Mécanisme de la douleur

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Mécanisme de la douleur.

La douleur est un phénomène perceptif pluridimensionnel qui signale une perte de l’intégrité physiologique. Elle résulte de plusieurs mécanismes :
• D’une part de l’intégration dans le système nerveux central d’un message afférent nociceptif modulé par des systèmes de contrôle inhibiteurs, selon une organisation anatomo-biologique formée d’un système neuronal et de substances neuroexcitatrices et neuro-inhibitrices qui peuvent subir des modifications fonctionnelles et structurelles (plasticité) ;
• D’autre part, de phénomènes centraux d’ordre émotionnels plus difficiles à appréhender.
Cette organisation complexe explique l’absence de parallélisme entre les lésions observées et l’importance des manifestations douloureuses.
On distingue plusieurs mécanismes générateurs de la douleur.

Douleur d’origine nociceptive

Physiopathologie

Elle est provoquée par une hyperstimulation de récepteurs périphériques, les nocicepteurs, constitués par les terminaisons libres des fibres nerveuses sensitives de petit diamètre Ad et C. Le stimulus intense mécanique, thermique ou chimique agit directement et (ou) par l’intermédiaire de substances libérées lors de la lésion tissulaire. Ces substances interviennent dans les phénomènes inflammatoires ou de sensibilisation des nocicepteurs [catécholamines, substance P, prostaglandines, calcitonine, CGRP (calcitonin generelatedpeptide) (6),(7)….
Les afférences sensitives primaires Ad et C gagnent la moelle par la racine rachidienne postérieure. Elles se projettent sur des neurones spinaux nociceptifs spécifiques et non spécifiques, les neurones convergents, qui reçoivent des projections nociceptives et non nociceptives d’autres régions, expliquant le phénomène de la douleur projetée : convergence somato-viscérale (figure 1)(8),(9),(10). Au moins 20 substances sont libérées au niveau de cette premièr synapse, dont des acides aminés excitateurs (AAE) comme le L-glutamate et des peptides (substance P, CGRP…).(11)
Les axones des neurones spinaux forment dans les cordons antéro-latéraux controlatéraux, les faisceaux spinothalamiques et pinoréticulaires qui se projettent sur la formation réticulée, le mésencéphale et le thalamus (figure 2) (11).
Les afférences sensitives tactiles non nociceptives (proprioception) de gros diamètre Aa et Ab empruntent elles, sans relais, les colonnes dorsales homolatérales dès leur entrée dans la moelle.(12)
Comme en périphérie, toutes ces structures possèdent des récepteurs pour les substances neuro-excitatrices, dont quelques-unes ont déjà été citées, et inhibitrices (sérotonine, adrénaline, opioïdes endogènes…) qu’el les ou des interneurones fournissent. La dernière projection se fait sur de nombreuses aires cérébrales qui participent au traitement de l’information sur les composantes de la douleur (intensité, durée, localisation…) et à l’élaboration de réactio ns émotionnelles, comportementales et neuro-endocriniennes qui en découlent.(13),(14),
Toute stimulation nociceptive intense et (ou) durable donne lieu au stockage d’une information « douleur » qui peut se réactiver ultérieurement, à la suite d’une lésion nerveuse (exemple de l’algo-hallucinose) ou sous l’influence de facteurs psychologiques, ce qui pourrait expliquer certaines douleurs qualifiées de psychogènes . (16)
Une stimulation nociceptive peut aussi induire une réponse réflexe motrice ou sympathique dont la pérennité engendre une douleur (contracture réflexe, algoneurodystrophie).(17)

Séméiologie

L’excès de nociception est le mécanisme générateur le plus fréquent de la douleur. Constante après la lésion, elle siège au oyerf lésionnel et dans sa région, ou à distance (douleur projetée, douleur référée). Elles’exprime selon un mode mécanique ou inflammatoire, s’accompagnant d’une réaction exagérée à toute stimulation non douloureuse (hyperesthésie) ou douloureuse (hyperalgésie), sans déficit sensitif objectif (12),
On parle de ‘’douleur signal ‘’ quand elle est :
– immédiate, fugace
– de durée limitée
– entraînant des réactions réflexes Sur la terminologie :
Nociceptif : qui active les nocicepteurs
algogène : qui déclanche la douleur
Nocif : qui provoque une lésion (18).

Douleur neurogène

Physiopathologie

Toute lésion périphérique, médullaire oucentrale du système nerveux sensitif, qu’elle soit d’origine traumatique, infectieuse, métabolique ou ischémique, est susceptible d’entraîner une douleur. La lésion provoque un dysfonctionnement de la transmission des messages, une hyperexcitabilité des neurones spinaux et supraspinaux, une perturbation des contrôles inhibiteurs physiolo giques(19),(20).

