L’inondation comme risque : savoirs experts, négociations, arrangements

L’inondation comme risque : savoirs experts,
négociations, arrangements

Penser la notion de risque dans le domaine de l’aménagement

« La science sociale est donc une construction sociale d’une construction sociale. Il y a dans l’objet même, c’est-à-dire dans la réalité sociale dans son ensemble et dans le microcosme social à l’intérieur duquel se construit la représentation scientifique de cette réalité, le champ scientifique, une lutte à propos de (pour) la construction de l’objet, dont la science sociale participe doublement : prise dans le jeu, elle subit les contraintes et elle y produit des effets, sans doute limités ». [P. BOURDIEU, 2002, Science de la science et réflexivité, p72-173] « Est fait social toute manière de faire, fixée ou non, susceptible d’exercer sur l’individu une contrainte extérieure ; et, qui est générale dans l’étendue d’une société donnée tout en ayant une existence propre, indépendante de ses diverses manifestations au niveau individuel » [E. DURKHEIM, 1895 [67], Les règles de la méthode sociologique, p. ] Au regard de la polysémie du mot « risque » dans le domaine de l’environnement (BORRAZ, 2008), la proposition de réaliser un rapide préambule étymologique semble faire sens. Pour le philologue Kurt BALDINGER, les mots se trouvent « au milieu d’un réseau complexe de relations, sur deux plans très différents : sur le plan linguistique et sur le plan humain. Sur le plan linguistique, une orientation structurale au sens le plus large en est la conséquence. Sur le plan humain, il s’agit de retrouver le trait d’union entre l’histoire du mot et l’histoire de l’homme en tant qu’être historique, social et culturel » (59, p64). Le corollaire d’une telle proposition est qu’un mot n’adopte pas le même contenu selon la situation ou l’époque à laquelle il se trouve mobilisé. L’étymologie informe alors sur l’émergence des idées que recouvre le terme et ainsi que sur leur circulation dans différents contextes et lieux où elles ont pu être mobilisées. Ce détour renseigne aussi sur la progressive constitution du terme autour de considérations particulières, puis sur son versement progressif dans le langage courant. A travers un rapide prélude étymologique, l’idée est donc de conduire une première piste de réflexion pour comprendre l’apparition et l’utilisation du mot dans le domaine de l’aménagement. Préambule – une étymologie qui ne fait pas consensus L’étymologie du mot « risque » ne fait pas consensus. L’hypothèse selon laquelle le terme dériverait de l’italien risco, lui-même issu du latin resecum (« ce qui coupe »), est la plus répandue (GUERREAU, 97 ; PERETTI-WATEL, 2001 ; LE BRETON, 2012). Par extension, le terme désignerait les rochers escarpés puis l’écueil qui menace les bateaux avant de faire référence aux dangers qu’encourent les marchandises en mer. Il s’agit de la principale filiation retenue au sein des dictionnaires, parmi lesquels Le Dictionnaire culturel en langue française qui indique que « l’hypothèse la plus satisfaisante est celle du latin resecum “ce qui coupe” […]. Resecum aurait pris la valeur d’“écueil” puis de “risque couru en mer” » (REY, 2006B, 20 p53), ou encore Le trésor de la langue Française informatisé8 . Le terme trouverait alors son origine au milieu du XIIIème siècle dans le secteur des assurances maritimes, d’abord en Italie, puis en Espagne avec le terme riesgo, avant de se généraliser dans les langues européennes au XVIème siècle. Cependant, l’historien Sylvain PIRON (2004) reproche à cette trajectoire linguistique les « contorsions peu commodes » qu’elle affiche. Il date les premiers usages du terme resicum au milieu du XIIème siècle dans des actes notariaux génois et en retrace les évolutions et variations (resicu, resegum, rezegue) dans le latin médiéval du XIIIème siècle, selon des modalités principalement économico-juridiques. Ainsi questionne-t-il les transformations du terme, d’un « sens initialement concret, évoquant un danger maritime » vers un « sens abstrait » juridique, d’autant que « les premiers usages du terme n’évoquent à aucun moment l’idée d’un obstacle à la navigation » (2004, p5). Des premiers usages essentiellement économico-juridiques De même, le linguiste Pierre GUIRAUD (82) conteste cette origine et fait état de l’absence du « moindre commencement de preuve à ce roman nautique »9 . Il repense la trajectoire du terme en l’associant à un « développement menant à des valeurs de “combat” et de “résistance” ainsi qu’à celle de “danger” » (BENCHEIKH, 2002, p0). Le mot « risque » prendrait alors racine dans le terme roman rixicare, du latin rixare (« se quereller », qui a donné le terme « rixe »). Mais malgré la ressemblance phonétique de ces deux termes (« risque » et « rixe »), cette étymologie n’est pas validée par PIRON notamment au regard du faible nombre d’illustrations10 . En suivant l’hypothèse d’un « rapprochement entre le terme « risque » et l’arabe ( رزق ( rizq, pressentie initialement par l’orientaliste Marcel DEVIC, PIRON apporte des arguments supplémentaires à cette filiation. En arabe, rizq désigne « une portion, toute chose qui vous est donnée (par Dieu) et dont vous tirez profit : tout ce qui est nécessaire pour vivre » 8 Le TLFI propose de nombreux exemples de l’utilisation du terme « risque » dans la langue française dès le XVIème siècle, sous une forme féminine, puis de manière plus fréquente dans la seconde moitié du XVIIème siècle, notamment chez MOLIERE (L’Impromptu de Versailles) ou bien dans une référence au Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots François, de Antoine FURETIERE, à l’intérieur duquel il est défini comme « f. m. & f. Hasard qui peut causer la perte, dangereux évènement. », suivi d’exemples d’utilisation « Un soldat, un matelot, un voyageur, ont bien des risques à courir, ils courent souvent risque de la vie. L’usure dans le commerce de mer est excusée à cause de la risque qu’on court. J’en prends le risque sur moi, j’en veux bien courir le risque » Cité par C. KERMISCH (2011, p) et O. BENCHEIKH (2002, p0)0 PIRON signale la graphie rixicum (voir note 23, p5 de PIRON, 2004) comme unique preuve, là où BENCHEIKH atteste du caractère « peu convaincante [de l’hypothèse] car elle n’est illustrée par aucune citation probante » (2002, p0)1 (DEVIC, 1876, p-5) et son utilisation évolue pour désigner la « solde » ou la « ration » des soldats, puis pour faire référence à la « chance », ou à un « hasard favorable ». Il s’agirait alors d’un sens proche du latin fortuna, synonyme du terme resicum, le premier renvoyant à une providence divine, le second, suggérant un accord entre deux parties d’un contrat, généralement associé à des conditions et des conséquences (PIRON, 2004). PIRON achève son argumentation en se référant à d’autres exemples de termes issus de l’arabe ayant circulé vers le latin de l’Italie du XIIème siècle, pratique relativement courante dans le domaine commercial. La nouveauté que constitue ce terme et l’idée qu’il véhicule sont elles aussi difficiles à dater11. Pour sa part, l’historien médiéviste Alain GUERREAU considère que « la société médiévale, de la chute de l’Empire romain jusqu’au XVIème siècle, n’a pas connu la notion de risque, au sens contemporain du terme » (97, p1). Bien que les sociétés médiévales européennes aient été confrontées régulièrement à de grands dangers et périls, l’imprévisibilité de ces fléaux (fames, pestis, bellum) 12 ainsi que le système de contrôle et de stabilité en cours diabolisant toute forme de hasard, de spéculation ou de probabilité, empêchaient les sociétés de penser la notion de risque, alors « incompatibles avec ce qui fait le cœur de cette notion » (Ibid, p2). Ainsi, GUERREAU réfute-t-il la possibilité de traduire le latin periculum, terme pourtant courant dans le droit romain, par le mot « risque » dont il note l’apparition au plus tôt au XIIIème siècle, principalement dans le secteur maritime, pour y rester confiné jusqu’au XVIème siècle. A l’inverse, PIRON, constatant la démocratisation des vocables de jeux de hasard13 ou encore les évolutions de certains termes (dont celui d’« aventure »14), s’attache à comprendre le contenu du terme