Caractérisation phénotypique et génotypique de souches de Salmonella isolées de porteurs asymptomatiques

Les salmonelles

Les espèces bactériennes du genre Salmonella appartiennent à la famille des Enterobacteriaceae et sont des hôtes habituels du tube digestif de l’homme et des animaux.
Le genre Salmonella se compose de deux espèces, S. enterica et S. bongori. Sur la base de caractères phénotypiques, l’espèce enterica est elle-même divisée en 6 sous-espèces (enterica, salamae, arizonae, diarizonae, houtenae et indica). La très grande majorité (99,7 %) des souches de Salmonella isolées en pathologie humaine ou d’animaux à sang chaud appartient à la sous-espèce enterica. Au sein de chacune de ses sous-espèces, il est possible de distinguer des sérovars caractérisés par leurs antigènes somatiques (antigène O) et flagellaires (antigènes H) et capsulaire (Vi).Plus de 2579 sérotypes de Salmonella ont été identifiés .(Grimont, 2007; Malorny et al., 2011).
Caractères bactériologiques : L’identification des salmonelles repose sur la détermination de leurs caractères morphologiques, culturaux, biochimiques et antigéniques.
Caractères morphologiques : Ce sont des bacilles à Gram négatif sous forme de bâtonnets, de dimension moyenne (0,8 μm de large sur 3,5 μm de long), généralement mobiles grâce à une ciliature péritriche. ; Il existe deux sérotypes immobiles : Pullorum et Gallinarum.
Caractères culturaux : La plupart des salmonelles ne présentent pas d’exigence pour leur croissance. Les salmonelles sont des bactéries aéro-anaérobies facultatives. A partir de prélèvements monomicrobiens, l’isolement se fait sur des milieux ordinaires(BCP).
Dans le cas de prélèvements polymicrobiens (selles), l’utilisation de milieux sélectifs est indispensable. Il existe des milieux d’enrichissement tels que le milieu Kauffman au tétrathionate et le milieu Rappaport au vert de Malachite qui permettent la multiplication des salmonelles au détriment des autres bactéries présentes.
Les colonies des souches de salmonelles sont généralement lisses de type smooth (S), à bords réguliers, blanchâtres, circulaires, légèrement bombées, translucides.(Freney et al., 2000).

Epidémiologie des salmonelloses

Les salmonelloses comprennent deux principaux types d’infections : Les salmonelloses typhiques (fièvres typhoïde et paratyphoïde); les salmonelloses non typhiques
Les salmonelloses typhiques ou paratyphiques sont dues à S.Typhi et S. Paratyphi encore appelées fièvres typhoide et paratyphoide. Ces sérotypes sont strictement adaptés à l’homme. La contamination peut se faire par voie directe (mains sales) ou indirecte (par l’intermédiaire d’aliments ou d’eau souillés par des déjections humaines)(Weill, 2008).
La fièvre typhoïde est une infection systémique, bactérienne, potentiellement sévère. Dans de nombreux pays en voie de développement, il s’agit d’une infection endémique liée à la précarité des conditions sanitaires; elle pose alors un véritable problème de santé publique.
L’incidence dans les pays en voie de développement est de 540 cas/100 000 habitants (versus 0,2 cas/100 000 dans les pays tempérés).Cette maladie, qui constitue la forme la plus grave des salmonelloses, touche chaque année 22 millions de personnes dans le monde et conduit à 217 000 décès(Crump and Mintz, 2010). Les salmonelloses non typhiques ou mineures sont dues à de nombreux autres sérotypes le plus souvent en cause dans les toxi-infections d’origine alimentaire. Elles entraînent des gastroentérites, des formes invasives étant observées chez les malades à risques, en particulier les malades immunodéprimés. Les réservoirs de virus sont les animaux domestiques ou sauvages.
Comme un grand nombre d’animaux sont porteurs de Salmonella, la contamination humaine peut se faire par le biais de divers produits alimentaires (viande, et particulièrement volaille, produits carnés, œufs et produits laitiers). La contamination peut aussi être interhumaine et elle est importante chez l’enfant, favorisée par le phénomène de portage asymptomatique (Bergeron, 2010).

Portage de salmonelles chez l’homme

L’état de porteur sain de salmonelle est représenté par un être humain ou animal hébergeant des salmonelles et ne présentant aucune manifestation clinique.
Les porteurs représentent dans certaines conditions un risque pour la collectivité et parfois pour leur propre santé.
Ce phénomène de portage asymptomatique permettant à la bactérie de persister dans les populations humaines constitue une source de contamination pour l’environnement. Certains individus infectés peuvent continuer, après leur guérison, à excréter pendant des dizaines d’années des salmonelles de manière intermittente dans leurs selles (Perron et al., 2007).
Cela contribue à entretenir le réservoir des salmonelles qui pourrait ainsi constituer une source de contamination possible au cours de la préparation et de la conservation de denrée d’origine humaine, liée à des manipulations par un personnel porteur.
En outre, le portage asymptomatique représente un réel problème de santé publique dans la mesure où les salmonelles d’origine animale peuvent se retrouver dans les aliments ainsi que dans les industries agroalimentaires et ainsi être à l’origine de la contamination de l’homme par ingestion ou par contact des produits contaminés.
Le premier cas de porteur sain de salmonelles a été noté aux Etats-Unis chez une cuisinière dénommée Mary Mallon (Figure4), connue sous le nom de Mary Typhoïd qui contaminait les victimes au fil de ses déplacements (Roumagnac, 2006).
Ainsi, dans l’entourage du malade, il ya la nécessité de dépister les porteurs sains afin d’éviter une dissémination de l’infection, principalement chez les personnes travaillant dans le secteur agroalimentaire, en collectivités de jeunes enfants, et des personnes âgées ainsi que chez le personnel soignant.

Antibiorésistance des salmonelles

Définition de la résistance aux antibiotiques : Un antibiotique est une substance de nature biologique, produite par des microorganismes (champignons microscopiques et bactéries) ou par synthèse (chimique) capable d’inhiber la multiplication (bactériostatique) ou de tuer des bactéries (bactéricide) (Freney et al., 2000). La résistance aux agents antimicrobiens est définie comme la capacité d’un micro-organisme à résister à l’action inhibitrice d’antibiotiques auxquels il était jusque là sensible (Courvalin et al., 2006).
Mécanismes et types de résistance aux antibiotiques : Pour s’échapper à l’action des antibiotiques, les bactéries peuvent être capables d’utiliser plusieurs mécanismes de résistance. Il s’agit de:
la modification des cibles des antimicrobiens pour empêcher leur action, l’inactivation de l’antimicrobien par la sécrétion d’enzymes, la réduction des concentrations intracellulaires de l’antimicrobien soit par des pompes à efflux, soit par une diminution de la perméabilité de la membrane(Hur, 2012 ).
La résistance aux antimicrobiens peut être le résultat d’une résistance intrinsèque ou acquise par conjugaison, par transformation ou par transduction, et parfois médiée par des éléments génétiques mobiles (plasmides, intégrons, etc.)(Maskell, 2006).
La résistance est dite naturelle si ce caractère est présent chez toutes les souches d’une espèce ou d’un même genre et délimite de ce fait le spectre d’activité de l’antibiotique. Elle peut être l’expression d’une propriété innée reflétant l’empêchement d’accéder à la cible ou l’absence de la cible. Elle est stable et transmise à la descendance. Elle a pour support génétique le chromosome bactérien et définit le phénotype «sauvage». Elle peut être liée aux caractéristiques physiologiques de l’espèce ou à la présence constitutive d’un gène de structure.
La résistance acquise est généralement obtenue par une mutation au niveau des gènes du chromosome ou par acquisition de gènes via un plasmide chez certains isolats de l’espèce. Les mécanismes génétiques de la résistance acquise peuvent expliquer le caractère épidémique que peut parfois revêtir la résistance aux antibiotiques.
Cette résistance n’apparaît que chez certaines souches d’une espèce donnée normalement sensible. Elle peut résulter de l’emploi abusif des antibiotiques.

