Mécanismes anatomo-physiologiques des états d’éveil et de sommeil

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Les fonctions du sommeil

Le sommeil est indispensable à la survie. Il participe à de multiples fonctions de maintenance et de réparation des organes. Il a d’abord une fonction de création d’énergie nécessaire au fonctionnement pendant la journée (c’est le rôle du sommeil lent profond). Il a également une fonction de récupération : par la sécrétion d’hormone de croissance dont les taux nocturnes sont considérablement plus importants que pendant la journée, de même que ceux produits au cours d’un exercice physique intense. Le sommeil permet la régulation de la température du corps, la relaxation des muscles, nécessaire pour leur régénération, une diminution plus rapide des toxines par inactivité cellulaire, le renforcement des défenses immunitaires, la diminution des réserves de gras, et la régularisation de la glycémie [15]. Le sommeil paradoxal est indispensable à l’apprentissage, la mémorisation, au maintien de la vigilance et de l’équilibre psychologique. Ainsi, un individu privé de sommeil paradoxal risque par ailleurs de souffrir de troubles de l’humeur et de la vigilance [9].

Troubles liés au sommeil

Classification des troubles du sommeil

La classification internationale des troubles du sommeil (ICSD : International Classification of Sleep Disorders) qui fait référence en médecine du sommeil est établie et révisée par l’American Academy of Sleep Medicine (AASM). La 3ème édition de cette classification (ICSD-3, AASM, 2014) a été publiée en mars 2014 [16]. D’autres systèmes de classification des troubles du sommeil sont proposés par l’American Psychiatric Association dans le Diagnostic and Statistical Manual of Sleep Disorder (DSM-V) 5e édition publiée en 2013 [17] et par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans la 10e version de la Classification internationale des maladies (CIM-10, OMS, 2019) [18]. Des différences notables existent entre ces 3 systèmes de classification. L’ICSD-3 est une classification plus technique et spécialisée, utilisée essentiellement en médecine du sommeil. La classification du DSM-5 elle, s’adresse aux acteurs du domaine de la santé mentale. La CIM-10 est une classification globale incluant l’ensemble des maladies et situations d’utilisation des soins de santé. Elle comporte par conséquent des catégories diagnostiques moins détaillées que les deux autres, alors qu’il existe des critères diagnostiques pour chaque trouble du sommeil dans le DSM et l’ICSD. De ce fait, l’utilisation de la classification de l’OMS dans les pathologies du sommeil est moins courante [19]. Selon l’ICSD-3, les troubles sont regroupés en 7 grandes catégories : les insomnies, les troubles respiratoires liés au sommeil, les hypersomnies d’origine centrale, les troubles du rythme circadien veille-sommeil, les parasomnies, les mouvements anormaux liés au sommeil et les autres troubles du sommeil [16]. Le DSM-5 quant à lui décrit 10 catégories de troubles du sommeil et de l’éveil : l’insomnie, le trouble d’hypersomnolence, la narcolepsie, les troubles du sommeil liés à la respiration, les troubles du rythme circadien de sommeil-éveil, les troubles d’éveil pendant le sommeil non paradoxal, le trouble cauchemar, les troubles de comportement en sommeil paradoxal, le syndrome des jambes sans repos, les troubles du sommeil induit par une substance ou un médicament [17].

Les troubles du sommeil

Les insomnies

L’ICSD-3 [16] propose comme critères diagnostiques de l’insomnie :
 A. Le patient se plaint ou l’entourage observe au moins un des éléments suivants : difficulté à s’endormir, difficulté de maintien du sommeil, réveil plus précoce que l’horaire désiré, refus d’aller se coucher à un horaire approprié, difficulté à dormir sans l’intervention d’un parent ;
 B. Critère B : Fatigue ou mal-être, troubles de l’attention, de la concentration ou de la mémoire, altération de la vie sociale, familiale, professionnelle, troubles de l’humeur ou irritabilité, somnolence diurne, problèmes comportementaux, diminution de la motivation, des énergies, des initiatives, facilité à faire des erreurs ou avoir des accidents, préoccupation ou insatisfaction par rapport au sommeil ;
 C. Les plaintes ne sont pas expliquées par un manque d’occasion de dormir ou un contexte inadapté au sommeil ;
 D et E. Les troubles du sommeil et les symptômes diurnes associés surviennent au moins 3 fois par semaine et sont présents depuis plus de 3 mois ;
 F. Les difficultés de sommeil et de veille ne sont pas mieux expliquées par une pathologie du sommeil autre que l’insomnie. Les critères A et F sont obligatoires.
En population générale, l’insomnie est le trouble du sommeil le plus répandu. En s’attachant uniquement à la présence de plaintes d’insomnie telles que citées plus haut, les taux de prévalence peuvent varier de 10 à 48% [20]. Elle serait plus fréquente chez la femme et le sujet âgé [21]. Il existe plusieurs classifications nosologiques des différents sous-types d’insomnie. L’ICSD-3 la subdivise en 3 sous-groupes notamment : l’insomnie chronique, l’insomnie de court terme et les autres insomnies [16]. Le DSM-4 classifie les insomnies en insomnie primaire (elle-même subdivisée en insomnie épisodique, récurrente et persistante) et en insomnie secondaire [22]. L’insomnie primaire peut être idiopathique ou liée à des facteurs psychologiques (stress, deuil…), environnementaux (niveau sonore, climat, altitude…) ou à une mauvaise hygiène de vie (hyperactivité physique le soir, dîner tardif…) [23]. Les insomnies secondaires sont pour la plupart des insomnies chroniques. Elles peuvent être liées à une pathologie psychiatrique (fréquentes : dépression, anxiété, psychose), une pathologie intrinsèque du sommeil (jambes sans repos et/ou mouvements périodiques nocturnes du sommeil, apnées du sommeil), une autre pathologie médicale, l’usage de médicaments ou de substances (abus de stimulants tels que le café, le tabac, les amphétamines, la cocaïne, l’alcool, les antidépresseurs stimulants, et les hypnotiques au long cours) [20]. Il faut savoir que les différents facteurs et catégories cités ci-dessus sont souvent intriqués. L’insomnie est souvent évolutive et complexe associant plusieurs facteurs. L’insomnie touche environ 1 adulte sur 5. Il est donc naturel que les travailleurs s’en plaignent régulièrement. Ses conséquences professionnelles sont multiples : accidents du travail plus fréquents, nombre de jours d’arrêt de travail augmenté, taux d’absentéisme plus élevé [24].

Les hypersomnies d’origine centrale

Ces troubles sont caractérisés par une somnolence excessive diurne (hypersomnolence) non attribuable à un autre trouble du sommeil, en particulier ceux qui entraînent des perturbations du sommeil ou des anomalies du rythme circadien. Les troubles centraux de l’hypersomnolence sont souvent causés par des anomalies intrinsèques des structures du SNC responsables du contrôle sommeil-veille. Bien que d’autres conditions médicales ou substances peuvent expliquer l’hypersomnolence [25]. Elles sont généralement liées à des accident de la circulation et du travail. Elles entrainent une baisse des performances cognitives et professionnelles [23]. Les diagnostics spécifiques au nombre de 8 sont répertoriés comme suit dans l’ICSD-3 : la narcolepsie de type I (déficit en hypocretin-1), la narcolepsie de type II (sans déficit en hypocretin-1), l’hypersomnie idiopathique, l’hypersomnie associée à une maladie psychiatrique, le syndrome de Klein-Levin, l’hypersomnie secondaire à une pathologie médicale, l’hypersomnie secondaire à l’usage de substances ou médicaments, le syndrome d’insuffisance de sommeil [16].
 Le syndrome d’insuffisance de sommeil
Ce syndrome est probablement la première cause de somnolence diurne excessive. Il apparaît lorsque, d’une façon persistante, un sujet ne dort pas aussi longtemps qu’il le devrait pour maintenir un niveau d’éveil normal. Le sujet se trouve ainsi en privation chronique, non intentionnelle, de sommeil. Les symptômes de l’insuffisance de sommeil comprennent une somnolence diurne excessive, principalement l’après-midi ou le soir et, en rapport également avec cette insuffisance de sommeil. S’ajoutent un ou plusieurs des troubles suivants : troubles de l’attention et de la concentration, irritabilité, distraction, manque de motivation, fatigue, etc. Le diagnostic découle d’un interrogatoire précisant les horaires habituels de sommeil et de la notion fréquente d’un réveil tardif le matin en fin de semaine et en vacances [26].
 Etiologies des hypersomnies
 Induites : par une privation chronique de sommeil due à des médicaments psychotropes (anxiolytiques, somnifères), des substances (toxiques, alcool) ou à une perturbation induite du rythme circadien veille-sommeil (travail posté, vols transméridiens, etc.)
 Pathologiques :
o Primaires : due à une pathologie intrinsèque liée à une atteinte d’un système d’éveil (narcolepsie de type 1 et 2, hypersomnie idiopathique)
o Secondaires : à une pathologie altérant le sommeil de nuit (syndrome d’apnées du sommeil, syndrome des jambes sans repos et mouvements périodiques nocturnes, affections neuropsychiatriques, pathologies chroniques sévères (traumatismes, douleurs, cancers, infections, etc.)
o Dues à un trouble du rythme circadien veille-sommeil (syndromes de retard de phase, et d‘avance de phase, etc.) [21].

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1. LE SOMMEIL
1.1. Physiologie du sommeil
1.1.1. Composition et durée du sommeil
1.1.2. Régulation de la veille et du sommeil
1.1.2.1. Mécanismes anatomo-physiologiques des états d’éveil et de sommeil
1.1.2.2. Régulation du sommeil
1.1.2.3. Interactions entre processus homéostasique et processus circadien
1.1.2.4. Synchronisation de l’horloge circadienne
1.1.2.2.1. Synchroniseurs externes
1.1.2.2.2. Synchroniseurs internes
1.1.2.2.2.1. La mélatonine ou «hormone du sommeil»
1.2. Les fonctions du sommeil
1.3. Troubles liés au sommeil
1.3.1. Classification des troubles du sommeil
1.3.2. Les troubles du sommeil
1.3.2.1. Les insomnies.
1.3.2.2. Les hypersomnies d’origine centrale.
1.3.2.3. Les troubles du rythme circadien veille-sommeil (TRCVS)
1.3.2.4. Les parasomnies
1.4. Prise en charge et prévention
1.4.1.1. Examen du sujet présentant un trouble du sommeil
1.1.4.1.1. Anamnèse
1.1.4.1.2. Outils d’aide au diagnostic
1.4.1.2. Examens paracliniques
1.4.1.3. Traitement des troubles du sommeil
1.4.1.3.1. Traitement de l’insomnie
1.4.1.3.1.1. Les moyens thérapeutiques
1.4.1.3.2. Traitement du syndrome d’insuffisance de sommeil et des TRC lié au travail posté.
2. LA PROFESSION DE SAGE-FEMME OU MAÏEUTICIEN
2.1. Déroulement de la formation
2.2. Les missions
2.2.1. Compétences communes aux sages-femmes et infirmiers
2.2.2. Compétences spécifiques aux sages-femmes
2.3. Les débouchés
3. TRAVAIL POSTÉ ET TRAVAIL DE NUIT
3.1. Définitions
3.2. Aspects législatifs et réglementaires
3.2.1. Mise en place du travail de nuit par accord collectif
3.2.2. Suivi de l’état de santé et des conditions de travail des salariés
3.2.3. Prise en compte du travail de nuit dans le cadre de la démarche générale de prévention
3.2.4. Retour sur un poste de jour
3.2.5. Dispositions particulières en cas de grossesse et maternité
3.2.6. Prise en compte du travail posté et de nuit dans le cadre du dispositif de « pénibilité »
3.3. Modes d’organisation
3.4. Pathologies liées au travail de nuit et posté.
3.4.1. Adaptation au travail posté : physiopathologie.
3.4.2. Troubles du sommeil liés au travail posté
3.4.3. Troubles digestifs
3.4.4. Troubles de la vigilance et risque d’accidents
3.4.4.1. Diminution de la vigilance et de la concentration
3.4.4.2. Risque accidentogène lié au travail de nuit
3.4.4.2.1. Accidents du travail
3.4.4.2.2. Accidents de trajet
3.4.5. Autres effets liés au travail posté et de nuit
3.4.5.1. Troubles nutritionnels, métaboliques et cardio-vasculaires
3.4.5.1.1. Troubles nutritionnels et métaboliques
3.4.5.1.2. Troubles cardio-vasculaires
3.4.5.2. Risques cancérigènes.
3.4.5.3. Risques spécifiques chez la femme
3.4.5.3.1. Risque au cours de la grossesse
3.4.5.3.2. Perturbations du cycle menstruel
3.4.5.4. Troubles psychiques, psychologiques et psychiatriques
3.4.5.5. Troubles musculosquelettiques
3.4.5.6. Perturbations socio-familiales
3.4.5.7. Effets sur les conditions de travail
3.5. Prévention et recommandations
3.5.1. Les troubles liés au sommeil et à la vigilance
3.5.1.1. Contenu de la visite médicale en santé au travail
3.5.1.2. Mesures de prévention
3.5.1.3. Autres mesures de prévention préconisées pour lutter contre troubles du sommeil et la vigilance
3.5.2. Les risques observés chez la femme
3.5.2.1. Contenu de la visite médicale en santé au travail
3.5.2.2. Mesures de prévention
3.5.2.3. Autres troubles associés au travail posté et/ou de nuit
3.5.2.3.1. Contenu de la visite médicale en santé au travail
3.5.2.4. Autres solutions de prévention pour une meilleure adaptation travail posté et/ou de nuit
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
1. OBJECTIFS
1.1. Objectif général
1.2. Objectifs spécifiques
2. CADRE DE L’ETUDE
3. MATERIELS ET METHODES
3.1. Population de l’étude
3.2. Type et période d’étude
3.3. Instruments d’étude
3.5. Variables étudiées
3.6. Saisie et analyse de données
3.7. Considérations éthiques
3.8. Difficultés rencontrées
4. RESULTATS
4.1. Résultats descriptifs
4.1.1. Effectifs totaux
4.1.2. Caractéristiques socio-démographiques et mode de vie de la population.
4.1.2.1. L’âge
4.1.2.2. Indice de masse corporelle
4.1.2.3. Enfants à charge
4.1.2.4. Situation et régimes matrimoniaux.
4.1.2.5. Activité sportive
4.1.2.6. Consommation de tabac et d’alcool
4.1.3. Données professionnelles
4.1.3.1. Ancienneté dans la profession
4.1.3.2. Ancienneté dans le travail posté
4.1.3.3. Vécu par rapport au travail posté
4.1.3.4. Durée des postes
4.1.3.5. Rythmes de rotation
4.1.4. Perturbation du comportement alimentaire et de l’état de santé pendant le travail posté
4.1.4.1. Alimentation
4.1.4.2. Troubles digestifs
4.1.4.3. Céphalées et/ou de migraines chroniques pendant et/ou juste après une garde de nuit
4.1.4.4. Traitement
4.1.5. Le sommeil et ses caractéristiques
4.1.5.1. Troubles du sommeil
4.1.5.2. Evaluation de la quantité de sommeil
4.1.5.3. Qualité du sommeil
4.1.5.4. La somnolence et ses contre-mesures
4.1.5.4.1. Evaluation de la somnolence
4.1.5.4.2. Contre-mesures à la somnolence pendant le poste de nuit
4.1.5.5. Réveils intra sommeil
4.1.5.6. Troubles de l’humeur
4.1.5.7. Habitudes de sommeil avant et après un poste de nuit
4.1.6. Les accidents et la surveillance médico-professionnelle
4.1.6.1. Accidents du travail
4.1.6.2. Accidents de trajet
4.1.6.3. Surveillance médico-professionnelle
4.2. Résultats analytiques
4.2.1. Troubles du sommeil en fonction de différentes variables
4.2.2. Corrélation entre temps de sommeil réduit après un poste de nuit quelques variables socio-démographiques
4.2.3. Corrélation entre somnolence diurne excessive (score >/=9) et accidents du travail et de trajet
DISCUSSION
1. CARACTERISTIQUES SOCIO-DEMOGRAPHIQUES ET MODE DE VIE DE LA POPULATION
2. DONNEES PROFESSIONNELLES
3. PERTURBATION DU COMPORTEMENT ALIMENTAIRE ET DE L’ETAT DE SANTE PENDANT LE TRAVAIL POSTE
3.1. Alimentation et troubles digestifs
3.2. Céphalées et/ou migraines chroniques pendant et/ou juste après une garde de nuit
3.3. Traitement
4. SOMMEIL ET SES CARACTERISTIQUES
4.1. Troubles du sommeil
4.2. Evaluation de la quantité de sommeil
4.2.1. Avant un poste de jour.
4.2.2. Lors d’un poste de nuit
4.2.3. Le lendemain d’un poste de nuit
4.3. Qualité du sommeil
4.4. La somnolence et ses contre-mesures.
4.4.1. Evaluation de la somnolence
4.4.2. Contre-mesures à la somnolence pendant le poste de nuit
4.5. Réveils intra sommeil
4.6. Troubles de l’humeur.
5. ACCIDENTS ET LA SURVEILLANCE MEDICO-PROFESSIONNELLE
5.1. Accidents du travail
5.2. Accidents de trajet
5.2.1. Moments de survenue
5.2.2. Causes de survenue
5.3. Surveillance médico-professionnelle
5.3.1. Présence d’un MT dans la structure sanitaire
5.3.2. Régularité des visites chez le médecin du travail
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES

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