement d’un fœtus est le résultat de l’attraction de certaines particules. Pour Maupertuis, ces molécules sont dotées de propriétés psychiques, conservant en elle le souvenir de leur situation. Elles savent en elles ce qu’elles doivent faire (Maupertuis, Système de la Nature, 1754).

 

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