L’Homère d’Euripide

L’Homère d’Euripide

Le personnage d’Agamemnon

Le schéma suivant, sur la généalogie des Atrides, aide à bien connaître l’identité d’Agamemnon. Tantale Pélops – Hippodamie Atrée – Aéropée Thyeste Ménélas-Hélène Agamemnon- Clytemnestre Pélopia Hermione Iphigénie Chrisothémis Electre Oreste Egisthe Homère a opéré des modifications à propos de ce schéma. Il présente Agamemnon certes comme le fils d’Atrée et d’Aéropée mais il dit que celui-ci eut trois filles Iphianassa, Laodicée, Chrysothémis ainsi qu’un garçon Oreste. Il ne précise pas que Clytemnestre fut leur mère. Agamemnon est originaire de Mycènes et participe à la guerre mythique de Troie où il est élu chef de l’expédition. Cependant, il est un chef cupide et un mauvais stratège. 20 a. Un chef cupide Lors de l’assemblée où les Grecs discutent des moyens de conjurer la peste répandue dans l’armée par Apollon, Calchas, après avoir demandé protection à Achille, affirme que Chryséis doit être rendue à son père Chrysès. Agamemnon éprouva dès lors un bouleversement physique. Il s’attache à sa captive. « Il est des plus chagrins, terriblement ses entrailles se gonflent d’une noire fureur ; ses yeux paraissent un feu étincelant »33 . ( Mένε ς δὲ μέ φ ένες ἀμφὶ μέλ ν πίμπλ ν ᾿, ὄσσε δέ ἱ π ὶ λ μπε όων ἐἸκ θν·) Il veut un dédommagement, Briséis, la captive d’Achille. Achille trouve dans son attitude un homme « au cœur émaillé d’effronterie et qui ne songe qu’au gain34 ». Il pense plutôt au gain personnel qu’au bien de la communauté. Cette cupidité se lit davantage pendant les périodes de conquête. Agamemnon, resté derrière ses nefs, prenait les trésors qu’Achille arrachait à l’ennemi en distribuait peu et en gardait beaucoup35 . Il est, selon Achille, un chef qui a oublié le but de son expédition, et par là même sacrifie son peuple. Et pourtant un peuple qui se montre très fidèle à sa cause. « C’est toi, l’effronté, que nous avons suivi, pour te plaire, pour que vous ayez aux frais des Troyens une récompense, à vous, Ménélas et toi, face de chien ! Et de cela tu n’as cure, ni souci ! » 36 (Aλλὰ σ ί, ὦ μέ ᾿ ἀν δὲς, ἅμ᾿ ἑσπόμεκ᾿ ὄφ σὺ χ ί ῃς, μὴν ἀ νύμεν Μενελάῳ σ ί ε, κ νῶπ , 160 π ὸς Τ ώων· ῶν ὔ με έπῃ ὐδ᾿ ἀλε ίηε ς·) Au chant IX, lorsque les Achéens sont acculés par les Troyens, Agamemnon, qui tient beaucoup aux honneurs, en veut à Zeus. Le dieu lui avait promis une victoire sur les Troyens et il n’a vu que des désastres. C’est pourquoi, il se déchire d’avoir perdu tant d’hommes et d’être déshonoré. Agamemnon est également un général qui joue son role de chef. Au chant IV, on le voit avant le combat faire une revue de ses troupes. Il les encourage et les rassure de la destruction prochaine de Troie. Devant chaque détachement, il distribue des éloges et des blâmes. Pour Fernand Robert, Agamemnon engagé dans une aventure où l’honneur a plus de part que l’intérêt et où ses obligations l’ont attiré plus que ses desseins, essaie de garder le plus de sujets possibles non par amour pour eux mais pour maintenir sa puissance 36 . Iliade, I, 158-160. 