Influence des facteurs physiographiques des bassins versants sur les débits de crues et d’ inondations

Analyse des facteurs de la variabilité et des changements climatiques sur les crues et les inondations au Québec méridional

En raison des conditions climatiques du Québec, il faut tout d’abord mentionner que les crues et les inondations surviennent au printemps en raison de la fonte de neige et/ou des pluies (crues nivo-pluviales), en été et en automne lors des chutes importantes de pluies (p. ex., Buttle et al., 2016). Au printemps, l’intensité des crues et les désastres qui peuvent en découler peuvent être aggravés par des embâcles de glace. En ce qui concerne la variabilité du climat, il existe encore très peu de travaux sur l’influence des indices climatiques sur la variabilité spatio-temporelle des débits d’inondations et des crues au Québec. Assani et al. (2010) ont analysé la variabilité interannuelle des débits maximums journaliers annuels de 15 rivières du Québec méridional pendant la période 1934-2000 en relation avec six indices climatiques. Rappelons que ces débits surviennent principalement au printemps au moment de la fonte de neige. Après avoir regroupé ces 15 rivières en trois régions hydrologiques homogènes au moyen de l’analyse en composantes principales, en ce qui concerne la tendance à long terme, ils ont observé une hausse significative de la magnitude des débits maximums journaliers annuels seulement des affluents du fleuve Saint-Laurent situés en en rive nord. Quant au lien entre ces débits et les indices climatiques, ils étaient significativement corrélés négativement à l’Oscillation atlantique multi-Décennale (AMO) alors que les débits des affluents de la rive sud ont été corrélés respectivement aux Oscillations australe (ENSO) et arctique (AO) au nord et au sud du 47°N. Ces résultats ont été confirmés par Mazouz et al. (2012, 2013).

Dans une étude récente, Assani (2017) a observé une corrélation significative positive entre la magnitude des débits maximums des crues printanières de deux rivières (Matawin et L’Assomption) de la rive nord et les indices hivernaux de l’Oscillation australe associés aux épisodes d’intensité modérée et forte de La Nina. Sur la base de ces résultats, il a suggéré que les fortes crues printanières sont généralement associées aux épisodes La Nina dans les deux bassins versants. Par ailleurs, Assani et al. (20 Il) ont analysé la tendance à long terme des débits maximums journaliers générés par les pluies en été et en automne en relation avec les indices climatiques dans 18 bassins versants du Québec méridional en s’appuyant sur les mêmes méthodes statistiques d’analyse, ils ont observé une hausse significative de la magnitude de ces débits seulement en rive nord. Ces débits étaient corrélés négativement à l’Oscillation atlantique multidécennale (OAM).

En revanche, les débits de rivières situées au sud du 47°N en rive sud étaient corrélés à l’Oscillation arctique (OA) et ceux des rivières situées au nord de ce parallèle l’ étaient à l’Oscillation australe (OAU). L’analyse des débits maximums de crues hivernales a révélé une hausse quasi généralisée de leur magnitude et leur occurrence précoce depuis la décennie 1970 à l’ échelle du Québec (Beauchamp et al., 2015). La magnitude de ces débits était principalement corrélée à l’ Oscillation pacifique décennale (OPD) et leur période d’occurrence à l’ Oscillation nord-atlantique (ONA). En ce qui concerne le fleuve Saint-Laurent, l’analyse de la tendance à long terme des débits maximums journaliers mensuels en relation avec les indices climatiques pendant la période 1912-2010 a révélé une diminution significative de la magnitude de ces débits principalement en hiver et au printemps après 1980 en raison probablement de la diminution de la quantité de neige observée depuis la décennie 1980. Ces débits étaient significativement corrélés à l’Oscillation atlantique multidécennale (Assani et al, 2014a, 2014b).

Les conditions météorologiques de genèse de quelques graves inondations ont été analysées profondément dans le cas du déluge de Saguenay, les inondations de la Rivière-au-Renard et celles de la rivière Richelieu. Dans le cas du déluge de Saguenay, de nombreux rapports et articles scientifiques ont été publiés. En résumé, ce déluge a été provoqué par l’occurrence d’une tempête tropicale stationnaire (qui se déplace très lentement) au-dessus de la réserve faunique des Laurentides. La tempête a ainsi déversé plus de 250 mm en 50 heures dans la région. Cette quantité importante d’eau est tombée sur un sol déjà gorgé d’eau de pluies tombées du premier au l7 juillet 1996. Par conséquent, l’ infiltration étant devenue quasi nulle, toute l’eau de pluie apportée par la tempête a ruisselé provoquant ainsi un véritable déluge (Tremblay, 2005). Quant à l’ inondation de la Rivière-au-Renard, la région a reçu pas moins de 110 mm de pluies en douze heures dans la nuit du 8 au 9 août 2007. Ces fortes pluies ont été accompagnées par une grande marée et de forts vents provenant de l’Océan. Cette situation a entraîné la pénétration des eaux de marée dans la rivière aggravant ainsi le débordement des eaux de la rivière en amont (OSCQ, 2008). Enfin, en ce qui concerne les inondations de la rivière Richelieu survenues au printemps 2011 , elles résultent des conditions hydrométéorologiques en hiver et au printemps (Saad et al., 2014, 2016). De fait, en hiver, on a enregistré des chutes exceptionnelles de neige dans le bassin versant. Au printemps, la fonte de cette quantité de neige fut très rapide en raison de l’élévation rapide des températures et de la chute importante de pluies. Ces conditions furent accompagnées de vents du sud dans la vallée du lac Champlain.

Impacts anthropiques sur les crues et les inondations au Québec méridional Ce sujet a déjà fait l’objet de plusieurs travaux. En ce qui concerne les barrages, plusieurs travaux ont démontré que le mode de gestion caractérisé par l’inversion du cycle naturel annuel des débits a entraîné une baisse significative de la magnitude des débits et une occurrence des débits de crues en hiver plutôt que durant les trois autres saisons comme c’est le cas en rivières naturelles. Les autres modes de gestion ont peu affecté les deux caractéristiques de crues (p. ex., Assani, 2016; 2017; Assani et al., 2006). Quant à l’agriculture et à la déforestation, plusieurs travaux ont démontré que cette activité affectait peu la magnitude des débits de crues et d’inondations (Assani, 2016a, 2016b, 2017; Assani et al., 2002, 2006, 2016; Fortier et al., 2010; Landry et al., 2013; Muma et al., 20 Il; Saint-Hilaire et al., 2016) même dans un contexte de changements climatiques (Quilbé et al., 2010) contrairement aux débits minimums journaliers. Toutefois, en comparant deux bassins versants contigus dont l’un est agricole (Bassin versant de la rivière L’Assomption) et l’autre entièrement forestier (Bassin versant de la rivière Matawin), on a observé que la magnitude des débits de crues (exprimée en débits spécifiques) était plus élevée dans le premier bassin versant que dans le second en raison d’un ruissellement plus important (Assani et al., 2016, 2017). Quant aux impacts de l’urbanisation, à notre connaissance, aucune étude n’a été encore réalisée au Québec spécifiquement sur l’influence de ce facteur sur les débits de crues et des inondations même si la ville de Montréal avait connu un déluge le 14 juillet 1987 à la suite des pluies diluviennes. Si on se réfère à une vaste étude menée aux États-Unis réalisée sur de nombreux bassins versants (Poff et al., 2006), l’urbanisation peut entraîner une hausse ou une baisse de l’intensité (magnitude) et de la fréquence des débits de crues dépendamment des régions.

La théorie de géométrie hydraulique à une seule station (AGH)

À la suite des travaux de Leopold et Maddock (1953), de nombreux travaux ont été consacrés à la vérification empirique des relations établies par ces auteurs dans des différents sites et milieux physiographiques (Gleason, 2015). Les résultats de ces recherches ont été compi lés séparément par Park (1977) et Rhodes (1977, 1978, 1987), qui ont introduit indépendamment le diagramme triangulaire b-f-m pour montrer la dispersion des valeurs calculées à partir des données mesurées sur le terrain. En représentant les valeurs de ces trois exposants dans le diagramme triangulaire, les sections transversales des chenaux peuvent être placées dans un contexte l’un de l’autre pour expliquer comment ces exposants sont reliés à travers les différentes rivières des milieux différents. Park et Rhodes ont observé une corrélation entre les rivières en fonction des valeurs de leurs exposants. Park a regroupé les données sur la base des ruptures naturelles entre les exposants et Rhodes l’avait fait sur la base de la classification de rivières.

