Caractérisation des couches minces de Ni2MnGa

Caractérisation des couches minces de Ni2MnGa

Introduction

Des couches minces de Ni2MnGa ont été déposées sur des substrats en silicium. Dans la perspective d’un emploi comme MEMS, il est nécessaire que ces films soient structurés en phase martensite et ferromagnétique à température ambiante. La caractérisation de ces films est présentée dans le présent chapitre. Conformément à la littérature, la composition chimique joue un rôle très important sur les propriétés de ces alliages. L’étude de cette dernière sera abordée en première partie de ce chapitre. Dans un second temps, l’observation de la morphologie des couches sera reportée. La caractérisation structurale par diffraction des rayons X nous permettra de proposer un modèle de comportement de structure. Enfin, la caractérisation mécanique fera l’objet de la quatrième partie de ce chapitre. Nous verrons au fil des études que des paramètres caractéristiques vont être fixés pour affiner les propriétés fonctionnelles des couches. Il est reconnu que la pression de gaz plasmagène et la puissance de pulvérisation ont une influence directe sur la nature et les caractéristiques de la couche. Il est alors indispensable de connaître les effets de ces paramètres principaux sur les propriétés physico-chimiques des échantillons réalisés. Conformément à l’état de l’art, des traitements thermiques sont nécessaires à l’obtention de films aux propriétés AMF, nous étudierons leur incidence au cours des différentes parties de ce chapitre. Chapitre 4 : Caractérisation des couches minces de Ni2MnGa 94 IV.1 Analyse de la composition chimique Dans cette partie, nous allons étudier l’influence des paramètres d’élaboration des films sur leur composition chimique. Dans un premier temps, nous allons aborder l’influence des paramètres principaux que sont la pression du gaz ionisé et la puissance cible nécessaire à la création du plasma. Nous exposerons ensuite les résultats sur l’étude de la tension de polarisation et des traitements thermiques. Pour finir, nous discuterons de la relation entre la composition chimique de nos films et leurs températures de transformation. IV.1.1 Influence de la pression et de la puissance Des films d’un micron d’épaisseur ont été pulvérisés à une puissance de 120 W pour des pressions comprises entre 0,3 Pa et 2 Pa. Les analyses obtenues par EDS sont reportées sur la figure IV.1. On remarque un écart de composition entre la cible et les films. Ces derniers révèlent une sur-stœchiométrie en Ni et une sous-stœchiométrie en Mn et Ga comparées à la cible de composition Ni50Mn25Ga25. Cet écart est attribué à la différence de rendement de pulvérisation des atomes de l’alliage. On rappelle qu’avec une énergie des ions Ar+ d’une valeur de 200 eV, les rendements de pulvérisation du Ni et du Mn sont respectivement de 0,5 et 0,9 [63]. Dans notre cas, l’évolution de la composition de la couche ne suit pas ce modèle, le Ni est pulvérisé préférentiellement aux autres composants de la cible. La concentration en Ni augmente avec la pression d’argon jusqu’à un seuil de « saturation » de 57 % obtenu à partir de 1 Pa. En dessous de cette pression, la probabilité d’atome d’argon ionisé augmente avec la pression de gaz, ce qui explique l’augmentation de la concentration en Ni.Les rendements de pulvérisation des éléments de la cible sont différents. On pourrait donc s’attendre à une dérive de la composition en fonction de la puissance de travail. Une étude plus approfondie de l’influence de la puissance sur la composition de nos films a donc été menée. Des séries de couches pulvérisées à 3 puissances distinctes ont été élaborées. La série 0,45 Pa révèle une diminution de la composition en Ni pour une puissance de 120 W, les résultats obtenus par RBS sont reportés sur la figure IV.2. En contradiction avec le paragraphe précédent, l’évolution de la composition dans la gamme de puissance balayée suit le modèle des rendements de pulvérisation.  Le dépouillement détaillé des spectres RBS nous donne plusieurs informations sur la qualité de la couche. En utilisant le détecteur de rayon X (PIXE), nous avons vérifié qu’aucun atome d’argon n’a été piégé dans la couche au cours du procédé. Le détecteur d’électrons rétrodiffusés nous permet de tracer le profil de concentration d’éléments comme le silicium, le carbone ou l’oxygène considérés comme contaminants. La figure IV.3 présente les analyses spectroscopiques de l’échantillon 40 W / 0,45 Pa. La courbe en rouge représente l’acquisition brute réalisée sur l’échantillon. Elle est la résultante des contributions des éléments de la couche, contaminants compris. L’intensité du pic est directement liée à la concentration de l’élément. On réalise alors des simulations en intégrant la composition chimique pour obtenir un spectre le plus proche possible du spectre réel. Ainsi, la courbe en bleu représente le spectre simulé, les autres courbes présentent les contributions individuelles pour chaque élément, utilisées pour construire le spectre global simulé. Sur notre échantillon, on remarque la présence d’un pic proche de 1300 keV, témoin d’une très légère contribution du carbone en surface.

