L’analyse phénoménologique

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Analyse phénoménologique

Définition et principes

L’analyse phenomenologique [DM96] est une technique rationnelle qui se fonde sur les equations génerales de la discipline ou elle s’exerce. Elle a pour objet de determiner, dans une situation physique complexe, les phenomenes qui jouent un role preponderant dans l’evolution de cette situation. Les autres phenomenes susceptibles d’intervenir sont qualifies de negligeables devant les premiers. Dans ce qui suit, le substantif ”phenomene” designe de facon generique un ou plusieurs termes des equations ou des conditions aux limites. En particulier, les ph´enom`enes negligeables se traduisent dans les equations par des termes qui peuvent en premi`ere approximation ˆetre supprim´es.
Une telle d´emarche n´ecessite donc une bonne compr´ehension des causes des ph´enom`enes etudi´es et des cons´equences, a savoir les ph´enom`enes eux-mˆemes, permettant de diff´erencier ainsi ce qui fonda-mental de ce qui est accessoire. Elle d´ebouche donc aussi bien sur le dimensionnement d’une installation exp´erimentale ou industrielle, que sur l’´elaboration de mod`eles th´eoriques approch´es conduisant `a des ´equations plus faciles a` int´egrer.
En analyse ph´enom´enologique, l’objectif n’est pas de rechercher une solution analytique ou num´e-rique, mais seulement l’ordre de grandeur de la solution.
D’une fa¸con g´en´erale, une situation pr´ecise, aussi complexe soit-elle, comporte suffisamment de donn´ees N par exemple) pour pouvoir d´eterminer les ordres de grandeur de tout ce qui est inconnu. Ceci revient implicitement `a admettre que le probl`eme est bien pos´e, et qu’il admet une solution et une seule. Pratiquement, on constate qu’il faudrait un miracle pour que les N donn´ees impos´ees aient pour cons´equence une ´egale importance de tous les ph´enom`enes physiques mis en jeu. En revanche, lors de la conception d’une installation, il existe un certain nombre n < N de donn´ees non fig´ees. Il est possible de les choisir dans des gammes de valeurs assez ´etendues : on dit que ce sont des donn´ees ”libres”. Alors, le principe dit de ”moindre d´eg´en´erescence” permet de d´eterminer les valeurs critiques des donn´ees libres pour qu’il n’y ait aucune simplification, ce qui correspond a` la situation permettant d’observer simultan´ement le maximum de ph´enom`enes. Ces valeurs critiques d´ependent des (N − n) donn´ees restantes.
La comparaison entre les valeurs possibles des donn´ees libres et leur valeur critique permet d’ef-fectuer un classement de toutes les simplifications possibles et de pr´eciser les conditions que doivent v´erifier les donn´ees pour qu’un type d’approximation ait lieu.
L’analyse ph´enom´enologique est la m´ethode qui va ˆetre mise en application pour ´etudier les ´ecou-lements de fuite dans les joints d’´etanch´eit´ statique.

Les ´ecoulements de fuite

G´eom´etrie de l’´ecoulement

L’objet de ce travail est de comprendre la ph´enom´enologie du changement de phase liquide-vapeur `a l’´echelle microm´etrique. Afin de se lib´erer de complexit´es analytiques qui pourraient masquer les m´ecanismes fondamentaux en alourdissant inutilement la description, on se donne un chemin de fuite de section constante. Le chemin de fuite est donc volontairement ramen´ `a un capillaire lisse de section droite circulaire, dont le diam`etre int´erieur est de l’ordre de quelques microm`etres. Le rapport entre le rayon a et la longueur L du capillaire est introduit sous la forme d’un param`etre g´eom´etrique ε, sans dimension, tr`es petit devant l’unit´e.
La formulation, adapt´ee `a l’´etude exp´erimentale, est effectu´ee pour un tube rectiligne, mais elle constitue une bonne approximation des situations pour lesquelles la ligne centrale du conduit est une courbe gauche dont les rayons de courbure sont de l’ordre de L. C’est l’approximation de la ligne tangente ou ´ecoulement par tranches.
Un capillaire repr´esentatif de l’´etude exp´erimentale a pour dimensions : L = 0,3m, a = 10µm  et
R = 2,25mm.
Les petits param`etres associ´es `a ces dimensions sont :
• ε = La ≈ 3,33.10−5
• ε2 ≈ 1,1.10−9
• η = Ra ≈ 4,44.10−3
• ηε22 ≈ 5,6.10−5

Les donn´ees physiques

Les conditions thermodynamiques

Aux extr´emit´es du capillaire, une diff´erence de pression Pe − Ps est impos´ee. La pression d’entr´ee Pe est sup´erieure `a la pression de vapeur saturante Psat (T0) du fluide. La pression de sortie Ps est inf´erieure `a Psat (T0). De la sorte, les conditions thermodynamiques a` l’entr´ee et `a la sortie du capillaire correspondent respectivement a` la phase liquide et `a la phase vapeur. Le changement de phase se produit donc sous l’effet d’une diminution de la pression locale le long du capillaire et non par un apport de chaleur en paroi, comme c’est souvent le cas dans les autres ´etudes.
Les fluides
Initialement, aucun fluide n’a et´ sp´ecifi´. Cependant, les calculs analytiques trait´es par la suite utilisent principalement les propri´et´es physiques et thermodynamiques d’un r´efrig´erant, le R134a mais ´egalement celles de l’hydrog`ene.
Le choix du R134a comme fluide d’´etude est justifi´e dans le chapitre exp´erimental. Les propri´et´es thermodynamiques du R134a sont r´epertori´ees en annexe A. Les valeurs num´eriques des principales propri´et´es du R134a et de l’hydrog`ene sont mentionn´ees dans le tableau (2.1).
Les mat´eriaux
Comme pour le fluide, aucun mat´eriau n’a et´ sp´ecifi´ afin que l’´etude soit utilisable dans le plus grand nombre d’applications possibles.
Les ´echelles
La premi`ere ´etape de l’analyse ph´enom´enologique est l’introduction d’´echelles de variation associ´ees aux diff´erentes grandeurs du probl`eme. Ces ´echelles permettent d’adimensionner les ´equations avant de proc´eder `a l’identification des ph´enom`enes dominants.

FRONT STATIONNAIRE DE CHANGEMENT DE PHASE

Afin d’´eviter les r´ep´etitions, l’ensemble des ´echelles utilis´ees dans ce chapitre sont d´efinies ci-dessous :
• coordonn´ee axiale : z = Lz¯
• position de l’interface : zi = Lz¯i
• coordonn´ee radiale : r = ar¯ o`u a = ε L et ε 1
• temps : t = τ t
• pression dans la phase liquide : P = Pe − (δP )
pression dans la phase vapeur : Pv = Ps + (δP )v Pv
• ´echelles de vitesse dans la phase liquide : uz = Uz0 u¯z et ur = Ur0 u¯r
• ´echelles de vitesse dans la phase vapeur : vz = Vz0 v¯z et vr = Vr0 v¯r
temp´erature dans le phase vapeur : Tv = T0 + (δT )v Tv
temp´erature dans le phase liquide : T = T0 + (δT ) T
temp´erature dans le solide : θs = T0 + (δθ)θs
Le choix des donn´ees est tel, que les couples pression-temp´erature correspondent respectivement a` la phase liquide a` l’entr´ee du capillaire et a` la phase vapeur a` sa sortie. Une solution stationnaire, s’il en existe une, se pr´esente sous la forme d’un front stationnaire de vaporisation, s´eparant la phase liquide en amont de la phase vapeur en aval.

Front stationnaire de changement de phase

Intuitivement, il vient a` l’esprit que le changement de phase d´ebute au point de coordonn´ee o`u la pression devient inf´erieure ou ´egale `a la pression de saturation Psat (T0). En aval de ce point singulier, il est possible d’envisager, compte tenu de l’ordre de grandeur de la section des conduits, que la totalit´e du liquide s’est vaporis´ee. Le changement de phase se produit alors sur un front stationnaire qui marque la limite entre un ´ecoulement monophasique de liquide en amont et un ´ecoulement monophasique de vapeur en aval. La position du front dans le capillaire est inconnue, ainsi que les ´echelles de vitesse et de temp´erature de chaque phase. Les pressions de part et d’autre de l’interface sont not´ees P i et Pvi .
Pour effectuer l’analyse ph´enom´enologique de ce probl`eme, il est n´ecessaire d’ins´erer les ´echelles d´efinies pr´ec´edemment dans les ´equations afin d’´etablir une classification des situations possibles.

Equations dynamiques dans la phase liquide

L’´ecoulement est axisym´etrique d’axe z et la direction radiale est not´ee r. Les ´equations de Navier-Stokes, en incompressible, sont ´ecrites sous forme adimensionnelle en y introduisant les ´echelles sp´eci-fi´ees pr´ec´edemment.
En amont du front de vaporisation, l’´ecoulement est monophasique liquide. Aux bornes de ce domaine, de longueur zi, la diff´erence de pression est (δP ) = Pe − P i , o`u zi et (δP ) ne sont pas connues.
L’´echelle de variation de la pression au sein de la phase liquide est choisie telle que : (δP ) = (δP )SR = Pe − Psat (T0), o`u l’indice SR signifie sous-refroidissement.
A volume donn´e, sur le diagramme pression-temp´erature d’un constituant, la phase liquide et la phase vapeur sont s´epar´ees par la courbe de saturation (figure 1.2). Sur ce diagramme, le sous refroi-dissement correspond a` une d´etente isotherme ou a` une augmentation isobare de la temp´erature du liquide, pour que celui atteigne la courbe de saturation liquide-vapeur. Une notion thermodynamique similaire est la surchauffe d’un liquide. Elle correspond cette fois a` un ´etat thermodynamique m´eta-stable du liquide : sur le diagramme pression-temp´erature, l’intersection entre ses valeurs locales de pression et de temp´erature se trouve en dessous de la courbe de saturation.
L’´equation de continuit´e s’´ecrit :
Uz0 ∂u¯z + Ur0 1 ∂ (¯ru¯r ) = 0 (2.1)
L ∂z¯ a r¯ ∂r¯
Attendu que les ´echelles de vitesse Uz0 et Ur0 sont inconnues, il est interdit de choisir des ´echelles qui entraˆınent la disparition d’un terme, car cela conduit a` une simplification non justifi´ee. C’est le principe de moindre d´eg´en´erescence (PMD) encore appel´ principe de non simplification abusive (PNSA). Le maximum de termes devant ˆetre conserv´ dans (2.1), il est imp´eratif de choisir : Ur0 = εUz0 . En reportant ces valeurs dans les composantes radiales et axiales de quantit´e de mouvement, en supposant la viscosit´e constante, il vient :
L ∂u¯r ∂u¯r ∂u¯r gL ¯ µ L ∂ 1 ∂ 2 u¯r
(δP )SR ∂P 2 ∂
+ u¯r + u¯z = k.er + + (¯ru¯r ) + ε (2.2)
¯ ∂r¯ ∂z¯ 2 2 2 2
τ Uz0 ∂t εUz0 ρ Uz0 ε ∂r¯ ρ a Uz0 ∂r¯ r¯ ∂r¯ ∂z¯
L ∂u¯z ∂u¯z ∂u¯z gL (δP ) ¯ µL1∂ ∂uz 2 u¯z
SR ∂P ∂
+ u¯r + u¯z = k.ez + + r¯ + ε2 (2.3)
¯ ∂r¯ ∂z¯ 2 ρ Uz0 ∂z¯ 2 ∂r¯ 2
τ Uz0 ∂t Uz0 ρ a Uz0 r¯ ∂r¯ ∂z¯
Dans ces deux ´equations, les termes petits devant l’unit´e sont n´eglig´es : seuls les termes dominants
sont retenus. La composante instationnaire de l’´ecoulement est repr´esent´ee par le terme d’ordre L ,
τ Uz
µ L 0
les composantes dynamiques sont d’ordre unit´e et les composantes visqueuses sont d’ordre .
ρ a2Uz0
Compte tenu des connaissances actuelles, il est ´etabli que les ´ecoulements de fuite dans un joint sont domin´es par la viscosit´e. Pour se placer dans cette situation, il faut chercher les conditions a` respecter sur les donn´ees afin que
µ L
1 (2.4)
ρ a2Uz0
L’application du PNSA dans (2.2) et (2.3) donne U = a2(δP )SR et U = a2(δP )SR . Ces deux valeurs
ε2Lµ
z0 z0 Lµ µ2L2
de Uz0 sont ensuite report´ees dans (2.4) et conduisent respectivement `a (δP )SR et (δP ) ρ a4ε2
µ2L2
ρ a4 . La seule valeur de (δP )SR a verifier la condition (2.4) est la seconde car la premiere engendre la disparition du terme moteur ∂P∂z¯ cause de l’´ecoulement. La gravite est une seconde cause possible de l’ecoulement. La comparaison entre les phenomenes de gravite et de difference de pression aux bornes du domaine se fait par l’intermediaire du rapport (δP )SR / (ρ gL) dans le cas ou k.ez est non nul.