Méthodes de typage des salmonelles

Le sérotypage des salmonelles selon Kauffman White : Le schéma de Kauffmann-White permet une classification des sérotypes selon leurs formules antigéniques (Freney et al., 2000). Ce schéma tient compte de la structure antigénique des Salmonella ; il repose principalement sur la présence et la mise en évidence de facteurs antigéniques reliés aux antigènes:
somatiques (O) de type polysaccharidique, flagellaires (H) constitués de polymères de flagelline, et possédant  le plus souvent deux spécificités antigéniques, Capsulaire(Vi) éventuellement.
Typage moléculaire des salmonelles selon la méthode “Multi-Locus : Sequence Typing” (MLST) Les méthodes de séquençage reposent sur la détection de variations dans la séquence de certains gènes codant pour les enzymes métaboliques afin de mesurer la distance génétique multi-locus (MLST, Multilocus sequence typing).
Le MLST est une méthode de séquençage partiel de l’information génétique de souches bactériennes et de certains eucaryotes unicellulaires, parasites ou champignons. Il porte sur des portions de gènes constitutifs d`agents pathogènes dits « gènes de ménage » désignant un gène dont l’expression est indispensable et qui est responsable du métabolisme de la cellule. La grande discrimination du MLST combinée au procédé relativement lent d’accumulation de changements dans la séquence des gènes métaboliques au cours du temps rend cette méthode idéale pour des études épidémiologiques globales (Fakhr et al., 2005).
Les gènes séquencés ont la particularité d’être indépendants des gènes de virulence et de résistance aux antibiotiques de l’agent pathogène, ainsi que des caractères phénotypiques cliniques observables chez l`individu qui en est infecté. Ces derniers caractères dépendent d’ailleurs autant de l’individu lui-même que de l’agent pathogène.
L’intérêt de cette méthode standard de séquençage est de permettre l’établissement d’importantes bases de données répertoriant chaque séquence, et à laquelle des laboratoires du monde entier ont l’accès ; mais peuvent également participer en partageant les séquences des souches qu’ils étudient.
Le séquençage puis la comparaison de ces séquences avec les bases de données, sont un moyen pour les épidémiologistes d`analyser la répartition de chaque souche pour ensuite tenter de prévoir leur propagation dans la population(Maiden et al., 1998).

Table des matières

INTRODUCTION 
PREMIERE PARTIE :REVUE DE LA LITTERATURE
I. Les salmonelles 
I.1. Historique
I.2. Classification – Définition
I.3. Caractères bactériologiques
I.3.1. Caractères morphologiques.
I.3.2. Caractères culturaux
I.3.3. Caractères biochimiques
I.3.4. Caractères antigéniques
I.3.5. Facteurs de virulence
II. Epidémiologie des salmonelloses
III. Portage de salmonelles chez l’homme 
IV. Symptomatologie 
IV.1. Salmonelloses typhiques
IV.2. Gastroentérites
V. Antibiorésistance des salmonelles
V.1. Définition de la résistance aux antibiotiques
V.2. Mécanismes et types de résistance aux antibiotiques
VI. Méthodes de typage des salmonelles
VI.1. Le sérotypage des salmonelles selon Kauffman White
VI.2. Multi-Locus Sequence Typing des salmonelles (MLST)
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL EXPERIMENTAL 
I. Objectifs de l’étude
II. Type et cadre d’étude 
III. Matériel et Méthodes
III.1. Matériels
III.2. Méthodes
III.2.1. Choix des sites d’étude
III.2.2. Population d’étude
III.2.3. Recueil des prélèvements de selles
III.2.4. Analyse bactériologique des selles
II.2.5. Sérotypage des salmonelles isolées
III.2.6. Etude de la sensibilité des salmonelles aux antibiotiques
III.2.7. Extraction de l’ADN
III.2.8. Recherche des gènes de virulence
II1.2.9. Multi –Locus Sequence Typing (MLST) des salmonelles
III.2.10. Saisie et analyse des données
IV. Résultats et Discussion
IV.1. Résultats
IV.1.1. Population d’étude
IV.1.2. Portage des salmonelles
IV.1.3. Distribution des sérovars
IV.1.5. Résultat de la caractérisation moléculaire des salmonelles
IV.1.5.1. Recherche des gènes de virulence
IV.1.5.2. Résultat MLST des salmonelles
IV.2 Discussion
CONCLUSION 
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *