MOUTONS ET FORTES TETES

MOUTONS ET FORTES TETES

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Précisons un peu ce que nous entendons par ”aléatoire dans le temps et dans l’espace” lorsque nous parlons des hotspots. On rappelle (voir introduction de la thèse), que les traces utilisées pour notre étude couvraient : • la fˆete de la St-Jean à Varsovie et Cracovie (21 juin) • la Fˆete de la Musique à Paris (21 juin) • les derniers tours de l’Euro de Football à Bucarest (13 juin), Madrid et Barcelone (28 juin). Dans le cas de la St-Jean, les usagers se sont simplement promenés dans la ville sans direction particulière. Le caractère aléatoire des rassemblements est donc bien établi. Seule exception à la règle : un concert sur une scène géante qui a eu lieu dans un parc de Varsovie. Mais mˆeme dans ce cas, l’accès était libre si bien que les individus pouvaient vaquer autour et se sont largement déplacés (comme peut en témoigner notre équipe qui était sur place). Le cas de la Fˆete de la Musique est assez similaire : à part pour un petit nombre de concerts géants bien identifiés et planifiés, les rassemblements peuvent ˆetre considérés comme spontanés. Et mˆeme pour lesdits concerts géants, le fait qu’il y en ait plusieurs au mˆeme moment à différents endroits incitait les individus à se déplacer en cours de route et réintroduisait une dimension aléatoire. Enfin, pour ce qui est des matchs de football, la première phase (retransmission sur écran géant) était aléatoire à cause des différentes localisations des écrans dans la ville. Et la deuxième phase (festive après la victoire) était clairement la plus spontanée et la moins planifiée des deux. Un modèle de mobilité à la fois réaliste et calculable nous permettrait d’améliorer significativement la robustesse des simulateurs en télécommunication et des modèles analytiques, ce qui nous permettrait de mieux comprendre l’impact de la mobilité sur la qualité de service. La prévision des rassemblements permet aussi de mettre au point des algorithmes de gestion dynamique des ressources radio, comme l’allocation dynamique de spectre (voir [Lea04]) ou la radio logicielle (voir [Mit00][Sim07]). Fig. 3.1: SMS envoyés pendant la Fˆete de la Musique à Paris, le 21 juin 2008. Il est 23h13. On peut observer d’importants rassemblements dans le centre-ville (Chˆatelet, Bastille, Saint-Michel), ainsi qu’au Parc des Princes (concert de Tokio Hotel) et à l’hippodrome d’Auteuil (concert de France 2). Dans un premier temps, nous passons en revue les modèles de mobilité existants et nous démontrons la nécessité d’un nouveau modèle pour qui veut modéliser une dynamique des hotspots. Ensuite, nous introduisons notre modèle markovien. Pour cela, nous divisons le territoire en zones d’attractions potentielles, et nous partons du principe que les individus s’influencent les uns les autres. Dans la partie 3.2, nous étudions un ”modèle à moutons”, pour lequel cette influence est particulièrement grande. Nous commen¸cons par étudier un territoire à deux zones, ce qui nous permet de trouver des formules analytiques pour le temps moyen de formation d’un hotspot ainsi que pour la loi de sa position spatiale. Nous donnons aussi des équivalents asymptotiques de ces quantités, et une borne supérieure de la vitesse de convergence. Enfin, nous généralisons ces résultats à un nombre quelconque de zones. Les hotspots sont bien aléatoires en temps et en espace, mais dès qu’ils se forment ils restent stables. Il nous manque donc encore leur désagrégation

Pourquoi un nouveau modèle ?

Sur la figure 3.1, on peut voir un instantané des traces laissées par les SMS dans Paris pendant la Fˆete de la Musique 2008. Tout de suite, on remarque la présence de hotspots. Et sur les animations vidéos de [Urb08], on voit bien que ces hotspots subissent une dynamique. Il ne nous est pas possible de reproduire les vidéos sur papier, mais les clichés de 3.2 donnent une idée de ce qui se passe : la foule commence par quitter petit à petit une zone (nous appellerons cela un ”siphonnage”) pour en remplir une autre (nous appellerons cela un ”remplissage”). La combinaison des deux s’appellera un ”transfert”. La localisation de tels phénomènes est aléatoire, car lorsque les individus quittent un endroit, nous ne savons pas à l’avance s’ils préfèrent se rendre à tel ou tel concert. Cela dépend de plusieurs paramètres subjectifs, comme leur humeur, l’influence de leur entourage, ou simplement leurs goˆuts musicaux. A présent, nous passons en revue les modèles de mobilité existan ` ts, et nous étudions s’ils pourraient ˆetre adaptés à nos besoins. Le modèle le plus populaire en télécommunication est probablement le Random Waypoint Model (voir [Bou05]). Ce modèle est facile à simuler et de plus il est calculable analytiquement dans un grand nombre de situations, selon les règles de déplacement que l’on donne aux individus et la forme géométrique du territoire. Cependant, il ne s’applique qu’à un seul individu à la fois, ou alors à un groupe d’individus indépendants. En utilisant ce modèle pour faire apparaˆıtre de l’attraction, nous devrions choisir une règle de déplacement qui donne plus de poids à certaines zones prédéfinies. Ainsi, la loi de la position d’un individu favoriserait ces zones. Malheureusement, cela empˆeche toute dynamique au niveau macroscopique. En effet, avec un grand nombre d’individus indépendants superposés, un argument de type loi des grands nombres montre que le résultat empirique constitue un. histogramme quasi-parfait de la loi théorique individuelle. Plus précisément, cela vient du théorème de Sanov (voir [Dem93], théorème 6.2.10). Soit µ la loi de position individuelle, et X1, X2, . . . Xn les positions de n utilisateurs indépendants qui suivent µ. Soit ˆµn = 1 n Pn k=1 δXk la loi empirique associée à une observation instantanée. Alors, quel que soit l’évènement B, le théorème de Sanov nous indique que pour n assez grand : P(ˆµn ∈ B) ∼ exp  −n inf ν∈B H(ν|µ)  , 86 Chapitre 3. Moutons et fortes tˆetes o`u H(ν|µ) désigne la distance de Kullback-Leibler1 entre µ et ν. En particulier, si B traduit le fait que les utilisateurs ne s’agglutinent pas là o`u ils devraient d’après µ, H(ν|µ) va ˆetre grand ∀ν ∈ B, et donc infν∈B H(ν|µ) va ˆetre grand aussi. Alors la probabilité d’une telle observation va ˆetre extrˆemement faible dès que n est un tant soit peu important. Ainsi, tous les attroupements vont avoir lieu dans les zones prédéfinies, jamais ailleurs, et ils seront toujours présents. On n’aura donc pas de transfert. D’une manière générale, on aura le mˆeme phénomène à chaque fois qu’on partira de la superposition de plusieurs modèles individuels indépendants. Or pendant les grands évènements publics, un point-clé est l’interdépendance entre individus, puisque les traces qu’ils laissent dans le réseau correspondent bien souvent à des rendez-vous donnés à tel ou tel endroit. Par exemple pendant la Fˆete de la Musique, si un concert est de bonne qualité, les spectateurs en informeront leurs amis pour leur proposer de les rejoindre, ce qui renforcera le hotspot. 

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