resicum : « l’imputation à un sujet juridique d’une charge financière éventuelle, liée à une entreprise au résultat incertain, mais qui n’a pas besoin d’être particulièrement hasardeuse » (p3). Il analyse la généralisation progressive du terme, d’abord dans le domaine commercial, juridique puis dans la littérature italienne du XIIIème siècle. Si la 11 En s’appuyant sur des exemples épars, Céline KERMISCH note, par exemple, l’impossibilité d’appréhender la manière dont les civilisations antiques saisissent la notion de risque, soulignant la difficulté « d’établir une distinction claire entre, d’une part, les pratiques d’interprétation divinatoires, les recommandations de prudence ou encore les simples paris, et d’autre part, la gestion des risques au sens moderne » (2011, p). Concernant cette tentative, elle met en garde quant à la prudence nécessaire lors de l’observation de populations anciennes et la propension de certains chercheurs à calquer des conceptualisations contemporaines2 Respectivement la famine, la peste et la guerre. A. GUERREAU (97) analyse la façon dont les populations médiévales faisaient face à ces grands fléaux, notamment en produisant « des formes de réponses collectivité d’une relative efficacité » (p5)3 Par exemple chaance, du latin cadentia, « le jeu de dés » ou encore hasaard de l’arabe yasara – « jouer au dés » (PIRON, 2004)4 Celui-ci est issu du grec adventurus, « ce qui doit arriver ». D’anciennes acceptions du terme désignaient « un revenu ou une rente dont l’éventualité ne fait aucun doute » (PIRON, 2004)2 forme resicum n’apparaît pas systématique dans le langage savant, PIRON note des connotations similaires à celles de l’idée de risque dans l’emploi du terme periculum au sein de divers documents officiels (traités, contrats, etc.). Il y pointe notamment « l’anticipation d’éventualités contingentes, permettant d’évaluer, au présent, les gains et les dommages probables, assumés par les acteurs » (2004, p2). Selon lui, la notion de risque qui émerge dans le secteur maritime, bien qu’elle ne soit pas généralisée à toute l’Europe, se diffuse progressivement autour de la Méditerranée, tout en conservant ses connotations économico-juridiques. Elle fait alors référence à l’action d’un individu assumant les potentielles conséquences des engagements qu’il contracte. Une laïcisation du mal qui sert au déploiement d’une nouvelle idée Une thèse fait état du lien entre la réforme religieuse, l’essor du capitalisme durant la Renaissance et la diffusion de l’idée de « risque » en Europe (KERMISCH, 2011 ; LUHMANN, 91[2002]). Cette dernière constituerait alors l’une des résultantes du capitalisme et enclencherait une nouvelle manière de se référer à un danger : les dommages causés par celuici cessent d’être attribués à la manifestation de la providence mais sont, en lieu et place, considérés comme fortuits, impersonnels et sans responsables. Néanmoins, cette théorie ne fait pas l’unanimité puisqu’elle est rejetée par certains auteurs (PRADIER, 2006), ou considérée, à l’inverse, comme le moment même de l’apparition de la notion de risque (LUHMANN, 91 [2002]). L’époque à laquelle elle se réfère est alors propice à l’émergence des probabilités (HACKING, 75) et au développement du système assurantiel. En effet, ce dernier voit le jour durant la seconde moitié du XVIIème siècle en s’appuyant sur les modèles de calcul probabilistes, dont la théorie se forge progressivement au sein de l’école de logique et de mathématiques de Port-Royal15 . En parallèle du développement de la statistique et du calcul de probabilité émergent des préoccupations philosophiques propres à la raison. Céline KERMISCH relève un extrait du théologien et mathématicien Antoine ARNAULD (1683) argumentant contre la crainte du tonnerre : « Puis donc que la crainte d’un mal doit être proportionnée non seulement à la grandeur du mal, mais aussi à la probabilité de l’évènement, comme il n’y a guères de genre de mort plus rare que de mourir par le tonnerre, il n’y en a guères aussi qui nous dust causer 15 La naissance du calcul de probabilité est généralement attribuée à Blaise PASCAL, qui répondant à un problème posé par le chevalier de MERE, formule le fameux « pari de Pascal ». Pour une analyse du pari, voir BOURDIEU (80A, P0-84). Jérôme CARDAN, près d’un siècle auparavant ébauchait le calcul des chances par l’utilisation des mathématiques en s’essayant au Liber de ludo alaea (Livre du jeu de hasard), écrit en 1564, mais publié seulement en 1663. Cette date de publication atteste, en outre, de l’intérêt pour le calcul probabiliste naissant3 moins de crainte, vu même que cette crainte ne sert de rien pour nous le faire éviter » (KERMISCH, 2011)16. Exempte de toute référence à la providence, la citation montre l’utilisation des probabilités pour appréhender une potentielle occurrence du tonnerre. Il s’agit, alors, d’un premier exemple de « laïcisation de la catastrophe » dont l’avatar le plus communément cité sont les échanges intellectuels et théologiques qui suivent le tremblement de terre dévastateur de Lisbonne en 1755. Dans son ouvrage l’Etat Providence, François EWALD (86) pointe le rôle central qu’a joué cet évènement dans la progressive critique de la théodicée, alors généralisée dans l’Europe du XVIIIème siècle, ainsi que dans la rencontre entre les réflexions sur la raison et le calcul de probabilité. La célèbre correspondance entre ROUSSEAU et VOLTAIRE à propos « du Désastre de Lisbonne », dont le contenu de la dernière lettre est cité par Jacques THEYS (87), montre l’émulation intellectuelle qui entoure cet évènement. ROUSSEAU soumet l’idée que « la plupart des maux physiques sont encore de notre ouvrage », avant d’exposer que « si les habitants de cette grande ville eussent été dispersés plus également et plus légèrement logés, le dégât eut été beaucoup moindre et peut-être nul ». Sans détourner les propos du philosophe des Lumières ou les considérer de manière anachronique, le lien effectué entre l’aménagement d’une ville et les effets d’un potentiel accident peuvent apparaître comme les ébauches d’une prévention des risques, qui n’en porte alors pas le nom. De même, l’historien Grégory QUENET (2010), retraçant l’histoire des tremblements de terre en France au XVIIIème siècle, montre comment une « laïcisation du regard de la nature » s’opère, dans une société qui fait face à de nouvelles préoccupations, et dont les moyens de circulation d’information s’accroissent. L’auteur propose notamment comme illustration un édit de 1695 sur la réparation des églises et presbytères qui instaure une codification juridique de la catastrophe. Il signale les « multiples procès suite aux catastrophes naturelles, pour définir la cause exacte des dommages matériels. […] Ces controverses sur la responsabilité se développent sans qu’apparaissent pour autant une théorie générale de la responsabilité » (p. ). Ainsi, si le séisme de Lisbonne stabilise les questionnements sur la nature métaphysique des catastrophes et sur la responsabilité des sociétés humaines, l’émergence de ces réflexions les précède. Selon QUENET « la laïcisation de la catastrophe réside moins dans le rejet des interprétations religieuses, qui reste très relatif, que dans la transformation du drame en événement contingent situé dans un temps et dans un espace précis » (p1)6 Passage issu de ARNAULD A., 1662, La logique de Port-Royal, p69-470 et cité dans KERMISCH, 2011, p. L’orthographe de la citation respecte le passage original4 Au cours du XVIIIème siècle, le mot « risque » et les idées qu’il véhicule connaissent une trajectoire féconde au contact des mathématiciens, qui tâchent alors d’en proposer des modélisations numériques17. Mais c’est surtout auprès des assurances qu’il se démocratise, avant de verser progressivement dans le langage commun. Ses usages se multiplient dans la littérature des XIXème et XXème siècles18 et il fait alors majoritairement référence aux décisions subjectives prises par un individu, qui doit, par la suite, en assumer les conséquences. L’ensemble sert de terreau fertile à son incorporation dans d’autres domaines, et en particulier dans celui de l’aménagement. Pour comprendre la notion de risque dans le domaine de