LA SUBJECTIVATION DU DROIT FAVORABLE AU DROIT AU DIVORCE

LA SUBJECTIVATION DU DROIT FAVORABLE AU DROIT AU DIVORCE

 Les effets de la subjectivation sur le concept d’un droit au divorce

La pertinence d’un droit au divorce est démontrée par le phénomène de subjectivation du droit (A.) et par l’incidence de la subjectivation du droit sur la procédure (B.) A. Le phénomène de subjectivation Deux circonstances expliquent cette transformation d’après Jean Carbonnier « la place conquise par la psychologie aux dépens de la sociologie »633 et le recul des valeurs collectives par l’exaltation permanente des droits de l’homme dans les discours idéologiques. La multiplication des droits subjectifs est un phénomène en soi, mais elle a également modifié la notion même de droit subjectif. En effet, la justification des droits subjectifs dans l’ordre juridique accompagne leur développement. Il y a une « inversion dans la démarche intellectuelle (…). Au lieu d’extraire le droit subjectif des règles objectives préalablement posées dans la vision d’intérêt collectif, le pouvoir normatif, confronté à des volontés et à des besoins individuels, est sommé de trouver une solution destinée à les satisfaire. C’est ainsi que le droit supplante les institutions »634, comme la famille. Les droits subjectifs étaient fondés à l’origine sur les besoins. Ils étaient la réponse à une oppression découlant des différents contextes politiques et sociaux. Dès lors, même s’ils favorisaient l’épanouissement personnel, ils tenaient compte du bien commun. Les droits subjectifs comprenaient deux éléments: l’« élément personnaliste »635 qui répondait aux besoins humains et la satisfaction de ces besoins devait se faire dans la poursuite d’un bien commun « élément finaliste »636. Le droit subjectif était « une prérogative reconnue par l’ordre juridique au profit d’un particulier, en tant que personne et membre de la société, dans le but de déployer une activité utile à lui-même et au bien commun. » Cette définition est obsolète. La notion de droit subjectif a été remaniée en fonction de sa prolifération. Vouloir est indéfiniment extensible637. La considération de l’intérêt général n’entre plus nécessairement dans la conception du droit subjectif. On est passé des droits subjectifs ayant pour objet les besoins à ceux ayant pour objet le désir. Le droit subjectif est davantage « désigné, pour ne pas dire défini, par l’objet sur lequel il porte, en somme identifié par l’objet du désir, ce qui est le contraire de ce à quoi nous sommes accoutumés »638.La notion de désir a intégré l’ordre juridique comme source de droit. Chaque désir exprimé en justice est un droit subjectif potentiel. Les droits subjectifs imposent par le jeu d’échange des désirs une certaine symétrie des droits. En effet, loin de l’impératif, la discussion est naturelle ».

L’incidence de la subjectivation du droit sur la procédure

Certains auteurs évoquent « la procéduralisation du droit »650, c’est-à-dire le glissement du fond vers la procédure. Le glissement « prend à peu près toujours la même forme, à savoir que le respect des garanties procédurales suffit à garantir la validité au fond de la solution ou de la décision prise »651. La procéduralisation serait directement liée au pullulement des droits subjectifs, mais l’inflation des droits découlant d’une demande de droit à laquelle les juges et le législateur sont tenus de donner force positive, est porteuse de conflit. En effet, les droits vont se concurrencer. « La solution pour résoudre ces conflits est d’édicter des procédures. Peu importe ce qu’il en sortira pourvu qu’une procédure ait été respectée et qu’elle ait permis à chacun de faire valoir son point de vue. Les règles de procédure prennent la place des règles de fond. La règle s’efface derrière le jugement »652 A plusieurs reprises, durant cette étude, on a répété que le fond et la forme étaient étroitement liés. La demande d’un droit au divorce a eu un impact sur le droit du divorce. Ce dernier pour œuvrer dans ce sens, a davantage précisé le cheminement procédural du divorce et corrélativement il a minimisé le rôle du fond dans le divorce. C’est ainsi, que le droit au divorce connaît une effectivité. Le schéma procédural a formalisé le divorce et pose des bornes comme contrepoids au libéralisme. Notamment, l’étape préparatoire du divorce par consentement mutuel doit être scrupuleusement respectée pour garantir l’accès au divorce. En effet, l’unique comparution a renforcé le degré de qualité de la convention qui doit être parfaite pour être homologuée. La procédure contentieuse est régie par le tronc commun procédural qui encore une fois normalise le divorce et fait oublier le fond. La procédure contentieuse s’ouvre par une requête silencieuse sur les faits et le fondement juridique du divorce (article 251 du Code civil). Elle pose également des règles qui s’associent plus à des objectifs à suivre par les époux qu’à des règles procédurales classiques. Comme, par exemple l’article 257-2 qui exige des époux une proposition de règlement des intérêts patrimoniaux afin d’anticiper au mieux les conflits et conforter l’objectif de pacification. Or l’office de la procédure se définit comme « un simple instrument, qui ne prend son sens que par le service qu’elle rend »653. Elle a pour « fin de discipliner le désordre, de lui substituer un ordre »654. Donc elle ne devrait avoir aucune influence sur la valeur substantielle du droit. Indéniablement la procédure de divorce a une influence sur le droit, elle ne joue pas un rôle accessoire, au contraire elle contribue à faire exister un droit au divorce. En effet, si le législateur n’a pas consacré officiellement un droit au divorce, il l’a créé à travers sa procédure. Les règles procédurales du divorce se distinguent donc de l’office traditionnel de la procédure. Les mesures provisoires prévues à l’article 255 du Code civil sont destinées au règlement du divorce. Les règles procédurales pour l’essentiel sont centrées sur la recherche d’accords dans l’organisation du divorce (par exemple l’article 268 du Code civil). Lorsque les époux ont déclaré accepter le divorce, ils ne peuvent se rétracter et l’instance sera engagée uniquement sur ce fondement ; sans oublier le jeu des passerelles qui favorise les divorces conventionnels ou semi conventionnels.

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