22 politique37. C’est pourquoi, il voue un amour inébranlable à l’armée argienne. Quand les événements empirent, il ne pense qu’aux Argiens. « Puisque Zeus s’est détourné de nous », dit-il, « nous avons besoin, o Ménélas, d’un conseil qui protège et sauve au moins les Argiens avec leur flotte. » 38 ( χ εὼ β λῆς ἐμὲ κ ὶ σὲ δ εφὲς ὦ Μενέλ ε κε δ λέθς, ἥ ίς κεν ἐ ύσσε ἠδὲ σ ώσε Ἀ εί ς κ ὶ νῆ ς, ἐπεὶ Δ ὸς ἐ άπε φ ήν) C’est ce rang à maintenir et une avidité certaine des honneurs qui caractérisent sa personne. Il est aussi un mauvais stratège. b. Un mauvais stratège. Agamemnon est un mauvais stratège. Homère place à ses côtés un donneur de conseil, le vieux Nestor, pour l’exercice de ses fonctions. Il est incapable d’élaborer un plan de guerre. Ses idées sont toujours désastreuses. Diomède le considère comme un chef qui manque de la valeur « ’ λκθν », l’une des qualités qui constitue la force suprême d’un combattant κ ς εσ με σ ν39 . Pour Ulysse, Agamemnon est un chef qui conduit l’armée à la ruine. Ce jugement lui est appliqué au chant XIV lorsque les Grecs,  accablés de fatigue et de blessures par les Troyens, Agamemnon voulait profiter de la nuit pour fuir avec ses troupes. « Allons ! Suivons tous l’avis que je donne », dit-il, « tirons les nefs d’avant, celles qui sont halées au bord du flot ; toutes tirons-les à la mer divine ; puis faisons-les mouiller en eau profonde sur les grappins jusqu’au moment où viendra la nuit immortelle. Qui sait si à ce moment les Troyens ne vont pas renoncer à se battre, et si nous ne pouvons pas mettre à l’autre toutes nos nefs ? Nul ne saurait trouver mauvais que l’on cherche à fuir le malheur même de nuit. Ne vaut-il pas donc mieux se dérober à lui que devenir sa proie ? » 40 L’industrieux Ulysse lui dit : « C’est à d’autres troupes que tu aurais dû commander au lieu d’être notre chef nous à qui Zeus a donné pour destin de nos plus jeunes ans à notre vieillesse de dévider le fil des guerres douloureuses jusqu’à l’heure où l’on doit périr… Ah ! Tais-toi : crains qu’un autre Achéen n’entende ce langage : Non ! Il ne devrait pas passer entre les lèvres d’un homme qui porte le sceptre et à qui obéissent autant de gens que tu en comptes parmi les Achéens… Ah ! Je te dénie complètement le sens … Tu veux que les Troyens, alors qu’ils triomphent déjà, voient leurs vœux réalisés plus complètement encore, et que le gouffre de la mort soit notre lot certain. » 41 Le poète, à travers ces exclamations d’Ulysse qui expriment un étonnement certain de la part du héros devant l’attitude de son chef  de guerre, insiste sur l’incompétence d’Agamemnon au champ de bataille. Il ne sait pas commander. C’est ainsi que Diomède réfléchit à sa place. Il exhorte les Achéens au combat malgré leurs blessures. Tout en se tenant loin du carnage, il pourrait être à l’abri de l’ennemi. Et les Achéens l’approuvèrent. En plus, Agamemnon n’est pas un beau parleur. Il ne sait pas réagir en assemblée. Pendant les assemblées des chefs achéens, c’est Nestor qui lui conseillait les règles et les techniques de l’éloquence. « Parler et écouter, et au besoin agir d’après l’avis d’un autre lorsque son cœur l’aura poussé à parler pour le bien de tous ; C’est à toi en ce cas qu’appartient l’avis qu’il aura ouvert » 42 telles sont les paroles du vieux Nestor à son supérieur. C’est à juste titre que ROBERT F. dit de lui qu’ « il a toujours les yeux sur Nestor » et « attend une impulsion de Nestor »  . Toutefois, Homère reconnaît en lui un chef courageux qui a fait beaucoup d’exploits . Au total, retenons du personnage d’Agamemnon dans l’Iliade un chef avide d’honneurs et de richesses, un roi certes courageux mais qui ne sait pas commander, et par conséquent qui a besoin de la compréhension de ses subordonnées. De tels caractères seront repris par Euripide dans la représentation du personnage d’Agamemnon dans sa tragédie.Voyons maintenant les caractères qui sont attribués à son frère Ménélas.

Le personnage de Ménélas

Ménélas, le principal concerné dans l’histoire de la guerre, est décrit comme un héros animé d’une bonne volonté mais peu efficace. a. Un héros dévoué Tout d’abord, dans la composition même de l’armée grecque, Ménélas dirige un contingent particulier de « soixante nefs », distinct de celui d’Agamemnon45 . Et le narrateur précise que « Ménélas marche avec eux, s’assurant en son ardeur et les poussant au combat ». Ménélas a fait aussi beaucoup d’exploits pendant la guerre. C’est lui qui tient le rôle principal parmi les Achéens dans les scènes du chant III et de la première partie du chant IV qui se jouent dans la plaine. Au chant III, il livre un combat singulier contre Pâris, son rival. Il le blesse si bien qu’Aphrodite, pour sauver Pâris, le couvre d’un nuage et le transporte chez lui. Il l’avait atteint adroitement d’un coup de lance sur les côtes et avait remporté le duel. Agamemnon demande aux Troyens d’exécuter les conditions fixées avant le combat, à savoir qu’Hélène revienne au victorieux. Mais ceux-ci n’honorent pas leur engagement. Au chant IV, Héra qui souhaite ardemment la victoire des Achéens, demande à Athéna de pousser les Troyens à violer leurs serments de paix.  convainc alors Pandare de décocher une flèche à Ménélas47. Celui-ci, blessé, rassure son frère Agamemnon inquiet : « N’aie pas crainte et ne va pas si vite effrayer l’armée achéenne. Le trait aigu n’est pas entré au bon endroit48 . » Ménélas a réussi d’autres exploits. Il a tué Scamandrios, fils de Strophios49 , puis Pylémène50, chef des Paphlagoniens et défend les fils de Dioclès. Au début du chant VI, c’est Ménélas qui attrape Adrestos. Celui-ci est tombé de son char et Ménélas, pique en main, est sur le point de l’assassiner51. Au chant VII, au défi d’Hector, c’est Ménélas qui est le premier à se lever pour l’affronter52 . L’Atride intervient aussi dans le récit de la grande défaite des Achéens. C’est lui qui perçoit l’appel d’Ulysse blessé et organise son secours : « …La voix d’Ulysse l’Endurant m’a frappé les deux oreilles. Allons ! Entrons dans la foule53… » C’est lui qui « emmène Ulysse hors de la foule, en lui tenant la main jusqu’à ce que son écuyer lui ait fait avancer son char54 . »  Dans les récits de la résistance animée par Poséidon, Ménélas blesse Hélénos, tue Pisandros et échappe aux coups du fils de Pylémène55 . Au chant XIV, il tue Hypérénor56. On le voit aussi secourir Mégès en assassinant Dolops57 . Sa détermination se lit davantage au chant XVI. Ménélas fait partie des chefs entre autres Patrocle, Antiloque, Thrasimède, Ajax, Mérion qui, dans la contre offensive des Myrmidons, tuent chacun leur homme. Le narrateur compare leur fougue à celle des loups se ruant sur des chevreaux ou des agneaux abandonnés par leurs bergers58 . Après la mort de Patrocle, on voit Ménélas défendre héroïquement le cadavre de celui-ci. Il est le premier à venir combattre auprès de lui après sa mort. Comme l’illustre ce passage : « Cependant le fils d’Atrée, Ménélas chéri d’Arès, n’est pas sans avoir vu Patrocle succomber sous les Troyens dans le carnage. Il s’en vient à travers les champions hors des lignes, casqué du bronze flamboyant, et se poste à ses côtés pour le défendre » 59 . (οὐδ᾽ ἔλαθ᾽ Ἀηπέορ ςἱὸν ἀπηἸθιλον Μενέλαον Πάηποκλορ Σπώεζζι δαμεὶρ ἐν δηφοηῆηι. βῆ δὲ διὰ ππομάσυν κεκοπςθμένορ αἴθοπι σαλκ῵, ἀμθὶ δ᾽ ἄπ᾽ αὐη῵ βαῖν᾽…) 55 . Iliade, XIII, 581-649. 56 . Iliade, XIV, 515-519. 57 . Iliade, XIV, 539-542. 58 . Iliade, XVI, 352-355. 59 . Iliade, XVII, 1-4. 