l’aménagement Ce parcours étymologique met en évidence le contexte dans lequel le mot « risque » se stabilise. Ses premiers usages couvrent donc des situations d’incertitude pour lesquelles des méthodes probabilistes et mathématiques sont susceptibles d’apporter des éléments d’éclairage. En cela, son versement dans le langage courant, ainsi que dans plusieurs domaines spécialisés, contribue à asseoir une modalité mathématico-technique pour saisir les problèmes associés. De cette manière, son succès peut être vu comme l’un des marqueurs d’un déplacement dans la manière d’appréhender certaines réalités sociales : les outils probabilistes et les instruments techniques permettent, ensemble, de décrire et d’étudier des situations d’incertitude à l’aune d’une rationalité technique, c’est-à-dire d’une modalité d’explication et de justification des réalités sociales fondée sur la mobilisation de connaissances et compétences spécialisées. Pour autant, avant de caractériser le potentiel effet que peuvent avoir des phénomènes physiques incertains et possiblement dévastateurs sur les sociétés voisines, le terme « risque » reste rare. Il s’avère même longtemps déconnecté des thématiques environnementales, ces problèmes étant davantage pensés en tant que « catastrophe », « désastre » ou bien « accident industriel ». Les tâtonnements dans l’émergence du terme et des idées associées, ainsi que l’apparente variabilité des situations auxquelles ils ont pu historiquement faire référence, laissent alors penser que l’usage du mot dans le domaine de l’aménagement est le produit d’un processus de stabilisation établit sur le long court. Selon cette perspective, le fait d’exprimer la protection vis-à-vis d’inondations, d’accidents technologiques ou d’autres phénomènes en termes de « risques » correspondrait a 17 A titre d’exemple, le mathématicien, physicien et médecin Daniel BERNOULLI propose en 1738 une Théorie sur la mesure du risque, par laquelle il tente de modéliser le choix d’un décideur donné et repère le caractère subjectif du risque pris par celui-ci (KERMISCH, 2011, p0-11)8 Article « Risque » du Trésor de la langue française informatisé : http://www.atilf.fr/tlfi , ATILF – CNRS & Université de Lorraine5 priori à une volonté des acteurs gestionnaires d’en simplifier la prise en compte et de l’orienter autour de grands principes. Si elle reste à démontrer, une telle hypothèse permettrait d’ailleurs d’expliquer le caractère non-consensuel de la notion : en fonction du groupe d’acteur et de la situation dans laquelle le terme de « risque » est utilisé, il ne décrirait pas nécessairement les mêmes réalités. Cette idée valide alors la perspective initiale de cette recherche de mobiliser les documents écrits et les discours d’acteurs pour analyser la politique de prévention des risques et d’y observer les variations de la notion et de son contenu. Afin de démontrer cette stabilisation, l’analyse se concentre sur l’ensemble des législations et règlements nationaux relatifs à la mise en sécurité des sociétés vis-à-vis des inondations et des accidents liés à une activité industrielle. Néanmoins, il convient, au préalable de présenter en détail les conditions de conduite et d’outillage de la présente recherche, en mettant en évidence la manière dont celle-ci a été située, c’est-à-dire « placée en un certain endroit »20. Pour cela, le chapitre 1 introduit le nord-est de l’agglomération lyonnaise, terrain d’étude où ont été menées les différentes enquêtes. Il renseigne aussi sur la posture réflexive adoptée par le doctorant-chercheur, tout en fixant le cadrage théorique de cette thèse. Conformément à ce qui a été annoncé, le chapitre 2 s’appuie, pour sa part, sur l’évidente concrescence qu’il existe entre le mot « risque » et les idées qu’il cherche à saisir et porte donc l’analyse sur les textes réglementaires qui ont progressivement œuvré à sa démocratisation dans le langage opérationnel. Ces deux pistes complémentaires visent à apporter une réponse à la question qui donne son titre à cette partie : comment penser la notion de risque dans le domaine de l’aménagement ?

