CARCINOMES EPIDERMOIDES CUTANES AU COURS DE LA DEPIGMENTATION VOLONTAIRE A

CARCINOMES EPIDERMOIDES CUTANES AU COURS DE LA DEPIGMENTATION VOLONTAIRE 

Epidémiologie

Prévalences Contrairement à ce que l‟on pourrait penser, la dépigmentation volontaire de la peau n‟est pas exclusive aux mélanodermes. En effet, la dépigmentation volontaire est une pratique cosmopolite, présente sur tous les continents des Philippines au Pakistan, de la Jamaïque à l‟Angleterre, la France, la Suisse ou les USA. Cependant les fréquences restent de loin plus élevées en Afrique [39, 57]. Selon Mahé et al, la prévalence de la dépigmentation artificielle chez les femmes peut aller de 25 à 67% dans les capitales ouest africaines [27]. A Dakar, une prévalence de 67% dans certains quartiers populaires a été rapportée par Pr Wone et al [72]. Des prévalences respectives de 41,6% et 33% sont rapportées respectivement à Nouakchott et en Mayotte (Océan indien) [37, 43]. A Lomé, une prévalence de 58,9% a été rapportée [59]. Au Bénin, on retrouve une prévalence de 36,6% [25]. Au Nigéria, elle est estimée à 77, 3% [2]. Ces prévalences sont sans cesse croissantes. Cependant, il existe peu de données sur l‟importance de ce phénomène en Europe. A Paris, les cas observés se voient surtout chez les immigrés qui avaient 7 débuté leur dépigmentation avant leur arrivée et chez des femmes noires nées en France 

Facteurs épidémiologiques

C‟est une pratique majoritairement féminine ; néanmoins des hommes se dépigmentent aussi dans certaines régions (Angola, Afrique du Sud, Nigéria, Libéria, Congo) [39]. Au bénin, la participation masculine est estimée à 33% (ratio de 0,49) [25]. Elle est de 27,6% au Nigéria [2]. Au Sénégal, il n‟y pas d‟articles publiés sur l‟importance de la dépigmentation chez les hommes. Les sujets vus en consultation pour des complications de la dépigmentation volontaire sont essentiellement des femmes. Dans une étude menée par Pr Ly et al. portant sur les facteurs socioéconomiques de la dépigmentation cosmétique à Dakar, il apparaissait qu‟elle était plus fréquente chez les dakaroises âgées de 20 à 40 ans, chez les femmes mariées ou faisant état d‟un compagnon, chez les femmes ayant un niveau de scolarisation primaire, une activité professionnelle comportant un contact avec une clientèle, et chez celles qui disposent de certains biens de consommation (télévision, téléphone, automobile). Les principales motivations des utilisatrices étaient le suivi de la mode, le désir d‟être belle, l‟imitation de personnes de l‟entourage et l‟automédication [48]. 8

 Composition et mécanisme d’action des produits dépigmentant

La dépigmentation volontaire s‟est largement développée au cours des trois dernières décennies en raison de l‟accessibilité géographique et financière des produits dépigmentant qui sont retrouvés sur tous les marchés africains à des prix modiques. Plus d‟une centaine de spécialités sont aujourd‟hui commercialisées. Les formes galéniques disponibles sont variées : crèmes, gels, laits de corps, savons, sérums [47]. L‟application des produits se fait généralement sur tout le corps, rarement seulement sur les parties découvertes, en une ou plusieurs fois par jour. Cependant, en pratique, les techniques de dépigmentation restent relativement imprécises et varient d‟une personne à une autre selon les moyens financiers, la vitesse de blanchiment souhaitée, les produits disponibles et les recettes locales [27, 3]. Quatre types de produits sont principalement utilisés : l‟hydroquinone et ses dérivés, les dermocorticoïdes d‟activité très forte, les dérivés mercuriels et les produits caustiques. On retrouve plus rarement les kératolytiques notamment la vaseline salicylée à des concentrations de 50% 