28 Il se heurte au bouillant Euphorbos fils de Panthoos qu’il tue au cours d’un combat singulier60 . Devant Hector, Ménélas s’arrêta et fit appel à son ami Ajax. Il organise la défense du corps, dépouillé de ses armes. Ajax prit la relève. Athéna ne tarda pas à procurer à l’Atride la vigueur et l’audace nécessaires pour bien combattre si bien qu’il tua Podès61, un fidèle compagnon d’Hector. Sur les conseils d’Ajax, il se met à la recherche d’Antiloque, le fils de Nestor, et l’envoie porter à Achille la nouvelle de la mort de son ami. C’est enfin Ménélas qui parvient, avec l’aide de Mérion, à dérober le cadavre de Patrocle et à le trainer loin du champ de bataille62 . Ménélas se présente aussi comme un héros généreux et soucieux du droit. Au chant III, dans son combat singulier contre Paris, l’Atride souhaite que le conflit soit tranché par un règlement qui assure le rétablissement entre les deux communautés63 . Au début du chant VI, Adrestos, tombé de son char, le supplie de le prendre vivant et de l’échanger contre une rançon de métaux précieux. Ménélas accepte mais Agamemnon s’interpose. Celui-ci dissuade Ménélas de l’épargner. Il lui rappelle la solidarité des Troyens dans le mal que Paris lui a fait64 . Au chant XIV, lors d’une épreuve athlétique, Antiloque, par ruse, a lancé ses cheveux devant ceux de Ménélas. Celui-ci demande à ses compagnons d’armes 60 . Iliade, XVII, 1-60. 61 . Iliade, XVII, 556-581. 62 . Iliade, XVI, 702-760. 63 . Iliade, III, 97-110. 64 . Iliade, VI, V. 62. 29 de se prononcer par un jugement et de ne pas user de partialité en sa faveur. Il ne veut pas qu’on lui reproche d’avoir profité de son rang. On le voit ainsi luimême, faire la sentence à laquelle personne ne trouvera rien à dire : « Tiens Antiloque la main sur tes chevaux jure le Maitre de la terre et Ebranleur du sol que tu n’as pas, par traitrise et volontairement gêné la marche de mon char.65 » Ces comportements de l’Atride à certains endroits du texte poussent Philippe Rousseau à dire que « Ménélas joint à un sens aigu de ses obligations envers la communauté des Achéens et des règles qui doivent gouverner les relations entre les hommes, une connaissance particulière des procédures et des rituelles qui permettent en cas de transgression ou de conflit de rétablir la concorde et la paix.66 » Mais aussi dévoué et amical qu’il soit, Ménélas est pour ses compagnons d’armes peu efficace. b. Un héros peu efficace Malgré ses exploits, Homère présente Ménélas à certains endroits de son texte comme un héros peu efficace. 65 . Iliade, XVI, 581-585. 66 . Rousseau Ph., « Le deuxième Atride, le type épique de Ménélas dans l’Iliade, », in Mélanges Pierre Leveque, Anthropologie et société, p.325-354, Paris, Les Belles Lettres, 1990, p.345. 30 En effet, au chant V, Ménélas, poussé par la pitié, vient hors des lignes pour interdire à Enée de dépouiller les cadavres. Antiloque intervient pour déjouer ce piège que lui a tendu Arès. Il se met à ses cotés pour combattre Enée. C’est ainsi que celui-ci renonça à son duel67 . Lorsqu’Athéna et Poséidon excitent Hector à défier n’importe lequel des Achéens en combat singulier, c’est Ménélas au cœur gémissant qui se lève le premier. Agamemnon le retient et l’invite à renoncer à ce duel68. Il juge qu’Hector est plus fort que Ménélas, même le vaillant Achille qui est cent fois meilleur que celui-ci s’effraie de l’affronter dans la mêlée. C’est ainsi que neuf héros se présentèrent parmi les Achéens- Agamemnon, Diomède, les deux Ajax, Idoménée, Mérion, Eurypyle, Thoas et Ulysse. Le vieux Nestor propose de faire un tirage pour choisir un d’entre eux. Les Achéens se mirent ainsi à prier : « Ah ! Zeus Père ! Fais qu’Ajax soit choisi, ou le fils de Tydée, ou le roi même de Mycènes pleine d’or ! 69 » Le sort désigna Ajax. Celui-ci éprouve une grande joie et se montre très déterminé à combattre Hector. Tous les héros prièrent pour les deux adversaires. Parce qu’il manque à l’Atride de la vigueur, les Achéens choisissent un autre chef à sa place. Au chant X également, Agamemnon recommande de ne pas choisir Ménélas dans la reconnaissance qu’il prépare. S’adressant à Diomède, il dit : « Ne va donc pas …. Laisser-là le meilleur pour en prendre un moins bon, par pure 67 . Iliade, V, 561-567. 