Les pointes-ondes continues du sommeil

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Epidémiologie

Même si les données épidémiologiques concernant les POCS sont rares et surtout difficiles à évaluer, en partie à cause de la diversité des définitions et des critères d’inclusion, quelques chiffres sont disponibles. En 1989, d’après une étude réalisée au centre Saint-Paul à Marseille, Les pointes-ondes continues du sommeil dans le cadre d’un syndrome de POCS sont retrouvés chez 3% des enfants d’âge scolaire et préscolaire adressés pour bilan spécialisé d’épilepsie. Il s’agit de 0,5% à 0,6% de tous les cas d’épilepsie chez l’enfant, observés dans les centres d’épilepsie de référence tertiaire [42]. Morikawa et al. ont observé 31 cas dans une population de 12 854 enfants épileptiques soit 0,5 % [78]. Kramer et al. retrouvent 0,2 % d’enfants porteurs d’une épilepsie avec POCS dans une cohorte de 440 enfants hospitalisés pour une deuxième crise épileptique [62].
La fréquence semble plus importante en Asie et en Europe par rapport au continent américain [56]. Dans les premières descriptions, il n’était pas observé de différence entre les deux sexes [78][108]. Actuellement, quelques auteurs signalent une prépondérance masculine. [19][21][41][63]

Physiopathologie

Les mécanismes sous-jacents au développement du schéma de POCS sont compliqués, même si plusieurs hypothèses existent. Une explication est que le réseau cortico-thalamique modulant les rythmes oscillatoires devient pathologiquement hyperactif, ce qui peut générer le schéma POCS observé sur le scalp à l’EEG [69]. Ce phénomène a été démontré par une analyse de cohérence de phase des enregistrements électroencéphalographiques [59]. La diffusion des anomalies paroxystiques induite par le sommeil lent chez l’enfant est due à une fonction d’hypersynchronie âge dépendante [71]. La perturbation des mécanismes impliqués dans la genèse des «spindles» et les oscillations physiologiques du sommeil engendre des décharges épileptiques qui diffusent au sein de réseaux corticaux [83][109].
La survenue d’une synchronisation bilatérale secondaire implique l’existence d’un foyer épileptique primaire. Plusieurs éléments orientent en effet vers une origine focale des manifestations électroencéphalographiques [30][91][108][117]. En effet, l’EEG lors de la veille et pendant les phases de sommeil paradoxal montre typiquement des anomalies paroxystiques focales. Les études expliquant la physiopathologie des POCS ont montré l’implication de la région périsylvienne, du cortex préfrontal, du gyrus cingulaire, ainsi que du thalamus dans la propagation bilatérale des décharges anormales suivant un réseau arciforme indépendamment de l’étiologie [84]. Par conséquent, les POCS peuvent être générés dans un réseau local et se généraliser à travers le circuit cortico-thalamique qui donne lieu à des oscillations physiologiques pendant le sommeil, contribuant à la généralisation des décharges épileptiques dans les POCS. L’interaction entre les neurones thalamo-corticaux excitateurs glutamatergiques dans le noyau dorsal et les neurones inhibiteurs GABAergiques réticulaires thalamiques est la base des propriétés oscillatoires du thalamus [125].
Les structures amygdalo-hippocampo-limbiques sont suspectées en raison de leur seuil épileptogène bas et de leur capacité à favoriser la diffusion d’anomalies paroxystiques. Mais les analyses électrocliniques des patients orientent plutôt vers un foyer frontal ou postérieur, mais volontiers temporal dans le syndrome de Landau-Kleffner [104].

Aspects électroencéphalographiques

La plupart des auteurs se sont accordés sur quelques critères clés pour définir le pattern POCS. Il s’agit notamment de:
o L’activation ou la potentialisation des décharges épileptiques pendant le sommeil lent [18][46][99][108].
o La présence de pointes-ondes lentes subcontinues bilatérales parfois latéralisées [18][53][108].
o La survenue de PO «pendant une proportion significative» du sommeil lent avec un seuil compris entre 25% et 85% [12][16][18][24][46][54][64][66] [68][85][93]119][122][123].

