INTERROGATION AUTOUR D’UNE CULTURE (DITE) TRADITIONNELLE

Télécharger le fichier original (Mémoire de fin d’études)

Les œuvres architecturales symbolique de la station

L’hôtel Le Flaine 30 et la résidence Bételgeuse sont parmi les premiers bâtiments érigés et inaugurés en 1968 à sur la station (voir annexe 6). L’hôtel est relié à la résidence Bételgeuse par une travée dans le but de créer un espace cohérent où les « locataires de la résidence pourraient disposer des services d’un hôtel31 ». Les deux corps de bâtiments sont donc élaborés sur un plan identique. Ils sont tous deux composés de sept niveaux et sont construits à leur base sur un système de pilotis. La construction sur pilotis d’un grand ensemble, offre une grande capacité d’accueil, tout en libérant l’espace au sol, donnant à cette immense masse, un aspect plus léger Une coursive centrale dessert de part et d’autre les soixante chambres d’hôtel pour l’un et les cinquante-cinq logements pour l’autre.
La façade du bâtiment est parée de ces fameux panneaux de béton à motifs géométriques, et dont la teinte grise, révèle différentes nuances selon la luminosité extérieure. Dans l’idée du respect d’une certaine humilité face à la montagne il semblerait que Marcel Breuer décide ici de confronter son bâtiment face « aux dangers de la montagne32 ». Comme si le bâtiment résistait à tomber dans le précipice, son pignon en porte-à-faux (voir annexe 7) surplombe le vide et accentue le caractère abrupt de la falaise. La montagne est grandiose. On pourrait se rappeler en voyant cette architecture qui joue les funambules retrouver l’image de la cabane au bord du précipice dans le film La Ruée vers l’or de Charlie Chaplin (1925), (voir annexe 8).
Les détails des panneaux préfabriqués de béton fournissent une grande variété de schémas visuels ; tant dans leurs formes que dans les jeux de lumières qui s’opère sur leur surface (lisse ou en pointe de diamants inversés comme on peut le voir sur la façade de l’hôtel les Lindars et la résidence Cassiopé (édifiés en 1968). En 2014 le photographe Pierre Vallet s’attarde à photographier ces panneaux de béton et forme une exposition au Centre d’Art de Flaine intitulée « Flaine, ‘’SUN AND SHADOW’’ » :
« L’œuvre de Marcel Breuer à Flaine est, pour celui qui écrit avec la lumière, une mine, exercice de style, gamme ininterrompue d’images ; une suite et variation sur la lumière33 ».

