Objectifs et dispositifs de stabilité financière dernières évolutions

Objectifs et dispositifs de stabilité financière dernières évolutions

 La crise financière mondiale a suscité un certain nombre d’interrogations sur le rôle des banques centrales en matière de stabilité financière. Toute modification de ce rôle peut avoir une incidence sur l’adéquation des dispositifs de gouvernance. Parmi les difficultés qui se posent, la toute première est de définir le mandat de stabilité financière ; une autre est de s’assurer que ce mandat est compatible avec la/les autre(s) mission(s) de la banque centrale ; une autre encore est de concevoir des structures opérationnelles permettant de s’en acquitter. La présente étude examine brièvement les questions relatives à la transposition, dans la législation, d’objectifs de stabilité financière et rend compte des changements apportés récemment aux dispositifs de stabilité financière dans lesquels les banques centrales ont un rôle. 

La problématique des objectifs de stabilité financière

Le rapport (ci-après le « Rapport Ingves ») d’un groupe d’étude présidé par Stefan Ingves, gouverneur de la Banque centrale de Suède, constatait la nécessité accrue d’une responsabilisation s’agissant de stabilité financière, en même temps que l’importance particulière d’objectifs clairs à cet égard, ainsi que la difficulté de fixer de tels objectifs1 . Les objectifs de stabilité financière sont difficiles à fixer pour trois raisons : la notion de stabilité financière nécessite elle-même d’être définie ; elle se traduit difficilement en objectifs quantifiables ; et sa nature multidimensionnelle peut donner lieu à des arbitrages. Les objectifs de stabilité financière sont donc bien plus difficiles à atteindre que les objectifs de stabilité des prix. Pour prendre l’exemple du ciblage de l’inflation, les objectifs de stabilité des prix se réfèrent habituellement à un niveau ou une fourchette de valeurs pour un indice spécifique (représentant un ensemble de prix significatif) et à un horizon temporel qui traduit l’attention portée à tel ou tel arbitrage (ne pas accroître inutilement la volatilité de l’économie réelle, par exemple). On exagère peut-être le contraste avec les objectifs de stabilité des prix, mais il reste qu’ériger la « stabilité financière » en objectif, sans plus la définir, laisse sans réponses des questions essentielles comme : quel est le degré de stabilité souhaité, pour quels éléments du fonctionnement du système financier, au prix de quelles autres dimensions de la responsabilité des banques centrales ? 

Définir la stabilité financière

Définir la notion de « stabilité financière » avec une clarté suffisante pour orienter l’action des banques centrales et établir une structure de responsabilisation dans ce domaine n’est pas chose aisée. Le Rapport Ingves a recensé cinq types de définitions (parmi lesquelles, par exemple, le bon fonctionnement et la robustesse du système financier). Ces définitions mettent l’accent sur des aspects différents du fonctionnement de l’économie susceptibles d’être exposés à des défaillances des marchés ou à diverses externalités qui motiveraient une intervention des autorités. La stabilité financière a, en effet, un caractère multidimensionnel marqué. 1.2 Quantifier la stabilité financière Si certaines des caractéristiques mises en avant dans les différentes définitions sont potentiellement quantifiables (proportion des services financiers ayant cessé de fonctionner, par exemple), la plupart ne le sont pas. Le problème de la quantification est peut-être surestimé par la comparaison avec les objectifs de stabilité des prix. Le concept de bien-être économique général est difficile à quantifier, et pourtant son équivalent est mentionné dans bon nombre de textes sur les objectifs de stabilité des prix. Par ailleurs, très peu d’objectifs de stabilité des prix énoncés dans la législation quantifient cette notion (voire ne la définissent tout simplement pas). Presque tous les dispositifs de ciblage de l’inflation sont décrits à des niveaux inférieurs, dans des documents non législatifs (la déclaration de stratégie d’une banque centrale, par exemple). Enfin, même si certains éléments étaient quantifiables, les pouvoirs publics devraient encore effectuer de nombreux arbitrages, en l’absence d’une méthode simple permettant de choisir, par exemple, entre x unités de services financiers interrompus et y unités de cycles de modération des prix des actifs. Il reste qu’un certain degré de quantification, lorsqu’elle est possible, serait utile. 1.3 Multidimensionnalité et arbitrages La principale difficulté traitée dans le présent document est le caractère multidimensionnel des politiques de stabilité financière et, tout particulièrement, le risque de conflits entre différentes dimensions. Pour rendre cette problématique plus tangible, intéressons-nous aux neuf composantes possibles d’un objectif de stabilité financière, telles qu’énoncées dans l’encadré 1. Le risque de conflits internes entre éléments de cette liste, qui est en quelque sorte inhérent à l’utilisation d’instruments réglementaires est manifeste. Pour ne citer que quelques exemples : les contraintes réglementaires conçues pour atteindre les composantes 2 et 3 peuvent entrer en contradiction avec les composantes 1 et 9 ; l’incapacité à mettre en œuvre intégralement les composantes 2 et 3 peut aussi avoir une incidence sur la composante 8 ; la réalisation de la composante 6 peut entraver la réalisation de la 7, tout comme les mesures destinées à atteindre la composante 4 en période de tensions ou de crise. On pourrait trouver encore d’autres exemples. Bien entendu, dans la plupart des cas, ces conflits potentiels n’existent qu’à court terme. À long terme, ces composantes peuvent s’accorder. Cela se vérifie aussi pour la relation entre stabilité des prix et économie réelle : les conflits apparaissent avec plus d’acuité à court terme, ce qui les rend partculièrement pertinents sur le plan de la mise en œuvre des politiques. BIS Papers n° 76 53 Les recommandations pratiques qui pourraient contribuer à résoudre ce type de conflits dans la législation sont quasi inexistantes. Les objectifs de stabilité financière sont généralement définis de façon très générale. L’exemple le plus complet de définition englobant l’ensemble des aspects à prendre en compte pour réaliser un objectif multidimensionnel se trouve dans la loi bancaire britannique (Banking Act 2009) – qui traite cependant d’une seule composante de la politique de stabilité financière : la résolution des défaillances bancaires. La section 4 de cette loi énonce cinq objectifs à prendre en considération dans le cadre de l’application d’un régime spécial de résolution bancaire : 1. protéger et renforcer la stabilité des systèmes financiers du Royaume-Uni, notamment dans l’optique d’assurer la continuité des services bancaires ; 2. protéger et renforcer la confiance du public dans la stabilité des systèmes bancaires au Royaume-Uni ; 3. protéger les déposants ; 4. protéger les fonds publics ; 5. éviter de porter atteinte aux droits de propriété en violation des traités de l’UE. La loi indique, par ailleurs, que l’ordre dans lequel les objectifs sont énoncés n’est pas significatif, qu’un juste équilibre doit être trouvé dans chaque cas et que, après consultation avec les autres autorités, le Trésor doit publier une stratégie (un « code de pratique ») qui peut aider à interpréter et atteindre les objectifs de résolution spéciale, et éclairer le choix entre les options possibles. En d’autres termes, le législateur a déterminé un objectif multidimensionnel, reconnu que les différentes dimensions peuvent entrer en conflit les unes avec les autres et établi un processus précisant comment interpréter et mettre en œuvre ces objectifs. 

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