Quantification des anomalies EEG

Bien que certains auteurs utilisent la définition classique des décharges de pointes-ondes continues ou subcontinues pendant le sommeil lent pour le diagnostic de POCS, [16][24][51][66][68][93][123] d’autres jugent l’index pointes-ondes indispensable à ce diagnostic [19][54][63][64][67][68][93][108][122]. Cet index est habituellement exprimé en pourcentage et est largement utilisé. Cependant la méthode exacte du calcul de sa valeur n’est souvent pas précisée [19][54][67][68][108]. Pour certains auteurs, cet index vise à déterminer le nombre total de pointes par unité de temps appelé fréquence de pointes, et désigne le pourcentage de sommeil lent occupé par des pointes-ondes [54][93][96][108][109]. Pour d’autres, la méthode reproductible utilisée consiste à quantifier le pourcentage d’un intervalle d’une seconde contenant au moins une onde transitoire, appelé pourcentage de pointes-ondes [1][106]. Une comparaison formelle entre ces deux méthodes a montré que la fréquence des pointes-ondes pouvait mieux détecter les changements d’activité épileptique chez les patients présentant des décharges épileptiques très actives [96]. De plus, la fréquence des pointes se prête mieux à la quantification automatisée [20]. Il n’existe pas non plus de consensus formel sur la partie du sommeil utilisée pour calculer l’activité épileptique [1][54] [75][93][96][108]. En outre, il est défini un seuil de cet index PO comme critère diagnostique. Ainsi, différents niveaux de pourcentage sont établis. Depuis 1985, le groupe de Tassinari [104][108][109] exige qu’au moins 85% du sommeil lent soit occupé par une activité généralisée de pointes-ondes pour retenir le diagnostic du syndrome POCS, et propose une évaluation avec trois EEG différents sur une période d’au moins 1 mois [104][108][109]. En 2013, Sanchez Fernandez et al. [97] soutiennent cette définition dans une enquête menée auprès des membres de la “Child Neurology Society” et de “l’American Epilepsy Society” sur leur compréhension actuelle du spectre électro-clinique POCS. En parallèle, à travers d’autres études [40], les valeurs de seuil inférieures à 85% avaient été acceptées pour retenir l’index PO. En effet, Kobayashi et al. [119] ont considéré dans une série de 102 enfants avec des pointes-ondes activées par le sommeil, un index de 25% ou plus comme critère d’inclusion. Au cours de la même année, Inutsuka M et al. [54] rapportent lors d’une étude portant sur une série de 15 patients présentant un schéma de POCS, qu’un index pointe-onde de référence d’au moins 60% était nécessaire pour poser le diagnostic. Plus tard, en 2014, des valeurs de seuil inférieures à 85% avaient été acceptées si elles étaient associées à un tableau clinique approprié [13]. Ailleurs, des auteurs [46][93] ont inclus la notion de potentialisation par le sommeil des pointes-ondes comme “modèle suractivé durant le sommeil” [46] ou “POCS atypique” [93], faisant référence à des patients présentant une suspicion électro-clinique élevée de POCS, mais avec un index en dessous du seuil de 85%. Ces caractéristiques EEG atypiques peuvent comprendre une asymétrie interhémisphérique marquée, qui, dans sa présentation la plus extrême, peut se présenter sous forme de pointes-ondes unilatérales [18][33]. De plus, certains auteurs [36] estiment qu’il n’y a pas suffisamment de preuves pour soutenir que les décharges unilatérales ou focales doivent être quantifiées différemment des décharges symétriques et bilatérales.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE: REVUE DE LITTERATURE I. Rappels sur la classification des épilepsies
II. Rappel sur l’EEطح_G
II.1. Principes
II.2. Aspects techniques
II.3. Résultats
III. Sommeil et épilepsie
III.1. Effet de l’épilepsie sur le sommeil
III.1.1. Retentissement de l’épilepsie sur la macroarchitecture du sommeil
III.1.2. Retentissement de l’épilepsie sur la microarchitecture du sommeil
III.1.3. Autres retentissements
III.2. Effet du sommeil sur l’épilepsie
III.2.1. Effet protecteur du sommeil au cours de l’épilepsie
III.2.2. Effet facilitateur du sommeil sur l’épilepsie
IV. Les pointes-ondes continues du sommeil
IV.1. Définition
IV.2. Historique
IV.3. Epidémiologie
IV.4. Physiopathologie
IV.5. Aspects électroencéphalographiques
IV.5.1. Quantification des anomalies EEG
IV.5.2. Localisation des anomalies EEG
IV.5.3. POCS et architecture du sommeil
IV.5.4. Aspects évolutifs
DEUXIÈME PARTIE: NOTRE ÉTUDE
I. Patients et méthodes
I.1. Cadre de l’étude
I.2. Type et durée de l’étude
I.3. Population cible
I.4. Critères d’inclusion
I.5. Méthode de recueil
I.6. Aspects éthiques
I.7. Méthode d’analyse
II. Résultats
II.1. Aspects épidémiologiques
II.1.1. Le genre
II.1.2. L’âge
II.2. Aspects cliniques
II.3. Aspects électroencéphalographiques
II.3.1. Aspects de l’EEG de veille
II.3.1.1. L’activité de fond sur l’EEG de veille
II.3.1.2. Les anomalies surajoutées sur l’EEG de veille
II.3.2. Aspects de l’EEG de sommeil
II.3.2.1. L’architecture du sommeil
II.3.2.2. Les pointes-ondes continues du sommeil
II.3.2.2.1. Aspects quantitatifs des POCS
II.3.2.2.2. Aspects topographiques des POCS
III. Discussion
III.1. Aspects épidémiologiques
III.2. Aspects cliniques
III.3. Aspects électroencéphalographiques
III.3.1. Aspects électroencéphalographiques sur l’EEG de veille
III.3.2. Aspects électroencéphalographiques sur l’EEG de sommeil
III.3.2.1. Aspects de l’architecture du sommeil
III.3.2.2. Caractéristiques des POCS
III.3.2.2.1. Aspects quantitatifs des POCS
III.3.2.2.1. Aspects topographiques des POCS
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
RÉFÉRENCES

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