Spectroscopie plasma

 Spectroscopie plasma

Peu accessible en laboratoire, la spectroscopie plasma à l’équilibre thermodynamique local est primordiale dans l’étude des plasmas rencontrés aussi bien en astrophysique qu’en fusion par confinement inertiel.

Convolution de la transmission

Le diagnostic de la structure atomique des espèces présentes dans un plasma peut utiliser deux types de spectres : • les spectres en émission, s’ils sont à l’équilibre thermodynamique local ; • les spectres en transmission. Les spectres en émission sont les plus faciles à obtenir, mais sont très difficiles à interpréter. En laboratoire, il est impossible d’obtenir un plasma homogène à l’É. T. L. Ceux en transmission facilitent l’interprétation, permettent d’accéder aux couches profondes et sont moins sensibles aux effets hors-É. T. L. que les spectres en émission. On considère un milieu d’épaisseur l d’opacité spectrale κ(hν) et de densité ρ 1 . L’opacité ne dépend que de ρ, et la dépendance est assez faible. La masse surfacique 1Mêmes notations que Sec. 1.3.2 dans cette section  ρl, en cm2/g, est la quantité qui est le plus souvent considérée La transmission est reliée à l’opacité via l’équation (1.48) p. 23 : T(hν) = I I0 = I(l, hν) I(0, hν) = e −τ(hν) , (9.1) avec τ(hν) = Z l 0 ρ(x)κν(l) dx. (9.2) La double égalité traduit les chemins qui relient l’opacité, la transmission et l’intensité observée. Le spectre en transmission expérimentale est déterminé par rapport des deux intensités spectrales mesurées : • l’intensité de référence I0,exp provenant du backlighter sans passage dans le plasma ; • l’intensité transmise IT,exp du rayonnement du backlighter qui a traversé le plasma. La transmission expérimentale brute T ◦ exp s’écrit alors T ◦ exp (hν) = IT,exp I0,exp . (9.3) La transmission théorique T ◦ Θ , elle, est déterminée par la seconde égalité, à savoir T ◦ Θ(hν) = e −τ(hν) = e −ρlκ(hν) . (9.4) La seconde égalité, dite loi de Beer-Lambert, est vraie uniquement si le milieu est uniforme. Dans le cas général, la profondeur optique τ(hν) est donnée formule (9.2). Les spectrographes sont limités en précision : un photon d’énergie hν est mesuré comme ayant une énergie hν + ∆hν, avec ∆hν ≪ hν variable aléatoire en énergie dont la distribution est donnée par Wexp(∆hν), appelée erreur expérimentale. La résolution instrumentale est le plus souvent donnée sous forme de λ ∆λ , où λ est la longueur d’onde. La conversion de λ à hν est aisée, car λ ∆λ est l’inverse d’une différentielle logarithmique, par conséquent hν |∆(hν)| = λ |∆λ| . (9.5) Même si l’élargissement instrumental dépend de l’énergie spectrale, l’effet d’une faible variation de l’élargissement instrumental sur le spectre en transmission est peu discernable. Le considérer uniforme sur la fenêtre du calcul en transmission a des effets négligeables sur l’interprétation du spectre expérimental. Les spectres expérimentaux à prendre en compte sont les produits de convolution Wexp ∗ I0,exp et Wexp ∗ IT,exp En général, la distribution Wexp suit une loi normale, et la FWHM, qui est égale à environ 2,355 fois l’écart-type, est appelée largeur instrumentale. Pour prendre en compte l’erreur expérimentale, la transmission expérimentale doit être exprimée comme le quotient des deux produits de convolution : Texp (hν) = Wexp ∗ IT,exp Wexp ∗ I0,exp (9.6)  Cependant, lors d’interprétations d’expériences, il n’est pas rare que des théoriciens effectuent la convolution suivante : T ∗ exp (hν) = Wexp ∗  IT,exp I0,exp  , (9.7) le plus souvent parce qu’ils n’ont que la transmission brute à disposition, et ensuite prennent pour transmission T ∗ exp (hν). Cette opération conduit dans le cas général à une transmission fausse, en particulier si I0,exp présente des variations brutales, notamment des raies d’émission [100]. Ce type de méthode ne donne des transmissions exploitables que si I0,exp a une allure suffisamment lisse sur la fenêtre de calcul de transmission. La transmission des spectres théoriques est issue de la convolution de l’expression τ(hν) qui dépend de l’opacité spectrale : TΘ(hν) = Wexp ∗ e −τ(hν) . (9.8) Nous avons vu Sec. 5.3.3 que l’erreur instrumentale devait être convoluée sur la transmission, sous peine de résultats faux en cas de saturation de la transmission, ce qu’il est impossible de savoir avant le calcul d’opacité.