Table des matières

Notations
Introduction
1 ´Etude bibliographique
1.1 Formation de la phase vapeur par ebullition
1.1.1 Thermostatique
1.1.2 Nucleation heterogene en espace confine
1.1.3 Croissance des bulles
1.1.4 D´etachement des bulles
1.2 Mod`eles globaux d’´ecoulements `a plusieurs phases
1.3 Exp´erimentations de changement de phase liquide-vapeur
1.3.1 Visualisation du changement de phase  hydrodynamiques
1.4 Coefficients de frottement dans lesmicrocanaux
1.5 Conclusion
2 Analyse phenomenologique
2.1 D´efinition et principes
2.2 Les ´ecoulements de fuite
2.2.1 G´eom´etrie de l’´ecoulement
2.2.2 Les donn´ees physiques
2.3 Front stationnaire de changement de phase
2.3.1 Equations dynamiques dans la phase liquide
2.3.2 Equations dynamiques dans la phase vapeur
2.3.3 Bilan d’´energie dans la phase liquide
2.3.4 Conditions interfaciales
2.3.5 Paroi athermane
2.3.6 Flux de chaleur impos´e `a la paroi
2.3.7 Capillaire diabatique
2.4 Front instationnaire de changement de phase
2.5 Nucl´eation et croissance de bulles
2.5.1 Bulle sph´erique dans un milieu infini
2.5.2 Classification des ph´enom`enes dominants
2.5.3 Identification du ph´enom`ene dominant pour du R134a
2.6 D´etachement et embarquement des bulles
2.6.1 Equilibre de la bulle
2.6.2 Embarquement de la bulle
2.7 Expulsion d’un bouchon de vapeur
2.7.1 Pr´esentation du mod`ele
2.7.2 R´esultats
2.8 Conclusion
3 Dispositif experimental
3.1 Objectifs du dispositif experimental
3.2 Choix et dimensionnement du dispositif experimental
3.2.2 Choix du couple fluide-chemin de fuite
3.2.3 Instrumentation
3.2.4 Les autres composants
3.3 Presentation generale du dispositif experimental
3.4 Estimation du diametre interieur des capillaires
3.5 Protocole experimental
3.5.1 Etape 1 : Preparation du dispositif
3.5.2 Etape 2 : Remplissage du capillaire
3.5.3 Etape 3 : Experimentations
3.6 Conclusion
4 Exploitation du dispositif experimental
4.1 Interpretation des visualisations
4.2 Comportement pendant l’etape
4.2.1 Camera rapide
4.2.2 Camera ”Webcam”
4.3 Comportement pendant l’etape 3
4.3.1 Visualisation de l’´ecoulement
4.3.2 Mesures de d´ebit
4.4 Conclusion
Conclusion et perspectives
A Proprietes du R134a
B Croissance d’un bulle spherique dans un liquide surchauffe
B.1 Systeme d’equations
B.2 Adimensionnement
B.3 Discretisation
B.4 Resolution numerique
B.5 Resultats
Bibliographie
Liste des figures
Liste des tableaux

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