La chapelle œcuménique

« Ville ou village, le lieu de culte reflète souvent l’esprit de l’agglomération qu’il dessert » Éric BOISSONNAS, Flaine, la création, Paris, Edition du Linteau, 1994, p. 93.
En échos à un village de montagne, Flaine devait avoir sa chapelle. Mais une chapelle contemporaine reflétant l’image moderne de la station Conçue comme une « vaste sculpture abstraite34 », faisant penser à des pièces assemblées d’un casse-tête chinois, la chapelle est également l’un des symboles de la station et fut classée Monument Historique en 2014 (voir annexe 9). Sa structure est originale, ses volumes « inversent l’orientation des pentes du toit et inclinent légèrement les murs extérieurs (…) qui sont parcourus par des rigoles, (comme des fentes), qui font le tour de la chapelle et évacuent les eaux de pluie par l’intérieur, évitant d’avoir recours à des gouttières disgracieuses et protégeant du gel35 ». Inaugurée en 1973 son architecture tranche avec le reste des structures flainoises. Le béton ne sera pas ici de la partie. Comme pour une église locale qui s’ancre dans son territoire, ce sont des matériaux plus traditionnels qui sont favorisés. Certes le socle est maçonné mais il soutient fermement la charpente de bois de Pin (importé du Canada) recouverte intégralement d’ardoises d’Anger36. La chapelle est fractionnée en trois parties distinctes. Au centre l’entrée principale est sous la forme d’un hall surplombé du cloché trapézoïdale qui atteint les 11 mètres de hauteur. De part et d’autre de ce hall d’entrée deux pièces sont affectées. A l’est (à gauche de l’entrée) la chapelle proprement dite, où l’on rend l’office, est une vaste de pièce de soixante-dix places environ. A l’ouest, une pièce de plus petite dimension est consacrée aux annexes (sanitaires, vestibule, bureau du curé et du pasteur)37 et une réserve eucharistique (chapelle du Saint sacrement) conformément à la volonté de l’évêché d’Annecy. La croix n’est pas représentée et ce choix s’explique par le fait que la société américaine, qui accepta de financer la construction souhaitait ce lieu de culte polyvalent : « la condition que la salle serait œcuménique38 au sens large et recevrait aussi bien des juifs ou des musulmans que des chrétiens, et devait pouvoir servir à toute espèces de rencontres, débat ou concert39 », permettant également un accès au non croyants.
Flaine se veut donc être à l’image d’une station qui affirme les valeurs de son temps. Station intégrée, son architecture moderne et fonctionnelle reflète les qualités que recherchent les nouvelles structures aménagées en haute altitude. Par des figures et des technique nouvelles, elle veut offrir à sa clientèle un cadre original, presque futuristes, (accentué par le caractère lunaire du site), pour passer leurs vacances. Cependant l’architecture veut également confronter le vacancier au caractère brut de la montagne et, tout en lui rendant grâce, elle et leur offrant un rapport proche à sa matière.
Les stations de sports d’hiver sont des lieux destinés à recevoir le tourisme. Leurs attractivités (les équipements, les services, l’animation) sont conçues en fonction de la clientèle, et s’accordent au cadre qui les entoure. Flaine a fait le choix d’y dégager une atmosphère liée à la modernité.
« La montagne, En France, n’a pas qu’une seule vocation que l’on semble avoir limitée actuellement au ski d’altitude sur des domaines skiables équipés. Elle peut dispenser à tout l’éventail social de la population urbaine et rurale un choix d’activités, de sports, de loisirs, de détente, de culture, d’émotions sensibles » (…) « L’offre de ski ou de neige se complète d’une dimension culturelle » (…) « Le parti d’urbanisme adopté à Flaine s’impose quatre règles : respecter la nature, créer un centre d’animation (après-ski et non skieur), éviter les conflits de circulation et marquer, bien sûr, la vocation de la station pour le ski40 »

Contribution à l’émergence d’une culture contemporaine

Art contemporain sur fond blanc

« La station de Flaine est née d’un geste culturel : le choix de l’architecte ave Marcel Breuer, un des maîtres du Bauhaus, les commandes passées pour le lieu à des artistes contemporains, la création du Centre d’Art en 1970. J’ai désiré qu’existe, au cœur de Flaine, un site d’accueil où toute personne puisse regarder, s’informer, se détendre, dans un climat culturel stimulant, avec toujours une grande vigilance quant à la qualité de ce qui est offert. Aline Luque et, en 1977, Benédicte Pesle, fondatrice d’Art sevice International, m’ont apporté leur imagination et leur expérience. Benedicte Pesle et moi-même collaborons intimement à la réalisation des trois expositions que nous organisons annuellement. Les artistes sont invités à séjourner à Flaine où une rencontre est suscitée au Centre d’Art afin que chacun puisse les aborder et les interroger à sa guise. (…) Le Centre d’Art de Flaine est financé par l’association « La Culture pour Vivre ».
Catalogue de présentation, Portraits en altitude, Documentaires d’Aline Luque, présenté pat La Culture pour Vivre et le Centre d’Art de Flaine. Sylvie Boissonnas. (Document d’archive Bibliothèque Kandinsky, fond Flaine, « été 1994 ; hiver 1994-1995 Articles de presses », côte FLAI 25).
C’est dans l’objectif de faire de la région de Flaine, un point de rayonnement culturel qu’un Centre d’Art est ouvert en 1977, et était déjà en projet dès la création de la station. Lieu de rassemblement dédié au temps d’après-ski, le Centre d’Art, point de rencontre, devait s’inscrit dans une politique culturelle qui dépasse les limites de son territoire.
Le Centre d’Art de Flaine faisait partie de l’association des Centres d’Art Privés créée en 1973, par cinq membres fondateurs, propriétaires et animateurs des centres d’art suivants : Madame Geneviève BONNEFOY-BRACHE dirigeait le Centre d’Art Contemporain Abbaye de Beaulieu (Tarn et Garonne) ; Monsieur Norbert PIERLOT celui du Château de Ratilly (Treigny, Yonne) ; Madame Aude de FONQUERNIE pour le Château de Sainte-Suzanne (Mayenne) ; le Centre d’art de Flaine, fut pris en charge par Éric Boissonnas et enfin, Fred DEUX dirigea le Centre d’Art Contemporain de Lacoux (Ain). Les trois premiers centres cités, animaient des monuments historiques, leurs redonnant une vie, une fonction et un moyen d’être entretenus et conservés plus aisément. Ces monuments anciens se réanimaient et se réactualisaient par l’art contemporain. Les deux autres centres trouvaient leur place dans de nouvelles constructions, répondant à leur fonction première, établir un espace d’exposition dédié à l’art contemporain. Ces institutions se voulaient être des lieux de réflexions et d’échanges, non seulement entre les artistes, mais en y invitant aussi les visiteurs. Le regroupement de ces cinq centres d’art fut organisé dans un souci de création d’une action culturelle plus forte et plus cohérente sur des territoires en marge des principaux centres artistiques, s’ouvrant alors à un plus large public. Le Centre Georges Pompidou, soutenait cette démarche, et présenta les centres lors d’une exposition en 1980 :
« Le but recherché par chacun d’eux est de rendre accessible à un large public les formes d’expression les plus originales et les plus novatrices dans le domaine de l’art, de la recherche intellectuelle et, généralement, de la pensée créatrice (…). Ces Centres sont en marge des circuits de diffusion culturelle officiels et des circuits commerciaux traditionnels (si les visiteurs ont la possibilité de contacter les artistes présentés, les Centres quant à eux n’assurent pas la vente des œuvres)41 ».
Le Centre d’Art de Flaine était donc, à travers cette association, inscrit dans une action culturelle qui visait à la diffusion et au rayonnement de la culture contemporaine pour tous, et pour les régions les plus éloignées des centres artistiques formels (institutions muséales ou encore galerie d’art, par exemple).
Le fonctionnement du Centre d’art de Flaine était régi par l’association La culture pour Vivre, présidée par Sylvie Boissonnas. La dénomination de cette association fut empruntée au titre du livre rédigé par Jacques Rigaud, et dont l’action était de démontrer la nécessité des individus à s’ouvrir à un champ culturel qu’ils n’ont pas pour habitude de côtoyer. L’association avait pour vocation « d’être un lieu d’accueil et de détente qui vise à familiariser un public aussi large que possible, partout où l’Association en aura les moyens, avec les œuvres d’art contemporaines aussi bien que classiques, avec les courants de la recherche intellectuelle et de la pensée créatrice, y compris dans le domaine des sciences42 ». C’est ainsi que le Centre d’art de Flaine, durant toutes ses années d’activités, anima par son action culturelle la vie de la station.

Le centre d’art

Sylvie Boissonnas ouvre les portes du Centre d’Art de Flaine en 1970, « avec le désir de créer et d’animer un lieu d’accueil où chacun puisse regarder, s’informer dans un climat culturel stimulant43 » à l’accès gratuit. Il était consacré à accueillir des expositions d’œuvres d’artistes, majoritairement contemporains, dont l’originalité créatrice pouvaient susciter de l’intérêt aussi bien chez un public non averti que pour les initiés des galeries des musées contemporains44. Les artistes eux-mêmes furent invités à séjourner à Flaine, faisant de ce fait tomber les barrières de leur inaccessibilité, créées parfois par la spéculation qui s’articule autour de l’art. Afin de prendre une forme complète dans l’action culturelle qu’il soutenait, le Centre d’Art était également constitué d’une bibliothèque, pourvue (encore actuellement) de nombreux ouvrages sur l’architecture, l’art contemporain, français, anglais et allemand. Peu importe l’origine de la clientèle, l’art semblait être dans cette station l’affaire de tous, et Flaine devenait ainsi une sphère publiquement réservée à ceux qui souhaitaient allier le ski à la culture. Ainsi, durant près de vingt-cinq années, plus de soixante expositions ont été accueillies dans l’enceinte du Centre d’Art (voir annexe10). En guise d’extension, un écomusée, (un espace d’exposition destiné à présenter l’activité, le savoir-faire et la tradition d’une collectivité, ou un groupe social, dans son contexte géographique, social et culturel), était installé dans les vitrines des commerces de la galerie commerçante, visant à promouvoir en effet de miroir, une autre culture, celle du territoire anciennement existant, et créant un lien entre tradition et modernité.
Si le Centre d’art de Flaine était le cœur de l’activité culturelle de la station il est un autre organe, tout aussi important dans cette organisation, qui insuffle, encore aujourd’hui, des airs de création d’une toute autre forme. La musique est à Flaine en accord parfait avec la famille Boissonnas, qui lui portait un grand intérêt. Ce dernier fut traduit par la construction d’un auditorium.

L’Auditorium Sylvie et Éric Boissonnas

L’Auditorium Sylvie et Éric Boissonnas (voir annexe 11) fut construit suite à la mise en place d’une Académie de musique « Les Bains de Flaine » en 1977, par le frère du promoteur, Rémi Boissonnas président de l’École normale de musique à Paris. Rythmé entre cours de musique et concerts, Flaine devait se munir d’une salle spécifique pour accueillir au mieux la musique et les nombreux stagiaires.
La musique commence à Flaine peu de temps avant l’année 1970. Des séjours de courtes durée (une semaine environ), s’achevant par un concert public, étaient organisés dans l’été, et ayant pour but d’accompagner, dans un environnement propice à la musique, des musiciens qui poursuivaient ou confirmaient leurs études musicales. Les concerts avaient lieu avant 1970 dans le sous-sol de la résidence Bételgeuse, puis dès 1970 dans le cinéma, et dès 1973 dans la chapelle « dont les murs légèrement inclinés offrent une acoustique remarquable45 ». Avec le temps Rémi Boissonnas eu la volonté d’organiser des stages plus performants, visant à poursuivre la formation musicale des élèves musiciens pendant les vacances d’été, et de les préparer aux concours nationaux et internationaux. En 1977 ces stages de plusieurs semaines intitulés « Bains de Musique » devinrent de plus en plus performant et s’élevèrent à un rang international. Une forte fréquentation s’annonça puisque les stages furent également ouverts aux musiciens amateurs. Jusqu’en 1985 plus de trois cents élèves et vingt professeurs étaient accueillis au sein de ces stages. Le cinéma de deux cent quatre-vingt-trois places ne suffisant plus, et face à l’ampleur que prenait les Bains de musique, il fut décidé qu’un auditorium serait construit pour permettre à la musique de Flaine de continuer à évoluer au mieux.
L’Auditorium de Flaine est inauguré le 2 Aout 1986 à Flaine Forêt. Réalisé par Daniel Chiquet et Mario Jossa, membres de l’équipe des architectes de Flaine, constituée par Marcel Breuer, il fut pensé et élaboré dans le souci de s’accorder au reste des constructions de la station. Ce complexe, de plan rectangulaire, se déploie sur deux étages. Le rez de chaussée où se situe le hall d’entrée permet d’accéder à l’étage supérieur par deux escaliers répartis de part et d’autre de la salle. L’étage est consacré à la salle de spectacle de cinq cents places assises.
L’ensemble de la construction est réalisé en béton et en acier, matériaux singuliers du Bauhaus, alliant arts et techniques, signes d’innovation architecturale, et qui ont aussi la capacité de réalisation de formes surprenantes. Rappelons que le béton est un matériau permettant de libérer le plus largement possible l’espace intérieur en repoussant vers l’extérieur, l’ensemble de murs porteurs. Une verrière, de verre et d’acier, façonnée sous l’aspect d’un piano à queue, habille la façade de l’entrée46.
L’Auditorium est à l’image de Flaine. Il est une œuvre d’art refermant des œuvres d’art. Les concerts qui s’y produisent sont d’une grande notoriété, les œuvres des musiciens, animent le bâtiment. Dans le hall d’entrée, une place est réservée à la Fontaine (voir annexe 12) de Pol Bury47 (1922-2005), artiste issu du surréalisme, dont ses premiers contacts furent à La Louvière48. Cette sculpture, comparable à celle réalisée en 1985 au Palais Royal de Paris, est encastrée dans l’un des piliers porteurs, et est composée de vingt-cinq sphères en acier inoxydable et poli. La fluidité de l’eau qui s’échappe sous les massives sphères en acier, en les mouvant par son ondulation, marque un contraste entre les éléments liquides et solides. La force de l’énergie cinétique créé par le mouvement de l’eau est ici mise en valeur. Lors du discours de l’inauguration de l’Auditorium et de la Fontaine le 3 Août 1986, Sylvie Boissonnas ne manque pas de citer l’historien de l’art Pierre Descargues, qui a écrit à propos des Fontaines de Pol Bury49 : « L’intervention n’est cependant pas liée à des propositions de chantier, mais a une exigence intérieure aux dialogues que la sculpture a eu avec l’eau comme matière, comme force. Il a d’abord cherché son pouvoir de déstabilisation des formes en équilibre. Et ensuite, avec les déséquilibres, il a mis en évidence sa matière quand l’acier inoxydable poli atteignit dans les reflets à une transparence voisine de celle de la goutte d’eau50 ».
L’intervention de Pol Bury pour animer le hall de l’Auditorium semble avoir était d’une évidence pour les flainois. En effet il est l’un des artistes qui marque la station par ses fréquentes interventions. Il exposa à deux reprises au Centre d’art de Flaine durant l’hiver 1974-1975 « Sculptures cinétiques à mouvement lent, gravures, dessins, films et à l’hiver 1985-1986 « Ramollissements, fontaines, miroirs ». L’œuvre de Pol Bury s’est beaucoup concentrée sur le temps et son le mouvement lent qu’il suggère. L’art nouveau a les capacités de montrer ce mouvement par la machinerie et le mécanisme du magnétisme, formant en partie l’art cinétique. Au-dessus de la Fontaine, le diptyque Jaune secret III réalisé par Monique Frydman, (voir annexe 13) vient compléter la dimension artistique de l’Auditorium. Musique, sculpture, peinture sont réunis en ce lieu.
La forme et la fonction de l’Auditorium s’accordent vers un même but, celle de diffuser l’art auprès d’un public, libre d’y accéder gratuitement. L’Auditorium contribue à dynamiser de manière originale le territoire en période estivale, saison creuse pour les stations de sports d’hiver, qui généralement s’oriente vers l’organisations de stages sportifs51. Les stages de musique se dotèrent d’une telle renommée internationale qu’en août 1973 ils accueillirent près de sept cents élèves encadrés par soixante-dix professeurs, évoluant dans « les conditions idéales » que produit « l’atmosphère de la montagne52 », qu’offre le cadre de Flaine ; « Éric Boissonnas confie dans son ouvrage Flaine, la création, sa fierté à propos de la réalisation ce projet : Lors de L’inauguration « Eugen Indjic donna un magnifique récital de piano. Tout le monde s’extasia sur la qualité de l’acoustique, sur l’élégance de l’architecture et sur la fontaine de Pol Bury qui anime le foyer ». (…). Le ministre de la Culture François Léotard (…) nous rendit visite le 21 août 1987. Il fut conquis, et en rend compte ainsi dans son livre A mots couverts : ‘’Hier soir, j’étais à Flaine, à 2000 m d’altitude, où il y avait plusieurs chefs d’orchestre et les meilleurs élèves des conservatoires de France. J’y suis resté jusqu’à deux heures du matin, et c’était passionnant. Il n’y avait pas de télé, pas de presse, mais le meilleur de la musique française’’. L’ouverture de cette salle permit en effet de donner un nouvel essor aux Bains de musique. Le bain de musique estival est surtout une académie. C’est l’enseignement qui est sa raison d’être53 ».

Le cinéma Studio 1600

Flaine avait également réservé une place pour le septième art. Dès l’ouverture de la station en 1968, des films étaient présentés en avant-première dans la salle de spectacle et de cinéma, le studio 1600 (voir annexe 14). L’idée de présenter ces longs ou courts métrages en station de sports d’hiver fut pour les promoteurs une autre façon de conquérir la clientèle et de compléter au mieux l’image de Flaine, station d’avant-garde. Lors de l’avant-première en décembre 1968, du film 7 jours ailleurs de Martin Karmitz, et présenté par Claude Lelouche on pouvait lire dans la presse : « Généralement, on se rend dans les stations de sports d’hiver soit pour faire du ski, soit pour retrouver les noctambules inconditionnels qui, pour un temps, ont pris leur quartier d’hiver. Mais jamais dans l’histoire du cinéma, producteur, réalisateurs et critiques ne s’étaient donné rendez-vous à 1600 mètres d’altitude, pour assister à une première mondiale. C’était une gageure de ressembler ce petit monde à Flaine. Et, pourtant, la soirée fut un succès complet. Les robes du soir côtoyaient les pantalons de ski. Devant le cinéma, des moniteurs trouaient la nuit de leurs flambeaux54 ».
Par la suite, de nombreuses projections de film d’auteurs se succédèrent et Flaine accueillit des acteurs et réalisateurs à l’occasion d’événements et festivals. Du 23 au 30 janvier 1969, le programme d’animation de la station dédiée cette semaine au cinéma ; Le cœur fou, avec l’actrice Ewa Swann, de J.G Albcocco ; Le Dernier Homme de Charles Bitch ; l’Etalon de Jean-Pierre Mocky ou encore l’Horizon de Jacques Rouffio étaient présentés en avant-première. A Noël 1971 fut organisé le festival Joseph Losey dédié aux films réalisés en Grande Bretagne. Et à Noël 1972 le festival de cinéma de Flaine était consacré au thème de l’enfance. La programmation des films annonçait Sciuscia de Vittorio de DSicca, Kes de Ken Loach ou encore Les cœurs verts d’Edouard Luntz et Jeux interdits de René Clement55. La salle de cinéma accueillit également des concerts de musique, produit par les élèves des Bains de musique, ou encore des spectacles joués par des compagnies théâtrales comme la bande du café de la Gare (Sotha, Patrick Dewaere, Gérard Lefèvre, Henri Guybet, Miou-Miou, Coluche, Romain Bouteille, Jean-Michel Haas, Coluche, Catherine Mitry)56. Afin de lier le ski au monde du rêve accessible par l’art et le cinéma, l’artiste Roland Topor exécuta tout spécialement pour ce lieu, une acrylique sur toile intitulée Alice au pays de la neige, qui était alors visible dans le hall d’entrée dès 1972.

Table des matières

Introduction
PARTIE 1 – FLAINE, « TRANSPOSITION » D’UNE CULTURE CONTEMPORAINE
CHAPITRE 1 – LA CRÉATION DE FLAINE (1959-1968) – PROJET ET CHANTIER
Le projet de toute une vie
Une figure reconnue pour Flaine, l’architecture de Marcel Breuer
Conception fonctionnelle de la station
Des formes architecturales innovantes
Les oeuvres architecturales symbolique de la station
CHAPITRE 2 – CONTRIBUTION À L’ÉMERGENCE D’UNE CULTURE CONTEMPORAINE
Art contemporain sur fond blanc
Le centre d’art
L’Auditorium Sylvie et Éric Boissonnas
Le cinéma Studio 1600
Les oeuvres d’art intégrées dans la station
Interrogations et critiques
Noël 1967, Éric Boissonnas, Départ de Paris du premier Wagon lit, Paris-Flaine
Des liens étroits avec la ville
PARTIE 2 – INTERROGATION AUTOUR D’UNE CULTURE (DITE) TRADITIONNELLE
CHAPITRE 3 – PORTRAITS EN ALTITUDE, UNE « OEUVRE À CARACTÈRE ANTHROPOLOGIQUE ». CULTURE TRADITIONNELLE « ILLUSTRÉE » PAR LE FOND PHOTOGRAPHIQUE DE PORTRAITS EN ALTITUDE
Prémices de l’oeuvre
Dualité du territoire
Au contact de la population : les portraits du passé
La Forme filmique et diffusion de questions sociales
La condition des femmes, sujet social traité par le court-métrage
La problématique de l’agriculture : une vie de travail en mutation
L’industrie alternative économique précédant le tourisme
Les photographies de Portraits en altitude inscrites l’histoire du reportage social
Les expositions
Le Livre, support de l’histoire
Conservation et pérennité de l’oeuvre
PARTIE 3 : POST-MODERNISME, QUELLE IMAGE POUR LA MONTAGNE ?
CHAPITRE 4 – MAIS DE QUELLE TRADITION PARLONS-NOUS ?
Le Néo-style montagnard, oubli de la tradition ?
Idéalisation d’un model
Uniformisation, standardisation des cultures vernaculaires
Conservation du Patrimoine. Les Labels et le titre monuments historiques des stations de sports d’hiver
L’inscription ou le classement au titre de Monument Historique
La labélisation
CHAPITRE 5– CULTURE ET IMAGE AUTOUR D’UNE PRATIQUE
Nouvelle pratique dite « Post-moderne » le snowboard
Courte histoire des sports de glisses et influences
Une liberté de la pratique prônée
La Board Culture en piste !
Spacejunk
Les Snowparks
L’oeuvre est/et « matériel »
La boucle est bouclée
Conclusion
Table des annexes
Bibliographie

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *