Validation d’un nouvel outil de diagnostic du Paludisme en zone de faible transmission : l’illumigene Malaria LAMP

Caractérisation des agents pathogènes du paludisme 

Le paludisme est transmis par un protozoaire appartenant au genre Plasmodium. Il existe de très nombreuses espèces de Plasmodium (plus de 140), touchant diverses espèces animales mais seulement cinq de ces espèces sont retrouvées en pathologie humaine. Il s’agit de Plasmodium falciparum, Plasmodium vivax, Plasmodium ovale, Plasmodium malariae et Plasmodium knowlesi, parasite habituel des singes (macaques) d’Asie qui vient de passer récemment chez l’homme. Les cinq espèces diffèrent par des critères biologiques, cliniques, par leur répartition géographique et par leur capacité à développer des résistances aux antipaludiques. D’emblée il faut différencier Plasmodium falciparum des autres espèces. En effet P.falciparum est celle qui développe des résistances aux antipaludiques et elle est responsable des formes cliniques potentiellement mortelles.
Plasmodium falciparum : Il sévit dans les régions équatoriales, il est transmis toute l’année avec cependant des recrudescences saisonnières. Dans les régions subtropicales, il ne survient qu’en période chaude et humide. Sa transmission s’interrompt lorsque la température tombe en dessous de 18°C. L’évolution se fait d’un seul tenant après une incubation de 7 à 12 jours. On n’observe pas de rechutes tardives comme avec les autres espèces. Plus de 90% des accès palustres à P.falciparum surviennent dans les 2 mois qui suivent le retour du pays d’endémie. P.falciparum est responsable des formes cliniques graves, notamment du neuropaludisme.
Plasmodium vivax : Très largement répandu en Amérique du Sud et en Asie, il est beaucoup plus rarement observé en Afrique et les érythrocytes du groupe sanguin Duffy négatif (observé chez la majorité des sujets originaires d’Afrique de l’Ouest) ne possèdent pas le récepteur membranaire nécessaire à l’infection par P. vivax. Sa transmission s’arrête en dessous de 15°C. Sa période d’incubation est de 11 à 13 jours, mais on peut observer des rechutes (accès de reviviscence) pendant 3 à 4 ans.
L’affection par P. vivax est classiquement considérée comme bénigne (fièvre tierce bénigne, c’est-à-dire due à un cycle érythrocytaire de 48 heures) mais en zone d’endémie il peut avoir des répercussions graves sur l’état de santé des populations, notamment par l’intermédiaire des anémies chez l’enfant. De plus on commence à voir surgir quelques résistances médicamenteuses à Plasmodium vivax à la chloroquine et à la sulfadoxine-pyriméthamine.
Plasmodium ovale : Il sévit en Afrique intertropicale du Centre et de l’Ouest (et dans certaines régions du Pacifique) et provoque une fièvre tierce bénigne, comme Plasmodium vivax dont il est très proche. Son incubation est de 15 jours au minimum mais peut-être beaucoup plus longue, jusqu’à 4 ans. Son évolution est bénigne mais on peut observer, comme avec Plasmodium vivax, des rechutes tardives (5 ans). Schématiquement on dit que Plasmodium ovale remplace Plasmodium vivax là où cette dernière espèce n’existe pas.
Plasmodium malariae : Il sévit sur les trois continents, de manière beaucoup plus sporadique. Il se différencie des autres espèces par une incubation plus longue (15 à 21 jours), par une périodicité différente de la fièvre (cycle érythrocytaire de 72 heures responsable d’une fièvre quarte) et surtout par sa capacité à entrainer des reviviscences très tardives (jusqu’à 20 ans après le retour de la zone d’endémie). Les mécanismes physiopathologiques responsables de ces reviviscences tardives ne sont pas totalement élucidés, certains évoquent la présence de mérozoïtes latents dans les voies lymphatiques. L’infection est bénigne mais P. malariae peut parfois entrainer des complications rénales.
Plasmodium knowlesi : Il sévit en Asie du Sud-Est (particulièrement en Malaisie, à Bornéo), en zone forestière car il est étroitement lié à la répartition des singes macaques, son hôte habituel, et de son vecteur, piquant l’homme et le singe. Il est morphologiquement proche de P. malariae. Il se différencie des autres espèces par un cycle érythrocytaire de 24 heures responsable d’une fièvre quotidienne. Il existe de rares formes graves, voire mortelles, avec forte parasitémie. A ce jour aucune chimiorésistance n’a été observée pour cette espèce.
Au Sénégal nous avons P. falciparum, P. malariae et P. ovale avec 90% des cas de paludisme imputables à la première espèce en association ou non avec les deux autres. P. falciparum est responsable de la totalité des cas mortels .

Modes de transmission du paludisme 

Le mode de transmission est une piqûre anophèlienne infestante. Les piqûres infestantes se faisaient le plus souvent la nuit mais depuis l’instauration des MILDA il y’a eu un changement de comportement adaptatif chez les anophèles qui piquent entre 5 heures et 6 heures du matin au moment où les gens partent au travail en dehors des habitations. Cette transmission est favorisée par des facteurs climatiques (température, humidité, eau), des facteurs anthropiques (urbanisation, réseau démographique) et des facteurs socio-économiques.
Il existe d’autres modes de contaminations souvent accidentelles: par transfusion sanguine, par voie placentaire.
Transmission par transfusion sanguine: résulte de la transfusion de sang parasité provenant de donneurs plus ou moins anciennement infestés apparemment sains , c’est « le paludisme de seringue », rencontré chez les malades transfusés, les toxicomanes etc.
Transmission congénitale : c’est la transmission de la mère à l’enfant par le sang placentaire : c’est le paludisme congénital .

Diagnostic du paludisme

Le paludisme est une maladie qui peut devenir grave et mortelle en absence d’une prise en charge rapide et appropriée. Son diagnostic est par conséquent, une urgence médicale.
Diagnostic clinique du paludisme: C’est la méthode de diagnostic basée sur la constatation d’un accès fébrile, décrit classiquement avec sa périodicité: frissons, chaleur, transpiration, vomissement, vertige, diarrhée… Ces signes cliniques n’étant pas spécifiques au paludisme, il faut l’associer avec le diagnostic biologique pour une meilleure prise en charge.
Diagnostic biologique: C’est un diagnostic d’urgence qui repose sur la mise en évidence des formes érythrocytaires de Plasmodium sur un prélèvement de sang.
Microscopie: L’examen microscopique (frottis sanguin et goutte épaisse) certifie le diagnostic du paludisme en mettant en évidence le parasite dans le sang circulant. Il doit être réalisé avant tout traitement antipaludique et immédiatement sans attendre un pic thermique . C’est la technique de référence préconisée par l’OMS (Gold Standard) . Il a une bonne sensibilité et une bonne spécificité pour la détection du Plasmodium, il permet un diagnostic rapide et un contrôle de l’efficacité du traitement antipaludique par le suivi de la parasitémie . C’est un examen peu coûteux en moyens et en réactifs et demeure la technique la plus utilisée.
Cependant, ses performances en termes de sensibilité et de fiabilité dépendent directement de l’expérience du microscopiste et du niveau de la parasitémie du sujet infecté .
Le Quantitative Buffy-Coat (QBC): Le principe de cette technique microscopique de fluorescence repose sur l’utilisation d’un fluorochrome (l’acridine orange) capable de se fixer sur le noyau du parasite. La recherche du Plasmodium se fait dans 50μl de sang recueillis dans un tube à hématocrite, après concentration par centrifugation et lecture au microscope à fluorescence . La sensibilité de cette technique serait comparable à celle de la GE pour des infections supérieures à 100 parasites/μL. Elle varie de 41% à 93% pour des parasitémies inférieures à 100parasites/μL. La spécificité pour P. falciparum est élevée (93-98%) mais chute à environ 50% pour les infections causées par les autres espèces. QBC Malaria test est d’apprentissage facile et de réalisation rapide ; il constitue actuellement le meilleur test de dépistage pour des biologistes non spécialisés et pour les structures traitant un grand nombre de recherche de Plasmodium.
Malheureusement, son emploi nécessite un matériel et des réactifs coûteux ce qui limite son utilisation. Il ne permet pas non plus le diagnostic d’espèce et le calcul de la parasitémie.
Tests de diagnostics rapides(TDR): Ils reposent sur le principe de l’immunochromatographie en utilisant des bandelettes sensibilisées par des anticorps monoclonaux spécifiques détectant des antigènes plasmodiaux .
Le principe est de détecter les antigènes du Plasmodium tels que l’HRP2 (Histidine Rich Protein2) glycoprotéine spécifique de l’espèce P. falciparum est produite par tous les stades érythrocytaires asexués du parasite et LDH (lactate déshydrogénase parasitaire) enzymes glycolytiques qui présentent l’avantage d’être communes aux 4 espèces plasmodiales, détectées à tous les stades sexués et asexués du parasite. Les LDH ont un seuil de détection identique à celui de l’HRP2, leur clairance est par contre plus rapide faisant qu’ils ne persistent pas dans le sang après disparition du Plasmodium, d’où leur intérêt dans la surveillance des patients traités .
Les TDR sont d’exécution rapide et de lecture facile pouvant être réalisés par un personnel moyennement formé. Ils sont indiqués particulièrement dans les structures non spécialisées lorsque l’examen microscopique n’est pas disponible. Leurs performances dépendent essentiellement de la parasitémie. Tests moléculaires: Ces tests sont basés sur la détection de matériel génétique du parasite (ADN), elles sont très sensibles et très spécifiques. Elles sont utilisées le plus souvent dans le domaine de la recherche scientifique.

Cycle biologique du parasite 

Le cycle se déroule successivement chez l’homme (phase asexuée, l’hôte intermédiaire) et chez l’anophèle (phase sexuée, l’hôte définitif). Chez l’homme le cycle est lui-même divisé en deux phases : la phase hépatique ou pré-érythrocytaire (ou exo-érythrocytaire): elle correspond à la phase d’incubation, cliniquement asymptomatique. la phase sanguine ou érythrocytaire: elle correspond à la phase clinique de la maladie.
Chez l’homme : Schizogonie pré-érythrocytaire
Les sporozoïtes inoculés par l’anophèle femelle lors de son repas sanguin restent pendant une trentaine de minutes maximum dans la peau, la lymphe et le sang. Beaucoup sont détruits par les macrophages mais certains parviennent à gagner les hépatocytes. Ils se transforment en schizontes pré-érythrocytaires ou ≪corps bleus ≫ (formes multinucléées) qui, après 7 a 15 jours de maturation, éclatent et libèrent des milliers de mérozoïtes dans le sang (10 000 à 30 000 mérozoïtes en fonction des espèces). La schizogonie hépatique est unique dans le cycle, la cellule hépatique ne pouvant être infectée que par des sporozoïtes.
Dans les infections à P. vivax et P. ovale, certains sporozoïtes intra hépatiques restent quiescents (hypnozoïtes) et sont responsables d’une schizogonie hépatique retardée, qui entraine la libération dans le sang de mérozoïtes plusieurs mois après la piqûre du moustique, expliquant ainsi les reviviscences tardives observées avec ces deux espèces.
Les hypnozoïtes n’existent pas dans l’infection à P. falciparum (pas de rechute) et ils n’ont pas été mis en évidence non plus dans l’infection à P. malariae, malgré l’existence de rechutes tardives, ni-semble-t-il pour P. knowlesi.
Schizogonie érythrocytaire : Très rapidement les mérozoïtes pénètrent dans les globules rouges. La pénétration du mérozoïte dans l’érythrocyte et sa maturation en trophozoite puis en schizonte prend 24, 48 ou 72 heures (en fonction de l’espèce) et conduit à la destruction du globule rouge hôte et à la libération de 8 à 32 nouveaux mérozoïtes .Ces mérozoïtes pénètrent dans de nouveaux globules rouges et débutent un nouveau cycle de réplication. Cette partie du cycle correspond à la phase clinique : la parasitémie s’élève, le sujet devient fébrile, c’est l’accès palustre. En l’absence de traitement, tous les parasites évoluent progressivement au même rythme (on dit qu’ils deviennent synchrones), tous les schizontes érythrocytaires arrivent à maturation au même moment, entrainant la destruction d’un grand nombre de globules rouges de manière périodique, toutes les 24 heures (pour P. knowlesi), 48 heures (fièvre tierce de P. falciparum, P. vivax ou P. ovale) ou toutes les 72heures (fièvre quarte de P. malariae). En pratique on observe que la fièvre tierce due à P. falciparum est rarement synchrone.
Apres un certain nombre de cycles érythrocytaires, certains mérozoïtes subissent une maturation d’une dizaine de jours, accompagnée d’une différenciation sexuée : ils se transforment en gamétocytes à potentiel mâle ou femelle, qui vont rester en circulation dans le sang pendant 10 à 15 jours.
Chez l’anophèle femelle : Les gamétocytes, ingérés par le moustique lors d’un repas sanguin sur un sujet infecté, se transforment en gamètes mâles et femelles qui fusionnent en un œuf libre, mobile appelé ookinète.
Cet ookinète quitte la lumière du tube digestif, se fixe ensuite à la paroi externe de l’estomac et se transforme en oocyste. Les cellules parasitaires se multiplient à l’intérieur de cet oocyste, produisant des centaines de sporozoïtes qui migrent ensuite vers les glandes salivaires du moustique. Ces sporozoïtes sont les formes infectantes prêtes à être inoculées avec la salive du moustique, lors d’un repas sanguin sur un hôte vertébré. La durée du développement sporogonique des Plasmodium varie en fonction des conditions climatiques : entre 9 et 20 jours pour P. falciparum (entre, respectivement, 30°C et 20°C), un peu moins pour P. vivax à températures équivalentes, plus long pour P. malariae.

Caractère biologique du vecteur

Le paludisme est transmis à l’homme par la piqûre d’un moustique culicidé du genre Anopheles au moment de son repas sanguin. Seule la femelle, hématophage, transmet la maladie. Elle ne pique qu’à partir du coucher du soleil avec un maximum d’activité entre 23 heures et 6 heures . Il existe de très nombreuses espèces d’anophèles ; toutes ne sont pas capables de transmettre le paludisme. Les espèces les plus dangereuses sont les espèces anthropophiles, qui ont une préférence pour effectuer leur repas sanguin sur l’homme plutôt que sur l’animal, les espèces exophiles et les espèces endophiles qui se reposent à l’intérieur des maisons. De très nombreux facteurs climatiques et/ou environnementaux, naturels (sécheresses, variations de température …) ou anthropiques (assèchement de marécages, construction de barrages, irrigations, construction de routes …) peuvent modifier la répartition des anophèles dans une région donnée et par conséquent influencer la transmission du paludisme. En Afrique, les deux principaux complexes d’espèces vectrices sont: A. funestus et A. gambiae. La femelle n’est fécondée qu’une fois toute sa vie. Les œufs ne deviennent matures qu’après un repas de sang. La longévité moyenne des vecteurs est de 3 à 4 semaines. Leur pullulation nécessite la présence d’eau (indispensable au développement larvaire et nymphal) .

Table des matières

Introduction
Chapitre I: Synthése bibliographique sur le paludisme
I-1) Définition
I-2) Epidémiologie
I-2-1) Agents pathogène
I-2-1-1) Classification des agents pathogènes
I-2-1-2) Caractérisation des agents pathogènes du paludisme
I-2-1-3) Cycle biologique du parasite .
I-2-2) Le vecteur
I-2-2-1) Classification du vecteur
I-2-2-2) Caractère biologique du vecteur
I-2-2-3) Cycle de vie du vecteur
I-2-3) Modes de transmission du paludisme
I-3) Diagnostic du paludisme
I-3-1) Diagnostic clinique du paludisme
I-3-2) Diagnostic biologique
I-3-2-1) Microscopie
I-3-2-2) Le Quantitative Buffy-Coat (QBC)
I-3-2-3) Tests de diagnostics rapides(TDR)
I-3-2-4) Tests moléculaires
I-3-2-4-1) Réaction de polymérisation en chaine (PCR)
I-3-2-4-2) La technique d’amplification isotherme de l’ADN facilitée par boucle ou LAMP
I-3-2-4-3) La PET-PCR
Chapitre II : Matériel et Méthodes d’étude
II-1) Cadre d’étude
II-1-1) Présentation du site d’étude
II-1-2) Type d’étude
II-1-3) Population d’étude et la période d’étude
II-1-4) Prélèvement des échantillons
II-2) Matériel et méthodes
II-2-1) la microscopie
II-2-1-1) Matériels
II-2-1-2) Méthodologie
II-2-2) La technique LAMP
II-2-2-1) Principe
II-2-2-2) Matériels
II-2-2-3) Méthodologie
II-2-3): LA PET-PCR
II-2-3-1) Principe
II-3) Analyse des données
Chapitre III: Résultats et Discussion
III-1) Résultats
III-1-1) Comparaison de l’illumigene Malaria LAMP à la Microcopies
III-1-2) Concordance et Discordance
III-2) Discussion
Conclusion et Perspectives
Références Bibliographiques
Wébographie

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