Séméiologie

La douleur est décrite en termes de dysesthésies, sensations anormales et désagréables, spontanées ou provoquées (brûlures,échargesd électriques, coups de poignard, striction, fourmillements…) plus ou moins intenses, continues et (ou) paroxystiques. Ces sensations sont influencées par la pression atmosphérique, le nycthémère, les phénomènes d’attention ou de diversion, l’humeur (21),(22).
L’examen retrouve des signes d’hypersens ibilité comme :
L’allodynie : douleur provoquée par une stimulation habituellement non douloureuse,
L’hyperpathie : réaction excessive et durable après une stimulation répétée, et (ou)
L’hyposensibilité : diminution de la sensibilité à une stimulation douloureuse ou absence de douleur à une stimulation nociceptive, dans une zone spontanément douloureuse) (22),(23).

Douleur psychogène

L’origine psychogène d’une douleur est rarement évoquée précocement. Il s’agit soit du phénomène déjà cité de réactivation d’uneouleurd sous l’influence de facteurs psychologiques (douleur mémoire), soit d’une origine psychopathologique pure (hystérie de conversion, dépression, hypocondrie),soit de troubles somatiques mineurs majorés par des difficultés psychosociales.(24)

Caractéristiques de la douleur

La douleur aiguë

Elle est d’évolution brève et souvent de forte intensité.Elle a un début et une fin bien précise. Elle s’accompagne de manifestations physiques, psychiques et comportementales du domaine du stress.
C’est un signe d’alarme utile qui appell e un diagnostic et un traitement étiologique.(25),(26)

La douleur chronique

Elle est sans début précis et sans limite. C’est une douleur qui perdure au-delà de la guérison d’une lésion ou plus généralement quivolueé depuis 3 à 6 mois. D’intensité variable, elle s’accompagne de modifications émotionnelles du registre de l’anxiodépression, et de modifications du comportement social, familial et professionnel. On l’évoque devant une plainte hors de proportion avec les données cliniques et paracliniques, chez des patients qui ont déjà beaucoup consulté et qui ne sont pas soulagés par les traitements déjà entrepris. Elle appelle une évaluation pluridimensionnelle et un programme thérapeutique multifactoriel (25),(26)

Douleurs post-opératoires .

La douleur post-opératoire est une sensation douloureuse, en rapport avec des lésions tissulaires créées lors d’une interventionchirurgicale et qui survient dès la fin de l’opération. L’intensité de ces douleurs dépend dugeste opératoire et est variable en fonction de la sensibilité de l’opéré.(27)
Des opérations sont souvent suivies de douleurs durant les premiers jours. Et, toute opération, même peu douloureuse, peut le devenir par survenue d’une complication (hématome, phlébite par exemple) (27)
• Retentissement de la douleur postopératoire
Le retentissement de la douleur postopératoire doit faire l’objet d’études épidémiologiques fondées sur des grands collectifsde patients. Elles doivent avoir comme objectif de différencier clairement vis-à-vis de la morbidité postopératoire ce qui revient respectivement à la douleur, à la techn ique analgésique et à l’acte chirurgical.(27)
La douleur aigue va avoir plusieurs conséquences physiopathologiques :
– Modifications neuro-endocriniennes : elles sont caractérisées par une augmentation de sécrétion des hormones cataboliques(cortisol, glucagon, hormone de croissance, catécholamine), et par une inhibition des hormones anaboliques (insuline et testostérone).Globalement, il apparaît une hyperglycémie et une balance azotée négative (28)
– Modifications cardiovasculaires : les flux nociceptifs activent le système sympathique et stimulent la libération locale et systémique de catécholamines, avec tachycardie, hypertension artérielle et élévationuddébit cardiaque. L’augmentation des résistances vasculaires et de la contractilité sontdes facteurs d’accroissement de la consommation d’oxygène du myocarde.(28)
Les données actuelles ne mettent pas en évidence nu retentissement majeur de la douleur postopératoire sur les grandes fonctions vitales de l’organisme, mais elles ne permettent pas de l’exclure (27)

Evaluation de la douleur.

Malgré les difficultés liées à la subjectivité dea douleur, son évaluation demeure une nécessité. L’objectif étant d’aboutir à une qualification chiffrée, reflétant l’intensité du phénomène douloureux. Pour être plus fiable la méthode utilisée doit répondre aux critères suivants :
• validité : lorsqu’elle mesure bien cequ’elle est censée mesurer,
• sensibilité : lorsqu’elle détecte desvariations d’intensité cliniquement utiles,
• fidélité : lorsque les mesures successives restent stables dans des conditions cliniques apparemment identiques.
Ainsi on distingue principalement trois méthodes d’évaluation : (29),(30),(31)

Les méthodes d’auto-évaluation: échelle globale:

Les échelles unidimensionnelles visent en pratique, à saisir la réponse globale aux traitements appliqués.