Malgré cette différence dans la classification et le regroupement des valeurs des exposants, les deux auteurs ont conclu que les exposants des équations de la géométrie hydraulique à une station montraient une faible similitude à travers les rivières ou les milieux physiographiques. Selon Park, ces résultats jettent un doute sur l’utilisation des valeurs moyennes des valeurs des exposants des échantillons pour caractériser la géométrie hydraulique d’une région particulière. Cette conclusion diffère significativement de celle de Leopold et Maddock (1953) qui ont regroupé leurs données d’observation limitées et ont trouvé que les rivières ayant des classifications similaires avaient des exposants des valeurs similaires. Ils ont conclu logiquement qu ‘une valeur moyenne de ces exposants était suffisante pour décrire un système de rivières ou une région. Par ailleurs, Knighton (1975) avait observé que les valeurs des exposants évoluent avec le temps qui se traduit par le changement de la pente des équations à l’intérieur des données mesurées à long terme. Ce changement dans le temps des valeurs des exposants suggèrent que la théorie AHG telle qu’elle a été formulée par Leopold et Maddock ne raconte pas toute l’histoire de la géométrie du chenal et de celle de l’hydraulique de l’écoulement. Par ailleurs, quant à Harlin (1984) et Park (1977), ils ont démontré que les valeurs de ces exposants ne sont pas non plus constantes dans l’espace.

Table des matières

COMITÉ DÉVALUATION
REMERCIEMENTS
RÉSUMÉ
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
CHAPITRE 1 CONTEXTE DE LA RECHERCHE À L’ÉCHELLE DU QUÉBEC
1.1 Introduction
1.2 Analyse des facteurs de la variabilité et des changements climatiques sur les crues et les inondations au Québec méridional
1.3 Estimation des débits de crues et d’inondations au Québec méridional
1.4 Impacts anthropiques sur les crues et les inondations au Québec méridional
1.5 Influence des facteurs physiographiques des bassins versants sur les débits de crues et d’ inondations
1.6 Influence des caractéristiques morphologiques des chenaux sur les débits de crues et d,m· on dah’ ons au Q ue’ b ec me »n d’l ona
CHAPITRE II CADRE THÉORIQUE, PROBLÉMA TIQUE ET OBJECTIFS DE LA RECHERCHE
2.1 Énoncé et objectif de la théorie de la géométrie hydraulique (GH)
2.1.1 La théorie de géométrie hydraulique à une seule station (AGH)
2.1.2 La théorie de la géométrie hydraulique longitudinale (DGH)
2.1.3 La théorie de la géométrie hydraulique à de nombreuses stations (AMHG
2.2 Apports de la théorie de la géométrie hydraulique
2.3 Étude de la largeur des chenaux dans le cadre de la théorie de la géométrie hydraulique
2.4 Étude de la sinuosité dans le cadre de la théorie hydraulique
2.5 Problématiques, objectifs et originalité de l’étude
CHAPITRE III MÉTHODOLOGIE
3.1 Description de la région d’étude et justification du choix des stations analysées
3.2 Description des variables analysées
3.2.1 Les variables hydrologiques
3.2.2 Les variables physiographiques
3.2.2.1 Analyse cartographique
3.2.3 Calcul de la sinuosité
3.3 Analyses statistiques des données
3.3.1 Méthode d’analyse de la variabilité longitudinale de la moyenne de
la largeur à plein bord
3.3.2 Analyse de la relation entre les variables morphologiques (largeur à
plein bord et sinuosité et les variables indépendantes
CHAPITRE IV RÉSULTATS
4.1 Variabilité longitudinale des largeurs à plein bord
4.2 Comparaison des moyennes de la sinuosité des trois régions physiographiques
4.3 Relation entre les facteurs physio-climatiques et les variables morphologiques
4.4 Analyse de régressions
4.4.1 Largeur à plein bord
4.4.2 Sinuosité
4.5 Comparaison avec les données des autres régions du monde
4.6 Un exemple d’application de la théorie de la géométrique hydraulique:estimation des moyennes de la largeur à plein bord en aval des barrages
4.7 Discussion
CHAPITRE V CONCLUSION
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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