Modèle physique de diffusion et piégeage de l’hydrogène par les platelets

Télécharger le fichier original (Mémoire de fin d’études)

La théorie de la maturation d’Ostwald

On a l’habitude de distinguer trois phases dans la cinétique des solutions métastables en saturation : (i) la phase de nucléation des précipités dans la solution (ii) la phase de croissance et (iii) la phase de maturation ou de croissance compétitive entre les différents précipités. Les deux premières étapes que sont la nucléation et la croissance de défauts furent étudiées dès le début du dix-neuvième siècle. La phase de maturation quant à elle, ne fut étudiée que plus tard à partir d’observations faites par des chimistes étudiant la croissance de particules en milieu saturé. Le principal résultat obtenu au cours de ces observations est que la concentration locale de la solution saturée ne dépend que de la taille des particules dans cette même solution. La première véritable étude a été menée par Ostwald au début du vingtième siècle [OST00]. Il a observé que les défauts les plus gros en taille grossissaient au dépend des plus petits. A l’aide de ces observations, il a modélisé la cinétique de ces défauts à partir des travaux de Thomson réalisés quelques années auparavant en 1871 [THO71] et qui donnaient l’expression de la pression de la vapeur en équilibre avec une gouttelette liquide en fonction de son rayon r.

SMART CUTTM ET COUCHES ENTERREES

A partir de ces éléments théoriques, l’équipe de Claverie a eu l’idée d’appliquer ce formalisme à la description de l’évolution thermique de populations de précipités dans un solide sursaturé. Par exemple, Claverie et al. [CLA95] puis Bonafos et al. [BON95, BON97] ont étudié, par MET, l’évolution de la taille moyenne et de la densité des boucles de dislocations (des précipités de Si dans du Si) après des recuits de durées et de températures variables dans du silicium amorphisé. Ces observations ont montré qu’au cours d’un recuit, la taille des boucles augmente, leur densité diminue et le nombre d’interstitiels piégés dans les boucles demeure constant. Pour expliquer et modéliser cette évolution, Bonafos et al. ont alors utilisé la théorie de la maturation d’Ostwald appliquée au cas particulier des boucles de dislocations. Pour cela, ils ont évalué l’énergie de formation des boucles et montré que l’énergie de formation par interstitiel diminue à mesure que la taille de la boucle s’agrandit. Ainsi, ils expliquent et modélisent la compétition que se livrent les boucles et montre que la force motrice de cette évolution est liée à une minimisation de l’énergie de formation entrainant donc une augmentation de la taille des boucles.
En 2000, Grisolia et al. [GRI00a, GRI00b, GRI00c] ont étudié les aspects cinétiques de la croissance des platelets dans du silicium implanté d’hydrogène après recuit. Après avoir établi une analogie entre platelets et boucles de dislocations, ils ont montré que ces défauts croissent par un mécanisme de maturation d’Ostwald conservatif (cf. Figure4) et ils ont modélisé cette croissance. En effet, la Figure 4 montre que le diamètre moyen des platelets augmente d’un facteur 2 pendant que la densité diminue d’un facteur 3-4. De plus, le volume occupé par ces platelets reste constant au cours du temps.
Figure 4: Evolution au cours du temps du diamètre des platelets, de leur densité et du volume qu’ils occupent lors d’un recuit à 450°C [GRI00b].

Les microfissures

Lorsque le budget thermique est augmenté, il a été observé, par microscopie électronique in-situ, que dans les zones où les platelets sont en forte densité, ils peuvent coalescer mécaniquement ce qui conduit à la formation de « nanofissures » puis de microfissures [DAI09].

Sans raidisseur : phénomène de cloquage

Le phénomène de cloquage est étroitement lié à la présence de platelets/microfissures en profondeur. En effet, en l’absence de raidisseur, lorsqu’elles atteignent une taille critique, les microfissures déforment élastiquement le film de silicium qui les surmonte et des cloques se forment à la surface du substrat. C’est pour cela que le procédé Smart CutTM utilise un raidisseur (SiO2) afin d’éviter cette déformation et que les fissures se propagent alors parallèlement à la surface, amenant ainsi à la fracture du silicium.
Poumeyrol [POU96] puis Lagahe [LAG00] ont étudié la croissance thermique du diamètre des cloques dans le silicium. Poumeyrol rapporte que l’augmentation de la taille des cloques s’accompagne d’une diminution de leur densité, et que parallèlement, la surface totale recouverte par les cloques augmente pendant le recuit. Ce dernier constat suggère que le mode de croissance des cloques n’est pas conservatif. Lagahe a observé au microscope optique l’évolution des cloques sur la surface d’un échantillon(même zone d’observation) recuit de façon isotherme à 450°C pour des temps de recuit différents (temps cumulés). Elle n’a pas observé de dissolution des petites cloques au profit des plus grosses, comme attendu d’une croissance par maturation d’Ostwald, ni de migration des cloques les unes vers les autres. Elle en a conclu que les cloques croissent par coalescence mécanique. Ces résultats ont ensuite été repris par Aspar et al. [ASP01] qui discutent de cette coalescence des cloques à la surface de l’échantillon et de la maturation d’Ostwald des cavités en profondeur (zone de défauts suite à l’implantation). Ils suggèrent que l’interaction entre les microfissures est à l’origine du cloquage et de l’exfoliation de la surface. Enfin, Daix [DAI09] a observé la croissance des cloques obtenues par co-implantation hélium-hydrogène en microscopie optique. Il a mis en évidence la disparition des petites cloques au profit des plus grandes en cours de recuit et établi un critère de « proximité » déclenchant la coalescence mécanique entre cloques et microfissures.

