Intérêt du suivi de la déplétion lymphocytaire B chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde

Physiopathologie de la PR

Facteurs déclenchants : Plusieurs mécanismes pouvant amener au développement de la PR ont été découverts. Tous contribuent à une réaction inflammatoire au sein de l’articulation qui va s’amplifier avec pour conséquence une atteinte structurale et une dégradation du cartilage et de l’os.
Les mécanismes déclenchant ce processus inflammatoire, bien que encore non complètement compris, laissent supposer que le développement de la PR est la résultante d’une interaction entre le profil génétique des patients et leur environnement quotidien, entraînant une anomalie de la réponse immunitaire et le déclenchement d’une réaction inflammatoire incontrôlée.
Les études de prévalence intrafamiliale ou entre jumeaux ont permis de montrer que la contribution génétique est de l’ordre de 50% à 60% dans le développement d’une PR . Au plan génotypique, plus de 80% des patients sont porteur de l’allèle HLA-DRB1*04 .
D’autres facteurs de risques génétiques ont été identifiés (plus de 30 de ces gènes n’appartenant pas au CMH ont été identifiés ), tels que PTPN 22, PADI4, STAT4, TRAF1- C5 et TNFAIP3, les 2 premiers ayant été mis évidence dans la cohorte VErA . Ils ne sont pas tous encore validés et leur prévalence individuelle est évidemment beaucoup plus faible chez les patients, puisque la présence simultanément de tous ces facteurs n’est pas nécessaire pour conduire à la PR . Les facteurs environnementaux sont encore aujourd’hui mal connus. Toutefois, le tabagisme actif est aujourd’hui un facteur de risque clairement identifié , même si il n’a pas encore été possible de déterminer quel composant de la cigarette est à l’origine de ce sur-risque. En revanche il semble exister un effet dose-dépendant avec un risque augmentant de façon linéaire en fonction du nombre de paquet/année fumé par les patients . Outre le tabagisme actif d’autres facteurs environnementaux ont été décrits mais leur corrélation est moins affirmée. On retrouve ainsi le sexe féminin, la notion de périodontite chronique,  l’obésité et un niveau socio-économique bas .

La destruction articulaire

La synovite inflammatoire est l’acteur principal de la destruction articulaire qui intervient au cours de la PR. Le cartilage est altéré par la production de métalloprotéinases (MMP) par les fibroblastes synoviaux. Ces MMP détruisent le maillage de collagène de type II induisant directement une modification biomécanique du cartilage qui s’altère. La MMP principalement mise en évidence dans ce processus est la MMP 14 .
L’érosion osseuse qui apparaît dans les 3 années qui suivent l’apparition de la PR chez 90% des patient est la conséquence de cet état inflammatoire intrasynovial prolongé. L’activation des ostéoclastes est la résultante directe de la production des cytokines pro-inflammatoires au sein de la synoviale. L’acteur majeur de l’ostéoclastogénèse est le RANKL. Le RANKL est une cytokine de la famille du TNF et joue un rôle majeur dans la résorption osseuse en tant que cytokine nécessaire à la différenciation des ostéoblastes en ostéoclastes et au maintien de la survie de ces derniers. Les principales cellules sécrétrices de RANKL sont les ostéoblastes mais d’autres cellules actrices de l’inflammation dans la PR, telles que les synoviocytes, les LT activés, les LB matures produisent elles aussi du RANKL . Enfin la synthèse de RANKL est majorée par la présence de l’hormone parathyroïdienne, la vitamine D et surtout les cytokines pro-inflammatoires telles que l’IL-1, l’IL-6, l’IL-17 et le TNFc .
Le TNFc, outre son effet inducteur de sécrétion de RANKL pourrait agir directement sur les précurseurs ostéoclastiques, ce rôle restant encore débattu . En revanche il est maintenant établi qu’il permet la survie des ostéoclastes matures .
Les autres cytokines pro-inflammatoires IL-1, IL-6 et IL-17 interviennent elles aussi dans l’activation des précurseurs ostéoclastiques et dans la survie des ostéoclastes matures induisant donc un déséquilibre de la balance osseuse en faveur de la destruction .