Effet de la non-uniformité spatiale

Dans nos calculs de transmission, nous supposons que le milieu traversé par le rayonnement est homogène, de température et densité uniformes. La réalité des plasmas de laboratoire, en particulier ceux produits par laser, est qu’il existe une multitude de gradients à un instant t dans un plasma qui se détend. Ces gradients sont dus à l’inhomogénéité du chauffage du plasma, qui est inévitable en spectroscopie de transmission. Dans beaucoup d’expériences, le plasma n’est chauffé que d’un côté [54]. L’étude de l’inhomogénéité de la densité est facilitée par le fait que l’opacité κν dépend faiblement de ρ. Dans l’axe z de propagation du rayonnement, l’inhomogénéité du faisceau ne peut jouer que sur la valeur de la profondeur optique R L 0 ρ(x) dx. Par contre, sur le plan (x, y) perpendiculaire à l’axe de propagation du rayonnement, l’inhomogénéité du plasma se traduit par une profondeur optique dépendante de la position dans le plan, dans la section droite S du faisceau de photons. Soit τν(x, y) la profondeur optique au point (x, y) de S. La transmission locale vaut e −τν(x,y) . La moyenne de cette transmission sur S nous donne la transmission du milieu : Tν = 1 |S| ZZ S e −τν(x,y) dx dy = D e −τν(x,y) E S . (9.9) La transmission dans un plasma inhomogène s’écrit donc comme la moyenne d’une exponentielle. L’inégalité de Jensen nous dit que Tν = D e −τν(x,y) E S ≥ e −hτν(x,y)iS ≥ T H ν , (9.10) où T H ν est la transmission calculée en considérant le plasma homogène de profondeur optique hτν(x, y)iS moyenne de la profondeur optique sur la section droite du faisceau. On peut ainsi conclure que l’hypothèse du milieu homogène, avec κ et ρL uniformes, sous-estime systématiquement la transmission du plasma. Il n’est donc pas  étonnant que les calculs théoriques donnent très souvent des transmissions plus faibles lors d’interprétations d’expériences. Peu d’hypothèses peuvent être faites sur la distribution τν(x, y) dans le cas général. La plupart des cibles dans les expériences de plasmas chauffés par laser sont composées d’une tranche de métal prise en sandwich entre deux tranches de matériau léger dont les zones de raies sont nettement distinctes des zones de raies du métal dont on veut étudier l’opacité. Le profil thermodynamique d’un plasma chauffé par laser peut se résumer à une zone chaude et plus ou moins dense entourée par une zone froide assez dense. Si elle est constituée du même élément que la zone chaude, la densité de la zone froide est supérieure. Il est possible de donner des modèles simples d’inhomogénéité avec des hypothèses fortes sur τν(x, y). Si, par exemple, on suppose que, dans la section S, il y a une proportion c ∈ [0, 1] de cette section qui a une profondeur optique τ0 c , et une proportion 1 − c qui a une profondeur optique 0, alors la profondeur optique moyenne est égale à τ0, mais la transmission totale vaut : T = cS S e −τ0/c + (1 − c)e 0 = c T1/c 0 + (1 − c), (9.11) où T0 = e −τ0 est la transmission du plasma s’il était homogène de profondeur optique τ0. Le terme (1 − c) fait apparaître un « plancher » dans la transmission, tandis que l’exposant 1/c tend à accélérer la saturation de la transmission, d’où une allure « en créneaux » pour c petit.

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