Analyse de quelques problèmes traditionnels savagienne

Analyse de quelques problèmes traditionnels

Le cadre et les postulats de Savage, qui permettent de parvenir aux résultats que nous venons d’exposer, ont alimenté la recherche et les controverses depuis plus d’un demi-siècle, si bien qu’il semble même vain de vouloir proposer une synthèse de la littérature qu’ils ont suscitée. Nous nous contenterons, dans cette partie, de rappeler quelques-uns des problèmes traditionnels que pose la représentation savagienne d’un problème de décision en situation d’incertitude, et de montrer que notre interprétation causale permet de leur apporter un éclairage nouveau. Les problèmes que nous évoquerons sont de deux ordres. D’une part, c’est la définition d’un problème de décision à partir de deux notions fondamentales, les conséquences et les événements, et du troisième, dérivé des deux premiers, d’actes qui ne semble pas correspondre, dans de nombreux cas, à l’expérience humaine de décision en situation d’incertitude. Si l’on s’en tient au cadre de Savage, cette construction peut donc paraître artificielle ou invraisemblable. D’autre part, les postulats de Savage, qui caractérisent les préférences du décideur à l’intérieur de ce cadre, imposent aussi des conditions particulières à la façon dont il définit les trois composantes de ce cadre. Or ces conditions rencontrent à leur tour certaines difficultés quand elles sont confrontées à la pratique. pour un observateur extérieur qui le mettrait à l’épreuve sur la base de cas concrets. En effet, la violation d’une hypothèse peut toujours, comme nous le verrons, être mise sur le compte d’un mauvais choix des conséquences, des événements ou des actes, puisque ces notions ne sont pas observables. Un observateur extérieur doit tenter de deviner les événements et conséquences par lesquels un décideur caractérise un problème donné . Son examen se ramène souvent à des questions d’interprétation, et de ce fait, nous pouvons utilement mener cette discussion à partir de notre exemple précédent, sans avoir formellement développé notre modèle.Nous commençons, dans la première section de cette partie, par analyser les difficultés liées à la définition même d’un problème de décision chez Savage, avant de consacrer la seconde section à trois implications particulières des postulats : l’indépendance des utilités par rapport aux états, l’absence d’aléa moral et le conséquentialisme.

Nous ne nous attarderons pas sur ce dernier argument, en notant simplement qu’en dépit d’une affirmation assez commune, le cadre de Savage n’exige pas que le décideur prenne effectivement les actes virtuels en considération. Le théorème de représentation nous dit simplement que le décideur se conduit comme s’il maximisait une utilité espérée, et la construction de Savage nous indique un moyen, impliquant notamment les actes virtuels, pour dériver la distribution de probabilités et une fonction d’utilité correspondant à cette conduite. Si l’existence d’actes virtuels entache la pertinence de la représentation de Savage, ce ne peut donc être sur le plan conceptuel mais tout au plus sur celui de la pratique, en l’occurence des possibilités de dérivation des probabilités et utilités. À cette éventualité, Savage nous semble avoir répondu de façon aussi convaincante que possible Revenons cette fois au point de départ de notre exemple : un décideur en charge de la poli- tique de santé publique sait qu’une usine rejette des substances cancérigènes, peut-être à des doses toxiques, mais que son activité procure aussi des bénéfices ; que le population consomme les produits contaminés en quantité inconnue, et peut de ce fait s’exposer au développement du cancer, mais que cette consommation a également des avantages économiques ; que les produits non consommés pourraient être exportés, et que le cancer entraîne des conséquences sanitaires incertaines ; enfin que les actes qu’il peut engager sont de limiter les rejets de l’usine, d’inciter la population à réduire sa consommation, de favoriser les exportations et de mener une campagne de dépistage du cancer. Imaginons que le décideur essaie de représenter cette situation par un problème de décision unique, où tous les enjeux feraient partie du même ensemble de conséquences, où la description de chaque événement lèverait entièrement l’incertitude, et où les actes seraient reformulés comme des fonctions entre les ensembles d’états et de conséquences correspondants. La seule élaboration d’un tel problème, sans même parler de sa résolution, représenterait une tâche d’une complexité extrême.

 

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