Analyse approfondie des données spectrales pour l’identification de glycoformes minoritaires

Analyse approfondie des données spectrales pour l’identification de glycoformes minoritaires

Le déroulement général d’une expérience de glycoprotéomique bottom-up peut se résumer en trois étapes. La préparation consiste à produire des glycopeptides à partir de l’échantillon initial par protéolyse, et peut comprendre purifications, préfractionnements, enrichissements et séparations chromatographiques ou électrophorétiques, au niveau des protéines ou des peptides. L’analyse par spectrométrie de masse en tandem permet de mesurer la masse des ions formés et, après leur fragmentation (MS/MS), de mesurer la masse de leurs fragments. Les informations ainsi collectées permettent de séquencer et d’identifier les peptides et leurs glycanes, plusieurs approches différentes mais interdépendantes sont possibles, dont le séquençage peptidique de novo, la comparaison à des banques de séquences protéiques, ou à des banques de spectres. Ces différentes méthodes se basent sur la masse des fragments peptidiques et glycopeptidiques pour identifier le précurseur fragmenté. Cependant l’abondance desdits fragments est très dépendante de la nature du glycopeptide et de sa concentration initiale. Si la majorité des protéines sont glycosylées, la forte hétérogénéité de ces modifications conduit à des concentrations parfois très faibles pour une glycoforme donnée. De plus, et comme explicité précédemment (cf. 2.3 Glycoprotéomique bottom-up), la faible efficacité d’ionisation des glycopeptides diminue d’autant plus l’abondance des fragments d’intérêt. Une solution envisagée au laboratoire afin de confirmer ou de proposer une identification précise des spectres MS/MS faiblement peuplés est d’utiliser les proportions relatives des ions oxoniums (fragments de sucres). En effet, chaque monosaccharide produit des fragments spécifiques (188), en particulier : les fragments mono-déshydratés (ΔH2O, – 18 Da), les fragments di-déshydratés (Δ2H2O, -36 Da), et les fragments résultants de la perte de deux molécules d’eau et d’un formaldéhyde (Δ2H2O- CH2O, -66 Da), dont il est possible d’extraire des informations structurales sur les glycanes. Cette possibilité a récemment été confirmée par les travaux menés par Marcus Hoffmann et al. (153) sur différents standards commerciaux (immunoglobuline G, lactotransférine et fibrinogène humains, ribonucléase B bovine). La différenciation entre les O-glycopeptides et des N-glycopeptides sur la base des ions oxoniums produits en MS/MS a également été démontrée (189). Des travaux ont également permis d’observer une différence d’abondance des ions oxoniums produits par les glycopeptides à O-GalNAc et ceux à O-GlcNAc (190).

Protocole de glycoprotéomique bottom-up et identification

Les trois familles de N-glycanes sont, par ordre de structure mannosylée croissante, les complexes, les hybrides, et les oligomannoses. Les ions oxoniums produits par ces N-glycanes seront des dérivés des GlcNAc, des NeuAc, et des hexoses (galactose et mannose principalement). L’analyse des spectres de fragmentation de glycopeptides différant uniquement par la composition de leur groupement glycosylé (séquence peptidique et charge identiques, notamment) montre que la présence et l’intensité des ions oxoniums varie en fonction de cette variable. En particulier, les ions issus de la fragmentation des hexoses (mannose ou galactose) ne sont détectés qu’à des intensités relatives très faibles dans les spectres MS/MS attribués à des glycopeptides complexes. Le processus de fragmentation privilégié pour les antennes de ces N-glycanes (formes non sialylées) ne semble donc pas passer par la perte des galactoses terminaux. Au contraire, la perte simultanée d’au moins deux monosaccharides sous la forme de l’ion oxonium GalGlcNAc (m/z 366,14) est favorable. L’impact des différentes caractéristiques structurales des N-glycopeptides fragmentés sur le profil des ions oxoniums a été évalué. Nous avons ici choisi délibérément de reprendre le protocole retenu afin de l’expliciter et d’argumenter les différentes étapes.

Le protocole suivi, de la préparation de l’échantillon jusqu’à la séparation en chromatographie liquide et la mesure de masse, est celui-ci mis en place et publié dans le cadre d’un projet connexe d’analyse de la glycosylation de la hCG après digestion sur réacteur enzymatique (147). En effet, ce protocole a permis la détection et l’identification de glycopeptides trypsiques de la hCG. Les travaux présentés à ce chapitre ayant pour objectif d’utiliser la « signature oxonium » des spectres MS/MS de N-glycopeptides, les paramètres En résumé, l’échantillon de départ est une solution injectable d’hCG recombinante (Ovitrelle®, Organon) concentrée à 0,5µg/µL. Cette protéine est produite par transfection de l’ADN codant pour les deux sous-unités de la hCG chez les cellules CHO (Chinese Hamster Ovary). S’il est évident que les glycoformes synthétisées dans ces cellules ne sont pas identiques ou en concentrations égales à celles produites chez la femme (191,192), le modèle CHO est couramment utilisé pour la production de (glyco)protéines recombinantes à visée thérapeutique du fait de la similarité des processus de biosynthèse. La solution a été filtrée sur membrane (Microcon 10kDa) permettant de retenir les deux sous-unités de la hCG (masses moyennes de 14 kDa et 23 kDa pour α et β, respectivement).

 

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