La présence d’enfants dans la représentation sociale de la famille

La présence d’enfants dans la représentation sociale de la famille

Abric (2005, p.59) définit la représentation sociale comme « un ensemble organisé d’informations, d’opinions, d’attitudes et de croyances à propos d’un objet donné. Socialement produite, elle est fortement marquée par des valeurs correspondant au système socio-idéologique et à l’histoire du groupe qui la véhicule pour lequel elle constitue un élément essentiel de sa vision du monde ». Sur le plan individuel, la représentation de la famille peut changer au cours de la vie (Koutchmaïeva 2019). Par exemple, l’extrait suivant illustre l’évolution du nombre idéal d’enfants167 en rapport avec les évènements que traverse une famille : (279) Pour moi, la famille idéale était composée de deux enfants, de deux sexes différents. Et il faut d’abord qu’il y ait un garçon, car ma fille doit être en quelque sorte protégée. Au moins, j’ai toujours rêvé d’avoir un frère effrayant, plus qu’une sœur. J’étais seule dans la famille, je devais me protéger. Mais maintenant, nos enfants ont grandi et je veux vraiment avoir un autre enfant, une fille. Et maintenant, il me semble que la famille idéale est une famille avec beaucoup d’enfants, il faut qu’il y en ait trois. Для меня идеальная семья раньше была с двумя детьми, двое, но разнополые. И сначала должен быть мальчик потому что дочка должна быть как бы защищена. По крайней мере я всегда мечтала иметь старшего брата, больше чем сестру. Я была в семье одна, мне самой себя приходилось защищать. Но теперь дети у нас выросли и мне очень хочется родить еще одного ребенка, девочку. И мне теперь кажется, что идеальная семья это все-таки многодетная семья, чтобы было трое детей. Rezeda, 36 ans, économiste, mariée, 2 enfants. L’entretien a été réalisé à l’été 2018 à son domicile à Oulianovsk. Si le nombre idéal d’enfants semble évoluer au cours de la vie, de nombreuses études (Tchourilova & Zakharov 2019 citant Testa 2007, Sobotka & Beaujouan, 2014, entre autres) montrent que le nombre idéal moyen d’enfants reste relativement stable au sein de la population. En effet, comme le montre le graphique suivant, dans les années 1990, cet indicateur reste entre 2,1 et 2,3 enfants par femme à l’exception d’une baisse importante entre 1991 et 1992.

La place du mariage dans la représentation sociale de la famille

Malgré le développement des unions libres dans les années 1990 (voir la partie 2, chapitre 7, section 2), le mariage reste important dans la représentation de la famille aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Les sondages réalisés par le Service fédéral des statistiques de l’État russe montrent que la représentation de la famille est fondée sur l’institution du mariage. La majorité des hommes et des femmes interrogées dans les années 2010 considèrent que l’union cohabitante doit être officialisée en tant que mariage à l’État civil. Cependant, l’évolution de cette représentation diffère selon le sexe. Alors que la part des femmes considérant le mariage comme obligatoire pour fonder une famille augmente entre 2009 et 2017 de 61,2 % à 65,6 %, ce pourcentage diminue chez les hommes : 63,4% en 2009 et 58,6 % interrogés en 2017. Cette différence entre hommes et femmes peut éventuellement s’expliquer par le fait que la promotion du modèle traditionnel est réalisée prioritairement auprès des femmes, puisqu’elles sont les seules bénéficiaires de certaines allocations telles que le capital maternel. Parallèlement, on observe une polarisation de l’opinion vis-à-vis du mariage avec une diminution de la part des hommes et des femmes considérant le mariage comme souhaitable (de 32,3 % à 31,4 % pour les hommes et de 33,9 % à 27,3 % pour les femmes) et une augmentation de la part des hommes et des femmes considérant que l’officialisation de l’union libre en tant que mariage n’est pas souhaitable (de 4,3 % à 10 % interrogés entre 2009 et 2017, contre de 4,9 % à 7,1 % de femmes interrogées pour la même période).Le même sondage montre que l’évolution de la position concernant le moment de l’enregistrement du mariage ne varie que faiblement en fonction du sexe (284). Plus de la moitié des hommes et des femmes interrogés en 2012 et en 2017 déclarent que le mariage doit être enregistré avant ou au début de la cohabitation, mais la proportion diminue légèrement dans les deux catégories.En résumé, malgré une faible évolution de la position des hommes et des femmes envers le mariage, l’augmentation importante, depuis l’introduction de la nouvelle politique familiale « traditionaliste », de familles pour lesquelles le nombre idéal d’enfants est de trois (d’après l’enquête du VTsIOM) permet de formuler l’hypothèse d’une influence de la politique familiale sur la représentation de la famille. Pour apporter des éléments de réponses à cette hypothèse, je m’appuie sur les données qualitatives recueillies lors de mon enquête de terrain. Je montre comment l’engagement des familles-lauréates dans la propagation du modèle traditionnel après le concours influence la représentation de la famille dans leur région mais aussi leur propre vision de la famille.

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