La Chute N’écoutez pas, Mesdames

La Chute N’écoutez pas, Mesdames

Daniel (Guitry), antiquaire, attend sa femme Madeleine (Hélène Perdrière) jusqu’au matin. Quand elle arrive enfin, ulcéré, il décide de divorcer. Elle restera son amie et c’est lui qui choisira ses amants. Daniel reçoit la visite d’une ancienne maitresse (Jeanne Fusier-Gir). Son ancienne femme Valentine (Mona Goya) l’aime toujours mais il finit par revivre avec Madeleine. Il est devenu très misogyne. Genviève n’a pas joué cette pièce mais il est très utile pour nos recherches de savoir quel rôle Guitry avait écrit pour elle. Le casting fut un échec car aucune des trois actrices prévues ne put jouer, ni Gaby Morlay, ni Marguerite Pierry, ni Geneviève. Or, la pièce fit un triomphe et se joua pendant deux ans, sans que l’épouse de Guitry lui donne la réplique. Lui qui avait toujours pensé que ses pièces ne pouvaient être jouées que par un couple d’acteurs amoureux, il joua seul, dans son salon reconstitué sur scène. Geneviève s’ennuiera ferme pendant ce temps-là ,prendra un amant et quittera Sacha à la fin de la pièce. Il prétend, dans une lettre conservée à la BNF Richelieu, que Geneviève lui demanda de supprimer son personnage, mais c’est un pieux mensonge car le personnage de Madeleine ressemble beaucoup à la situation de Geneviève à l’époque. Elle a trompé son mari mais elle a perdu son amant et elle est malheureuse. Il la traite de « petite canaille » mais, finalement, il la garde. En janvier 1942 Sacha note en effet dans Dates (BN, A et S) : « Inconduite de Geneviève », le 18.1.42 et il écrit, deux jours plus tard : « Tout est fini entre nous 281 ». Mais il préfère attendre la Libération pour divorcer. Il reçoit alors une lettre émouvante de Geneviève qui le touche. « Je viens de relire mon brouillon. Il est tard et je veux le laisser ainsi. C’est un fidèle témoignage de toutes mes pensées. Je n’ai pas à en avoir honte. J’ajoute seulement une chose au sujet des peines innombrables que je t’ai faites. Ce qui me console à leur sujet, c’est la puérilité de mes actes. Tout ressemble tellement à la rage d’un enfant. . La Chute N’écoutez pas, Mesdames 268 Je n’ai rien à me reprocher de grave et j’ai tout à me reprocher envers ta sensibilité extrême et ta personnalité. Je n’avais pas le droit de discuter tes actes et de jouer avec tes nerfs ainsi que je l’ai fait. Pardon et surtout ne dis pas que c’est vite dit et que c’est facile à dire. Il y a une justice quoi qu’il arrive. Je t’aime mieux que les premiers jours de notre union car je t’aime à travers ma douleur. J’ai fait ce soir mon examen de conscience et j’ai affreusement honte. Je sens que je suis en train de perdre l’équilibre. Je ne sais pas où me raccrocher et à qui demander conseil. Je viens de passer des heures pénibles en face de moi-même. Sacha, tu ne peux pas savoir, toi qui n’as jamais rien à te reprocher, ce que c’est triste d’être abattue par le remords. Comment ai-je pu faire de la peine à un être comme toi ? Comment peut-on oublier même pendant une seconde le respect que l’on doit à l’auteur de tant de chefsd’œuvre ? Ce que j’ai été malheureuse en écoutant Françoise. Ma tristesse et ma douleur sont aussi profondes que serait ma joie de reconquérir tout ce que j’ai perdu par ma faute, s’il est encore temps. Je ne veux pas que tu croies que je t’impose la lecture de cette lettre. Jettes y les yeux. Peut-être m’exprimerai-je mieux maintenant. Je suis comme la voile d’un voilier. J’irai où tu me diras d’aller. Ma conduite me livre à toi. Je suis ta prisonnière. Ne sois pas trop impitoyable. Mon cerveau s’est alourdi et ensablé dans ma stupidité. J’ai l’impression de marcher dans un long tunnel tout noir. Sacha, mon bien-aimé que j’ai si mal su aimer depuis quelque temps alors qu’au contraire, j’aurai dû l’aider, le comprendre, le respecter et l’admirer plus que jamais. Je t’aime et je me serre contre toi. Laisse-moi te dire tout bas combien je suis triste et seule. C’est ma punition. Le remords est bien à soi, à soi tout seul. C’est affreux. 

Geneviève de Séréville au cinéma avant Guitry

Entre son élection à Cinémonde (13.1.1938) et son premier film avec Guitry (1.12.1938), il s’écoula très peu de temps et ses deux rôles offerts par Cinémonde ne furent pas tellement convaincants. 

L’Etrange

Monsieur Victor (Grémillon, 1937) En 1937, Geneviève de Séréville annonce son « départ pour Berlin » où elle jouera avec Raimu. Victor (Raimu) patron d’un aimable bazar toulonnais est également le chef d’une bande de malfrats. Il tue un de ses complices mais son voisin le cordonnier (Pierre Blanchar), mal marié à Adrienne (Viviane Romance) est condamné à sa place. Sept ans plus tard, le cordonnier s’évade et Victor l’accueille dans son foyer mais son épouse (Madeleine Renaud) tombe amoureuse de lui et Victor est arrêté. En fait, elle ne rencontrera jamais Raimu sur le plateau et devra se contenter d’avoir pour partenaire éclair Viviane Romance, très brillante au demeurant, qu’on voit, dans un café, se débattre avec un encombrant bateau à voile pour enfants. Impatiente, elle appelle la serveuse du café et Geneviève accourt à toute vitesse. Son texte tient en une ligne unique : « Oui, oui ! J’arrive ». Pour être juste, on l’aperçoit une seconde fois, immobile et muette, parmi les spectateurs qui assistent à une bagarre dans ce même café. Ses débuts furent extrêmement modestes, on le voit, et son nom ne figure même pas au générique. Elle tourne le film en Allemagne pour l’UFA et les rues de Toulon sont habilement reconstituées dans les studios de Babelsberg par des décorateurs allemands.

Ma sœur de lait (Boyer, 1938)

Dans son second film : Ma sœur de lait, elle s’appelle Françoise mais n’apparait qu’à la dix-septième place, au générique. Cinémonde n’a vraiment fait aucun effort pour dénicher et propulser une future vedette. Une artiste de music-hall (Henri Garat) a une sœur de lait qui doit venir passer quelques jours à Paris. Conformément aux conventions de l’époque, elle est naturellement stupide et en surpoids puisqu’elle est campagnarde. Une autre jeune fille, mince et fine, elle, (Meg Lemonnier), est amoureuse de l’artiste. Elle se fait passer pour la vilaine sœur de lait et l’artiste tombe amoureux d’elle. On ne sait pas vraiment ce que fait Geneviève de Séréville dans cette galère. Elle tourne à nouveau le film à Babelsberg et signale fièrement ses départs pour l’Allemagne à Guitry qui l’attend.

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