Carbènes N-Hétérocycliques : Des catalyseurs en chimie des silicones

Carbènes N-Hétérocycliques : Des catalyseurs en chimie des silicones

Contrôle des longueurs de chaîne : différents amorceurs de type alcool 

Le rapport D4/BnOH permet de réguler la longueur des chaînes mais pas de façon encore satisfaisante. Nous avons donc, par la suite, recherché des amorceurs pour lesquels nous aurions un meilleur contrôle des masses molaires.

Influence de l’encombrement stérique de l’alcool 

 Pour commencer, nous avons effectué la polymérisation de D4 en présence d’alcools de classe différentes afin d’étudier l’influence de l’encombrement stérique : Tableau 3 : Polymérisation de D4 avec différents alcools : carbène 1 : 1000 ppm/D4 ; a) 80°C – 16 h ; b) 50°C – 16 h ; Ar Lorsque la quantité d’amorceur augmente, la diminution progressive des masses molaires des polysiloxanes est observée. Ces résultats montrent aussi qu’un meilleur contrôle des masses molaires est obtenu lorsque les amorceurs sont des alcools primaires (BnOH et MeOH). Dans le cas d’un alcool tertiaire encombré (tBuOH), seule une légère diminution des masses est observée, et ceci même en présence d’un large excès d’amorceur. Ainsi, cette étude indique qu’avec un alcool peu encombré comme amorceur, nous avons une étape d’initiation plus rapide que l’étape de propagation. Le système catalytique est alors plus efficace et la polymérisation mieux contrôlée.

Cas particulier de la N-diéthylhydroxylamine 

En cherchant de nouveaux amorceurs de type alcools, nous nous sommes interessés à la Ndiéthylhydroxylamine. Celle-ci est notamment reconnue comme catalyseur bifonctionnel (acide et basique) pour des réactions entre silanols et alkoxysilanes13. Nous avons testé cet amorceur pour la polymérisation de D4. Tableau 4 : Polymérisation de D4 en présence de Et2NOH : carbène 2 : 1000 ppm/D4 ; 80°C – 16 h ; Ar Dans ce cas, les chaînes polymères obtenus sont particulièrement longues : avec un rapport D4/Et2NOH = 200, les masses molaires dépassent 300 000 alors qu’elles étaient comprises entre 125 000 et 150 000 pour les autres alcools. De plus, pour D4/Et2NOH > 200, les polymères n’ont pas pu être analysés avec la colonne utilisée en GPC signifiant des masses molaires > 500 000 ! En s’appuyant sur les travaux de Chu et al. sur la condensation silanol/alkoxysilane13, nous pouvons supposer que la présence de Et2NOH accélère l’étape de propagation et/ou favorise les réactions de polycondensation entraînant une forte augmentation du Mn. Et2NOH pourrait intervenir lors de l’état de transition suivant pour déprotonner une fonction silanol et en même temps favoriser le départ d’une molécule d’eau (Figure 15).Ce résultat permet néanmoins d’envisager l’utilisation du système carbène/Ndiéthylhydroxylamine pour l’obtention de gommes de très hautes masses molaires : celles-ci sont particulièrement recherchées pour la formulation d’élastomères vulcanisables à chaud (EVC) que l’industrie de l’automobile et de la fabrication de câble électrique utilisent pour leurs propriétés mécaniques et leur stabilité thermique. IV – Réactivité des carbènes vis-à-vis des silanols : Quel que soit l’alcool utilisé comme amorceur, les masses molaires des polymères ne peuvent pas être contrôlées de façon très précise. A l’hypothèse de la non-consommation totale des amorceurs s’ajoute l’hypothèse d’une réaction entre les carbènes et les silanols formés au cours de la polymérisation. C’est ce point que nous souhaitons étudier maintenant. Afin d’évaluer la réactivité des carbènes sur les silanols, une étude RMN 29Si a été réalisée sur le mélange stoechiométrique carbène 1 / huile silicone linéaire de formule MOH-D10-MOH (MOH = HO-Si(Me)2, D = O-Si(Me)2). Figure 16 : RMN 29Si (C6D6) : comparaison de MOH-D10-MOH et du mélange M OH-D10-MOH + carbène – Le premier spectre correspond à MOH-D10-MOH seul. Les fonctions Si-OH sont observées à –12 ppm, les Si(Me)2-O linéaires se trouvant autour de –21 ppm. On peut aussi noter la présence de D4 à – ppm en quantité non négligeable. – Le deuxième spectre correspond au mélange du carbène 1 / MOH-D10-MOH. Nous voyons la disparition des fonctions Si-OH et des Si(Me)2-O linéaires, l’augmentation du signal de D4, ainsi que la présence d’oligomères cycliques D5, D6 (–20,6 et –21,6 ppm). A partir de ces résultats, nous pouvons penser que le carbène 1 déprotonne les fonctions Si-OH pour former des silanolates Si-O- . Ces silanolates sont très réactifs et peuvent soit se condenser de façon intramoléculaires pour donner des oligomères cycliques : D4, D5, D6 et des chaînes linéaires plus courtes ou conduire à des réactions de redistribution et de polycondensation. Figure 17 : Interaction carbène 1 / MOH-D10-MOH V- Mécanisme en présence de carbène et d’alcool : Un mécanisme similaire à celui décrit par Hedrick et al. peut être proposé : la polymérisation est amorcée par une attaque nucléophile du carbène sur un silicium de D4 provoquant l’ouverture du monomère cyclosiloxane et la formation du silanolate zwitter-ionique 5. Ce silanolate réagit avec l’alcool pour former le silanol 6 et le carbène est libéré. Celui-ci est alors capable d’attaquer une nouvelle molécule de D4 ou de réagir avec 6 pour former l’adduit 7, lui même capable d’ouvrir une nouvelle molécule de D4 et de poursuivre la polymérisation. Figure 18 : Mécanisme réactionnel VI- Vers un meilleur contrôle des longueurs de chaîne : Pour avoir un meilleur contrôle des longueurs de chaînes, il faut contourner la formation des fonctions silanols au cours de la polymérisation. Pour cela, nous avons envisagé d’une part d’ajouter en bouts de chaîne des motifs SiMe3 et d’autre part d’utiliser des amorceurs sans protons labiles. VI-1- Influence d’un agent de terminaison : Dans l’optique d’améliorer le contrôle des masses molaires, l’influence de M2 (Me3Si-OSiMe3), agent de terminaison, sur la polymérisation de D4 a été étudiée en présence d’un amorceur de type alcool. Carbènes N-Hétérocycliques : Des catalyseurs en chimie des silicones 25 Lorsque la quantité de M2 augmente, la différence entre les Mn obtenus et le Mn théorique (13 000) diminue. Nous pouvons donc ici remarquer l’effet non négligeable de M2 sur le contrôle des longueurs de chaînes. 

Influence d’un amorceur sans proton 

 Nous avons ensuite choisi de voir l’effet de nouveaux amorceurs potentiels, M2 et Me3SiOEt, sur les longueurs des chaînes polymères. De part la nature de ces amorceurs (absence de proton), nous devrions ne pas former de fonctions silanols au cours de la polymérisation. Les essais de polymérisation de D4 suivants ont été effectués à 80°C et à T.A. : Tableau 6 : Polymérisation de D4 en présence de différents amorceurs : carbène 1 : 1000 ppm/D4 ; D4/amorceur = 50 ; [A] : 80°C – 16 h ; [B] : T.A. – 24 h ; Ar Des comportements différents sont observés pour les trois amorceurs. Les meilleurs résultats ont été obtenus pour Me3SiOEt. Nous avons un bon contrôle des longueurs de chaînes et ceci indifféremment de la température. Par contre, l’activation thermique est indispensable avec M2 et BnOH pour amorcer la polymérisation. A 80°C, des résultats similaires pour ces deux amorceurs sont obtenus. A T.A., l’amorçage est inexistant pour BnOH et très lent pour M2. La différence de réactivité entre M2 et Me3SiOEt peut s’expliquer par leur différence de polarisation. L’activation de l’alcoolate est alors favorisée par rapport à celle du silanolate (Figure 19). Avec Me3SiOEt, nous pouvons supposer que nous sommes sous contrôle cinétique.

Table des matières

Introduction générale
Chapitre I Carbènes N-Hétérocycliques : des catalyseurs en chimie des silicones
A- Introduction bibliographique
B- Polymérisation de D4
I- Polymérisation de D4 : Approche qualitative
I-1- Rôle de catalyseur du carbène
I-2- Rôle d’amorceur de l’alcool
I-3- Critères de polymérisation
I-3-1- Nucléophilie et encombrement stérique des carbènes
I-3-2- Choix de la base pour la déprotonation de l’imidazolium
I-3-3- pKa de l’alcool
II- Cinétique de polymérisation
III- Polymérisation de D4 : Approche quantitative
III-1- Contrôle des longueurs de chaînes : effet de l’alcool
III-2- Contrôle des longueurs de chaînes : différents amorceurs ROH
III-2-1- Influence de l’encombrement stérique de l’alcool
III-2-2- Cas particulier de la N-diéthylhydroxylamine
IV- Réactivité des carbènes vis-à-vis des silanols
V- Mécanisme en présence de carbène et d’alcool
VI- Vers un meilleur contrôle des longueurs de chaînes
VI-1- Influence d’un agent de terminaison
VI-2- Influence d’un amorceur sans proton
VII- Copolymérisation
VII-1- Vérification de l’activité du catalyseur
VII-2- Copolymérisation par ajout de monomère D vinyl
VIII- Désactivation du catalyseur
VIII-1- Désactivation du catalyseur par neutralisation par H3PO4
VIII-2- Désactivation par chauffage
VIII-2-1- Tests préliminaires
VIII-2-2- Optimisation des conditions
IX- Amélioration du procédé : polymérisation de D4 à l’air
X- Conclusion et perspectives
C- Polycondensation
I- Activité des carbènes N-Hétérocycliques pour la polycondensation
I-1- Choix des carbènes
I-2- Cinétique de la polycondensation
I-3- Influence de la quantité de carbène sur les longueurs des chaînes
II- Copolymérisation
II-1- Activité du carbène après polycondensation
II-2- Polycondensation couplée à la ROP
II-3- Réaction de redistribution
III- Conclusion et perspectives
D- Partie expérimentale
E- Références bibliographiques
Chapitre II Carbodiphosphoranes : Introduction bibliographique
I- Les carbodiphosphoranes : composés dérivés des ylures
I-1- Les ylures de phosphonium
I-2- Quelle structure pour les carbodiphosphoranes ?
II- Etude structurale des carbodiphosphoranes
II-1- Géométrie des CDPs et longueurs des liaisons P=C
II-2- Structure électronique des CDPs
II-3- Conclusion
III- Synthèse des carbodiphosphoranes
III-1- Approches synthétiques de CDPs acycliques
III-1-1- Déprotonation, déshydrogénation et déchlorination
III-1-2- Oxydation des bisphosphinométhanes
III-1-3- Réarrangement prototropique
III-1-4- Synthèse à partir de phosphino(phosphonio)carbènes
II-2- Approche synthétiques de CDPs cycliques
III-2-1- Cyclisation des bisphosphinométhanes
III-2-2- Réarrangement
III-2-3- Cyclisation d’un phosphino(phosphonio)carbène
IV- Réactivité des carbodiphosphoranes en synthèse organique
IV-1- Réactivité des CDPs comme bases
IV-2- Formation d’adduits
IV-2-1- Réactions avec des cumulènes
IV-2-2- Réaction d’oxydation avec S, Se et Te
IV-3- Réactions de Wittig
IV-3-1- Synthèse d’aryléthynylphosphonium
IV-3-2- Réaction avec un composé dicarbonylé
IV-3-3- Synthèse de phosphallènes et d’allènes tétra-substitués
V- Chimie de coordination des carbodiphosphoranes
V-1- Mode de coordination simple
V-2- Cas particulier des complexes à groupements carbonyles
V-3- Modes de coordination double et triple
V-4- Phénomène de prototropie et ligands bidentates
V-5- Stabilisation des espèces cationiques
V-6- Les CDPs : des ligands à 4 électrons
V-6-1- Complexe dinucléaire d’Au
V-6-2- Complexes dinucléaires de Cd et de Zn
VI- Perspectives
VII- Références bibliographiques
Chapitre III Carbodiphosphoranes cycliques : des ligands σ-donneur
I- Encombrement stérique et cyclisation
I-1- Cyclisation à partir de tBu2PCH2PtBu2 : voie A
I-2- Cyclisation à partir de tBu2P(CH2)3PtBu2 : voie B
I-3- Variation des conditions opératoires
I-4- Conclusion
II- Les cations α,α’-diphosphorés : des précurseurs de CDPs cycliques
III- Synthèse de CDPs cycliques encombrés à 5 chaînons
III-1- Choix du cation α,α’-diphosphorés
III-2- Choix de la base : réactivité particulière des lithiens
III-3- Déprotonation des cations α,α’-diphosphorés
III-4- Validation chimique par réaction avec l’iodure de méthyle
III-5- Stabilité thermique des composés synthétisés
IV- Etude structurale des CDPs cycliques synthétisés
IV-1- Etude expérimentale par diffraction des rayons X
IV-2- Etude théorique par DFT
V- Coordination des CDPs cycliques synthétisés
V-1- Réaction avec [Rh(norbor)Cl]2 et [Pd(allyl)Cl]2
V-2- Réaction avec [Rh(CO)2Cl]2
V-3- Réaction avec CuCl
VI- Conclusion et perspectives
VII- Partie expérimentale
VIII- Références bibliographiques
Chapitre IV Carbodiphosphoranes cyliques : un nouveau type de carbénoïdes
I- Interconversion carbodiphosphorane diphosphinocarbène
I-1- Réaction de thermolyse
I-2- Mise en évidence de l’interconversion
I-3- Piégeage par le ter-butylisonitrile
II- Etude théorique de l’interconversion
III- Réactivité des carbodiphosphoranes en présence de nitriles
III-1- Compétition des réactions de réarrangements
III-2- Thermolyse en présence de diméthylcyanamide
IV- Réactivité des carbodiphosphoranes en présence de benzaldéhyde
V- Conclusion et perspectives
VI- Partie expérimentale
VII- Références bibliographiques
Conclusion générale
Annexes : Données Cristallographiques

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