Caractéristiques des lymphocytes T Non Conventionne

Caractéristiques des lymphocytes T Non Conventionne

Lymphocytes intra-épithéliaux

 Les lymphocytes T appartiennent à deux compartiments, différant par leur ontogénèse et leur distribution tissulaire. Les lymphocytes conventionnels, systémiques, naviguent entre les territoires immunitaires secondaires (rate et ganglions) et constituent la majorité des lymphocytes périphériques. Les lymphocytes intra-épithéliaux sont dédiés aux muqueuses. Ils sont minoritaires dans le sang périphérique mais sont responsables de la protection de toute l’interface entre l’organisme et l’extérieur, qui comporte de très grandes surfaces. Ils ont une origine thymique très brève et complètent leur ontogénèse et sélection dans les territoires immunitaires associés aux muqueuses (MALST) surtout intestinaux (GALT) dans les plaques de Peyer (Guy-Grand 1991, Cruz 1998, Helgeland 1999, Lefrançois 1995, Marquez 2000).

 Lymphocytes T  

 Si les lymphocytes T αβ, conventionnels, dichotomisés dans les deux sous-groupes CD4 et CD8, forment la grande majorité des lymphocytes T circulants, ils ne sont pas exclusifs. Il existe, en effet d’autres populations qui sont moins nombreuses et moins connues. Les lymphocytes T gamma, delta (T) sont d’authentiques lymphocytes T qui expriment le CD2 et le CD3 mais leur récepteur spécifique d’antigène est constitué d’une chaîne gamma et d’une chaîne delta (TCRγδ). Le récepteur T comprend une partie hyper variable composée de deux éléments VD (chaîne γ) ou trois éléments VDJ (chaîne δ) (Table IV) dont les combinaisons permettent de constituer une diversité encore plus étendue que pour les T (M Davis 1988). Les lymphocytes Tγδ se distinguent des Tαβ par de nombreux aspects (Bluestone 1995). Les lymphocytes Tγδ ont un parcours ontogénique particulier. En effet, s’ils ont un passage obligatoire par le thymus dans les phases très précoces (Helgeland 1997, McVay 1998) avec constitution de la diversité (Galagher 2001) et sélection négative (Dent 1990), ils quittent très rapidement le thymus pour aller continuer leur maturation dans les sites lymphoïdes associées aux muqueuses (MALT). Les lymphocytes Tγδ semblent particulièrement dédiés à l’immunité de la peau et des muqueuses Caractéristiques des lymphocytes T Non Conventionnels notamment intestinales et broncho-pulmonaires (Ferrick 2000, Beagley 1998, Bagriacik 2000). Ils ne représentent qu’une petite fraction (<5 %) des T périphériques mais, du fait de leurs tropismes tissulaires (Di Liberto 2000), leur nombre total dans l’organisme pourrait être aussi important que celui des lymphocytes Tαβ, encore que ceci ne soit pas clairement documenté. Si leur diversité est potentiellement très grande, ils semblent avoir des fonctions et des distributions dans l’organismes très restreintes selon leurs isotypes. En effet, plusieurs études chez l’adulte ont montré que la répartition des isoformes Tγδ était restreinte selon les compartiments bien que quelques ambiguïtés persistent dans la littérature, dues à un problème de nomenclature (Lefranc 1999). Les isotypes Tγ2δ2 (Chen 2003) ou Tγ9δ2 (Parker 1990, Di Libero 1997, Dechanet 1999, De rosa 2001) ou encore γ1 (Hviid 2000) par exemple, sont très nettement majoritaires dans le sang périphérique alors que les T51prédominent dans la peau et les T61 au niveau des muqueuses intestinales ou utérines et les Tγ4δ1 dans les tissus lymphoïdes secondaires (ganglions, rate -Carding, 2002-). L’intestin pourrait constituer leur sanctuaire (Lin 1999). Les Tγ92 peuvent être l’objet de lymphome nasal (Oyoshi, 2003). Les lymphocytes Tγδ reconnaissent des déterminants antigéniques présentés par des molécules du MHC mais seulement les groupes « non classiques », ubiquitaires comme le CD1, le MIC-a, le MIC-b…- Chien 2000, Morita 2003-). Ces molécules MHC « non classiques » présentent des antigènes non peptidiques, mais des particules antigéniques de type phospholipidique ou glycolipidique (Julien 1997, Kato 2001). Ces groupes ne sont pas polymorphiques et les lymphocytes Tγδ n’ont qu’une très faible restriction du groupe MHC (Carding 2002, Chen 2003, Hviid 2000) ce qui les place à la frontière entre l’immunité spécifique (cognitive) et l’immunité non-spécifique (innée). Les Tγδ1 reconnaissent plus volontiers les molécules MHC de type MICA ou MICB, ainsi que les molécules HLA A2 et A24 et CD1c. Les T-2 reconnaissent des antigènes de stress présentés par les molécules de type HLA DRW53 comme l’Heat Shock Protein (HSP) 65 des mycobactéries (Mak 1998) ou encore des toxines (toxine tétanique, ou toxine du staphylocoque –SEA-) et le palmidronate (Carding 2002). Classiquement, la plupart des lymphocytes γδ n’expriment ni CD4 ni CD8 et ils constituent la majorité des lymphocytes T circulants double négatifs (DN). Une petite fraction des lymphocytes T γδ peut cependant exprimer le CD8 (Straube. 