Physiologie des hormones thyroïdiennes

COMMENTAIRE SUR L’EPIDEMIOLOGIE

 La thyroïdite de Hashimoto est la thyroïdite la plus fréquemment rencontrée mais souvent ignorée en clinique, et discutée entre spécialistes (50) (51). Plus de 40 études rapportent la prévalence d’une dysfonction thyroïdienne dans diverses populations ou groupes de sujets. Des données sont disponibles dans plusieurs études de population transversale. Dans l’enquête de population NHANES III (National Health and Nutrition Examination Survey) portant sur un échantillon représentatif de la population des Etats-Unis âgée de plus de 12 ans, la prévalence de la thyroïdite de Hashimoto chez les sujets n’ayant pas d’antécédents connus de maladie thyroïdienne était de 4,3% chez les sujets caucasiens. Dans le Colorado study sur 25.862 volontaires adultes, la prévalence passe respectivement de 7 à 37% de la population totale. Dans l’étude longitudinale menée pendant 20 ans auprès de 2779 adultes représentatifs de la population du comté de Whickham en Grande-Bretagne, la prévalence remonte jusqu’ à 10,3%. A l’hôpital général de Yaoundé (Cameroun), de 1989 à 1996, 613 observations ayant des affections thyroïdiennes ont été inventoriées, 16% de ces patients avaient une thyroïdite soit 98 patients. Sur ces 98 patients, 30 avaient présentés une thyroïdite de Hashimoto. Ce qui vient en 2e position, en matière de fréquence, avec une proportion de 30% (52). A Madagascar la prévalence de thyroïdite de Hashimoto n’est pas encore bien documentée du fait de l’absence d’études menées à propos de cette pathologie.

SELON L’AGE ET LE SEXE

Toujours dans la même étude effectuée à l’hôpital général de Yaoundé, il en est ressorti que sur les 30 patients atteints de thyroïdite de Hashimoto, la tranche d’âge comprise entre 26 à 31 ans était la plus représentative (8%) (53) et que 22 patients (73%) sont de sexe féminin et 8 patients (27%) de sexe masculin confirmant la prédominance féminine de la maladie. Dans notre étude, il n’y avait pas de prédominance de sexe puisque 50% des patients étaient de sexe masculin et l’autre moitie de sexe féminin. De même le nombre faible de notre échantillon ne nous permet pas d’avancer la moyenne d’âge de survenue de la maladie da Hashimoto chez la population malgache

PATHOLOGIES ASSOCIEES L’un de nos 4 patients présente un diabète de type I documenté avec anticorps anti GAD positif et une thyroïdite de Hashimoto confirmé biologiquement par un taux de TSH élevé à 7,29μUI/ml et dosage d’anticorps anti-TPO positif à 40UI/ml (observation III). Ce qui rentre dans le cadre des polyendocrinopathies auto immunes (PEAI) de type II selon la classification de Neufeld (association de diabète type I à une thyréopathie auto immune) (annexe 4). Selon l’étude rétrospective portant sur 1079 patients colligés dans le service d’endocrinologie de Sfax dans le sud Tunisien, pour les maladies thyroïdiennes auto immunes de 1990 à 2003, 1079 patients, 246 patients présentaient une thyroïdite de Hashimoto dont 7 de thyroïdite de Hashimoto associée à un diabète de type I donnant une fréquence de 2,84% (59)(60). Selon la littérature, en Algérie, le diabète était découvert à un âge moyen plus précoce (32ans) que les thyréopathies (37,7 ans) au cours de l’association (61). Ce qui est différent de notre observation car le diagnostic de 2 pathologies a été porté en même temps. Toutefois, nous ne pouvons pas conclure du fait de nombre restreint de nos observations.