 Avec raidisseur

Lorsqu’un raidisseur est solidarisé à la plaque implantée, il empêche la déformation du film implanté dans la direction perpendiculaire à la surface et les fissures vont croître latéralement dans le substrat (cf. Figure 6). La formation et l’évolution de ces fissures ont été étudiées dans plusieurs travaux [REB08, PER08, DAI09, PEN10, PEN13].

Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 : Smart CutTM et couches enterrées
1. Introduction
2. La technologie Smart-CutTM
2.1. Le procédé
2.2. Avantages du procédé
3. De l’implantation à la fracture
3.1. Défauts et complexes formés lors de l’implantation
3.2. Les platelets..
3.3. La théorie de la maturation d’Ostwald
3.4. Les microfissures
3.4.1. Sans raidisseur : phénomène de cloquage
3.4.2. Avec raidisseur
3.5. Fracture finale et état de la surface après la fracture
4. Hydrogène et bore
4.1. Interactions entre atomes H et B
4.2. Interactions entre atomes d’hydrogène et silicium dopé bore
4.3. Co-implantation B+H
4.4. Couche enterrée Si:B
5. Hydrogène et germanium
5.1. Couche SiGe sur substrat silicium
5.2. Couche SiGe dans du germanium
6. Bilan et objectifs
Chapitre 2 : Procédés et techniques expérimentales
1. Introduction
2. Fabrication des échantillons
2.1. Epitaxie
2.2. Oxydation thermique
2.3. Implantation ionique
2.3.1. Principe général
2.3.2. Technologie de l’implantation ionique
2.4. Collage direct hydrophile
2.4.1. Principes physiques
2.4.2. Technologie du collage direct hydrophile
2.5. Découpe
2.6. Recuits
3. Caractérisation des échantillons
3.1. Spectrométrie de Masse par Ions Secondaires
3.2. Microscopie Confocale
3.3. Microscopie Electronique en Transmission
3.3.1. Préparation des échantillons
3.3.2. Observation des échantillons
3.4. Microscope à Force Atomique
Chapitre 3 : Confinement de la fracture dans les couches enterrées Si: et SiGe
1. Introduction
2. Etude de cloquage
2.1. Méthodologie
2.1.1. Description de l’étude de cloquage
2.1.2. Procédure d’identification des conditions favorables d’implantation et traitement thermique
2.1.3. Analyse quantitative des images de microscopie confocale
2.2. Résultats pour la couche Si:B
2.2.1. Effet de la dose, de l’énergie d’implantation, de la température de recuit
2.2.2. Effet du dopage de bore
2.3. Résultats pour la couche SiGe
2.3.1. Effet de la dose d’hydrogène implantée
2.3.2. Effet de l’énergie d’implantation
2.3.3. Effet de la température de recuit
2.4. Conclusions de l’étude de cloquage
3. Essais de transfert
3.1. Description des essais
3.2. Tests de transfert à 500°C-1h
3.3. Cinétique de fracture
3.4. Mesures de rugosité après transfert
4. Etude du mécanisme de fracture avec une couche enterrée
4.1. Impact des couches enterrées sur le profil d’hydrogène
4.2. Impact des couches enterrées sur la localisation des défauts précurseurs de fracture
4.2.1. Après implantation
4.2.2. Après recuit
Conclusion
Chapitre 4 : Diffusion et piégeage de l’hydrogène implanté dans structures localement dopées de type Si/Si:B/Si
1. Introduction
2. Description des expériences
3. Analyse par Spectrométrie de Masse par Ions Secondaires
3.1. Profil après implantation
3.2. Recuits isothermes
3.3. Recuits isochrones
4. Microscopie Electronique à Transmission
4.1. Méthodes
4.1.1. Observations des platelets
4.1.2. Etude quantitative
4.2. Résultats
4.2.1. Images MET
4.2.2. Etude quantitative
4.2.3. Discussion des résultats
5. Modèle physique de diffusion et piégeage de l’hydrogène par les platelets
5.1. Pourquoi un modèle ?..
5.2. Description du modèle physique
5.3. Modèle numérique
5.4. Effet des différents paramètres du modèle
5.5. Détermination du coefficient de diffusion et de l’énergie d’activation
Conclusion
Conclusion générale
Références

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *