La souveraineté et l’ingérence démocratique : la tendance à une primauté de l’ingérence démocratique

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INTRODUCTION GENERALE

Adama SADIO – « Conditionnalité politique de l’aide publique au développement des partenaires occidentaux à l’Afrique : analyse des actions françaises en Afrique subsaharienne » – Thèse de doctorat – 2019.
L’année 2010 va faire date dans l’histoire politique contemporaine de l’Afrique subsaharienne1, notamment francophone. En cette année, dix-sept (17) pays africains2 ont fêté le cinquantenaire de leur accession à la souveraineté internationale. Parmi ces Etats, seuls deux ne sont pas francophones (la Somalie et le Nigéria). Dans plusieurs de ces pays, l’anniversaire a été ponctué par des manifestations de grandes envergures comme pour dire : « depuis maintenant 50 ans, nous sommes maîtres de nous-mêmes ». D’une telle impression, ces commémorations de cinquantenaire d’indépendance peuvent constituer une fenêtre ouverte nous amenant à porter notre réflexion sur les actions de l’ancienne puissance coloniale en Afrique au sud du Sahara à travers la conditionnalité politique de son aide publique au développement.
Au lendemain des indépendances jusqu’au début, pratiquement, du renouveau démocratique africain des années quatre-vingt-dix (90), l’Afrique subsaharienne est souvent le théâtre de conflits armés et de régimes autoritaires peu soucieux du respect des principes démocratiques et des droits de l’Homme. La recrudescence de L’Afrique subsaharienne est comprise comme l’ensemble des pays africains à l’exception de l’Afrique du nord (Algérie, Maroc, Tunisie, Libye et Egypte) soit 48 des 53 pays du continent africain. A souligner que l’étude portant sur la période 1990-2010 (même si cette limitation temporelle n’est pas rigide) n’a pas pris en considération l’Etat du sud Soudan fondé le 9 juillet 2011.
L’Afrique subsaharienne est la partie du continent voire du monde la plus pauvre. La preuve, la quasi-totalité des pays les plus pauvres du monde sont de l’Afrique noire (voir classement FMI des 25 pays les plus pauvres du monde 2015).
Sur le plan politique, l’Afrique subsaharienne reste caractérisée, depuis les indépendances, par de violents troubles sociaux et politiques. Les tentatives d’ouverture démocratique telle que la tenue des conférences nationales n’ont pas réussi à profondément modifier cette triste réputation.
l’instabilité sociopolitique vaut au continent le record mondial des coups d’Etat dans les années 1970 détrônant ainsi l’Amérique latine3. L’Afrique francophone subsaharienne demeure de loin la partie la plus instable de l’histoire postcoloniale du continent avec au menu des conflits armés, des crises politiques majeures, des coups d’Etat, etc. La preuve, pendant la période de 1960 à 1972, le Bénin a connu une période d’instabilité politique majeure: cinq (5) Constitutions, dix (10) Présidents et une douzaine de coups d’Etat4. Durant toute cette période, le Bénin se caractérisait par des crises politiques et la stabilité était l’exception qui confirmait la règle. Cet état de fait qui a prévalu jusqu’à l’arrivée au pouvoir du Gouvernement Militaire Révolutionnaire (GMR) dirigé par Mathieu Kérékou en 1972 a valu au Bénin le qualificatif d’« enfant malade de l’Afrique ». La chute du mur de Berlin et l’effondrement du bloc communiste sont apparus, à plus d’un titre comme les « géniteurs » exogènes et immédiats des soubresauts démocratiques, au début des années quatre-vingt-dix (90), en Afrique noire5. Pour L’Amérique latine a une histoire très chargée de renversements violents de régimes de 1910 à 2010. A ces coups d’Etat, il faut y ajouter de nombreuses tentatives de putschs. Pratiquement tous les pays de l’Amérique latine ont eu à vivre un coup d’Etat ou une tentative de coup d’Etat à savoir Mexique, Nicaragua, Bolivie, Venezuela, Brésil, Argentine, Salvador, Chili, Paraguay, Costa Rica, Salvador, Equateur, Bolivie, Panama, Pérou, Uruguay, Honduras et Argentine.
Le Dahomey (devenu Bénin) a connu son premier coup d’Etat militaire le 28 octobre 1963 avec la prise du pouvoir par le colonel Soglo. Le pays passe à la gestion civile moins de 4 mois plus tard (janvier 1964) et sera respectivement dirigé par Sourou Migan Apithy et Justin Ahomadegbé. Cette parenthèse de gestion civile sera vite fermée par le retour à la tête de l’Etat du colonel Soglo qui sera, à son tour, déposé le 17 décembre 1967 par un coup d’Etat perpétré par Maurice Kouandété. Après l’adoption d’une nouvelle Constitution le 31 mars 1968, le pays est présidé par Emile Derlin Zinsou victime d’un coup d’Etat le 10 décembre 1968. Le 7 mai 1970, un
Conseil présidentiel regroupant les trois principaux partis est instauré. Ce Conseil présidentiel sera renversé le 26 octobre 1972 suite à coup d’Etat militaire par le commandant Mathieu Kérékou.
Lire Aminata Traoré, « Afrique : les nouvelles démocraties » in Le courrier ACP-CEE, n0 138, mars-avril 1993, p. 62 ;
Adama SADIO – « Conditionnalité politique de l’aide publique au développement des partenaires occidentaux à l’Afrique : analyse des actions françaises en Afrique subsaharienne » – Thèse de doctorat – 2019.
plusieurs transitologues6, ces phénomènes politiques ont exercé de réelles influences sur le processus de démocratisation des pays africains. C’est la conviction de Philippe Hugon, pour qui « la perestroïka et la mise en place du multipartisme en Europe centrale et de l’Est, ont exercé des influences certaines sur l’Afrique7 ». Ces dynamiques du dehors sont, cependant, insuffisantes pour expliquer le déclenchement du processus de démocratisation. Des dynamiques endogènes relatives particulièrement à la forte aspiration démocratique des peuples africains ont été très déterminantes dans la lourde tendance de démocratisation dans l’espace des Etats africains subsahariens. D’ailleurs pour certains dont Me Robert Dossou8, la chute du mur de Berlin et la dislocation du bloc de l’Est n’ont eu aucun impact sur l’entame des transitions démocratiques en Afrique. A l’en croire les dynamiques endogènes sont les seuls et uniques facteurs déclencheurs des lourdes tendances à la démocratisation des régimes politiques africains dans les années 1989-1990. Ainsi pour Me Robert Dossou, il est bien affirmé que ce sont les événements d’Europe de l’Est qui ont entraîné ceux d’Afrique. Je ne partage pas cette opinion. Pour moi, Vents d’Est et du Sud ont été produits par les mêmes causes. Il faut donc ramener à sa réelle dimension la place des bouleversements de l’Europe de l’Est par rapport aux revendications démocratiques en Afrique9 ».
Il nous semble que c’est la conjugaison des dynamiques exogènes et endogènes qui ont amené l’Afrique subsaharienne, au tournant des années 80 et à l’orée des années 90, à traverser une situation particulière déclenchant les transitions démocratiques.

Table des matières

DEDICACES
REMERCIEMENTS
RESUME
SOMMAIRE
LISTE DES ABREVIATIONS, SIGLES ET ACRONYMES
INTRODUCTION GENERALE
I. LA DÉFINITION DES CONCEPTS
I.1. La démocratie : un système politique aux définitions multiples
I.2. L’aide publique au développement
I.3. La souveraineté et la légitimité démocratique
I.3.1.La souveraineté étatique : la marque de la société internationale
I.3.2. La souveraineté et l’ingérence démocratique : la tendance à une primauté de l’ingérence démocratique
II. L’INTERET ET LA PROBLÉMATIQUE DE L’ÉTUDE
II.1.1. L’intérêt historique de la recherche
II.1.2. L’intérêt d’actualité de l’étude
II.1.3. L’intérêt théorique de notre objet de recherche
III. LES CONSIDERATIONS METHODOLOGIQUES
III.1. Le cadre théorique de la recherche : une construction hybride
III.1.1. La présentation des paradigmes idéaliste et réaliste
III.2. L’échantillonnage
III.2.1. La délimitation spatiale de l’étude
Les pays d’Afrique subsaharienne francophone
Les pays d’Afrique subsaharienne anglophone
La France
Les acteurs secondaires de notre étude
III.2.2. La limite chronologique de la recherche: de 1990 à 2010
PREMIERE PARTIE : LA CONDITIONNALITE POLITIQUE DE L’APD FRANÇAISE AUX ETATS D’AFRIQUE SUBSAHARIENNE : MOTIVATIONS ET JUSTIFICATIONS 72
CHAPITRE I : LES MOTIVATIONS DE LA CONDITIONNALITE POLITIQUE DE LA FRANCE EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE
SECTION I. : L’évolution historique de la conditionnalité politique de l’APD française
Paragraphe 1. Les Etats-Unis : les géniteurs de la conditionnalité politique de l’aide publique au développement
Paragraphe 2. Les institutions de Bretton Woods et l’Union européenne s’approprient la conditionnalité politique
Paragraphe 3. Le discours de La Baule de juin 1990, un tournant dans la coopération franco-africaine
SECTION II. Les objectifs de la conditionnalité politique de la France
Paragraphe 1. Le lien entre la démocratie et le développement
Paragraphe 2. La relation démocratie-développement n’est pas aussi flagrante
Paragraphe 3. La démocratie et les droits de l’Homme, des valeurs universelles
Paragraphe 4. Le relativisme culturel, un obstacle à l’universalité des principes démocratiques
de droits de l’Homme
1.1. Le Droit à l’homosexualité, un droit de l’Homme diversement apprécié
Conclusion du premier chapitre
CHAPITRE II. LES JUSTIFICATIONS DE LA CONDITIONNALITE POLITIQUE DE L’AIDE PUBLIQUE AU DEVELOPPEMENT DE LA FRANCE AUX ETATS D’AFRIQUE SUBSAHARIENNE
SECTION I. Le bilan mitigé des processus de démocratisation des Etats d’Afrique au sud du
deux décennies après le discours de La Baule
Paragraphe 1. Les processus électoraux demeurent souvent tendus
Paragraphe 2. La personnalisation du pouvoir ou le pouvoir personnalisé
Paragraphe 3. Le peu de considération à la sacralité de la Constitution, encore une réalité
Paragraphe 4. La persistance des coups d’Etat
SECTION II. La volonté de rupture face au réel
Paragraphe 1. La personnalisation des relations étatiques
Paragraphe 2. Le discours de La Baule, une dynamique pas déterminante dans le processus démocratique en Afrique subsaharienne
Paragraphe 3. L’ambivalence de la France sur sa politique africaine après le sommet de
Baule
Paragraphe 4. La politique de deux poids deux mesures dans l’application de l’esprit de La Baule
Conclusion du deuxième chapitre
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
DEUXIEME PARTIE: LES DYNAMIQUES DU DECLIN DE L’INFLUENCE FRANCAISE EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE
CHAPITRE I. LE RECUL DE L’INFLUENCE FRANCAISE EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE
SECTION I. L’Afrique subsaharienne : un enjeu géostratégique et économique pour la France
la scène internationale
Paragraphe 1. L’Afrique subsaharienne dans la diplomatie mondiale
1.1. Le poids diplomatique très relatif de l’Afrique sur la scène mondiale.
1.2. L’Afrique subsaharienne, un élément majeur pour la « grandeur » de la France sur la
internationale
Paragraphe 2. Les intérêts économiques de la France en Afrique subsaharienne
Paragraphe 3. L’influence économique française en Afrique subsaharienne en régression
SECTION II. Le temps de la ferveur de nouveaux acteurs et vers la nécessité d’une reconsidération de la politique africaine de la France
Paragraphe 1. L’opinion publique africaine plus connectée et plus exigeante
1.1. Une société civile regardante de la coopération franco-africaine
1.2. Les nouveaux mouvements citoyens ou générations facebook
Paragraphe 2. L’émergence d’un leadership politique plus conscient des enjeux de l’Afrique
le monde
1.1. Le regard des chefs d’Etat africains sur le choix des ambassadeurs français
1.2. Le cinquantenaire des indépendances africaines et menace sur la présence militaire française au Sénégal et au Tchad, un symbole du recul de l’influence française en
subsaharienne
1.3. La tentative de chefs d’Etats africains de tourner la page du « paternalisme » français
Conclusion du premier chapitre
CHAPITRE II. LA CONDITIONNALITE POLITIQUE FRANÇAISE A L’EPREUVE DE
COOPERATION SINO-AFRICAINE
SECTION I. La coopération sino-africaine, une alternative pour les Etats africains face à la conditionnalité politique française
Paragraphe 1. Le parallélisme entre les échanges commerciaux sino-africains et ceux franco-africains
Paragraphe 2. Les infrastructures de grande envergure, l’annulation de dettes et les contrats faramineux : une stratégie chinoise peu explorée par la France en Afrique subsaharienne
Paragraphe 3. Le leadership politique africain tombe sous le charme de la coopération sino-africaine
SECTION II. La diplomatie économique chinoise, un échappatoire de pays africains mis au
la communauté internationale
Paragraphe 1. L’offensive diplomatique de la Chine en Afrique subsaharienne
Paragraphe 2. La diplomatie chinoise, un paravent pour les pays africains en rupture de
avec les occidentaux
Paragraphe 3. La France revendique sa stratégie de conditionnalité politique, la Chine applique en « douceur » son principe du « lui ou moi »
Conclusion du deuxième chapitre
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES
TABLE DES ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE
I. OUVRAGES GENERAUX
II. OUVRAGES SEPECIALISES
III. TRAVAUX UNIVERSITAIRES
IV. ARTICLES
V. DISCOURS ET INTERVIEWS
VI. MEDIA ET SITES INTERNET
TABLE DES MATIERES

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