2000 ; De Paoli 1991). Ces derniers pourraient avoir un développement ontogénique particulier avec une persistance plus longue dans le thymus (Bagriacik 2000). Le CD8 serait alors impliqué dans l’interaction avec la molécule de MHC non classique (Carding 2002, Hiviid 2000, Kawahshima 2003, Gao 2000). Les lymphocytes T γδ semblent jouer un rôle essentiel dans l’immunité (Ziegler 2004) notamment contre des micro-organismes à croissance intra-cellulaire tels que les mycobactéries, les borrellia, Francisella Tularensis ou encore les salmonella (Pellegrin 1999, Moore 2000, Jason 2000, Mogues 2001, Kawashima 2003, Chen 2003, Szereday 2003). Par exemple, les antigènes du BCG peuvent induire une forte prolifération des lymphocytes T2 2, très rapidement (Dieli 2003). Les lymphocytes T γδ ont une importante capacité d’activité cytotoxique (Dieli 2001). Ils pourraient jouer un rôle dans l’immunité anti-virale (Lehner 2000, Gougeon 2000, Lafarge 2001, Celine 2001, Mathiot 2001, Martini 2002, Poccia 2002) et notamment contre le virus du SIDA (Kabelitz 2001, Pellegrin 1999, Sindhu 2003) et anti-parasitaire (De paoli 1992, Troye-Blomberg 1999). Il a également été démontré qu’ils avaient une activité anti-tumorale (Girardi 2001, Kato 2001, Chen 2001, Kobayashi 2001, Ferrarini 2002, Lopez 2002), augmentée par l’action de Tumor Necrosis Factor alpha (TNFα – Suzuki 1999-). D’ailleurs, une augmentation des lymphocytes T γδ dans le sang périphérique a été montrée chez des patients qui étaient porteurs d’un lymphome (Mc Clanahan 1999). Ils peuvent avoir une réactivité auto-immune contre la molécule de stress T70 (HSP70). Les lymphocytes T possèdent également une activité immuno-régulatrice (Egan 2000, O’Brien 2000), essentiellement en faveur de la cytotoxicité (proche de l’activité Th1 -Kabelitz 2001, Agrata 2001-). Ils ont une grosse capacité de production de l’Interféron gamma (IFN), du TNF et de chimiokines (Chen 2003). Ils sont également sensibles aux chimiokines, exprimant des récepteurs tels que CXCR3 ; CXCR4 et CCR5 (Glatzel 2002, Meisner). Ils semblent particulièrement impliqués dans la réponse immune des muqueuses (Dieli 1997, Davies 2004) et notamment des bronches (Salerno 1998, Lahn 1999). Les Tγδ pourraient participer à la protection de la peau contre les staphylocoques (Holne 2003) et prévenir l’inflammation cutanéomuqueuse sous l’action de produits bactériens de la flore intestinale (Falk 1993, Mac Donald 2001) et les réactions allergiques (Schramm 2000). Inversement, dans certaines circonstances, ils peuvent avoir une activité de type Th2. Au cours de l’infection à mycobactéries tuberculosis, ils peuvent produire de l’IL-10 (Rojas 1999). Ils pourraient aussi jouer un rôle dans des syndromes inflammatoires comme l’asthme (Mak 1998, Schramm 2000). Des souris déplétées es en Tγδ produisent moins de médiateurs de l’allergie immédiate (IgE, IL-5 – Mak 1998 -). Les Tγδ intra-hépatiques seraient de gros producteurs d’IL-4 (Gerber 1999). La quantité de lymphocytes T dans le sang périphérique est très variable chez les patients (Chen 2003) sans que leur signification séméiologique ne soit éclaircie. Cependant, il est maintenant bien démontré qu’ils ont un rôle immuno-pathologique dans certaines maladies notamment auto-immunes (Ichikawa 1991, Olive 1994, Robak 1999, Yin 2000) et particulièrement le diabète (Kretowski 1999, Steele 2000) ou dans des maladies liées aux bronches notamment l’asthme (Zuany-Amorim 1998, Mc Clanahan, 1999, Schramm 2000). L’activation des lymphocytes Tγδ peut être observée en absence d’antigène (Fahrer 2000, Meisner ) et induite par des substances moléculaires associées aux pathogènes (PAMS) par l’intermédiaire des toll like recepteurs (TLR) de groupe 3 ou 9 ou encore du CD36 (Hegdes 2005). L’activation par un antigène est très rapide (débutant dés 4 à 6 jours et induit une expansion clonale très forte (plus de 200 fois) et très prolongée (pouvant persister plus de 7 mois) (Chen 2003). Ainsi, en période d’activation, le lymphocyte Tγδ spécifique d’un antigène peut représenter plus de la moitié (de 48 à 90%) des lymphocytes Tγδ circulants (Chen 2003). Les Tγδ ont, semble t-il, le même développement phénotypique que les Tαβ avec des états naïfs (CD45 RA+, CD62L+ CD7+, CD27+ -Dieli 2003-). Après rencontre de l’antigène, ils peuvent acquérir un phénotype mémoire, soit effecteur (CD45RA-, CD27-, CD62L- ; CCR7-) avec faible capacité de prolifération et mémoire central (CD103+, CD45 RA+ et CD7+ à forte capacité de prolifération (Chen 2003, De Rosa 2004). Les T γδ ont également des rôles importants dans des fonctions non immunologiques comme l’embryogenèse et l’homéostasie tissulaire. En fait, il semble que les Tγδ soient produits par vagues au moment de l’embryogenèse avec une première production des T5 à la 14e semaine chez la souris qui migrent dans la peau, suivis des T6 dont le maximum est à la 16e semaine et qui migrent vers le poumon, les voies aériennes et le thymus. Plus tard, vers la 19e semaine, les T4 apparaissent et migrent vers le poumon, les ganglions et le sang périphérique. Enfin, sont produits des T1 dont la production maximale se trouve au moment de la naissance. Plus récemment, les lymphocytes T γδ ont également été impliqués dans la régulation des mécanismes de cicatrisation épithéliale (Jameson 2002) et dans l’homéostasie de la peau.

Lymphocytes T CD8 

 Si la plupart des lymphocytes T conventionnels TCRαβ CD8+ expriment l’isoforme hétérodimérique (αβ) du CD8, une petite fraction de la population exprime une forme homodimèrique comprenant deux chaînes CD8α. Ces lymphocytes sont subséquemment nommés T CD8. Le CD8αα peut, comme le CD8 se lier à la molécule MHC classe 1 (Garcia 1996, Renard 1996, Cho 2001) mais avec une affinité différent. Mais leurs ligands préférentiels semblent être des molécules du complexe MHC non classique (ex Qa2 chez la souris), pour lesquels la chaîne CD8 ne semble pas requise (Janeway 1994, Renard 1996, Das 2000). En effet, les lymphocytes T CD8 gardent la capacité de se développer chez les souris qui n’ont pas de complexe majeur d’histocompatibilité de classe 1 (MHC classe 1) comme par exemple, les souris déficitaires en 2 microglobuline (Cheroutre 1995, Gapin 1999, Das 1999, Kronenberg 2005). Les lymphocytes T CD8 partagent de nombreuses propriétés fonctionnelles avec les lymphocytes Tγδ. Ils complètent leur maturation dans le MALT (Sun 1997) après un court passage dans le thymus (Dunon 1999, Bagriacik 2000) où ils subissent une sélection (Leishman 2002). Une origine est aussi possible par conversion de T CD8αβ conventionnels (Konno 2002). Ce phénomène est contradictoire avec la possiblité de filiation de CD8αα vers CD8αβ au cours de la thymopoiese (Carrasco 1999). Ils ont un fort tropisme muqueux et sont considérés comme faisant partie des lymphocytes intra-épithéliaux (IEL – Luhtala 1997, Dunon 1999, Imhof 2000-). Ils auraient une diversité très restreinte au sein de l’épithélium intestinal (Helgeleand 1999 chez le rat). Ils sont également richement représentés dans l’épithélium cutané (Spetz 1996). Les lymphocytes T CD8αα auraient plutôt une activité immuno-régulatrice de type Th1 (Yoshukai 1999). Ils ont été impliqués dans la pathogénie des colites inflammatoires (modèle porcin ; Waters 2001). Mais ils peuvent également exprimer des signes de cytotoxicité (CD56+ : Arcaro 2001, Kern 1999) Le CD8 peut également être exprimé à la surface des Tγδ et également des lymphocytes NK. La signification physiologique de ces isotypes n’est pas clairement établie (Straub 2001).

Lymphocytes T reg

Si les lymphocytes T CD4 sont associés à la fonction amplificatrice de la réponse immune, il existe une minorité de cellules T qui ont une activité régulatrice, inhibant la réponse lymphocytaire T de façon spécifique. Plusieurs phénotypes ont été décrits. La majorité est de type T CD4+ exprimant le CD25 comme les lymphocytes activés mais de façon plus spécifique le facteur nucléaire FoxP3. Ils sont nommés Treg. Le CD25 n’est que le reflet de l’état d’activation des Treg comme pour les autres cellules et il existe des Treg CD25- (qui expriment le FoxP3) (Jiang 2004). Les Treg ont une origine thymique (Coutinho 2005). Des lymphocytes T CD8 (CD25+, CD28-, Foxp3+) peuvent avoir une activité inhibitrice. Les cas décrits (Brimmer 2005) exprimaient un TCR Vβ5.1. Ils n’expriment pas un phénotype « mature » (CD28-) mais peuvent exprimer son ligand alternatif (CTLA-4) qui aurait une activité inhibitrice (Vlad 2005). Ils peuvent être associés aux muqueuses (IEL) et reconnaître un antigène présenté par une molécule MHC non classique (CD1d) (Brimmer 2005). L’isoforme CD8 n’était pas précisée. Dans le contexte auto-immun, les Treg CD8+ reconnaîtrait des peptides spécifiques du TCR, présentés par des molécules HLA-1b non classiques (HLA-E) qui seraient exprimées sous formes hétéro-dimérique (MHC + β2-microglobuline que sur les lymphocytes T activés, B et cellules dendritiques (Sarantopoulos 2004). Notons que la molécule HLA-E monomérique est exprimée de façon ubiquitaire et est un ligand naturel du récepteur NKG2A protégeant la cellules d’une cytotoxicité non spécifique par les NK ou T CD8+. Les NK-T ont une activité Treg par leur production de IL-4, IL-10 et TGFβ, notamment sur les réponses de type Th1. Leur rôle protecteur de maladies auto-immunes a été montré dans des modèles de diabète (souris NOD) ou encéphalite allergique (revue par Jiang 2004) Plusieurs mécanismes permettent l’activité régulatrice (Table VIII) : Une trop forte affinité du TCR pour le ligand spécifique induit le suicide (apoptose) de la cellule effectrice. Les Treg exprimeraient le CTLA-4 (CD152 ; molécule inhibitrice, induisant anergie/tolérance) en remplacement du CD28 activateur au cours de la reconnaissance. Une moindre expression ou inhibition de molécules coactivatrice (ex : le CD40L) réduirait également considérablement l’activité auxiliaire du lymphocyte T CD4+ sur la réponse des lymphocytes B (production d’anticorps) ou l’activation de la cellule dendritique (expression de ligand co-activateurs comme le CD80 et CD86). Enfin, les lymphocytes T CD4+ peuvent acquérir la capacité de production de cytokines régulatrices IL-10 et IL-4 (type Tr1) ou TGFβ (nommées type Th3) fortement inhibitrices de la réponse immunitaire contrairement à IL-2, IFNγ (Th1) ou IL-4, IL-5 (Th2) habituellement impliqués dans les réponses efficaces (revue par Jiang 2004).

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *