Réponse antivirale des cellules dendritiques plasmacytoides contre des cellules infectées

Réponse antivirale des cellules dendritiques plasmacytoides contre des cellules infectées

Reconnaissance des agents viraux par les Toll-like récepteurs

Les Toll-like récepteurs Les TLRs (Toll-like receptor) constituent la première famille de TLR à avoir été identifiées. A l’origine, les chercheurs avaient observé que le gène codant pour une protéine Toll, chez la drosophile, était essentiel au développement embryonnaire de la polarité dorso-ventrale. Plus tard, des études de mutants de la protéine Toll ont montrés que ces mutations rendaient les mouches très sensibles à des infections par des champignons auxquels elles sont normalement résistantes. Des protéines activant l’expression des gènes de la réponse de l’immunité innée dans les cellules humaines et similaires à Toll sont ensuite été découvertes et seront plus tard appelées récepteurs « Toll-like » (Medzhitov et Page 10 al., 1997). Chez les mammifères, la famille des TLRs regroupe 13 membres identifiés à ce jour. Les TLRs 1 à 10 sont homologues chez l’Homme et la souris alors que les TLRs 11 à 13 ne sont exprimés que chez la souris. Les TLRs sont des protéines transmembranaires constituées d’un domaine extracellulaire de répétition riche en leucine (LRR) capable d’interagir avec des ligands spécifiques, chaque TLR possédant un répertoire spécifique de PAMPs (Tableau 1). Dans la plupart des cas, la reconnaissance d’un PAMP par un TLR entraine son homodimérisation. Néanmoins, TLR2 forme des hétérodimères en s’associant soit au TLR1 soit au TLR6. La localisation cellulaire des TLRs est en accord avec leurs ligands respectifs, afin d’y répondre de façon optimal. Par exemple les TLRs reconnaissant les PAMPs présents à la surface des pathogènes extracellulaires sont localisés au niveau des membranes plasmiques, alors que les TLRs reconnaissant les composants internes des pathogènes, exposés uniquement lors de leurs dégradations, se situent dans les endosomes et les lysosomes. Enfin, l’expression des TLRs n’est pas statique mais modulée en réponse à la présence de pathogènes ou de différentes cytokines.

Reconnaissance virale par les Toll-like récepteurs

Les génomes viraux, composés à la fois d’ADN ou d’ARN sous sa forme double brin (dsRNA) et simple brin (ssRNA), ainsi que les glycoprotéines de surfaces, sont reconnus comme des PAMPs par les TLRs (Tableau 1). Les TLR3, TLR7, TLR8 et TLR9 sont spécifiquement impliqués dans la reconnaissance des nucléotides viraux, entrainant notamment la production d’interféron de type I (IFNI) un acteur essentiel de la lutte antivirale. Par exemple, l’ADN viral généralement enrichi en motif CpG va stimuler le TLR9 situé dans le compartiment endosomal et induire la production d’IFN-I et de cytokines pro-inflammatoires (Akira et al., 2006). Dans le cas du virus de l’herpès simplexe (HSV), un virus à ADN, cette réponse est limité aux cellules dendritiques plasmacytoides (pDCs) (Krug et al., 2001). Le ssRNA viral est reconnu par le TLR7 et 8, exprimés au niveau de la membrane endolysosomale. Ces deux TLRs possèdent une forte homologie et peuvent être stimulés suite à un traitement par un agoniste comme l’imiquimod (R837) ou encore le resquimod (R848). Beaucoup de virus enveloppés étant internalisés dans le compartiment endosomal, la fusion des endosomes avec les lysosomes entraine la formation d’endo-lysosomes au pH hautement acide et riches en enzymes de dégradation. Dans ces conditions, les particules virales vont être digérées, rendant possible la détection du génome viral ainsi libéré par les TRL7 ou 8. La phagocytose de cellules infectées apoptotiques peut également donner lieu à la reconnaissance des génomes viraux, transférés de la cellule infectée au phagocyte. Dans le cas d’ARNs cellulaires relargués dans le milieu extracellulaire, contrairement aux Page 11 génomes viraux protégés par une capside, ces derniers sont la cible de nombreuses RNAses et se retrouvent généralement dégradés avant de pouvoir être potentiellement reconnus. Le dsRNA viral est reconnu par le TLR3. Un analogue synthétique utilisé est l’acide polyinosinique-polycytidylique (poly I:C) (Alexopoulou et al., 2001). Les dsRNA viraux peuvent être générés durant la réplication virale, soit sous la forme d’un intermédiaire de réplication pour les virus à ssARN ou comme un produit dérivé de la transcription des virus à ADN. Bien que TLR3 soit exprimé par un grand nombre de cellules, comme notamment les cellules dendritiques dites « conventionnelles » (cDC), il n’est pas retrouvé dans les pDCs. Son expression est rapidement augmentée par traitement au poly I:C ou à l’interféron (IFN) de type I (IFN-I), et son rôle dans la réponse antivirale a été illustré par un grand nombre d’études in vivo et in vitro. En effet il a été montré que des souris déficientes pour TLR3 montraient une sensibilité accrue à MCMV (Murine Cytomegalovirus) (Hardarson et al., 2007; Tabeta et al., 2004), HSV-2 (Type 2 Herpes Simplex Virus) (Reinert et al., 2012). De plus son rôle de protection antivirale a également été démontré contre un certain nombre de flavivirus comme WNV (West Nile Virus), DENV (Dengue Virus) ou encore ZIKV (Zika Virus) (Daffis et al., 2008; Hamel et al., 2015; Liang et al., 2011). Certaines protéines virales peuvent être reconnues par TLR4 et TLR, leurs détections entrainant la production de cytokines pro-inflammatoires mais pas ou peu d’IFN-I, à l’origine d’une réponse préférentiellement inflammatoire mais pas antivirale (Oliveira-Nascimento et al., 2012). Table 1: Toll-like récepteurs et leurs ligands (Akira and Takeda, 2004) TLR Ligands Pathogènes Localisation Dimères Signalisation TLR1 Lipopeptides triacylés Mycobactéries et bactéries à Gram négatif Membrane plasmique TLR1/TLR2 MyD88/TIRAP Peptidoglycanes Bactéries à Gram positif Protéines à ancre GPI Trypanosomes Lipoprotéines Mycobactéries et autres bactéries Zymosan Levures et champignons Phosphatidylsérine Schistosomes TLR3 ARN double brin (dsRNA) Virus Endosomes/lysosomes TLR3/TLR3 TRIF/TRAM LPS Bactéries à Gram négatif Protéine-F Virus syncytial respiratoire (RSV) Mannanes Champignons TLR5 Flagelline Bactéries Membrane plasmique TLR5/TLR5 MyD88 Lipopetides diacylés Mycobactéries et bactéries à Gram positif Zymosan Levures et autres champignons TLR7 ARN simple brin (ssRNA) Virus Endosomes/lyosomes TLR7/TLR7 MyD88 TLR8 ARN simple brin (ssRNA) Virus Endosomes/lyosomes TLR8/TLR8 MyD88 Dinucléotides non méthylés CpG ADN bactérien Dinécluotides TLR10 Inconnu Inconnu inconnu Inconnu Inconnu Inconnu Bactéries uropathogènes Profiline Toxoplasme TLR12 Inconnu Innconnu inconnu Inconnu Inconnu TLR13 Inconnu Virus de la stomatite vésiculeuse Endosomes/lysosomes TLR13/TLR13 MyD88 TLR11 Endosomes/lyosomes Membrane plasmique Membrane plasmique TLR1/TLR2 TLR2/TLR6 TLR4/TLR4 TLR2/TLR6 TLR11/TLR11 TLR9/TLR9 TLR2 Membrane plasmique TLR4 Membrane plasmique Endosomes/lysosomes TLR6 TLR9 Myd88/TIRAP Myd88/TIRAP TRIF/TRAM MyD88 MyD88 

Voies de signalisation des Toll-like récepteurs

L’engagement des TLRs par la reconnaissance des PAMPs entraine une cascade de signalisation induisant l’expression de nombreux gènes impliqués dans les défenses de l’hôte. Les voies de signalisations activées par un dimère de TLR sont essentiellement déterminées par la protéine adaptatrice recrutée au niveau de leur domaine intracellulaire TIR (Toll/IL-1 Récepteur). Il existe quatre protéines adaptatrices dont MyD88 (Myéloid Différenciation factor 88), et TRIF (TIR-domaincontaining adaptator-inducing IFNβ Factor) qui seront plus particulièrement détaillées. Celles-ci amorcent deux voies de signalisation distinctes responsables respectivement de la production de cytokines pro-inflammatoires et d’IFN-I. MyD88 est critique pour les voies de signalisation induites par tous les TLRs à l’exception du TLR3. Une voie de signalisation des TLRs indépendante de MyD88, induite par les TLRs 3 et 4, est médiée par TRIF. Dans le cas particulier de l’activation des pDCs, la production d’IFN-I par les TLR7 et 9 dépend de MyD88 (Tableau 1). Celle-ci conduit au recrutement à la membrane des endosomes, et à l’assemblage du complexe multi protéique regroupant IRAK4, TRAF6, BTK et IRF7. IRF7 est activé par son ubiquitylation par TRAF6 et sa phosphorylation par IRAK4. Une fois activé, IRF7 interagie avec TRAF3, IKKα, IRAK1, l’ostéopontine (OPN) et PI3K pour être transloqué dans le noyau (Gilliet et al., 2008). IRF7 est essentiel pour la transcription des gènes des IFN-I comprenant l’IFNα et l’IFNβ (Figure 1). Figure 1 : Activation et signalisation du Toll-like récepteur 7 Les cellules dendritiques plasmacytoides (pDC) expriment principalement les TLRs (Toll-like receptor) 7 et 9, qui migrent du réticulum endoplasmique (ER) vers les endosomes. TLR7 est synthétisé dans le ER ou il est associé aux protéines gp96 et UNC93B nécessaires à sa conformation. TLR7 est relocalisé au niveau du golgi dans une vésicule recouverte de la protéine COPII (coat protein complexe II). Dans le Golgi, UNC93B1 ubiquitine TLR7 qui est transporté dans les endosomes. L’acidification présente dans les endosomes entraine le clivage protéolityque de TLR7 par la furine. La reconnaissance d’acides nucléiques par TLR7 provoque des changements de conformation dans sa structure moléculaire conduisant à l’activation de MyD88 et à son association avec TRAF6 (tumour-necrosis factor (TNF) receptor-associated factor 6) et IRAK4 (interleukin‑1-receptor-associated kinase 4). Le complexe MyD88-TRAF6-IRAK4 active la kinase TAK1, et IRF5 pour activer des molécules en aval de la voie de signalisation. IRF7 est activée par ubiquitylation et phosphorylation par TRAF3, IRAK1, IKKα (inhibitor of nuclear factor kappa-B kinase α), OPN (ostéoponine) et PI3K (phosphoinositide 3-kinase). Après activation, IRF7 est transloquée vers le noyau et initie la transcription des interférons de type I et III. TAK1 entraine l’activation de NF-κB et des MAPKs (mitogen-activated protein kinases) et, avec l’IRF5, conduit à la production de cytokines pro-inflammatoires (Gilliet et al., 2008; Petes et al., 2017).

Les récepteurs induits par l’acide rétinoïque 

Reconnaissance et voies de signalisation des récepteurs induits par l’acide rétinoïque Les récepteurs induits par l’acide rétinoïque (RLR) sont des PRRs solubles résidant dans le cytosol de nombreux types cellulaires où ils jouent un rôle crucial contre les infections virales. Les RLRs incluent RIG-I (retinoic-acid-inductible protein I), MDA5 (Melanoma differenciation associated gene 5) et LGP2 (laboratory of genetics and physiology 2) (Figure 2). Ils sont composés d’une hélicase virale permettant la reconnaissance de l’ARN, d’un domaine CTD (zinc-binding C-terminal domain) et d’un domaine CARD (caspase activation and recruitement domain) à l’extrémité N-terminal impliqué dans la transmission du signal. Contrairement à RIG-I et MDA5, LGP2 ne possède pas de domaine CARD, mais est capable de se lier au dsRNA de façon similaire à ses homologues. Il serait d’ailleurs impliqué dans la régulation de la signalisation de RIG-I et MDA5. En dépit de leur homologie de séquence et de structure, RIG-I et MDA5 lient préférentiellement des ligands différents. RIG-I lie principalement des dsRNA ou ssRNA de courte taille (10-300pb), incluant les ARNs possédant une extrémité 5’triphosphate et des régions enrichies en poly-U/UC, comme le génome du virus de l’hépatite C (HCV) (Saito et al., 2008). MDA5 reconnait plus particulièrement les longs fragments de dsRNA. LGP2 a été montré comme interagissant avec l’extrémité des dsRNA de différentes tailles avec une affinité élevée (Li et al., 2009). L’expression des RLRs est ubiquitaire, quoi que faiblement exprimé avant qu’une infection viral ou la stimulation IFN-I n’induise rapidement sa sur-expression (Yoneyama et al., 2005). La cascade de signalisation des RLRs se fait via MAVS (Mitochondrial antiviral-signaling protein), situé au niveau de la membrane extérieure de la mitochondrie, et de MAM (mitochondria associated-membrane) ce qui suggère l’implication des mitochondries dans les réponses IFN, en plus de leurs rôles dans le métabolisme cellulaire (Figure 2).  

Table des matières

Introduction
I. L’immunité innée : première ligne de défense antivirale9
I. i. Reconnaissance des agents viraux par les Toll-like récepteurs
I. i. i. Les Toll-like récepteurs
I. i. ii. Reconnaissance virale par les Toll-like récepteurs
I. i. iii. Voies de signalisation des Toll-like récepteurs
I. ii. Les récepteurs induits par l’acide rétinoïques
I. ii. i. Reconnaissance et voies de signalisation des récepteurs induits par l’acide rétinoïques
II. La réponse interféron de type I
II. i. Introduction sur les interférons de type I
II. i. i. Les interférons de type I et leur récepteur
II. i. ii. La voie de signalisation des interférons de type I
II. i. iii. Les mécanismes de protection antiviraux des interférons de type I
II. ii. Régulation de la réponse interféron de type I
II. ii. i. La régulation positive de la réponse interféron de type I
II. ii. ii. Régulation négative de la réponse interféron de type I
II. ii. iii. Les effets délétères de la réponse interféron de type I
III. Les cellules dendritiques plasmacytoides
III. i. Caractéristiques des cellules dendritiques plasmacytoides
III. i. i. Introduction sur les cellules dendritiques plasmacytoides
III. i. ii. Ontogénie et maturation des cellules dendritiques plasmacytoides
III. i. iii. Activation des cellules dendritiques plasmacytoides par reconnaissance de l’infection virale
III. ii. Les fonctions des cellules dendritiques plasmacytoides
III. ii. i. L’activation des cellules dendritiques plasmacytoides
III. ii. ii. La régulation négative des cellules dendritiques plasmacytoides
III. ii. iii. Dérèglement de la réponse des cellules dendritiques dans l’auto-immunité
IV. Les contacts cellulaires
IV. i. La synapse immunologique
IV. i. i. Structure et dynamique de la synapse immunologique
IV. i. ii. Importance de l’actine dans la synapse immunologique
IV. i. iii. Transfert polarisé au niveau de la synapse immunologique
IV. i. iv. Lien avec les cellules dendritiques plasmacytoides
IV. ii. Rôle fonctionnelle et régulation des intégrines dans la synapse immunologique
IV. ii. i. Activation et positionnement des intégrines
IV. ii. ii. Activation des intégrines dans la synapse immunologique
IV. ii. iii. Rôle des intégrines dans la migration et leurs régulations par les chémokines
V. Les modèles viraux
V. i. Le virus de la Dengue
V. ii. Le virus de l’hépatite C
V. iii. Les mécanismes d’évasion virale à la réponse interféron de type I
V. iii. i. Inhibition de la production d’IFN de type I par DENV
V. iii. ii. Inhibition de la voie de signalisation de l’interféron de type I par DENV.
V. iii. iii. L’infection chronique par HCV
V. iii. iv. Les mécanismes d’évasions à la réponse interféron de type I par HCV
V. iv. Activation des cellules dendritiques plasmacytoides par les modèles viraux
V. iv. i. Activation par le transfert de particules immatures
V. iv. ii. Activation par le transfert d’exosomes
Objectifs de la thèse
Résultats
I. Paper N°1: Plasmacytoid Dendritic Cells and Infected cells Form an Interferogenic synapse
required for Antiviral Responses
II. Paper N°2: IFN-I signaling reinforces the interferogenic synapse-mediated sensing of infected
cells by the plasmacytoides dendritics and antiviral response (in preparation)
Discussion
I. La synapse interferogenic : Une plateforme structurale polarisée
II. Modèle d’action antivirale des cellules dendritiques plasmacytoides
III. Une boucle de régulation IFN-I restreinte dans le temps ?
IV. La synapse interferogénique permet une réponse localisée
V. Caractériser d’avantage la synapse interferogénique
VI. Une lignée cellulaire déficiente pour ICAM-I, un nouvel outil.
Bibliographie
Annexe

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