L’hydroquinone et ses dérivés

Composition L‟hydroquinone est un composé phénolique, dérivé du benzène, utilisée couramment en industrie mais aussi en thérapeutique à des concentrations de 2 à 8% voire 10% [57, 27, 4]. En thérapeutique, elle est destinée à soigner les hypermélanoses acquises telles les hyperpigmentations cicatricielles, postinflammatoires, post-traumatiques, photo-toxiques [24, 44]. 10 Sa commercialisation à des fins cosmétiques est prohibée par la loi de certains pays surtout européens où elle n‟est soumise qu‟à prescription médicale. Ceci est dû à un potentiel effet carcinogène de l‟hydroquinone du fait qu‟il soit dérivé du benzène. Néanmoins cette hypothèse n‟est pas encore admise de tous et par conséquent, dans certains pays notamment aux USA, l‟incorporation de l‟hydroquinone dans les produits cosmétiques à une concentration maximale de 2% est autorisée [57, 23, 24]. Au Sénégal, du fait de l‟absence de réglementation de la commercialisation des produits cosmétiques, on assiste à une utilisation anarchique du produit. En effet, la vente et l‟utilisation du produit sont libres. On observe très souvent des produits cosmétiques dont l‟étiquette ne mentionne pas la présence d„hydroquinone alors qu‟ils en sont pourvus à des concentrations très élevées. Il s‟agit aujourd‟hui du produit le plus utilisé dans la dépigmentation volontaire avec une fréquence d‟utilisation de 89% à Dakar par rapport aux autres produit

 Mécanisme d’action

L‟action dépigmentant de l‟hydroquinone passe par une inhibition de la première étape de la synthèse de la mélanine, pigment naturel de la peau, et par une action toxique sur les mélanocytes, cellules qui fabriquent ce pigment. Cependant, son mode d‟action cellulaire n‟est pas encore clairement défini. Quelques hypothèses ont été émises. La mélanogenèse (synthèse et répartition de la mélanine) se fait au niveau des mélanosomes (organites cellulaires provenant de l‟appareil de golgi et du réticulum endoplasmique des mélanocytes) à partir d‟un acide aminé, la tyrosine en présence d‟une enzyme, la tyrosinase et d‟un ion cuivre. De structure analogue à la tyrosine, l‟hydroquinone agirait comme un inhibiteur compétitif de la tyrosinase à laquelle elle se combine donnant naissance à des composés toxiques pour le mélanocyte avec destruction sélective des mélanosomes .L‟hydroquinone empêche ainsi la synthèse de la mélanine qui est responsable de la couleur foncée de la peau.

Les dermocorticoïdes

Composition Les dermocorticoïdes sont des médicaments actifs sur la plupart des maladies inflammatoires cutanées et représentent de ce fait, la base de l‟arsenal thérapeutique en dermatologie. Leur efficacité thérapeutique s‟échelonne, parallèlement à leur toxicité et leur pouvoir dépigmentant, sur une grille de puissance standardisée à quatre niveaux de 1(activité faible) à 4 (activité très forte). Leur utilisation dans la dépigmentation volontaire porte principalement sur le propionate de clobatésol qui est de niveau 4 [23]. L‟utilisation de dermocorticoïdes d‟activité très forte dans la dépigmentation volontaire, dont la fréquence varie de 61 à 73%, porte donc sur des médicaments autorisés, détournés de leur usage et surtout des « pseudo-médicaments » (lait de corps et autres cosmétiques qui en contiennent) vendus sans autorisation de mise sur le marché. Ils proviendraient de l‟écoulement de stocks périmés de médicaments fabriqués dans les pays occidentaux, à l‟insu ou non des fabricants [47, 57, 27]. De nos jours, on assiste au développement de nouveaux types de procédés de dépigmentation avec les corticoïdes. Il s‟agit d‟injections périodiques de corticoïdes retard qui permettent d‟obtenir un effet dépigmentant plus puissant et plus rapide.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
1. LA DEPIGMENTATION VOLONTAIRE
1.1. Définition
1.2. Historique
1.3. Epidémiologie
1.3.1. Prévalences
1.3.2. Facteurs épidémiologiques
1.4. Composition et mécanisme d‟action des produits dépigmentant
1.4.1. L‟hydroquinone et ses dérivés
1.4.1.1. Composition
1.4.1.2. Mécanisme d‟action
1.4.2. Les dermocorticoïdes
1.4.2.1. Composition
1.4.2.2. Mécanisme d‟action
1.4.3. Les dérivés mercuriels
1.4.3.1. Composition
1.4.3.2. Mécanisme d‟action
1.4.4. Les produits caustiques
1.4.4.1. Composition
1.4.4.2. Mécanisme d‟action
1.5. Complications de la dépigmentation volontaire
1.5.1. Dermatoses associées à la dépigmentation volontaire
1.5.1.1. Les dermatoses infectieuses
1.5.1.2. L‟acné
1.5.1.3. Les dyschromies
1.5.1.4. Les dermites de contact irritatives ou allergiques
1.5.1.5. Les dermatoses lichénoïdes
1.5.1.6. Autres complications
1.5.2. Complications systémiques
1.5.3. Les complications obstétricales
2. CARCINOME EPIDERMOIDE DE LA PEAU
2.1. Définition
2.2. Epidémiologie
2.3. Formes anatomo-cliniques
2.3.1. Formes morphologiques
2.3.1.1. Forme commune : Carcinome épidermoïde ulcéro-végétant
2.3.1.1.1. Aspects cliniques
2.3.1.1.2. Aspects histologiques
2.3.1.2. Carcinome épidermoïde verruqueux
2.3.1.2.1. Aspects cliniques
2.3.1.2.2. Aspects histologiques
2.3.1.3. Autres formes
2.3.2. Formes topographiques
2.3.2.1. Carcinome épidermoïde cutané de la peau glabr
2.3.2.2. Carcinome des muqueuses et des demi-muqueuses
2.4. Diagnostic positif
2.5. Diagnostic différentiel
2.5.1. Le carcinome basocellulaire
2.5.2. Le mélanome
2.5.3. LA kératose actinique
2.5.4. Le kératoacanthome
2.6. Diagnostic étiologique
2.6.1. Chez les sujets de phototype clair
2.6.1.1. L‟exposition solaire
2.6.1.2. L‟infection par les HPV (human papilloma virus)
2.6.1.3. Les dermatoses prénéoplasiques
2.6.1.4. Autres facteurs étiologiques
2.6.2. Chez les sujets de phototype foncé
2.7. Facteurs pronostiques des CEC infiltrants
2.7.1. Facteurs pronostiques cliniques
2.7.1.1. La localisation de la tumeur primitive
2.7.1.2. La taille de la tumeur (diamètre dans sa plus grande dimension)
2.7.1.3. L‟infiltration en profondeur (adhérence au plan profond)
2.7.1.4. Les signes neurologiques d‟invasion
2.7.1.5. La récidive locale
2.7.1.6. L‟immunodépression
2.7.2. Les facteurs histopronostiques
2.7.2.1. Le type histologique
2.7.2.2. Le degré de différenciation cytologique
2.7.2.3. L‟épaisseur de la tumeur et la profondeur (Clark) de l‟invasion
2.7.2.4. L‟invasion péri-nerveuse
2.7.3. Proposition de classification pronostique
2.8. Traitement
2.8.1. Traitement curatif
2.8.1.1. Buts du traitement
2.8.1.2. Moyens
2.8.1.2.1. Bilan initial
2.8.1.2.2. La chirurgie
2.8.1.2.3. La chimiothérapie
2.8.1.2.4. La radiothérapie
2.8.1.2.5. Curetage, Electrofulguration, Cryothérapie
2.8.1.3. Indications
2.8.2. Prévention
2.8.2.1. Prévention primaire
2.8.2.2. Prévention secondaire
3. RELATION ENTRE LA DEPIGMENTATION VOLONTAIRE ET LE CARCINOME EPIDERMOIDE CUTANE .
3.1. Historique
3.2. Cas observés
3.2.1. Au Ghana
3.2.2. Au Nigéria
DEUXIEME PARTIE
OBJECTIFS
1. METHODOLOGIE
1.1. Type et durée de l‟étude
1.2. Cadre de l‟étude
1.2.1. Le service de Dermatologie de l‟IHS
1.2.1.1. Infrastructures
1.2.1.2. Activités
1.2.1.3. Personnel
1.2.2. Le service de Dermatologie de l‟HALD
1.2.2.1. Infrastructures
1.2.2.2. Activités
1.2.2.3. Personnel
1.3. Population d‟étude
1.3.1. Critères d‟inclusion
1.3.2. Critères de non inclusion
1.4. Variables étudiés
1.5. Traitement des données
2. RESULTATS
2.1. OBSERVATIONS
2.2. SYNTHESE
3. DISCUSSION
3.1. Représentativité, biais, limites
3.2. Aspects socio-démographiques
3.3. Aspects cliniques
3.4. Aspects anatomo-pathologiques
3.5. Aspects thérapeutiques et évolutifs
CONCLUSION

projet fin d'etudeTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *