Supraconducteurs à haute température critique

Supraconductivité

La supraconductivité n’apparaît qu’en dessous d’une certaine température critique et d’un certain champ magnétique appliqué . Elle est caractérisée par l’absence de résistance électrique et l’annulation du champ magnétique à l’intérieur du matériau (diamagnétisme parfait). Les courants électriques peuvent donc circuler à travers ces matériaux sans aucune dissipation d’énergie . Un matériau n’est supraconducteur que dans certaines conditions : la température doit être inférieure à la température critique Tc, le champ magnétique appliqué doit être inférieur à une certaine valeur Hc, la densité de courant appliqué doit être inférieure à la densité de courant critique Jc. Température critique: La caractéristique la plus attractive des supraconducteurs est que leur résistivité électrique en continu chute brutalement jusqu’à une valeur non détectable par les appareils de mesure.
Les supraconducteurs ont la propriété de véhiculer du courant électrique sans perte d’énergie. A l’inverse des conducteurs traditionnels dans lesquels le courant est transporté par des électrons individuels, dans les supraconducteurs, le courant est transporté par des paires d’électron appelées Paires de Cooper. Lorsque les électrons se déplacent à travers le solide en paires de Cooper, ils sont insensibles aux pertes d’énergie par interaction (ce sont précisément ces interactions qui sont à l’origine de l’absorption d’énergie dont souffre la conduction électrique au sein des matériaux conventionnels). A ce moment, il n’y a plus de résistance au flux du courant électrique. Pour former des paires de Cooper, un supraconducteur doit être utilisé en dessous d’une certaine température appelée Température critique.
La température critique est la température en dessous de laquelle apparaît la supraconductivité. Elle est inférieure à 30 K pour les matériaux à basse température critique et de l’ordre de 100 K pour les supraconducteurs à haute température critique .
Pour les supraconducteurs HTC, le saut de la résistivité lors du changement d’état est moins franc que pour les supraconducteurs BTC . Il est donc difficile de définir la température critique. Le critère de la résistivité inférieure à 10-14Ωm est souvent utilisé. Les températures critiques des matériaux les plus utilisés sont 92K pour les composés Y-123 (YBCO) et Bi2212 (BSCCO) et de 110K pour le Bi-2223.
La température critique peut être sensible aux contraintes mécaniques car certains matériaux ne deviennent supraconducteurs que sous pression . D’un autre coté les impuretés, en particulier magnétiques, peuvent réduire et même détruire la supraconductivité.
Comportement diamagnétique, Effet Meissner : Quand un échantillon supraconducteur est refroidi en dessous de sa température critique puis placé dans un champ magnétique, celui-ci est éjecté de l’échantillon : le champ magnétique à l’intérieur de l’échantillon est nul . C’est l’apparition de courants supraconducteurs de surface qui empêche le champ magnétique de pénétrer à l’intérieur du matériau. Les boucles d’électrons qui tournent à la surface du supraconducteur peuvent être assimilés à de petits circuits filiformes, qui créent à leur tour un champ magnétique d’induction qui s’oppose au champ inducteur extérieur. La susceptibilité χ dans l’échantillon est égale à –1. C’est l’effet Meissner ou diamagnétisme parfait.
L’aimant supraconducteur ainsi crée peut subir une force de répulsion avec un autre aimant. De cette interaction est créée une force électromagnétique assez importante, suffisante pour neutraliser l’action de l’apesanteur (figure I.3b). C’est l’origine des expériences de lévitation.

Champ magnétique critique, Supraconducteurs de type I et II

Champ magnétique critique : Il est connu qu’un courant électrique circulant dans un fil conducteur génère un champ magnétique autour de ce fil. L’intensité de ce champ magnétique est proportionnelle au courant traversant le fil. En raison de leur aptitude à transporter de forts courants sans perte d’énergie, les supraconducteurs sont bien adaptés pour la confection d’aimants puissants. De plus, si un courant électrique circule en boucle, uniquement dans un supraconducteur, il continuera à circuler sans faiblir et constituera un aimant permanent. Ces courants permanents circulants dans un supraconducteur sont appelés courants persistants. Le champ magnétique généré par le supraconducteur influence à son tour l’aptitude qu’a le supraconducteur à transporter le courant. En fait, lorsque le champ magnétique augmente, les valeurs de Tc et de Jc diminuent. C’est ainsi que lorsque le champ magnétique dépasse une certaine valeur, l’aimant « Quenche » et n’est plus supraconducteur. Ce champ magnétique est appelé Champ Critique.
Les supraconducteurs de type I : Les matériaux de type I deviennent intégralement supraconducteurs à la température critique. Ils sont caractérisés par un seul champ magnétique critique Hc et leur diamagnétisme est parfait. Leur supraconductivité disparaît si elle est soumise à un champ magnétique plus intense que le champ magnétique critique. La valeur de ce champ magnétique critique dépend de la température. Au-delà de la valeur critique Hc, le matériau ne développe plus de supercourants pour s’opposer à la pénétration du flux, il retourne brusquement l’état normal.
La catégorie des supraconducteurs de type I est principalement constituée de métaux et de métalloïdes qui présentent une certaine conductivité à température ambiante.
Supraconducteurs de type II : Les supraconducteurs de Type II différent du Type I du fait que leur transition d’un état normal à un état supraconducteur est graduelle dans des régions d’état mixte. En effet, ces supraconducteurs possèdent deux valeurs de champ magnétique critique Hc1 et Hc2, le second étant nettement plus élevé que le premier (jusqu’à plusieurs centaines de teslas dans les
oxydes). Ceux-ci présentent en outre des valeurs plus élevées de température, de champ et courant critiques. Les valeurs des champs critiques évoluent avec la température.

Densité de courant critique

En présence d’un courant de circulation les vortex sont soumis à la force de Lorentz. Si la force de Lorentz ramenée à l’unité de longueur de vortex l’emporte sur la force d’ancrage par unité de longueur de vortex, le réseau d’Abrikosov se met en mouvement et l’échantillon entre dans le domaine du « flux flow ». La tension aux bornes de l’échantillon cesse d’être nulle et la valeur de la densité de courant à partir de laquelle les vortex se mettent en mouvement est la densité de courant critique Jc. La densité de courant critique des matériaux supraconducteurs dépend de leur structure interne et varie avec le champ magnétique.
Plusieurs auteurs ont proposé des relations de JC(H) . Pour rester supraconducteur, la densité de courant de transport doit rester inférieure à une valeur critique JC. Celle ci dépend de l’induction magnétique car la seule présence d’un courant de transport, crée un champ magnétique H, et donc la première limite de J correspond à l’apparition du premier vortex à H = HC1.
En dessous de Hc1, J est tout de même limitée à une valeur critique JC dépendant de l’induction magnétique. Au-dessus de HC1 l’interaction du courant et des vortex devrait les faire se déplacer, et provoquer ainsi une dissipation d’énergie et le passage du matériau à l’état normal. La densité de courant critique serait alors nulle. Cependant les défauts du matériau (dislocations, impuretés etc.) vont bloquer les vortex et ainsi empêcher le changement d’état. Cet effet d’ancrage des vortex est appelé «flux pinning».
La caractéristique du champ électrique E en fonction de la densité de courant J . Pour les faibles valeurs de E avec J proche de JC la courbe E(J) est de forme exponentielle, c’est la région de «flux-creep» qui correspond à des déplacements des vortex dus à l’activation thermique. Pour les fortes valeurs de E avec J>JC, c’est la région de « flux flow ». Dans cette région les vortex se déplacent ensemble et les pertes sont équivalentes à celles dues à des frottements visqueux. La densité de courant critique Jc est un paramètre très important pour les applications en courant fort. Puisqu’il n’y a pas de pertes d’énergie lorsque le supraconducteur conduit du courant électrique. Des fils supraconducteurs de diamètre relativement fin sont susceptibles de transporter d’énormes courants jusqu’à limite de la densité critique : au-delà de laquelle la supraconductivité disparaît. Il y a eu d’énormes efforts accomplis pour augmenter la valeur de Jc dans les composants supraconducteurs (couches minces, céramiques, monocristal).
Pour la plupart de ces applications il faut disposer de matériaux dont les densités de courant critique sont de l’ordre de 105 A/cm² en présence de champ magnétique. Dans les céramiques préparées de manière conventionnelle à partir de l’oxyde YBCO, les densités de courant critique en champ nul et à 77K sont seulement de quelques 102 A/cm² donc loin de pouvoir répondre aux caractéristiques requises pour la plupart des applications visées. La densité critique intrinsèque du même oxyde en couches minces déposées sur un substrat SrTiO3, pour les mêmes conditions, est de l’ordre de 107 A/cm².

Mécanisme de la supraconductivité

Le phénomène de la supraconductivité à haute température critique dans les cuprates n’est pas clairement interprété jusqu’à présent, bien que plusieurs hypothèses ont été avancées dont : Une première explication repose sur l’idée d’un mécanisme de transfert de charges . Il est généralement admis que la supraconductivité se produit dans les plans CuO2. Le comportement métallique de ces plans résulte d’un excès de trous venant des chaînes CuO qui jouent le rôle d’un réservoir de charges isolantes. Avec l’augmentation de l’écart à la stœchiométrie δ, le site Cu(1) sera réduit et les trous passeront donc du plan CuO2 aux chaînes CuO par transfert de charges. Ceci s’accompagnera de changements dans les distances entre les sites Cu(1) et O(1). Le site O(1) joue le rôle d’un pont entre les plans et les chaînes. Le site Ba joue aussi un rôle très important dans ce mécanisme de transfert : la variation de sa position relative dans la maille représente 0,3 Å au lieu de 0,06 Å pour la distance Cu(1)-O(1).
D’autre part, Rusiecki et al ont montré l’influence de la pression sur l’axe cet sur la température Tc. La position de l’oxygène O(1) expliquerait le lien existant entre Tc et le paramètre c. Des mesures de diffraction de neutrons ont permis de confirmer la variation de position du site O(1) en fonction de δ dans le composé YBa2Cu3O7-δ.
Une deuxième explication, concernant la présence de plateaux est liée au degré d’orthorhombicité du matériau. En effet, les expériences de micro-diffraction électronique ont fait apparaître des taches de sous structures liées à la non stœchiométrie.

Facteurs limitant le courant critique

Les densités de courant critique des céramiques sont limitées par plusieurs facteurs : Facteurs intrinsèques :
Anisotropie cristalline : Un monocristal de YBa2Cu3O7-δ montre des densités de courants critiques différentes selon l’orientation du cristal . Ainsi, les valeurs de Jc mesurées dans les plans CuO2 et selon la direction [001] sont différentes, ce qui conduit à fabriquer des échantillons à structure orientée.
Longueur de cohérence ζ : Parmi les supraconducteurs de type II, le composé YBa2Cu3O7-δ présente, en raison de l’anisotropie cristalline des valeurs de longueurs de cohérence ζ distinctes et faibles. Les joints de grains doivent donc avoir une épais seur inférieure à ces longueurs pour permettre le passage des supercourants sans destruction des paires de Cooper .
Facteurs dus au mode d’élaboration : La principale méthode d’élaboration des céramiques est le frittage. Ce mode d’élaboration introduit des défauts structuraux dont il est important de connaître leurs origines et leurs incidences pour essayer de les minimiser.
Les joints de grains : Il a été démontré que les joints de grains peuvent être considérés comme des jonctions Josephson, ce qui est équivalent à une seconde phase supraconductrice de type II. Ces joints de grains sont aussi appelés jonctions faibles ou « Weak links » .
La porosité : La porosité, même si elle facilite la réoxygénation du matériau, réduit considérablement la connexion intergranulaire et donc les chemins de percolation nécessaires au passage des supercourants.
Les microfissures :Les microfissures, de tailles plus ou moins importantes, peuvent apparaître au cours du traitement thermique de la céramique. La cohésion des grains et la nature des joints de grains sont importantes quant à la qualité mécanique de la céramique YBa2Cu3O7-δ et les propriétés supraconductrices qui en découlent .

