Propriétés physico-chimiques des carbonates fondus par simulations atomistiques

Propriétés physico-chimiques des carbonates fondus par simulations atomistiques

Sels fondus

Un sel fondu est un liquide ionique formé à partir d’une espèce stable à l’ambiante sous forme cristalline. Il en existe une très grande variété car un tel liquide peut être obtenu de tout sel ou mélange de sels dont la température de fusion est inférieure à la température de décomposition. L’exemple le plus connu est sans doute l’halogénure NaCl, un sel simple, mais les sels fondus peuvent avoir des compositions très variées pouvant comprendre des ions moléculaires (nitrates, carbonates) ou de diverses valences. Ces composés ioniques stables ont en commun un certain nombre de propriétés physicochimiques : grande énergie de cohésion, faible pression de vapeur, capacité calorifique élevée, forte conductivité électrique, stabilité à haute température… Les propriétés particulières des sels fondus permettent de dépasser certaines limites de la chimie en phase aqueuse, par exemple liées à de hautes températures de fonctionnement ou à la dissolution de composés inorganiques, et expliquent leurs applications dans des domaines variés : électrométallurgie, traitement de sous-produits ou conversion énergétique. La recherche sur les sels fondus a connu un essor au cours des années 1940 et 1950, en partie porté par la recherche sur le nucléaire militaire. La température de fusion, la densité, la capacité calorifique, la viscosité de très nombreux sels fondus sont alors recensées. Entre 1968 et 1983 Janz compile les données existantes dans une démarche critique sur les méthodes expérimentales et fournit de nouveaux résultats dans le cadre du Molten Salts Standards Program. Il en résulte une base de données publiée en 1988 qui sert aujourd’hui encore très souvent de référence (Janz, 1988)

Carbonates fondus 

L’utilisation des carbonates fondus pour des dispositifs technologiques ou industriels se concentre très majoritairement sur des compositions alcalines (Li2CO3, Na2CO3 et K2CO3), sous forme pur ou de mélanges, et qui contiennent parfois une certaine proportion de carbonates alcalino-terreux (CaCO3, BaCO3…). La température de fusion des carbonates alcalins purs est comprise entre 1000 et 1200 K environ (cf. Section I.3). Les mélanges eutectiques, de plus bas point de fusion, présentent des gammes de stabilité étendues en température et sont couramment utilisés. La Table I.1 résume ces compositions et leur point de fusion.Ainsi, le mélange eutectique ternaire a été utilisé pour la synthèse de nanoparticules de carbone par électroréduction (Groult et al., 2006). L’usage des carbonates fondus est aussi envisagé pour l’électroréduction de CO2 en CO (Chery et al., 2015a) qui pourrait ouvrir la voie vers la formation d’hydrocarbones et de combustibles de synthèse (Cassir et al., 2012). Bien que l’électroréduction semble possible dans d’autres sels fondus (Chery et al., 2015b), les carbonates sont le milieu le plus prometteur pour cette application du fait de leur très forte capacité à solubiliser le CO2 (Claes et al., 1996, 1999). Les applications technologiques des carbonates fondus sont largement orientées vers la production d’énergie propre. Ils sont par exemple utilisés comme fluide caloporteur en couplage avec des centrales solaires thermiques. Les piles à combustible à carbonate fondu (MCFC 1 ) en sont sans doute l’application la plus aboutie. Leur fonctionnement ne produit que de l’électricité, de la chaleur (cogénération) et de l’eau, (presque) sans émission de CO2.

 Exemples d’applications 

Pile à combustible à carbonate fondu (MCFC) : Les carbonates sont parmi les premiers sels fondus à avoir été utilisés comme électrolytes. La toute première version de MCFC date de 1921, quoique le développement de cette technologie ne remonte qu’aux années 1950 et son exploitation aux années 1990. Actuellement, leur utilisation est plutôt limitée à des applications stationnaires (hôpitaux, écoles, etc.) du fait de leurs très hautes températures de fonctionnement. Cependant des progrès importants ont été réalisés ces dernières décennies donnant lieu à la mise en service de dizaines d’installations (Cassir et al., 2013). De plus, des études récentes suggèrent la possibilité d’exploiter les MCFC comme source d’énergie auxiliaire pour le transport maritime (Kang et al., 2016). Les MCFC sont des dispositifs électrochimiques dont l’électrolyte est constitué d’un carbonate fondu, le plus souvent les mélanges eutectiques Li2CO3-K2CO3 (LKe) et Li2CO3- Na2CO3 (LNe), dispersé dans une matrice céramique, en général l’aluminate de lithium LiAlO2 (Cassir et al., 2013). Le principe de fonctionnement est présenté sur la Figure I.1. La réaction totale, H2 + 1/2 O2 = H2O, ne fait intervenir ni les ions carbonates, ni le dioxyde de carbone : le CO2 produit à l’anode est consommé à la cathode. Les performances d’une telle cellule électrochimique dépendent de l’efficacité des rencontres entre l’électrolyte, le catalyseur (l’électrode) et le combustible gazeux. La géométrie du site réactionnel entre les trois phases est optimisable notamment par contrôle de la distribution du carbonate fondu dépendant elle-même de sa densité et de sa tension de surface (Figure I.2). Cette dernière propriété prévient également la fuite des gaz (H2, CO2 et O2). Par ailleurs le caractère corrosif des carbonates fondus peut provoquer la dissolution de la cathode (NiO) et donc diminuer l’efficacité de la cellule électrochimique ainsi que sa durée de vie. Les compositions riches en Li dont l’oxoacidité 2 est moindre sont donc préférables aux carbonates davantage potassiques ou sodiques. L’ajout de quelques pourcents de carbonates alcalinoterreux (Mg, Ca, Sr, Ba) permet aussi de réduire la solubilité de NiO (Lair et al., 2012). Les hautes températures de fonctionnement des MCFC accélèrent les réactions électrochimiques sans recours à des catalyseurs, et permettent l’utilisation de combustibles très divers. Outre ces avantages, les MCFC peuvent aussi être utilisées comme moyen de séquestration du CO2. Capture et séquestration du carbone (CSD/CCS) : Afin de lutter contre l’augmentation de l’effet de serre, le maintien des concentrations atmosphériques de CO2 nécessite soit la réduction (par le recours aux énergies renouvelables), soit la récupération des émissions de CO2. On parle dans le second cas de dispositifs de capture et séquestration du carbone, CSD (Capture and Storage Devices) ou CCS (Carbone Capture and Storage). Une voie de capture du CO2 consisterait à coupler une MCFC au flux de gaz de combustion s’échappant d’une centrale énergétique ordinaire, fonctionnant grâce à des combustibles fossiles (Sugiura et al., 2003). D’autres types de CCS font l’objet de développements, notamment des membranes elles-mêmes constituées de carbonates fondus (Kanai et al., 2013; Zhang et al., 2013). Une fois capturé le CO2 pourrait être réutilisé dans l’industrie ou séquestré dans des formations géologiques (aquifères salins, veines de charbon, réservoirs de pétrole et de gaz naturel, formations basaltiques).

Structure et composition de la Terre actuelle

Avec Mercure, Mars et Vénus, la Terre forme l’ensemble des planètes telluriques du système solaire. Ce terme qui provient du latin tellus faisant également référence à la Terre et à la terre (au sol), désigne les planètes dont la surface est solide. Ces planètes sont composées de roches et d’alliages métalliques de forte densité disposés en couches. Quoique la description de la structure de la Terre comme une succession de sphères concentriques remonte à l’Antiquité, l’identification de la nature de ses couches et l’établissement du modèle de la Terre actuelle sont relativement récents (à partir de la fin du XIXe siècle) suite à l’avènement de la sismologie. Cette zonation est largement héritée de la différenciation primitive 3 et se traduit par des discontinuités observées dans les propriétés physiques et chimiques des matériaux terrestres avec la profondeur. On distingue généralement trois domaines principaux (Figure I.3) : — La croûte qui constitue précisément la surface solide, est la seule couche (de la Terre interne) directement accessible à l’observation. Elle n’est épaisse que d’environ 6 km sous les océans, mais sous les continents elle s’étend jusqu’à 30 km de profondeur en moyenne, voire ∼ 80 km au niveau des chaînes de montagne ou des cratons. 4 La croûte est constituée de silicates granitiques (riches en silice, ∼ 70 wt%) pour sa partie continentale et de silicates basaltiques et gabbroïques 5 (moins riches en silice, ∼ 50 wt%) pour sa partie océanique. — Le manteau est formé de roches silicatées constituées d’oxydes (SiO2, Al2O3, MgO, FeO et CaO) qui subissent divers changements minéralogiques avec la profondeur sous l’effet de l’augmentation de la pression. Les transitions de phase du minéral principal, l’olivine ((Fe,Mg)SiO4), délimite un manteau supérieur (entre la base de la croûte et 410 km de profondeur) d’un manteau inférieur (de 660 à 2900 km de profondeur). Le domaine intermédiaire (410-600 km) est appelé zone de transition (Figure I.7). — Le noyau est composé de métaux, Fe et Ni principalement, incorporant des éléments plus légers (O, Si, C, S, P, H). Il est solide dans sa partie interne, ou graine (5150- 6371 km) et liquide dans sa partie externe (2900-5150 km). Cette dernière région est responsable du champ magnétique terrestre. 

Table des matières

Introduction
I Enjeux de l’étude
I.1 Enjeu technologique
I.1.1 Sels fondus
I.1.2 Carbonates fondus
I.1.3 Exemples d’applications
I.2 Importance géologique du carbone
I.2.1 Quelques notions de sciences de la Terre
I.2.2 Occurrence et dynamique des carbonates fondus
I.3 Domaine de stabilité des carbonates fondus
II Dynamique moléculaire
II.1 Définitions de base et principes
II.1.1 Algorithme de propagation
II.1.2 Définition et contrôle de la température et de la pression
II.1.3 Conditions aux limites périodiques
II.2 Dynamique moléculaire ab initio (AIMD)
II.2.1 Approximation de Born-Oppenheimer
II.2.2 Dynamique Moléculaire Born-Oppenheimer
II.2.3 Théorie de la Fonctionnelle de la Densité (DFT)
II.2.4 Fonctionnelle d’échange corrélation
II.2.5 Résolution autocohérente des équations de Kohn et Sham
II.3 Dynamique moléculaire classique
II.3.1 Potentiel effectif – champ de force
II.3.2 Troncature des interactions
II.4 Simulations atomistiques des carbonates fondus : état de l’art
II.4.1 Carbonates alcalins
II.4.2 Carbonates alcalino-terreux
II.4.3 Potentiels transférables
III Détermination du champ de force
III.1 Description du champ de force
III.1.1 Interactions intramoléculaires
III.1.2 Interactions intermoléculaires
III.1.3 Effet de la dispersion
III.1.4 Hiérarchie des paramètres
III.2 Validation du champ de force
III.2.1 Accord avec les structures ab initio
III.2.2 Accord avec les densités expérimentales des liquides
4 Table des matières
III.2.3 Accord avec les densités expérimentales des solides
III.2.4 Compressibilités des liquides à 1 bar
III.3 Démarche
IV Thermodynamique et structure
IV.1 Équation d’état
IV.1.1 Méthode
IV.1.2 Résultats
IV.2 Structure
IV.2.1 Stabilité de la structure de l’anion
IV.2.2 Structure de sel fondu
IV.2.3 Effet de composition
IV.2.4 Effet de pression
V Propriétés de transport des carbonates fondus
V.1 Coefficients de diffusion
V.1.1 Méthode numérique
V.1.2 Comportement à pression atmosphérique
V.1.3 Comportement en pression
V.1.4 Mécanisme de diffusion
V.2 Conductivité électriqu
V.2.1 Méthode numérique
V.2.2 Accord simulations-expériences
V.2.3 Loi d’activation
V.2.4 Processus de conduction
V.3 Viscosité
V.3.1 Méthode numérique
V.3.2 Comportement à pression atmosphérique
V.3.3 Comportement aux hautes pressions
VI Propriétés d’interface et de solvatation
VI.1 Tension de surface .
VI.1.1 Méthode numérique
VI.1.2 Tension de surface avec le vide
VI.1.3 Tension de surface en pression
VI.2 Solubilité des gaz dans les carbonates fondus
VI.2.1 Méthodes numériques
VI.2.2 Solubilité des gaz rares
Conclusion
A Annexe : Simulations ab initio
B Annexe : Champ de force
Table des matières
C Annexe : Equations d’état
D Annexe : Structure
E Annexe : Thermodynamique et transport
F Annexe : Tension de surface
G Annexe : Solubilité
Bibliographie

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