Table des matières

Introduction générale
Partie I – Penser la notion de risque dans le domaine de l’aménagement
Préambule – une étymologie qui ne fait pas consensus .
Chapitre 1 – Situer la recherche
1) Situer la recherche dans son espace de réalisation
A) Le nord-est de l’agglomération lyonnaise
B) un espace périurbain à enjeux
C) soumis à différentes formes de « risques ».
2) Terrain de « je »
A) Situer la recherche dans un parcours académique
B) L’ingénieur ingénu
C) Le nord-est de l’agglomération lyonnaise comme construit de recherche
3) Une posture de recherche peu commune
A) La notion de risque comme objet de recherche
B) L’approche constructiviste pour saisir la production des risques
C) Pourquoi déconstruire une notion ?
Les régimes d’objectivation : des outils pour suivre les modalités d’objectivation de ce qui fait risque
Chapitre 2 – La cartographie, l’aménagement et l’information : le triptyque de la prévention des risques
1) Mise en loi et scientifisation en faveur de la généralisation d’une notion
A) La pérennisation des installations industrielles en ville
B) Les villes à l’abri des inondations via l’aménagement fluvial
C) Une scientifisation au service du développement économique
D) L’essor de la notion de risque depuis les années 50
E) « Risques majeurs », le succès d’une expression
F) volontairement polysémique
2) De nouveaux outils pour identifier ce qui fait risque 8
A) La loi BARNIER : l’instauration du plan de prévention des risques
B) La loi BACHELOT : responsabilisation, information et démocratisation
C) La loi de modernisation de la sécurité civile : information et gestion de crise
D) Des méthodologies transposées d’un domaine à l’autre
3) Au-delà de la prévention des inondations
A) La prévention des risques comme levier de développement ?
B) Une harmonisation du risque d’inondation via la doctrine Plan Rhône
C) Faire autre chose que de l’aménagement
D) Une portée stratégique pour les territoires à risques importants d’inondation
Un construit réglementaire en constante évolution
Point d’étape – Les trois régimes d’objectivation de ce qui fait risque
Partie II : L’expert et son expertise, ensemble pour l’objectivation des aléas – Le régime d’objectivation scientifico-technique de ce qui fait risque
Préambule : l’expertise comme objet d’étude
Chapitre 3 – Les traductions de l’expert enrôleur
1) Raconter la trajectoire des phénomènes physiques
A) Les configurations des situations d’expertises à plusieurs niveaux d’incertitude
B) Cas n°1 – L’expertise réglementaire et étatique des aléas d’inondation du Rhône
C) Cas n°2 – La contre-expertise : l’expertise pour (in)valider une expertise
D) Cas n°3 – Transparence hydraulique pour une opacité publique
E) Cas n°4 – Le Bucopa V.S. la DDT de l’Ain : le bras de fer de l’expertise
F) Une histoire orientée et problématisée des phénomènes physiques
2) L’expert légitimé : six traits pour l’enrôlement
A) Le mandat intronise l’expert
B) La technicité de l’expert comme gage de l’intéressemen
C) Quand la réputation d’un spécialiste le précède : l’Expert de la situation ?
D) Tendre vers un idéal de l’expertise
Etudier le contenu des traductions
Chapitre 4 – L’objectivation d’une composition technique
1) L’aléa sous toutes ses coutures : à propos de la notion d’aléa
A) Un terme double, pour qualifier un évènement et la probabilité qu’il advienne
B) L’aléa est une représentation physico-mathématique d’un évènement
C) Des modalités de définition variées
D) qui permettent la projection des aléas sur un plan
2) De l’observation aux hypothèses
A) Premier contact avec le terrain
B) Reconstituer un puzzle pour interpréter le phénomène physique
3) Des données pour un rendu
A) Des jeux de données pour extrapoler une inondation
B) Les données ne sont pas données : vérifications et mécanismes de légitimation
C) Transformer des observations en données via l’instrumentation
D) Quand l’empirisme prime – concrétiser les hypothèses par l’expérimentation
4) La simplification qui se cache derrière la modélisation
A) Multiples choix de modélisation pour un phénomène unique
B) Une compréhension itérative du phénomène physique
C) Une simplification objectivante
5) Objectiver l’aléa par la cartographie
A) Les niveaux d’intensité : une ultime simplification des aléas
B) Des modalités de représentation des aléas diversifiés mais limitées
C) Un outil simplificateur qui camoufle plusieurs degrés d’incertitude
Objectiver l’incertitude, objectiver les aléas
Conclusion : le régime d’objectivation scientifico-technique des risques
Partie III – Les arrangements (autour) de ce qui fait risque – Le régime d’objectivation opérationnel
Préambule : Les arrangements au cœur des échanges
Chapitre 5 – L’initialisation : configurer l’espace des discussions
1) L’exemple de Thil : des arrangements pour un PPRI
A) Une procédure inédite pour les participants
B) Des ambitions variables pour une finalité partagée
C) La négociation opportune d’un certificat d’urbanisme
D) Une concertation riche en requêtes mais limitée à son strict minimum ?
E) La stabilisation d’un document apparemment équivoque
2) L’amorce de la procédure – fixer le cadre des discussions
A) Un objectif initial modelable
B) Des services de l’Etat dotés de capitaux techniques et variés
C) Les maîtres des négociations et les rôles qu’ils attribuent
D) Un périmètre d’étude similaire aux cartes des aléas
E) Une qualification empirique de l’occupation des sols
3) « Enjeu » et « vulnérabilité » – deux notions directrices
A) « L’enjeu », une catégorie d’action fourre-tout ?
B) Les trois acceptions de la notion de vulnérabilité
C) Un cadre définitionnel objectivé par les gestionnaires
4) Premier contact et initialisation des échanges
A) Un acteur étatique prépondérant
B) L’objectivation de construits dont les modalités de production échappent
C) Vers la phase de mobilisation des acteurs
Chapitre 6 – La phase de mobilisation : faire valoir ses conceptions de ce qui fait risque
1) Quand les maires produisent un avis sur les documents cartographiques
A) Des profils d’élus disparates aux capitaux techniques non garantis
B) L’épreuve de conformité : s’assurer que les demandes correspondent au cadre des discussions
2) Trouver des solutions techniques : le technicien à la rescousse des élus
A) Une compréhension locale des documents d’urbanisme
B) De la gestion courante aux discussions arbitrales
C) Le cas du centre commercial de Beynost : étendre un site en zone inondable ?
D) D’épreuves en épreuves : faire valoir ses enjeux au cours des négociations
3) L’acteur-expert : un fort capital technique malgré une position fragile ?
A) La notion de risque vue au travers du prisme de l’expertise
B) Une pluralité d’acteurs-experts pour de nombreuses formes d’expertise
C) Bilan intermédiaire : une première mobilisation sous le signe de la technicité
4) Un public privé des échanges ? Trouver des synergies avec les autres acteurs
A) Un public bien plus disparate qu’il n’y paraît
B) Des riverains aux mille visages
C) Les acteurs économiques : une présence thématique
5) La seconde phase de mobilisation : information, consultation et enquête publique
A) Une réunion d’information qui n’implique pas le public ? 
B) Droit d’entrée et épreuve de conformité
C) Le commissaire-enquêteur : « l’expert » des procédures d’information
D) Le « niveau de vulnérabilité » pour valider les requêtes remontées par le public
E) Bilan de la seconde phase de mobilisation
Chapitre 7 – La phase de stabilisation : des arrangements à trois niveaux
1) L’acte final des discussions : vers un arrangement à propos de ce qui fait risque
2) Se disposer autour de ce qui fait risque : les arrangements liés aux capitaux
A) Quatre blocs d’acteurs-négociants aux stratégies différentes
B) Pour appréhender les jeux d’acteurs – la mobilisation dans un sens ou dans l’autre
3) Le PPRN : un instrument normé pour objectiver ce qui fait risque
A) La progressive instauration des supports cartographiques
B) Anatomie d’un plan de prévention des risques
C) Un outil standardisé de la prévention des risques
D) L’application d’une norme et ses limites
4) L’objectivation par la cartographie
A) La cartographie pour représenter ce qui fait risque
B) Les arrangements des données cartographiques
C) Une objectivation pour l’opérationnalité
Conclusion : Objectiver ce qui fait risque par des procédures d’aménagement
Partie IV – Informer pour mieux gérer ? Le régime d’objectivation communicationnel du risque
Préambule : la culture du risque, une expression opérationnelle aux sens pluriels
Chapitre 8 : Objectiver ce qui fait risque via l’information préventive régalienne
1) Le premier jalon de la diffusion de ce qui fait risque
2) Une voie d’information régalienne continue pour un risque consensuel
A) Les nombreux outils de l’information préventive régalienne
B) Le consensus préalable à l’information
C) Des présupposés qui cadrent l’information régalienne
3) Une voie d’information régalienne directive et aléa-centrée
A) Une présentation objectivante
B) Des préconçus qui alimentent la façon de penser l’information
C) L’aléa au centre de la communication
D) Une modalité d’information directive et descendante
4) Une information complémentaire destinée à tout le monde ?
A) Pour une (ré)interprétation de la prévention des risques
B) essentiellement naturaliste et aléa-centrée
C) car s’appuyant, elle aussi, sur une démarche objectivante
L’information préventive régalienne dans tous ses états
Chapitre 9 : Une information préventive communale de seconde main ? Adaptations locales pour une bonne gestion des risques
1) L’inégal traitement des missions de gestion du risque par les municipalités
Catégorie n°1 : une information préventive négligée et non prioritaire
Catégorie n°2 : des missions prioritaires qui circulent de service en service
Catégorie n°3 : une information adaptée aux représentations locales
Catégorie n°4 : un contexte urbain dense forçant à l’exhaustivité
Bilan : des territorialités différentes pour une information communale variable
2) Diffuser et objectiver ce qui fait risque via le DICRIM
A) Entre reprises et (ré)interprétations de « la culture du risque »
B) Anatomie d’un document d’information aux mille facettes
C) La réutilisation de l’information régalienne en faveur de l’objectivation de son contenu
D) Des documents performatifs qui figent les risques identifiés
3) Un exercice de composition complexe pour prévoir la gestion de crise
A) Des services en marge et aux ressources limitées
B) La double vocation du PCS
C) Un « bricolage » inspiré des évènements antérieurs
D) Un dossier confidentiel dont la diffusion est restreinte
Conclusion : la diffusion d’un risque consensuel moteur du régime d’objectivation
communicationnel de ce qui fait risque
Conclusion générale : restituer la recherche
1) De la thèse à la synthèse : le triptyque phénomènes-acteurs-territorialités
2) Déconstructions et perspectives
Index bibliographique et sources
Annexes de thèse
Plan détaillé
Table des illustrations
Index des acronymes
Résumé de thèse

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