Echelle Verbale Simple : (E.V.S)

Elle est beaucoup moins sensible car discontinue.
En effet, elle est plus accessible au patient. Elle propose une série de note chiffrée hiérarchisée.
Exemple d’ E.V.S : quel est le niveau de votre douleur ?
Pas de douleur = 0
Douleur faible = 1
Douleur modérée = 2
Douleur intense = 3
Douleur très intense = 4

Echelle Numérique (EN) :

Dans ce cas, le patient donne une note de 0 à 100 (ou 10). La réponse peut être donnée par écrit mais aussi oralement, ce qui est nu avantage dans certaines situations. La note zéro est définie par « douleur absente », tela note maximale 100 (ou 10) par « douleur très intense, insupportable ».

Echelle Visuelle Analogique : (EVA)

Elle se présente sous forme de réglettegraduée appelée « algodécimètre » très utile dans la pratique courante. Le déplacement d’une aiguille incorporée le long de la réglette de la gauche vers la droite ou de bas en haut selon que la réglette sera orientée horizontalement ou verticalement, détermine une distance en millimètre lue sur une face dite « évaluateur » à l’opposé de la face présentéeau malade.

Méthode d’hétéro-évaluation : Questionnairqualificatifs :

Ce sont des instruments multidimensionnels. Ces échelles d’hétéro évaluation permettent en pratique de préciser et qualifier lesparticipations respectives du sensoriel et de l’affectif dans la douleur.

Le Mac Gill Pain Questionnary (MPQ) :

Il est élaboré par Melzack en langue anglaise. Le MPQ est un questionnaire constitué par une liste de 79 qualificatifs, repartis en 20 sous classes ; regroupés en 4 classes : Affective, sensorielle, évaluative et divers (sensori-affective).(32)
Le patient choisit les qualificatifs qui correspondent à sa douleur.
Dans chaque sous-classe, un seul qualificatif le plus approprié est choisi.

Le Questionnaire de Douleur de Saint Antoine (QDSA) :

Le Q.D.S.A est l’adaptation française du M.P.Q. Il comporte 61 qualificatifs répartis en 16 sous classes :
• 9 sous classes sensorielles,
• 6 sous classes affectives,
• 1 sous classe évaluative
Les termes sélectionnés doivent être compris par slepatients, d’où la nécessité d’éliminer au tant que possible le vocabulaire médical.
Après avoir sélectionné le terme le mieux adapté nsda une sous classe, le patient peut pondérer son jugement grâce à une échelle de 0 à 4.

Echelles Comportementales

Elles sont établies selon une conception largement rependue que seul le rapport verbal constituerait un indice valide pour apprécie l’importance d’une douleur. Exemple d’échelle comportementale :
• 1 : Aucune douleur
• 2 : Douleur présente mais peut être facilement ignorée

Prise en charge de la douleur en générale.

Existe-t-il des moyens de prévention dela douleur postopératoire (27)?

Il existe deux approches différentes pour la prévention de la douleur postopératoire: l’analgésie préventive (pre-emptiveanalgesia), définie par l’efficacité supérieure d’une méthode analgésique lorsqu’elle t esappliquée avant la stimulation douloureuse; une deuxième démarche, qui associe diverses mesures anesthésiques et chirurgicales visant à bloquer la survenue ou à dim inuer l’intensité de la douleur postopératoire. Au vu des données examinées, l’administration d’agents antalgiques ou la réalisation d’une anesthésie locorégionale avant, plutôt qu’après ou pendant la stimulation chirurgicale, n’a pas fait la preuve de sa supériorité..
Les mesures préventives générales font partie des bonnes pratiques cliniques et débutent par la préparation psychologique à l’intervention; cela est de la responsabilité de tous les intervenants, et en premier lieu des chirurgiens et des anesthésistes.
La diminution de la douleur postopératoire passe aussi par la prévention des douleurs inutiles. La prescription d’agents antalgiques s’intègre aujourd’hui dans une stratégie d’analgésie multimodale, visant à limiter l’intensité de la douleur postopératoire. Les prescriptions doivent tenir compte de la voie d’administration et de la pharmacocinétique des agents utilisés. L’administration de paracétamol, d’anti-inflammatoires non stéroïdiens, les infiltrations pariétales ainsi que les blocs tronculaires, réalisés avant la fin de l’acte chirurgical, ont une efficacité sur les douleurs postopératoires.

Les précautions d’utilisation et les modalités de surveillance des différents traitements analgésiques

La douleur postopératoire doit êtreconsidérée comme un effet indésirable et attendu de la chirurgie, de sorte qu’une analgésieefficace apparaît comme un bénéfice clinique indiscutable. Cependant, la qualité de 1’analgésie apporte peu de bénéfices supplémentaires sur la morbidité postopératoire.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE 
1. Définition de la douleur
2. Mécanisme de la douleur
2-1. Douleur d’origine nociceptive
2-1-1. Physiopathologie
2-1-2. Séméiologie
2-2. Douleur neurogène
2-2-1. Physiopathologie
2-2-2. Séméiologie
2-3. Douleur psychogène
3. Caractéristiques de la douleur
3-1. La douleur aiguë
3-2. La douleur chronique
4. Douleurs post-opératoires
5. Evaluation de la douleur
5.1 Les méthodes d’auto-évaluation: échelle globale
5.1.1 Echelle Verbale Simple : (E.V.S
5.1.2 Echelle Numérique (EN)
5.1.3 Echelle Visuelle Analogique : (EVA
5.2 Méthode d’hétéro-évaluation : Questionnaires qualificatifs
5.2.1 Le Mac Gill Pain Questionnary (MPQ)
5.2.2 Le Questionnaire de Douleur de Saint Antoine (QDSA
5.3 Echelles Comportementales
6. Prise en charge de la douleur en générale
6.1 Existe-t-il des moyens de prévention de la douleur postopératoire ?
6.2 Les précautions d’utilisation et les modalités de surveillance des différents traitements analgésiques
6.2.1 Analgésie par voie générale
6.2.1.1 Analgésiques non morphiniques
6-2.1.1.1 Paracétamol
6.2.1.1.2 Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
6.2.1.1.3 Autres agents
6.2.1.2 Analgésiques morphiniques
6.2.1.2.1 Analgésiques intermédiaires
6.2.1.2.2 les Morphines et ses dérivés
6.2.2 Anesthésie locorégionale
6.2.2.1 Anesthésies périmédullaires
6.2.2.1.1 Données générales
6.2.2.1.2 Risques liés à la technique
6.2.2.1.3. Risques liés aux agents utilisés
6.2.2.1.4. Modalités de surveillance
6.2.2.2 Blocs périnerveux périphériques
6.2.2.3 Blocs thoraciques
6.3. Classification des antalgiques selon leur puissance
DEUXIEME PARTIE : Notre travail
1. Matériels et méthodes
1.1. Recrutement
1.2. Sélection des patients
1.2.1. Critères d’inclusion
1.2.2. Critères d’exclusion
1.3. Paramètre à évaluer
1.4. Supports
2. Résultats
2.1 Tableaux montrant les scores de l’échelle visuelle analogique
2.1.1 Evaluation de la douleur selon les classes d’âges
2.1.2 Evaluation de la douleur selon les types de l’intervention
2.1.3 Evaluation de la douleur selon les variations de sexe
3. Protocoles de prise en charge de la douleur post- opératoire dans le service
3.1 Médicaments les plus utilisés dans le service
3.2. Schéma thérapeutique dans le service
3.3 Modalités de prise en charge de l’intensité de la douleur post- opératoire dans le service et son coût
3.3.1. Douleur d’intensité forte : score de l’EVA entre 50 à 100mm
3.3.1.1. Prise en charge de la douleur d’intensité forte
3.3.1.2. Coût de la prise en charge de la douleur post- opératoire d’intensité Forte
3.3.2. Douleur d’intensité moyenne : score de l’EVA entre 30 à 50 mm
3.3.2.1. Prise en charge de la douleur d’intensité moyenne
3.3.2.2. Coût de prise en charge de l’intensité moyenne de la douleur postopératoire dans le service
3.3.3. Douleur d’intensité faible : score de l’EVA ≤ 30mm
3.3.3.1. Prise en charge de la douleur d’intensité faible dans le service
3.3.3.2. Coût de prise en charge de l’intensité faible de la douleur post- opératoire
dans le service
TROISIEME PARTIE : Commentaires et suggestions
1. Commentaires
1.1 Selon les résultats obtenus lors de l’EVA concernant les classes d’âges
1.2. Evaluation de la douleur selon les types d’interventions
1.3 Evaluation de la douleur selon les variations de sexe
1.4 Coût de prise en charge de l’intensité de la douleur post- opératoire
1.4.1. Douleur d’intensité forte
1.4.2. Douleur d’intensité moyenne
1.4.3. Douleur d’intensité faible
1.5. Evaluation de l’efficacité de la prise en charge de la douleur au service de réanimation chirurgicale
2. Suggestions
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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