HORMONOLOGIE

Toujours, en analysant l’étude réalisée au Centre Hospitalier Universitaire de l’Hôtel Dieu de France, portant sur 121 patients présentant une thyréopathie auto immune, 70 patients sont atteints de thyroïdite de Hashimoto. Parmi ces 70, 60 patients (85%) d’entre eux avaient présenté une hypothyroïdie (infra clinique, et clinique) dont 34 patients (56,6%) une hypothyroïdie franche avec une moyenne de TSH à 45,23μUI/ml, une moyenne de T4 libre à 0,672 ng/dl et une moyenne de T3 totale à 64,7 ng/dl. L’hypothyroïdie infra clinique a été retrouvée chez 26 patients (43,4 %) avec une moyenne de TSH à 5,45 μUI/ml, T4 libre à 1,09 ng/dl et de T3 totale à 101, 3 ng/dl (57). Dans nos observations, 3 patients parmi les 4 (observations II, III, IV) présentent une hypothyroïdie avec un taux moyen de TSH à 10,13 μUI/ml. Nous n’avons pas tenu compte du dosage de T3 ni de T4. En effet, cette attitude a été motivée par le fait que la concentration de TSH circulante est l’indicateur le plus sensible de l’imprégnation tissulaire en hormones thyroïdiennes et donc du statut thyroïdien. Par contre, un seul patient a présenté une hyperthyroïdie franche à 0,10 μUI/ml (observation I). Ce patient a simultanément un anticorps anti- TPO élevé à 15 fois la normale et un anticorps anti-RTSH élevé à 3 fois la normale. Le diagnostic de thyroïdite de Hashimoto à la phase initiale a été porté. Malgré tout, le doute est permis quant à la possibilité d’association de la Maladie de Hashimoto et de Basedow pour ce patient, vu ce bilan. Espérons que l’évolution nous éclairera davantage. Quoi qu’il en soit, notre taux moyen de TSH est assez bas par rapport à celle rapporté par cette étude. Cependant nous ne disposons pas de la notion exacte de la durée de l’évolution de la dysthyroïdie dans nos observations.

DIAGNOSTIC POSITIF

Le diagnostic positif repose sur un faisceau d’arguments (cliniques, biologiques et iconographiques). Un patient parmi les 3 a présenté un goitre visible et un patient un nodule palpable. Parmi les 4 patients, 3 présentent une hypothyroïdie clinique et biologique avec un taux de TSH allant de 5,8 à 17,32 μUI/ml Un patient parmi les 4 a, par contre, présenté des signes clinico-biologiques d’une hyperthyroïdie qui peut être en faveur d’une thyroïdite de Hashimoto à sa phase de début (hashitoxicose). Toutefois, nous émettons des doutes quant à la signification exacte de la positivité de l’anti-RTSH pour ce patient. Serait-ce une maladie de Hashimoto isolée ou serait-ce une association maladie de Hashimoto et maladie de Basedow ? Ce qui est certain, c’est que tous nos 4 patients présentent un dosage d’anticorps anti-TPO positif allant de 40 à 1494 UI/ml avec un taux moyen à 601,25 UI/ml. Ce qui serait conforme avec les données de la littérature puisque 90 à 100% des porteurs de la maladie de Hashimoto ont des anticorps anti-TPO et 80 à 90% des anticorps anti-Tg. Plusieurs études considèrent la présence d’anticorps anti-TPO comme suffisant pour poser le diagnostic de thyroïdite de Hashimoto. Cette hypothèse serait basée sur le fait que le taux d’anticorps anti-TPO est corrélé avec la présence d’infiltration lymphocytaire thyroïdienne sur les examens autopsiques des patients porteurs de Hashimoto. Toutefois, aucune limite n’est clairement établie concernant son taux. Il reste tout de même en réserve que 8 à 27% des sujets normaux sont porteurs des anticorps anti-TPO et 5 à 20% d’anticorps anti-Tg. Dans notre observation, un seul patient a bénéficié d’un dosage d’anticorps anti-Tg qui d’ailleurs est revenu élevé. L’élévation de l’anti-Tg n’est pas, cependant, spécifique ni fiable pour poser le diagnostic de la maladie puisqu’ elle est observée au cours de tout processus inflammatoire de la thyroïde. Aussi, son dosage n’est pas indiqué en 1e intention pour poser le diagnostic de thyroïdite de Hashimoto. Concernant l’imagerie, ni l’échographie, ni la scintigraphie ne sont déterminantes pour poser le diagnostic. L’échographie permettrait tout particulièrement de détecter un nodule suspect et guider une biopsie à l’aiguille fine pour exclure une pathologie maligne (72). Aucun de nos patients n’a bénéficié d’un examen anatomo-pathologique. La cytoponction est difficilement accessible dans notre pays.

TRAITEMENT Parmi nos 4 patients, 3 ont une hypothyroïdie franche avec un taux moyen de TSH à 10,13 μUI/ml, ce qui a motivé l’hormonothérapie de substitution pour ces 3 patients. Pour l’observation II, l’euthyroïdie est atteinte avec du Levothyroxine 50 μg/j. Pour l’observation III, l’euthyroïdie est atteinte avec du Levothyroxine 25 μg/j. Pour l’observation IV, l’euthyroïdie est atteinte avec du Levothyroxine 75 μg/j. Notons que pour ces 3 patients, nous avons institué l’hormonothérapie (Levothyroxine) avec une dose faible à 25μg/j. Un patient parmi les 4 (observation I) a présenté une hyperthyroïdie motivant un antithyroïdien de synthèse à visée frénatrice (Carbimazole) en raison de 40mg/j depuis le mois de Novembre 2011. Il est revenu euthyroïdien au bout 12 semaines de traitement. Nous n’avons, hélas, retrouvé aucune publication relatant ni la durée ni la modalité du traitement de l’hyperthyroïdie au cours de la maladie de Hashimoto. Aucun de nos 4 patients n’a bénéficié de Sélénium qui est non disponible dans notre arsenal thérapeutique. Dans la littérature, seule est indiquée l’hormone thyroïdienne dont le premier choix est la Levothyroxine. La posologie est débutée à 25 à 50 μg en l’absence de cardiopathie sous jacente (73). Les autres traitements médicamenteux comme les corticoïdes et les immunosuppresseurs n’ont pas fait leur preuve. Les corticoïdes ne sont, en effet, indiqués qu’en cas d’encéphalopathie. Tous nos patients, heureusement, en étaient exempts. Il n’y a pas de consensus sur la posologie de l’hormonothérapie. L’efficacité n’est pas garantie et il y a un risque faible mais non nul de complications. Théoriquement l’objectif est d’obtenir une TSH basse en gardant un taux de T4 libre et de T3 libre dans les limites de la normale d’une population de référence. Puisqu’ on ne peut pas agir, du moins directement sur le phénomène auto immun, il faut obtenir une euthyroïdie clinique et biologique et garder la dose efficace de l’hormonothérapie substitutive. Ce qui équivaut à une substitution à vie en principe. Aucune de nos observations n’a eu besoin de Chirurgie. En effet, la chirurgie n’est indiquée qu’en cas de compression locorégionale ou de malignité prouvée ou fortement suspectée (74).

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS THEORIQUES
I . GLANDE THYROIDE
I .1. Anatomie
I .2. Histologie
I .3. Physiologie des hormones thyroïdiennes
I .3.1 Synthèse
I .3.2 Transport plasmatique et métabolisme
I .3.3 Actions biologiques
I .3.4 Régulation de la sécrétion
II . LA THYROIDITE DE HASHIMOTO
II .1 Définition
II .2 Facteurs prédisposant
II .3 Anatomopathologie et physiopathologie
II .4 Clinique
II .4 .1 Type de description
II .4. 2 Formes cliniques
II .4. 3 Evolution
II .4. 4 Complications
II . 5 Diagnostic
II .5. 1 Diagnostic positif
II .5. 2 Diagnostic différentiel
II .6 Traitement
II .6.1 Buts
II .6.2 Moyens
II .6.3 Indications
II .6.4 Surveillance
DEUXIEME PARTIE : METHODOLOGIE ET OBSERVATIONS MEDICALES
I . METHODOLOGIE
II . OBSERVATIONS MEDICALES
II .1 Observation médicale I
II .2 Observation médicale II
II .3 Observation médicale III
II .4 Observation médicale IV
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES, DISCUSSION et SUGGESTIONS
I . COMMENTAIRES SUR L’EPIDEMIOLOGIE
I .1 Prévalence
I .2 Selon l’âge et le sexe
I .3 Selon l’origine géographique
II . COMMENTAIRES SUR LES MANIFESTATIONS CLINIQUES
II .1 Goitre
II .2 Signes cliniques de dysthyroïdies
II .3 Pathologies associées
II .3.1 Thyroïdite de Hashimoto et diabète de type I
II .3.2 Thyroïdite de Hashimoto et insuffisance surrénalienne
III . COMMMENTAIRES SUR LES EXAMENS PARACLINIQUES
III .1 Biologie
III .2 Imagerie
IV . DISCUSSION SUR LE DIAGNOSTIC POSITIF
V . DISCUSSION SUR LE TRAITEMENT
VI . DISCUSSION SUR L’EVOLUTION
VII . DISCUSSION SUR LE SUIVI THERAPEUTIQUE
SUGGESTIONS
CONCLUSION

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