68. Cf. Iliade, VII, 104-122. 69 . Iliade, VII, 179-180. 31 courtoisie en ne regardant qu’au lignage. » Et le narrateur de poursuivre « il dit ; il a soudain eu peur pour le blond Ménélas 70 » Philippe Rousseau note que cette infériorité de Ménélas se limite strictement à la sphère du combat et n’ôte en rien à la supériorité du rang qui fait de l’Atride un roi. Pour lui, le poète dans ses épisodes insiste sur la peur d’Agamemnon à l’idée du danger que court Ménélas ou la précipitation avec laquelle les chefs des Achéens retiennent celui-ci au moment où il s’arme pour affronter Hector71 . A propos de cette réflexion de Philippe Rousseau, de nombreuses questions hantent notre esprit. Ménélas n’est-il pas venu à la guerre pour combattre ? Cette réaction d’Agamemnon à l’endroit de son frère ne souligne-t-il pas son manque d’expérience comparé aux chefs comme Achille, Diomède, Hector ? Tout donne lieu de le croire. Au chant XVII, le divin Apollon souligne son manque de vigueur. Il reproche à Hector de trembler devant le plus faible des Achéens : « Hector quel autre effrayeras-tu désormais, si tu as tel peur de Ménélas jadis si piètre combattant ? Et le voilà maintenant qui part, tout seul, emportant un cadavre entre les rangs des Troyens72 ». (Ἕκ ίς κέ σ᾽ ἔ ᾽ ἄλλ ς Ἀχ ῶν βήσε εν; ἷ ν δὴ Μενέλ ν ὑπέ εσ ς, ὃς ὸ πά ς ε μ λκ κὸς ἰχμθ ής· νῦν δ᾽ ἴχε ἶ ς ἀεί ς νεκ ὸν ὑπ᾽ ἐκ Τ ώων,)  Ce sont ces deux traits qui caractérisent le personnage de Ménélas dans l’Iliade : une conscience de ses devoirs et une faiblesse physique qui l’empêche de réussir quelques grands exploits. Euripide rendra ces traits beaucoup plus obscurs. Il deviendra un personnage qui a du mal à s’affirmer parmi les siens. C. Le personnage d’Achille Achille est le fils de Pélée un mortel et de la déesse Thétis. Il fut confié successivement à Chiron73 et à Phoenix. Chiron lui apprit l’art de la chasse, du dressage des chevaux et de la médecine. En plus, Achille apprit à chanter et à jouer de la lyre. Chiron l’entretenait dans les vertus antiques : le mépris des biens de ce monde, l’horreur du mensonge, la modération, la résistance à la douleur et aux passions mauvaises. Les paroles suivantes d’Achille prouvent les vertus qu’il a reçues de cette éducation : « Celui-là m’est en horreur à l’égal des portes d’Hadès qui, dans son cœur, cache une chose et sur les lèvres en a une autre. Je dirai moi ce qu’il me semble qu’il faut dire. » C’est un centaure qui a reçu lui aussi les précieux enseignements d’Apollon et d’Artémis qui lui ont appris l’art de la médecine et de la chasse, enseignements qui lui permettent de recevoir des malades et des disciples. 74 . Iliade, IX, 312-314. 33 Chiron le nourrissait, dit-on de miel pour lui donner la persuasion, de moelles d’ourses pour la douceur et d’entrailles de lions et de sangliers pour lui communiquer la force de ces animaux. Tout enfant, Phoenix s’occupait de lui. Il lui donnait à manger et à boire, le redressait de ses actes enfantins. Et Achille ne connaissait personne d’autre que lui. Il lui apprit l’art de l’éloquence et le maniement des armes. « Je devais t’apprendre à être en même temps un bon diseur d’avis et un bon faiseur d’exploits75 » lui dit-il, au chant IX. ……..δ δ σκέμεν άδε πάν , μύκων ε ῥθ ῆ ᾽ ἔμεν π θκ ῆ ά ε ἔ ων.) En outre, on rapporte toute une légende autour du personnage d’Achille. Zeus, dit-on, sur les conseils d’un oracle, de peur d’épouser Thétis et d’avoir d’elle un fils qui le détrônerait un jour, la maria à un mortel, Pelée. Mais Thétis qui désirait avoir des enfants immortels plongeait ses fils dans le feu pour éliminer de leur nature les éléments mortels qu’ils tenaient de leur père. Les enfants mouraient ainsi. Achille eut la chance de survivre grâce à son père Pelée qui l’arracha des œuvres de sa mère et demanda au sage Chiron de lui remplacer l’os de sa cheville que Thétis avait brûlé. Chiron se procura la cheville du géant Damysos, de son vivant, un coureur particulièrement rapide et la lui adapta76. Achille eut ainsi toute sa vie le don de courir très vite, ce qui lui a valu l’épithète qu’Homère lui applique – « Achille aux pieds rapides » (πόδ ς ὠκὺς Ἀχ λλεύς·). Et Euripide, pour mettre en 75 . . GRIMAL P., Petite histoire de la mythologie et des dieux, p. 154. 34 relief sa rapidité, le montre courant sur le sable du rivage contre un char attelé de quatre chevaux77 . On dit aussi que Thétis aurait trempé Achille tout jeune dans les eaux du Styx pour le rendre invulnérable mais elle le tenait par un talon, et négligea de mettre cette partie dans l’eau magique. Son talon resta alors son point faible, la seule partie de son corps qui fût sans protection divine78 . Sa mère également, au moment de la guerre de Troie, l’aurait dissimulé dans l’île de Scyros pour qu’il ne participât pas à l’expédition79. Homère, dans l’Iliade, semble s’inspirer de cette légende merveilleuse, qui fait d’Achille un héros entouré de surnaturel mais attribue à celui-ci des traits très humains. 

Table des matières

Introduction
Première partie : La Guerre
Chapitre premier : Les préparatifs de la guerre : l’Iphigénie à Aulis
I La peinture des héros homériques
A) Le personnage d’Agamemnon
B) Le personnage de Ménélas
C) Le personnage d’Achille
II Euripide et les personnages homériques
A) Agamemnon et Ménélas
B) Achille
C) Iphigénie
III-L’actualité de la pièce
A) La critique des dirigeants
B) L’appel à l’union
Chapitre deuxième : La Guerre : Le Rhésos
I- Le chant X de l’Iliade
A- Le camp des Grecs
B- Le camp des Troyens
II- Le Rhésos d’Euripide
A- Le camp desTroyens
B- Le drame.
III-Ressemblances et Dissemblances
A- Ressemblances
B- Dissemblances
C- Le Rhésos est-il d’Euripide ?
Chapitre troisième : L’Hécube
I- Le sacrifice de Polyxène
A) Ulysse et Hécube
B) La brave Polyxène
II – La Fable de Polydore
A) Agamemnon et Hécube
B) Le jugement d’Agamemnon
III- L’actualité de la pièce
A) Le désastre de Délion et de Sphactérie
B) La question Thrace
Chapitre quatrième : La chute de Troie : Les Troyennes
I La prise d’Ilion : la réaction des Troyennes
A) Cassandre
B) Andromaque
C) Hécube
II – La position politique d’Euripide
A) La Sicile grecque
B) Les idées d’Euripide
Deuxième partie : Le retour des Grecs
Chapitre premier : Le retour de Ménélas : l’Hélène
I) Sources
A) Les Nostoi d’Agias de Trézène
B) Les chants III et IV de l’Odyssée
II) La rencontre des deux époux
A) La reconnaissance
B) Le stratagème
C) L’actualité de la pièce
III Ménélas en Grèce : L’Andromaque
A) La confrontation des deux légendes
B) La mort de Néoptolème
C) L’actualité de la pièce
Chapitre deuxième : Le retour d’Ulysse : Le Cyclope
I Le chant IX de l’Odyssée
A) Les obstacles du retour
B) Ulysse et le Cyclope
II Les modifications de la légende
A) Le Polyphème euripidéen
B) Silène et les Satyres
C) L’Actualité de la pièce
Chapitre troisième : Le retour d’Agamemnon : L’Electre, L’Oreste, L’Iphigénie en Tauride
I- L’Electre
A) Le personnage d’Electre
B) La reconnaissance d’Electre et d’Oreste
C) L’actualité dans Electre
II- L’Oreste
A) La folie d’Oreste
B) Le jugement des matricides
C) La vengeance sur Ménélas
D) L’actualité dans Oreste
III-L’Iphigénie en Taur
A) La rencontre d’Iphigénie et d’Oreste
B) La scène de reconnaissance
C) L’actualité de la pièce
Conclusion.

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