Table des matières

Introduction 
Chapitre I : Supraconducteurs à haute température critique
Introduction 
I.1. Histoire de la supraconductivité 
I.2. Supraconductivité 
I.2.1 Température critique
I.2.2 Comportement diamagnétique, Effet Meissner
I.2.3 La théorie des frères London
I.2.4 Champ magnétique critique. Supraconducteurs de type I et II
I.2.4.1 Champ magnétique critique
I.2.4.2 Les supraconducteurs de type I
I.2.4.3 Supraconducteurs de type II
I.2.5 Densité de courant critique
I.2.6 Surface critique
I.2.7 Théorie microscopique ‘’ BCS ‘’ de la supraconductivité
I.3. Supraconducteur à haute température critique de type 
I.3.1 Le composé YBCO (ou Y-123)
I.3.1.1 Structure cristallographique
I.3.1.2 Les différentes phases
I.3.1.2.1 La phase antiferromagnétique
I.3.1.2.2 La phase supraconductrice
I.3.1.3 Evolution de la structure avec le taux d’oxygène
I.3.1.4 Coordinence et degré d’oxydation
I. 3.1.5 Evolution de la température critique avec le taux d’O2
I.3.1.6 Mécanisme de la supraconductivité
I.3.1.7 Anisotropie des propriétés physiques
I.3.1.8 Facteurs limitant le courant critique
I.3.1.8.1 Facteurs intrinsèques
I.3. 1.8.2 Facteurs dus au mode d’élaboration
I.3. 1.8.3 Les joints de grains
I.3.2 Le composé PBCO (ou Pr-123)
I.3.2.1 Absence de la supraconductivité
I.3.2.2 Indication d’une supraconductivité non-homogène
I.4 Applications des supraconducteurs 
I.4.1 Applications de base
I.4.2 Applications à grande échelle
I.4.3 Applications en électrotechnique
I.4.3.1 Machines électriques
I.4.3.2 Transformateurs
I.4.3.3 Câbles électriques supraconducteurs
I.4.3.4 Limiteurs de courant
I.4.3.5 Disjoncteur
Conclusion 
Chapitre II : Jonctions
Introduction 
II.1 Effet tunnel 
II.2 Effet Josephson 
II.3 Types d’effet Josephson 
II.3.1 Effet Josephson continu
II.3.2 Effet Josephson alternatif
II.3.2 Effet Josephson radiofréquence
II.4 Jonctions 
II.4.1 Jonction de Josephson
II.4.2 Jonction supraconducteur-isolant-supraconducteur
II.4.3 Jonction supraconducteur-métal normal-supraconducteur
II.4.4 Jonction métal normal – isolant – métal normal
II.4.5 Jonction PN et NP
II.4.6 Jonction de semiconducteurs : Transistor
II.4.7 Jonction métal normal – oxyde – semiconducteur
II.4.8 Jonction métal normal-isolant-supraconducteur
II.5 Enjeux et perspectives des jonctions Josephson à base de supraconducteurs à haute température critique 
II.6 Applications 
II.6 1 Transistors supraconducteurs
II.6.1.1 Transistor a base supraconductrice
II.6.1.2 Quiteron
II.6.1.3 Transistor a tube de flux
II.6.1.4 Les transistors à effet de champ
II.6.1.5 Les transistors à flux de Vortex Abrikosov
II.6.1.6 Les transistors à flux de vortex Josephson
II.6.1.7 Les transistors à injection de porteurs de charges à spin polarisé
II.6.2 Portes logiques à jonctions Josephson
II.6.2.1 Commandées par le courant
II.6.2.2 Commandées par le champ magnétique
II.6.2.3 A commande hybride
II.6.3 Circuits SFQ
II.6.4 Circuits RSFQ (Rapid Single-Flux-Quantum)
Conclusion 
Chapitre III : Techniques d’élaboration et de caractérisation
Introduction 
III.1 Techniques d’Elaboration 
III.1.1 Processus d’élaboration des céramiques
III.1.2 Techniques de dépôts
III.1.2.1 Dépôts par CVD
(Metal Organic Chemical Vapor Deposition)
III.1.2.2 Dépôts par ablation Laser (Pulsed Laser Deposition)
III.1.2.3 Dépôts par évaporation
III.1.2.4 Dépôts par pulvérisation cathodique
III.1.2.5 Dépôts par épitaxie par jets moléculaires
III.1.3 Substrats
III.2 Techniques de caractérisation 
III.2.1. Analyse structurale
III.2.1.1 Diffraction des Rayons-X (DRX)
III.2.1.2 Microscope Electronique à Balayage (MEB)
III.2.2 Analyses thermiques
III.2.2.1 Analyse thermogravimétrique (ATG)
III.2.2.2 Analyse thermodifférentielle. (ATD)
III.2.3 Analyses qualitatives ou EDS
III.2.4 Propriétés physiques
III.2.4.1 Propriétés électriques
III.2.4.2 Propriétés magnétiques
III.2.4.3 Propriétés acoustiques
III.2.4.3.1 Constitution du microscope acoustique
III.2.4.3.2 La Microscopie acoustique (imagerie et signal)
III.2.4.3.3 Imagerie de volume
III2.4.3.4 Imagerie de surface
III.2.4.3.5 Signature acoustique V(Z)
III.2.4.3.6 Bases du modèle utilisé
III.2.4.3.7 Traitement de la signature acoustique V (Z)
Conclusion 
Chapitre IV : Résultats et discussions
Introduction 
IV.1 Elaboration de Y-123, Pr-123
IV.1.1 Choix des précurseurs
IV.1.2 Analyse des précurseurs
IV.1.3 Préparation de Pr-123 (ou PBCO)
IV.1.4 Préparation de Y-123 (ou YBCO)
IV.1.5 Oxygénation des échantillons
IV.1.6 Etude des mécanismes de refroidissement
IV.2 Analyse thermogravimétrique (ATG) 
IV.3 Analyse des échantillons Pr-123 synthétisés sous air statique 
IV.3.1 Influence du précurseur de baryum
IV.3.2 Influence de la température
IV.3.3 Influence de l’Oxygénation
IV.4. Analyse des échantillons Y-123 
IV.4.1Propriétés structurales
IV.4.2 Propriétés magnétiques et électriques
IV.5 Elaboration des jonctions YBCO/ PBCO/YBCO 
Introduction
IV.5.1 Dépôt de YBCO/ PBCO/YBCO
IV.5.1.1 Dépôt par ablation laser
IV.5.1.2 Dépôt par CVD (Chemical vapor deposition)
IV.6 Traitement V(Z)
Conclusion 
Conclusion et Perspectives 
Annexes 
Références

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