Biothérapie des rhumatismes inflammatoires chroniques et médecins généralistes

Biothérapie des rhumatismes inflammatoires chroniques et médecins généralistes

Les Rhumatismes inflammatoires chroniques

La Polyarthrite rhumatoïde La PR est le plus fréquent des RIC dont l’évolution se caractérise par des poussées inflammatoires liées à une inflammation de la membrane synoviale. La PR est une maladie chronique de déterminisme complexe et multifactoriel, d’évolution imprévisible, source de handicap fonctionnel potentiellement sévère, susceptible de perturber gravement la qualité de vie sociale et professionnelle. Même si la recherche a permis depuis ces vingt dernières années des progrès considérables dans la compréhension des mécanismes immunologiques de la maladie, les causes initiales du déclenchement de la PR demeurent inconnues. Diagnostic précoce et évaluation initiale De nombreux arguments plaident pour un diagnostic précoce de la PR. En effet, les destructions ostéo-cartilagineuses surviennent tôt dans l’évolution de la maladie (10 à 7 15% des PR ont des érosions après 3 mois d ‘évolution, 30% à un an, 70% à 3 ans, et 95% à six ans) [6] et sont irréversibles. La démarche diagnostique de PR débutante est difficile, elle doit amener le praticien à remplir trois objectifs majeurs :  Reconnaître un rhumatisme inflammatoire débutant pouvant correspondre à une PR : le diagnostic de PR doit être envisagé devant une polyarthrite évoluant depuis plus de 6 semaines, d’autant qu’elle atteint les articulations des poignets, métacarpo-phalangiennes (MCP) et interphalangiennes proximales (IPP), qu’elle a un caractère symétrique et qu’il existe une raideur matinale d’au moins 30 minutes.  Eliminer un autre rhumatisme inflammatoire défini  Rechercher devant cette PR probable des éléments permettant de prédire l’évolution vers une PR chronique destructive auxquels s’ajoutent les critères de classification 2010 ACR (American College of Rheumatology)/EULAR (European League Against Rheumatism) [Annexe 1]. La population cible de ces critères correspond aux patients ayant au moins une synovite clinique constatée par un médecin et qui ne réponde pas à un autre diagnostic plus probable que la PR. La réalisation d’examens biologiques est destinée à rechercher un syndrome inflammatoire biologique (inconstant dans ses formes débutantes) et la présence d’anomalies immunologiques. Le Facteur rhumatoïde (FR) est le plus souvent absent au cours des six premiers mois d’évolution. En revanche, la présence d’Anticorps (Ac) anti protéines citrullinées a une sensibilité de 68% dans une PR débutante, mais surtout une spécificité élevée 97% [7]. Les radiographies des deux mains, des deux poignets de face, des deux pieds de face et trois quarts, et de toute articulation douloureuse, sont destinées à rechercher des érosions précoces et serviront de référence pour le suivi évolutif. Si ces radiographies sont normales, l’échographie-doppler voire l’IRM (Image par Résonance Magnétique) peuvent mettre en évidence des synovites ou des érosions articulaires. 8 Objectifs thérapeutiques La PR est une urgence thérapeutique : elle nécessite une prise en charge spécialisée, précoce, individualisée et multidisciplinaire. Le traitement précoce est déterminant dans le succès de la prise en charge de ce rhumatisme. Dès que le diagnostic est posé, un traitement de fond doit être débuté. L’objectif du traitement est la rémission clinique ou au minimum la faible activité pour chaque patient. La rémission clinique peut-être définie par l’absence de signes et de symptômes cliniques d’inflammation. Dans la pratique on utilise des indices composites d’activité et notamment le DAS28 (Disease Activity Score 28) [8] : rémission = DAS28 < 2,6 et faible niveau d’activité = 2,6 ≤ DAS28 < 3,2. Le suivi de la maladie Il est réalisé conjointement par le médecin généraliste traitant et le médecin spécialiste rhumatologue. Il doit être fréquent tant que la maladie est active. Il est recommandé de suivre l’activité de la maladie de façon mensuelle jusqu’au contrôle de la maladie puis tous les trois mois : c’est le « tight control » ou « contrôle serré » avec stratégie thérapeutique dynamique. En l’absence d’amélioration à 3 mois et si l’objectif n’est pas atteint à 6 mois, il faut réviser la stratégie thérapeutique et généralement modifier ou changer le traitement de fond [9]. 

Les spondyloarthropathies 

Le concept de spondylarthropathies regroupe des RIC qui partagent certaines de leurs manifestations cliniques ainsi qu’un terrain génétique commun dont font partie la SA et le RPso. Une nouvelle terminologie a été introduite permettant de décrire au mieux le phénotypage clinico-radiographique d’un patient atteint de spondyloarthrite :  Spondyloarthrites axiales (SpA axiales) – Radiographiques = avec sacroiliite radiographique = spondylarthrite ankylosante – Non radiographiques = sans sacroiliite radiographique 9  Spondyloarthrites périphériques articulaires (SpA périphériques) – Érosives – Non érosives  Spondyloarthrites périphériques enthésitiques (SpA enthésitiques). La prévalence globale de l’ensemble des spondylarthropathies est de 2% en France, le sex ratio étant de 1,5 (hommes/femmes). La majorité des cas débute chez l’adulte jeune avant 35 ans. Les manifestations cliniques des spondylarthropathies combinent de façon variable : un syndrome pelvirachidien ou axial, un syndrome enthésopathique, un syndrome articulaire périphérique, un syndrome extra-articulaire (iritis, psoriasis, balanite, uréthrite, diarrhée, entérocolopathie MICI ou RCUH). Le diagnostic précoce de SpA est difficile et repose sur un faisceau d’arguments anamnestiques, cliniques, biologiques et d’imagerie. 

La spondylarthrite ankylosante 

La SA est la forme la plus typique et la plus sévère, caractérisée par une atteinte du squelette axial (rachis et sacro-iliaques) conduisant à une ankylose. Sur le plan clinique, elle se manifeste par un syndrome pelvi-rachidien prédominant. L’atteinte sacro-iliaque radiologique, la sacroiliite stade 2 bilatérale ou stade 3, est un critère majeur parmi les critères du groupe ASAS et un critère indispensable pour porter le diagnostic de SA, selon les critères de classification de New-York modifiés [Annexe 2]. Dans certaines formes sévères, l’évolution peut se faire vers une ankylose rachidienne complète, par ossification des enthèses. L’atteinte rhumatismale périphérique est présente dans 50 % des cas. La manifestation extra-rhumatismale la plus fréquente est l’uvéite antérieure aiguë, présente dans 10 à 30 % des cas, parfois révélatrice et évoluant de façon indépendante de l’atteinte rhumatismale. L’évolution chronique de la spondylarthrite ankylosante se fait par poussées, plus ou moins interrompues par des périodes de rémission, sur une période de dix à vingt ans, à l’origine d’un handicap fonctionnel dans les formes sévères. La réalisation d’examens biologiques recherche un syndrome inflammatoire biologique (très inconstant), une négativité des FR et Ac anti protéines citrullinées, le typage HLA 10 (Human Leukocyte Antigen) complet dont HLA-B27 fortement associé aux SpA (prévalence supérieure à 90% dans la SA) avec un résultat négatif qui ne doit pas faire rejeter le diagnostic. L’élément d’imagerie pris en compte pour le diagnostic est à ce jour la mise en évidence sur les articulations sacro-iliaques d’un œdème osseux sous-chondral en IRM, objectivé sur au moins 2 coupes consécutives si une seule zone topographique est anormale, ou sur la présence d’un œdème osseux sur au moins 2 sites péri-articulaires différents. Ces anomalies pour être retenues doivent être non équivoques, d’étendue suffisamment importante [10]. 

Le rhumatisme psoriasique 

Les manifestations sont typiquement hétérogènes et le patient peut souffrir de rachialgies inflammatoires dans le contexte d’enthésites, de spondylites ou de sacroiliites, définissant une atteinte dite axiale. L’atteinte peut également être périphérique, sous la forme de tendinites, d’enthésites, de dactylites et de synovites. Les synovites ou arthrites sont typiquement oligo-articulaires et asymétriques. Il existe également une forme où l’atteinte périphérique est symétrique et peut alors ressembler à une PR. Elle s’en distingue par son atteinte préférentielle des articulations interphalangiennes distales (IPD), souvent épargnées dans la PR, et une inflammation surtout périarticulaire à l’insertion des ligaments et de la capsule articulaire. Contrairement à la PR, le FR et les AC anti protéines citrullinées sont le plus souvent négatifs et le syndrome inflammatoire biologique est peu important, voire absent. Bien qu’appartenant aux SpA, le RPso possède des caractéristiques radiologiques qui lui sont propres et qui orientent souvent le diagnostic : il s’agit de l’association souvent évocatrice de lésions destructrices (érosion marginale, ostéolyse) et de lésions reconstructrices (hyperostose, appositions périostées, périostite, enthésiophytes souvent exubérants, surtout au rachis, ankylose). Afin de prendre en compte les différentes manifestations, le groupe international GRAPPA (Group for Research and Assessment of Psoriasis and Psoraitic Arthritis) a émis des critères diagnostiques qui englobent les différentes formes de RPso. Ce sont les critères CASPAR (Classification of Psoriatic Arthritis) [Annexe 3], publiés en 2006 [11] et servent de référence pour le diagnostic dans la majorité des études cliniques.  

Table des matières

I. INTRODUCTION : Concepts fondamentaux
1. Les Rhumatismes inflammatoires chroniques
A. La Polyarthrite rhumatoïde
B. Les spondyloarthropathies
a. La spondylarthrite ankylosante
b. Le rhumatisme psoriasique
2. Définition d’une biothérapie
3. Nomenclature des biothérapies
4. Rappels sur la structure des anticorps
5. Les anticorps monoclonaux
6. Les protéines de fusion mimant le récepteur
7. Les différents agents biologiques dans les RIC
A. La modulation des cytokines pro-inflammatoires
a. Les anti-TNFα
b. L’inhibition de l’IL-1
c. L’inhibition de l’IL-6
d. L’inhibition de l’IL-17A
e. L’inhibition de l’IL-12/23
B. La modulation de l’immunité acquise
a. Les anticorps monoclonaux anti-lymphocytes B
b. L’inhibition des lymphocytes T
8. Les biosimilaires
9. Place et indications des biothérapies dans les RIC
A. Dans la polyarthrite rhumatoïde
B. Dans la spondylarthrite ankylosante et le rhumatisme psoriasique
10. Tolérance des biothérapies dans les RIC
A. Principaux effets secondaires des biothérapies
a. Les anti-TNFα
b. Le Rituximab
c. L’abatacept
d. Le tocilizumab
e. Le sécukinumab
f. L’ustékinumab
g. L’anakinra
B. Contre-indications et précautions d’emploi des biothérapies
a. Les anti-TNFα
b. Le rituximab
c. L’abatacept
d. Le tocilizumab
e. Le sécukinumab
f. L’ustékinumab
g. L’anakinra
11. Situations particulières
A. Grossesse/allaitement et biothérapies
B. Vaccinations et biothérapies
C. Acte chirurgical et biothérapies
12. Bilan pré-thérapeutique à réaliser lors de l’initiation d’une biothérapie pour un RIC
13. Rôle du médecin généraliste dans les RIC
II. OBJECTIFS ET MÉTHODES
1. OBJECTIFS
A. Objectif principal
B. Objectifs secondaires
2. MÉTHODES
A. Population d’étude
B. Le questionnaire
C. Type d’enquête
III. RÉSULTATS
1. Caractéristiques de la population étudiée
2. Le MG et les biothérapies en pratique courante
3. MG et cas pratiques
IV. DISCUSSION
1. Le MG et les biothérapies en pratique courante
A. Formation des MG sur les biothérapies : états des lieux
a. Les connaissances des biothérapies
b. L’expérience personnelle du MG face aux biothérapies
c. Les réponses aux cas pratiques
2. La place du MG dans le suivi de patients sous biothérapies pour un RIC
A. Rôle de prévention
B. Rôle d’éducation
3. Réflexions sur les types d’actions à entreprendre
V. CONCLUSION
VI. BIBLIOGRAPHIE
VII. ANNEXE
VIII. TABLE DES ILLUSTRATIONS

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