Maturation du lymphocyte B

Le lymphocyte B (LB) est issu d’un précurseur hématopoïétique pluripotent pouvant se différencier soit en lymphocyte T soit en lymphocyte B. La maturation des LB commence au cours de la vie fœtale dans le foie puis se poursuit tout au long de la vie adulte dans la moelle osseuse. La caractéristique principale du lymphocyte B est la présence à sa surface d’un récepteur membranaire (BCR), de structure type immunoglobuline, capable de reconnaître un antigène différent pour chaque LB. Ces immunoglobulines sont des hétérodimères composés de 2 chaînes lourdes H (heavy) et de 2 chaînes légères L (light).
Chaque chaîne est constituée d’une région constante et d’une région variable. En ce qui concerne la diversité du BCR qui permet à chaque LB de reconnaître un antigène différent, il faut rappeler que les gènes codant pour les chaînes lourdes du BCR sont situés sur le chromosome 14 et sont divisés en 3 groupes de gènes, le groupe V pour variable, le groupe D pour diversité et le groupe J pour jonction, enfin 9 gènes codent les régions constantes des différentes classes et sous-classes d’immunoglobulines. Les gènes des chaînes légères sont constitués de 2 segments V et J et se situent sur le chromosome 2 pour les chaînes m et sur le chromosome 22 pour les chaînes. La diversité du BCR est donc assurée par 2 mécanismes de réarrangement. D’une part le mécanisme combinatoire qui consiste à générer une région variable par l’association d’un segment J avec un segment D et un segment V créant un exon VDJ pour la chaîne lourde et un exon VJ pour la chaîne légère. Le grand nombre de segments V, D et J existant ainsi que la multitude de combinaisons possibles permettent donc une grande diversité combinatoire. L’autre mécanisme de diversité est jonctionnel, en effet à chaque recombinaison il existe un phénomène de réparation de l’ADN dans les zones de jonction, ce phénomène étant parfois imparfait il se créé ainsi une variabilité supplémentaire. Outre leur rôle bien établi de sécréteurs d’anticorps, les lymphocytes B régulent et participent à de nombreuses autres fonctions essentielles à l’homéostasie immunitaire. Les LB participent à l’activation de la réponse immunitaire T par la présentation antigénique. Après reconnaissance d’un antigène par son BCR le lymphocyte B peut jouer le rôle de cellule présentatrice de l’antigène pour le lymphocyte T permettant ainsi son activation. En effet dans différents modèles il est retrouvé que la réponse T est altérée en cas de déplétion lymphocytaire B ou de lymphocyte B sans BCR de surface.
Les LB sont aussi producteurs de lymphotoxine g et important producteurs de TNF, deux cytokines décrites comme jouant un rôle central dans l’organisation et le développement lymphoïde . Une autre fonction des LB a été décrite, ils jouent un rôle dans la promotion de la lymphangiogenèse et de l’expansion des ganglions lymphatiques par l’expression du VEGF-A (vascular endothelial growth factor-A) . Les cellules B peuvent également sécréter plusieurs autres cytokines dont l’IL-1, IL-4, IL-6, IL-8, IL-7, G-CSF, GM-CSF, IL-10, IL-12 et le TGFく .
Comme vu précédemment le LB, en situation physiologique, est indispensable à la création et à l’architecture d’un centre germinatif dans les organes lymphoïdes et dans certains tissus spécifiques tels que la membrane synoviale dans le cas de la PR. C’est au sein de ces centres germinatifs que le LB activé va se différencier en plasmocyte ou en cellule mémoire. Ces centres germinatifs sont le lieu privilégié de la sécrétion d’anticorps de haute affinité et surtout la création des cellules mémoires . La différenciation vers l’une ou l’autre voie est probablement le fait de plusieurs facteurs tels que : des signaux extrinsèques émanant d’autres cellules (cytokines, contact intercellulaires), des signaux basés sur l’intensité de l’affinité du BCR pour l’antigène, un facteur temps et/ou un effet stochastique qui serait soit aléatoire ou tiendrait compte de signaux locaux et de la position des cellules B au sein du centre germinatif à un moment critique (théorie du «bon endroit, bon moment») .

Traitement de la PR

Diagnostic : La polyarthrite rhumatoïde est une maladie chronique inflammatoire caractérisée par une douleur articulaire, un gonflement articulaire et évoluant vers la destruction des articulations, conduisant à une impotence fonctionnelle grave et à une mortalité prématurée.
La présence d’auto-anticorps tels que le facteur rhumatoïde et/ou les ACPA fait de la polyarthrite rhumatoïde une pathologie auto-immune. La présence de ces auto-anticorps peut précéder la maladie de plusieurs années. Les altérations structurelles sont visualisables par des radiographies standard ou d’autres techniques d’imageries, cependant ces érosions osseuses, relativement spécifiques de ce rhumatisme, ne sont que rarement présentes au stade précoce de la maladie. Le diagnostic de PR à un stade précoce, alors que les altérations structurelles articulaires sont encore minimes, est donc crucial afin d’introduire le plus rapidement possible les traitements adéquats. En 2010 de nouveaux critères diagnostiques pour la polyarthrite rhumatoïde ont été publiés sous l’égide de l’EULAR (European League Against Rheumatism) et de l’ACR (American College of Rheumatology). Ces nouveaux critères qui remplacent ceux de 1987 ont pour objectif d’identifier de façon plus précoce les patients atteints de PR .
Ces critères s’appliquent chez les patients présentant au moins une articulation gonflée et un tableau clinique ne pouvant être expliqué par un autre diagnostic tel que connectivite, vascularite, arthrite microcristalline, spondyloarthrite, arthrite infectieuse. De même ces critères de classification ne s’appliquent pas aux patients présentant d’emblée une lésion radiographique typique pour qui le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde sera retenu d’emblée.
Les critères ACR/EULAR 2010 se divisent en 4 catégories : l’atteinte articulaire cotée de 0 à 5 points selon le type et le nombre d’articulations gonflées ou douloureuses à la pression.
le statut sérologique en auto-anticorps de façon qualitative et quantitative coté de 0 à 3 selon le taux de facteur rhumatoïde ou d’ACPA (un taux fortement positif étant considéré comme étant supérieur à 3 fois la norme supérieure du laboratoire).
la présence d’un syndrome inflammatoire biologique cotée 0 ou 1 selon que la VS ou la CRP sont augmentées.
la durée des symptômes cotée 0 ou 1 selon que ceux-ci sont présent depuis au moins 6 semaines. Chez un patient ayant un score supérieur ou égal à 6 le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde est retenu .

Table des matières

Introduction 
I. Rappels théoriques
I. A. Physiopathologie de la PR
I. A. 1. Facteurs déclenchants
I. A. 2. Mécanismes physiopathologiques
I. A. 1. a) Les acteurs cellulaires
I. A. 1. b) Les acteurs intercellulaires
I. A. 3. La destruction articulaire
I. B. Le cycle du lymphocyte B
I. A. 4. Maturation du lymphocyte B
I. A. 5. Rôles du lymphocyte B
I. C. Traitement de la PR
I. C. 6. Diagnostic
I. C. 7. Principes du traitement
I. C. 8. Les options thérapeutiques
I. C. 1. c) Les traitements de fonds synthétiques
I. C. 1. d) Les biothérapies (anti-TNFc, abatacept, tocilizumab)
I. C 1. e) Le rituximab
I. D. Bases scientifiques et justifications de ce travail 
I. E. Objectifs
II. Patients et Méthodes
II. F. Patients
II. G. Typage lymphocytaire
II. H. Analyses statistiques 
III. Résultats 
III.. I. Caractéristiques de la population
III.. J. Déplétion lymphocytaire B induite par le rituximab
III.. K. Evolution de la déplétion lymphocytaire B
III.. L. Suivi de la réponse clinique et facteurs pronostiques de bonne réponse
III.. M. Evolution des paramètres biologiques sous rituximab 
IV. Discussion 
Conclusion
Annexes
Bibliographie

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