ATTITUDES ET COMPORTEMENTS DES LYCEENS FACE AU TABAGISME

ATTITUDES ET COMPORTEMENTS DES LYCEENS FACE AU TABAGISME

 RAPPELS SUR L’ADOLESCENCE ET LE TABAGISME

L’adolescence 

 Actuellement évident, le concept d’adolescence correspond à une réalité relativement récente de notre société. En effet, non seulement les sociétés primitives ne le connaissaient pas, mais il est ignoré par des sociétés très évoluées, par la Grèce, par Rome, par les sociétés françaises du Moyen Âge et des Temps modernes (1). Le mot adolescence n’apparaît dans les dictionnaires français qu’à la fin du XVIIe siècle. Le dictionnaire de l’Académie précise alors qu’il ne s’utilise que pour les garçons. Bien plus, le terme « adolescent » ne s’employait à cette époque que dans une intention comique ou satirique. Ce n’est que dans la seconde moitié du XIXe siècle et après un long parcours et de nombreuses fluctuations de sens, que le mot «adolescence» finit par rejoindre l’acception d’aujourd’hui (1). Ce qui montre combien l’adolescence dans la manière dont elle se vit, mais aussi dont elle est perçue, loin d’être une réalité universelle, est un phénomène historique, fortement marqué par des dimensions culturelles et sociales. Remarquons aussi que chaque adolescent étant unique, l’adolescence ne peut être qu’une réalité plurielle. Par ailleurs, l’Organisation Mondiale de la Santé définit l’adolescence, période de transition de l’enfance et l’âge adulte, comme le groupe d’âge situé entre 10 à 19 ans (2). 

Métamorphoses physico-psychiques 

Voyons à présent les métamorphoses du point de vue physique mais aussi psychique se déroulant durant l’adolescence. 

Période de transition 

 La définition du terme, vue précédemment, souligne d’emblée une des caractéristiques majeures de cette période de la vie. C’est une étape, un passage, un processus, une transition entre l’enfance et l’âge adulte. Ces deux âges laissent discerner l’origine des difficultés, ambivalences, conflits marquant la « crise de l’adolescence ». L’enfant pubère qui s’éloigne de son monde peut le regretter, et le futur adulte peut aussi redouter ce qui l’attend. Cela crée alors une instabilité entre le passé et l’avenir, un désir et une crainte, une impatience et une nostalgie, qui rend encore plus le présent incertain voire difficile. Tout ceci engendre alors des inquiétudes et des tensions. Saison des attentes, l’adolescence est aussi le temps de la vulnérabilité et de la sensibilité la plus vive aux carences. La définir revient toujours à se référer au négatif : ce n’est plus l’enfance et ce n’est pas encore l’âge adulte (3). Nous pouvons remarquer cependant que l’âge adulte n’est pas exempt d’attitudes adolescentes ou enfantines. Sur le plan social, l’adolescence correspond à une période charnière car elle s’ouvre sur le monde du travail, c’est-à-dire migrer d’un statut de dépendance à la conquête de l’autonomie. Ce caractère transitoire se manifeste par un éloignement progressif du noyau familial. Cela explique sans doute un nombre de comportements apparemment contradictoires, qui correspondent en fait à une double motivation : recherchant la liberté et l’autonomie, mais ayant toujours besoin de l’affection et de la protection de ses parents. L’adolescent vacille entre une attitude de révolte et de soumission, entre un désir de toute-puissance et un sentiment d’impuissance. Et plus il dépend des liens familiaux, plus il se sent menacé par ce qui l’attache et se tourne vers des conduites de contestation. Cette situation psychologiquement inconfortable est propice aux comportements extrêmes, qui peuvent mettre la santé, et parfois même la vie en danger. En témoignent les principales causes de décès chez les jeunes, qui sont le suicide et les accidents de voiture.

Période de transformation

 Physiquement, l’adolescence est une période de croissance accélérée. De même sur le plan psychique, c’est une période de profonde transformation. 5 La puberté, phénomène physiologique par lequel l’organisme humain se transforme pour accéder à la fonction de reproduction, marque le début de cette période. C’est la métamorphose du corps, agissant sous l’influence des modifications hormonales associées à une forte poussée de la croissance. L’adolescent peut alors souffrir quant à sa nouvelle personne et souvent aucun qualificatif positif ne lui sied : il peut se trouver trop gros ou trop maigre, trop petit ou trop grand, loin des modèles médiatiques… N’acceptant pas sa nouvelle image, l’adolescent donnera alors une grande importance à un aspect modifiable : la tenue vestimentaire. Celle-ci pourra être provocante par son originalité ou son laisser-aller. Cependant, ce changement peut se manifester par la maltraitance de son corps par des pratiques de tatouage ou de piercing : le marquage du corps est un moyen de se l’approprier, une manière de manifester sa différence par rapport au monde des adultes, mais aussi son appartenance à tel ou tel groupe. Selon Xavier POMMEREAU, l’expérience montre que l’importance et la multiplicité des signes distinctifs et des conduites de rupture adoptées sont proportionnelles à l’incapacité que connaît l’adolescent à vivre distinctivement et différemment (4).Ces changements physiques liés à la puberté participent à la constitution et à l’affirmation de l’identité sexuelle : les garçons et les filles manifestent leurs différences, des décalages apparaissent vis-à-vis de certains apprentissages ou de certaines conduites. Par exemple, les garçons montrent leur côté viril, et les filles découvrent la féminité en soi. En proie à des attentes, des émotions et des sentiments nouveaux sont souvent ressentis de manière antagoniste : l’attrait se mêlant à la peur, l’amour à la haine. L’adolescent se sent tiraillé entre ses pulsions sexuelles et les difficultés voire l’impossibilité de les assumer. C’est durant cette période que certains auront très tôt un premier rapport sexuel, et d’autres au contraire le retarderont en attendant « le grand amour ». Les changements biologiques ont entraîné des changements physiques, qui sont eux-mêmes associés à une série de changements psychologiques et affectifs. L’ensemble de ces bouleversements entrainera ainsi l’adolescent dans une quête d’identité, qu’il assurera bien ou mal selon les cas.

Une quête d’identité 

 Devant son corps nouveau avec des sensations et des situations jusque-là ignorées, l’adolescent a le devoir d’apprendre à se reconnaître, à s’accepter, dans tous les domaines. Il se découvre et « s’auto-construit ». L’obtention d’une identité autonome est un défi pour le développement majeur des adolescents. Ce processus vers l’autonomie implique de faire des choix : ses valeurs, ses croyances et ses buts au regard de nombreux domaines de sa vie personnelle et sociale, dont l’école, le travail, les amitiés, la sexualité, la vie spirituelle et la vie politique font partie (5). Cependant, il doit aussi faire face aux différences qu’il découvre dans son entourage (sexe, âge, opinion, culture, religion, etc.). A travers ce travail d’identification de soi-même et de l’autre, il gagnera, dans la mesure du possible, une estime de soi, mais aussi celle qui s’exprime à travers le regard d’autrui. En effet, alors que la société d’aujourd’hui nous montre que les valeurs et les repères sont comme brouillés : la famille-nucléaire perd sa force et se transforme, l’école est un lieu de débat continuel, le chômage prend beaucoup plus de place, le « melting-pot » est omniprésent et pourtant les différences sont toujours marquées, les adultes renient la vieillesse et la mort, il n’est pas étonnant que les adolescents aient parfois du mal à trouver leur place. C’est donc en imitant et en s’opposant, que l’adolescent va peu à peu grandir. Comme l’explique Bruno BETTELHEIM : « L’adolescent a besoin de se définir, non seulement par rapport à ses parents mais aussi contre eux, de crainte qu’ils ne lui imposent une personnalité qu’il entend se construire lui-même.Pour être sûr qu’il est bien ce qu’il désire être, il essaie, dans une certaine mesure, d’être aussi ce que ses parents ne veulent pas qu’il soit. Il suppose que seule cette attitude peut lui assurer son indépendance. » (6) Cette attitude d’opposition peut donner à l’adolescent l’occasion d’éprouver la solidité du lien qui le relie à ses parents et dont il a besoin (7). Il veut avoir sa propre identité, distincte de celles de ses parents et des personnes significatives. Sa pensée formelle se développe graduellement et l’amène à avoir une autre vision de lui-même, plus abstraite, plus complexe à long terme. Il acquiert la capacité de discerner ses caractéristiques psychologiques, de se comparer aux autres et de définir comment il doit être. Le « soi » se distingue. La quête de l’autonomie met en jeu les caractéristiques 7 individuelles (le tempérament, les compétences) et environnementales (l’opportunité d’exercer son autonomie). Faute d’atteindre une telle autonomie, le développement d’un jugement personnel à l’occasion de décisions complexes de la vie est compromis. Mais l’adolescent agit aussi par imitation. Il éprouve le besoin d’appartenir à un groupe, celui de ses pairs, dont il adopte les goûts, les comportements, le langage. Ce double mouvement, opposition aux adultes et identification aux pairs renvoie à un même processus d’individualisation par comparaison, par référence à l’autre, que celleci soit positive ou négative. On connaît aussi l’influence majeure de la publicité sur l’adolescent : il consomme pour être valorisé, être intégré dans un groupe, en adoptant certaines marques par exemple, et plus largement dans la société, ce qui n’est d’ailleurs pas l’apanage des adolescents.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS SUR L’ADOLESCENCE ET LE TABAGISME
I. L’adolescence
1.1 Définition
1.2 Métamorphoses physico-psychiques
1.2.1 Période de transition
1.2.2 Période de transformation
1.2.3 Une quête d’identité
1.2.4 Période de formation et découverte
1.3 Attitudes et comportements à risque
1.3.1 Définitions
1.3.2 Risque pour grandir
1.3.3 Risque pour se détruire
1.3.4 Prise de risque et le groupe
1.4 Les ressources de l’adolescent
II. Le tabagisme
2.1 Définition
2.2 Acteur principal : le tabac
2.2.1. Historique
2.2.2. Production mondiale
2.2.3 Composition du tabac
2.3 Tabac et santé
2.3.1 Signes cliniques liés au tabagisme
2.3.2 Tabagisme et dépendance
2.3.3 Tabagisme passif
III. Epidémiologie du tabagisme chez les jeunes
3.1 Cas de l’Algérie
3.2 Cas du Cameroun
3.3 Cas de Madagascar
IV. Lutte contre le tabac
4.1 Traitement préventif
4.2 Traitement curatif : le sevrage tabagique .
4.2.1 Pourquoi le sevrage tabagique ?
4.2.2 Moyens techniques pour le sevrage
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EPIDEMIOLOGIQUE DES ATTITUDES ET COMPORTEMENTS DES LYCEENS D’ANTANANARIVO FACE AU
TABAGISME
I. Objectif de l’étude
II. Méthodologie
2.1 Type d’étude
2.2 Population étudiée
2.2.1 Critères d’inclusion
2.2.2 Critères d’exclusion
2.3 Paramètres d’étude
2.4 Traitement des données
III. Résultats
3.1 Taux de participation
3.1.1 Par genre
3.1.2 Par âge
3.1.3 Par religion
3.2 Tabagisme occasionnel
3.2.1 Prévalence des fumeurs occasionnels
3.2.2 Age de la première cigarette
3.3 Prévalence du tabagisme actif
3.3.1 Prévalence des fumeurs actifs
3.3.2 Par genre
3.3.3 Par âge
3.3.4 Par religion
3.3.5 Par statut de lycées
3.4 Facteurs de risque associés au tabagisme
3.4.2 Influence sociale
3.4.3 Situation de stress personnel
3.4.4 Statut social
3.4.5 Toxicité environnementale
3.4.6 Activités parascolaires
3.5 Les autres comportements à risque chez les fumeurs
3.5.1 Prise d’autres toxiques
3.5.2 Sexualité précoce
3.5.3 Comportements à caractère destructeur
3.6 Comportements des tabagiques
3.6.1 Dépendance au tabac
3.6.2 Autres comportements
3.7 Attitudes des lycéens face au tabagisme
3.7.1 Raisons
3.7.2 Gêne et plainte
3.7.3 Loi sur le tabagisme
3.8 Lycée et tabagisme
3.8.1 Connaissance et application de la loi
3.8.2 Sanctions
3.9 Connaissances sur le tabagisme
3.9.1 Risques liés au tabagisme
3.9.2 Journée sans tabac
3.10 Propositions de prévention et de lutte anti-tabac
TROISIEME PARTIE : DISCUSSIONS ET SUGGESTIONS
I. Discussions
1.1 Prévalence du tabagisme occasionnel chez les lycéens
1.2 Prévalence du tabagisme actif chez les lycéens
1.3 Facteurs de risque associés au tabagisme
1.3.1 Facteurs de risque personnels
1.3.2 Influences sociale et environnementale
1.3.3 Variables socio-économiques
1.4 Autres comportements à risque des tabagiques
1.5 Attitudes des fumeurs face au tabac
1.5.1 Dépendance à la nicotine
1.5.2 Fumeurs et sevrage tabagique
1.5.3 Accessibilité au tabac
1.6 Attitudes des lycéens face au tabagisme
1.7 Lycée et tabagisme
1.8 Connaissances sur le tabagisme
1.9 Les limites de notre étude
1.9.1 Cadre d’étude
1.9.2 Les moyens
1.9.3 Le type d’étude
II. Suggestions
2.1 Volet préventif
2.1.1 Renforcement de la loi
2.1.2 Information – Education – Communication (IEC)
2.1.3 Suivi de l’évolution de l’épidémiologie du tabagisme
2.2 Volet curatif
2.2.1 Création de centre de désintoxication pour les jeunes
2.2.2 Soutien psychologique en ligne
2.2.3 Moyens médicamenteux accessibles aux mineurs
CONCLUSION
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE

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