Influence de la tension de polarisation du substrat

Le bâti de pulvérisation utilisé permet d’appliquer une tension de polarisation radiofréquence au porte-substrat. Cette dernière permet d’augmenter le potentiel électrique du plasma au voisinage de l’échantillon, mais également l’énergie des atomes arrivant en surface du substrat. On rappelle que l’énergie transmise aux atomes au cours de la décharge est égale Chapitre 4 : Caractérisation des couches minces de Ni2MnGa 100 à la tension d’auto-polarisation du plasma (chapitre II.1). Lorsque l’on applique une tension au porte-substrat, ce potentiel est additionné à la tension d’auto-polarisation au voisinage de l’échantillon. Les atomes acquièrent ainsi une plus grande énergie (de l’ordre de la tension de polarisation) mais la densité du flux de particules émis par la cible reste constante. Phénoménologiquement, on peut observer une modification du mode de croissance de la couche et de sa composition chimique. Dans cette optique, des procédés ont été réalisés en appliquant une tension de polarisation de –50 V. Les couches déposées à 120 W pour une pression de 0,45 Pa et polarisées pendant le procédé, ont une composition chimique fortement modifiée en passant de Ni56Mn24Ga20 à Ni76Mn12Ga12 (fig. IV.6). Si l’on se réfère au modèle de rendement de pulvérisation [38, 63], le Mn et le Ga présentent des rendements de pulvérisation supérieurs à celui du Ni. Lorsque l’on applique une tension de polarisation sur le substrat, les atomes acquièrent une énergie qui, dans notre cas, est suffisante pour re-pulvériser certaines espèces de la couche. Il est intéressant de regarder l’évolution de la composition résultante en fonction de la température de dépôt (fig. IV.6) : à des températures de dépôt supérieures à 400 °C et avec une polarisation du substrat, la composition en Ni tend à se rapprocher de celle du film pulvérisé sans polarisation du porte-substrat.

Influence des traitements thermiques

Dans ce paragraphe, nous allons décrire l’influence des traitements thermiques sur la composition des films. Dans cette perspective, des recuits après dépôt et des procédés de pulvérisation avec mise en température des substrats ont été envisagés. Sur la figure IV.7, on observe un changement de composition pour une température de dépôt de 200 °C. Les analyses réalisées sur les échantillons déposés à d’autres températures ne révèlent qu’une modification marginale de la composition chimique. L’étude menée sur la température de recuit après dépôt est présentée en figure IV.8. Les analyses EDS, pour un temps de recuit de 36 ks, mettent en évidence des variations maximales de la composition de l’ordre de 2 at%, considérées comme négligeables au vu de l’incertitude de l’expérience. On peut donc affirmer que lors des recuits, nous n’avons aucune perte d’éléments, confirmant que les atomes de la couche sont alliés.Des analyses RBS sur les films traités thermiquement ont également été réalisées. Cette technique, très précise pour la détection des atomes légers tels que l’oxygène, nous permet de détecter une éventuelle oxydation du film dans les couches atomiques profondes. Les spectres résultants pour les films déposés et recuits à 600 °C – 36 ks sont reportés sur la figure IV.9. À environ 1900 keV, on observe un pic témoin d’une contribution de l’oxygène en surface de la couche. Cette contribution est plus importante pour l’échantillon recuit durant 36 ks à 600 °C mais reste cependant négligeable au vu des concentrations atomiques simulées, de l’ordre 0,001 at%. Le pic se situant à 1300 keV, attribué au carbone, est un pic récurrent que l’on observe également sur les échantillons non traités thermiquement (fig. IV.3).On remarque qu’en fonction de la technique d’analyse, nous obtenons des compositions différentes. Celles-ci peuvent être attribuées à la technique d’analyse elle-même mais aussi à la densité de la couche. On compare sur la figure IV.10 les résultats obtenus par les deux techniques, RBS et EDS (fig. IV.10).Des analyses de composition effectuées par microscopie électronique à transmission (MET) ont permis d’établir une cartographie en composition sur l’épaisseur d’une couche. On reporte sur la figure suivante les résultats pour des couches déposées à 120 W / 1 Pa non recuite et recuite 36 ks à 600 °C (fig. IV.11). Les compositions sont déterminées de manière qualitative sur la figure (a) et quantitative sur la figure (b), l’analyseur ayant été étalonné au préalable. Cependant, l’intérêt principal de cette expérience consiste à vérifier l’homogénéité de la composition sur toute l’épaisseur de la couche. Pour la couche recuite, nous avons ainsi vérifié la présence éventuelle de précipités de compositions différentes de la stœchiométrie visée ainsi que la diffusion d’un élément à l’interface. 

Relation entre la composition chimique et les températures de transformation

Dans le 1er chapitre, nous avons discuté de la forte dépendance des températures de transformation avec la stœchiométrie de l’alliage (partie I.2.3). Il est reconnu que la surstœchiométrie en Ni provoque un rapprochement de la température de transformation martensitique et de la température de Curie. Le terme de concentration électronique e/a, soit le nombre d’électron de valence de l’alliage, se révèle un bon indicateur pour simuler les températures de transformation [65]. Il est calculé à partir du nombre d’électrons de valence par maille. Le Ni présente une structure de couche 3d8 4s2 soit 10 électrons de valence, le Mn 3d5 4s2 soit 7 électrons de valence et le Ga 3d104s2 4p1 soit 3 électrons de valence. Pour la couche de composition Ni55Mn23Ga22 (120 W / 1 Pa / recuit 36 ks à 600 °C), on calcule donc un rapport e/a égal à :×××  = 7,77 (eq. IV.1). Selon le graphique de la figure IV.12, la température de transformation attendue est proche de 147 °C (420 K). Ces mêmes auteurs proposent la relation empirique suivante, qui donne sensiblement les même valeurs, soit 430 K pour notre composition [65]. 25,44 × % − 4,86 × % − 38,83 × % (eq. IV.2). On notera, d’une part, que la relation a été établie pour un matériau massif et d’autre part, la faible influence de la composition de Mn. La température de transformation dépend fortement du %Ni et du %Ga. 

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